FORUM NATIONAL POUR LA DEMOCRATIE ET L’UNITE (FNDU)
SEPT QUESTIONS PREJUDICIELLES A TOUT NOUVEAU SERMENT
PRESIDENTIEL
Nouakchott, le 30 Juillet 2014
Le Général MOAA se prépare à prêter serment ce 2 août 2014.
Son investiture consacre les résultats d’une élection taillée sur mesure, mais
clairement délégitimée par le boycott de l’opposition et de l’écrasante
majorité du peuple mauritanien et qui ne constitue en fait qu’une nouvelle usurpation du pouvoir.
Quel crédit pourrait-on alors accorder à un serment destiné à ornementer une
telle imposture ?
Déjà
en 2009, après une élection contestée, le Général Mohamed Ould Abdel Aziz avait
prêté serment un certain 6 août, jour
anniversaire de son coup d’Etat de 2008 contre un président civil élu
démocratiquement.
Reprenant
les termes prévus par la constitution, il proclamait alors devant le Conseil
Constitutionnel et tout le peuple mauritanien :
« Je
jure par Allah l’Unique de bien et fidèlement remplir mes fonctions, dans le
respect de la Constitution et des lois, de veiller à l'intérêt du Peuple
mauritanien, de sauvegarder l’indépendance et la souveraineté du pays, l’unité
de la patrie et l’intégrité du territoire national. »
Malheureusement,
cinq années durant, il n’eut de cesse de fouler aux pieds constitution, lois,
intérêts du peuple mauritanien, souveraineté et unité nationales. Les
violations de son serment étaient d’autant plus graves qu’elles étaient
délibérées, révélant un esprit putschiste réfractaire à toute norme
démocratique ou simplement légale.
Cette accusation nous la fondons, entre
autres, sur les faits avérés, exposés ci-après et que nul ne saurait contester. C’est un droit
pour notre peuple de réclamer du Président Mohamed Ould Abdel Aziz des
explications ou des excuses publiques, avant tout serment, en particulier par
rapport aux sept questions suivantes.
1. Le Président Mohamed O Abdel Aziz peut-il
justifier son refus d’appliquer loi sur
la transparence financière ?
· -Le président civil
nouvellement élu Sidi O Cheikh Abdallahi, fit adopter par
le Parlement la loi 2007-054 du 18
septembre 2007 relative à la transparence financière de la vie publique qui institue une
obligation de déclaration du patrimoine
pour le président de la république et certains hauts responsables de l’Etat. En
son article 2 elle impose particulièrement au président de la République de
faire après son investiture et à la fin de son mandat une déclaration de sa
situation patrimoniale et celle de ses enfants mineurs. De surcroît, et à la
différence des autres responsables de l’Etat, il lui est fait obligation de la
rendre publique.
o
le Président MOAA refusa de se plier à cette loi au
lendemain de son investiture le 6 août 2009. En réponse à la question d’un
journaliste lors de la conférence de presse du ? , il déclara
avec désinvolture que cette loi « n’est
pas importante ».
o
il fallut attendre une année plus tard pour que le Président
se résignât à faire une déclaration de patrimoine hors délai devant la
commission compétente. Toutefois il refusa de la rendre publique en violation
flagrante de la loi 2007-054.
o
Ce mépris de la loi, et l’irrespect de son propre serment
viennent d’être illustrés à nouveau par son refus, malgré l’interpellation de
certain parlementaire, de renouveler et de publier sa déclaration de patrimoine
à la fin de son mandat qui arrivait à son terme le 18 juillet 2014.
2.
Et le
tripatouillage de la constitution par un parlement dont le mandat avait
expiré ?
o
-le mandat de l’assemblée nationale élue en novembre
2006 expirait en novembre 2011. Le tiers
du Sénat devait aussi être renouvelé. Le Président MOAA, par calcul électoraliste,
décida de ne pas respecter les échéances constitutionnelles et pour l’une et
pour l’autre, et de reporter sine die les élections législatives en dehors de
toute procédure légale et de toute situation de force majeure ou de consensus
politique national.
o
-plus grave, en février 2012, il s’autorisa à utiliser une
« majorité » de députés dont le mandat avait expiré pour introduire illégalement
d’importants amendements à la Constitution malgré la contestation de
l’opposition démocratique et l’indignation de l’opinion. Comble de la
forfaiture, ces ex-députés votèrent pour eux-mêmes une prolongation de mandat
sans limite.
3. Qu’est-t-il advenu des 50 millions de
dollars du don saoudien ?
o
-Peu avant son coup d’Etat du 6 août 2008, l’Arabie Saoudite
avait accordé au Gouvernement du Président civil Sidi Mohamed Ould Cheikh
Abdallahi un don de 50 millions de dollars pour l’équipement des forces armées
et de sécurité.
o
-dans une conférence de presse à Nouadhibou en avril
2009, le Général MOAA reconnut en avoir
déjà utilisé en tant que chef de la junte militaire près de « 2 milliards
d’ouguiyas » (environ 10 millions de dollars) ;
o
--la constitution prévoit en son article 68 que
l’affectation des ressources publiques relève de la loi des finances votée par
le Parlement. Les textes afférents stipulent de surcroît que toute dépense
effectuée par le gouvernement en situation d’urgence en dehors du budget doit
par la suite être impérativement soumise à l’approbation de la plus proche
session parlementaire.
o
pourtant au lendemain de son « élection » de 2009,
et face aux réclamations de parlementaires soucieux de connaître le sort de ce
don saoudien, le Ministre des finances ne pu opposer qu’un silence embarrassé.
o
-il en fut de même chaque fois à toutes les sessions
parlementaires des années suivantes. La
trace des 50 millions de dollars était belle et bien perdue depuis qu’elle
avait quitté les comptes de la Banque Centrale de Mauritanie et du Trésor sur
ordre du Général puis Président MOAA.
o
-les faits précités sont indéniables et ils sont
constitutifs du crime de détournement de
fonds publics au regard des lois et règles régissant les dépenses publiques. Le
Président le sait, mais il compte probablement sur l’impunité que lui garantit
un pouvoir absolu.
4. Qu’en est-il de l’obstruction au cours de
la justice dans la scandaleuse affaire du 13 octobre 2012
o
En début de soirée le 13 octobre 2012, le Président de la
République est atteint par balle dans des circonstances obscures, sans la
présence de gardes de corps ou de témoin et emmené grièvement blessé à l’hôpital militaire par un inconnu.
o
Dès son réveil tôt le matin du 14 octobre, après une lourde
intervention chirurgicale d’urgence durant la nuit, le Président MOAA, tint avant son évacuation d’urgence en
France, tôt le matin, à faire une surprenante déclaration à la TVM, où il
qualifia l’événement de « simple bavure » qu’il
« pardonne » et affirma que « l’affaire est terminée ». Sa
préoccupation primordiale était visiblement d’empêcher toute enquête et
d’étouffer l’affaire pour des raisons inavouées.
o
Par la suite, l’opinion publique n’eut droit pour toute
explication qu’à une mise en scène télévisée où un officier prétendument auteur
du coup de feu « ami »,
présenta, le même jour, une version mal assimilée et incohérente de
l’événement. Fait révélateur, cet
officier qui, soi-disant, venait
d’ouvrir le feu contre le Chef de l’Etat 24 heures auparavant bénéficiait de
tous les égards et de toute la compréhension de ses supérieurs et conformément
à la volonté du Président, ne sera soumis à aucune instruction judiciaire.
o
la justice a été
effectivement empêchée de se saisir d’une affaire de tentative d’homicide et
d’atteinte à la sécurité de l’Etat, en violation flagrante de son indépendance
dont le Président devait être le garant
aux termes de la constitution.
o
Le Président MOAA ne veut pas que la justice se
« mêle » de « ses affaires ». Il s’est placé, lui et les siens au-dessus de la loi.
L’opinion nationale en avait eut déjà une illustration édifiante quelques mois
plus tôt lorsque son fils, ouvrit le feu à bout portant, le 22 janvier 2012,
contre une jeune fille dénommée Raja mint Syadi. La pauvre fille après des
semaines de lutte contre la mort s’en tirera avec une infirmité définitive. Le
ministère publicquant à lui se chargera d’étouffer l’affaire : il n’y eu
ni détention provisoire du coupable, ni une quelconque poursuite judiciaire.
5. Pourquoi avoir dissimulé la vérité sur les
relations suspectes dans l’affaire dite Ghana gâte ?
o
Le 28 mars 2013, le site Cridem, publie
l’interview de Hamed Oumar ressortissant
malien établi à Bamako, ex-collaborateur des services mauritanien, qui révèle
avec force détails que son ex-officier traitant Mohamed Ould Abdel Aziz «
l’avait mêlé »(en 2006-2007) pour son compte personnel dans des affaires
plutôt « illégales ». Il cite en particulier l’établissement du contact
avec un Irakien du nom d’Ousman Allawi, établi à Accra au Ghana et
relatif à une transaction douteuse où il est question de blanchiment de faux
dollars américains (4 malles) et même de proposition de coopération possible
pour le transit de la drogue.
o
Il était difficile d’accorder crédit à ces allégations
jusqu’au jour, quelques semaines plus tard, où des sites mauritaniens
Taquadoumy.com et Essirage.net publient en même temps des enregistrements
sonores relatifs à des conversations téléphoniques entre ledit Allawi et le
Colonel MOAA à l’époque, chef de la garde présidentiel et relatif à une
transaction portant sur « des malles d’argent ».
o
Le Président de la République observera un mutisme total pendant
des mois, malgré la gravité des accusations et le choc qu’elles avaient
provoqué dans l’opinion. Mais il finira un peu malgré lui et de façon furtive,
embarrassé et confuse par faire comme un aveu sur la réalité des conversations
en réponse à la question surprise d’un journaliste lors de la conférence de
presse de Néma en août 2013.
6. Comment expliquer et justifier la
complaisance coupable envers des trafiquants de drogue internationaux ?
L’affaire du caïd
de la drogue Mangane Eric Walter et compagnie
o
En juillet 2007 éclate l’affaire Ould Soudany –Sid’Ahmed
Ould Taya- Eric Walter. Il s’agit d’un puissant réseau de trafic international
de drogue. Le chef du réseau Walter, un franco-sénégalais, arrive à échapper
aux arrestations. Recherché par la police mauritanienne et Interpol, il n’en
passera pas moins un séjour tranquille à Nouakchott à visage découvert (cf.
documentaire de Canal plus « africa-stup »2010) jusqu’au jour où il
est repéré dans un café par des coopérants policiers français. Il choisit alors
de quitter le pays mais finit par se faire arrêter au Sénégal en 2009. Il sera
ensuite extradé vers la Mauritanie sur l’insistance de celle-ci. Jugé, il est
alors condamné à 15 ans de prison.
o
A la surprise générale, alors que le dossier de l’affaire
0769/007 était encore pendant devant la cour d’appel, le Président de la
République prend un décret de grâce, le 15 février 2011, accordant àWalter et
ses acolytes une réduction de peine de 5 ans. Aveu de culpabilité : ledit
décret pris en catimini ne fut jamais publié au journal officiel. Comment le
Président de la République peut-il expliquer cette magnanimité envers un réseau
criminel dans une sous-région menacée par le trafic de drogue ?
o
Pour une justice aux ordres le décret a fonctionné comme un
signal et une pression. Sans entrer dans les péripéties et manœuvres
judiciaires, le résultat en fut la libération de Walter et de ses complices,
cinq mois après. Le Président se contentera de calmer l’indignation de
l’opinion nationale et internationale en sacrifiant comme bouc émissaire, le
président de la cour d’appel qui avait acquitté les prévenus.
L’affaire du convoi
de drogue de Lemzereb
o
Le 26 février 2010, une unité de l’armée mauritanienne
intercepte dans l’extrême nord-est des confins mauritano-maliens, au lieu-dit
Lemzereb, un convoi de plusieurs véhicules transportant un chargement de 6
tonnes de drogue et escorté par une vingtaine d’hommes armés des tribus du nord
malien. L’exploit de l’armée est alors salué par l’opinion, les prévenus pris
en flagrant délit immédiatement déférés à la justice et la cargaison de drogue
brulée à Nouakchott dans une grande cérémonie publique.
o
Puis à peine sept mois après, le 27 septembre 2010, le
Président de la République décida, à la surprise générale et à l’insu de la
justice, de libérer tous les trafiquants de Lemzereb.
o
L’indépendance de la justice était ainsi et comme d’habitude
foulée aux pieds sans même un minimum de respect des formes. L’opinion publique
quant à elle, tenue dans le mépris, n’eut droit à aucune explication sur cette
ténébreuse affaire.
7. Pourquoi le refus du Président d’ordonner
toute enquête sur les nombreux scandales économiques divulgués régulièrement
par la presse et impliquant son proche entourage ?
o
Les conditions douteuses et dommageables pour les intérêts
de la Mauritanie de la convention avec la société chinoise de pêche Poly-Hondong
o
La gestion opaque de l’Agence chargée de l’Etat civil,
o
la fourniture d’aliment bétail avarié aux éleveurs dans le
cadre du plan d’assistance 2012,
o
le marché pour une usine « d’assemblage d’avions »
de la Mauritanian development corporation (MDC) la prétendue société américano-mauritanienne,
o
les conditions douteuses du marché de gré à gré du nouvel
aéroport international,
o
le prêt de 15 milliards d’ouguiya de l’entreprise minière
SNIM au profit de la société privée Najah, chargée de la réalisation du nouvel
aéroport international
o
les transferts de propriété foncière du secteur public au
secteur privé sans autorisation préalable du Parlement : aéroport actuel,
stade olympique, école de police et cela généralement au profit du proche
entourage du Président.
En conclusion :
Sur la base des
faits avérés énumérés ci-dessus un
constat s’impose : la violation répétée et délibérée du serment proclamé
le 6 août 2009 par le Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Pour toutes les lois
humaines le parjure est passible de lourde peine ou tout au moins disqualifie
son auteur pour toute fonction qui requiert la confiance de la collectivité et
invalide d’avance son nouveau serment.
Circonstances
aggravantes les faits énumérés plus haut illustrent la nature chaotique de la
gouvernance qu’exerce le Président Mohamed Ould Abdel Aziz sur notre pays. Une gouvernance marquée par la
prise en otage de l’Etat, une gestion personnelle et privative des richesses du
pays, une connivence coupable avec les milieux douteux, un mépris et une
violation constante de la Constitution et des lois de la République. En outre,
il vient de proclamer sa réélection à l’issu d’un scrutin boycotté par
l’ensemble de l’opposition démocratique. Un scrutin marqué par une implication outrancière de l’Etat et de ses moyens au
profit du candidat Aziz. Un scrutin marqué par une abstention record avec un
taux réel de participation très en deçà des chiffres officiels. Que cherche
Ould Abdel Aziz à travers l’organisation en grandes pompes d’une cérémonie de
prestation de serment ? Il cherche précisément, d’une part, à maquiller la
véritable nature de sa gestion, et d’autre part, à compenser par des artifices
le déficit de légitimité de sa réélection, et ce, à la veille de la tenue du
sommet Afrique-Amérique à Washington.
Le FNDU tient, par
la publication du présent document, à édifier l’opinion publique nationale et
internationale sur la réalité tant en ce qui concerne la réélection de Ould
Abdel Aziz que sur son comportement et ses actes au cours des années qu’il a
passées à la tête de l’Etat Mauritanien.
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