lundi 21 juillet 2014

chronique d'Ould Kaïge - publié déjà par Le Calame . 28 Juillet 2009



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26.28 Juillet 1960   &    30 Juillet 1968


Fixation de la date et des modalités de la proclamation de l’indépendance
&
Lois sur l’organisation territoriale
en régions et district de Nouakchott

 


 

Le 26 Juillet  1960, Moktar Ould Daddah reçu à l’Elysée par le général de Gaulle : il est convenu que la République Islamique de Mauritanie proclamera son indépendance le 28 Novembre 1960 après qu'aient été transférées les compétences communes et négociés des accords de coopération.

La démarche s’inscrit dans deux processus. Du côté de la France – qui avait proposé deux ans auparavant à ses colonies d’Afrique, notamment, la mutation de leur statut de territoires d’Outre-mer pour celui d’Etats membres d’une Communauté – la rupture politique a été opérée. Elle vient de s’inscrire dans les textes. Du 30 Mai  au 3 Juin 1960,  se tient à Paris la deuxième et dernière session du Sénat de la Communauté. La révision constitutionnelle est acquise par 206 voix contre 8 et 6 abstentions [1]. Le général de Gaulle conclut que " la Communauté va prendre, de ce fait, une forme nouvelle. Je ne crois pas, cependant, que l'esprit, ni la valeur, de cette grande institution doivent s'en trouver altérés. Son principe est la coopération organisée entre Etats. Il en sera de même demain. " Depuis les 11-12 Décembre 1959, lors du Conseil exécutif de la Communauté, à Saint-Louis, il était admis que la fédération du Mali (Soudan et Sénégal) accèderait à l’indépendance. Les Etats de l’Entente, emmenés par Félix Houphouët-Boigny avaient répliqué par une demande semblable mais, en hostilité avec Dakar, pour sortir de la Communauté. Ils formalisent dès la révision acquise. Passant la journée à Nouakchott, avant de se rendre à Saint-Louis, le président français avait publiquement pressenti que la Mauritanie ferait de même.

Du côté mauritanien, la démarche est exemplaire de la manière de Moktar Ould Daddah dans les décisions qui ont fondé le pays. D’abord s’assurer d’éléments pratiques. En l’occurrence, depuis que le 31 Mai, Black, président de la BIRD, a  assuré sur place sa confiance dans l’avenir du pays, le financement du projet minier de la Kedia d’Idjill est acquis. Ensuite examiner et comprendre le contexte : il est dominé par l’indépendance du Mali [2], qui est alors tout l’environnement régional de la Mauritanie de Bamako à Saint-Louis et à Dakar, puisque le Sahara [3] est un des enjeux de la guerre de décolonisation qui continue en Algérie, et que le Maroc est hostile avcec l’assentiment de personnalités mauritaniennes [4]. Moktar Ould Daddah est cependant isolé [5]. Sans doute, dès le 6 Février, sur le site historique de Koumbi-Saleh, ancienne capitale de l’empire du Ghana, non loin de Timbedra, il a pris de l’avance et déclaré «  que la vocation de la Mauritanie ne date pas d’hier ! A la fin de l’année ou au début de 1961, la Mauritanie demandera le transfert des compétences. ». A son retour à Nouakchott, il est pris à partie par le groupe parlementaire qui vient juste de de se substituer au bureau exécutif du P.R.M. [6], et donc de devenir le seul organe dirigeant du Parti. « Ces camarades m’accusaient – à juste raison, je l’avoue – de n’avoir pas respecté la discipline du Parti, en faisant ma déclaration à Koumbi-Saleh sans consulter aucune instance, et d’avoir ainsi mis la direction du Parti devant le fait accompli. Je me défendis comme je pus…».  Finalement – patience, ténacité de moktar Ould Daddah, mais démocratie – le  groupe, à l’issue d’une longue session tenue du 16 au 18 Février 1960 « invite le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie à prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de l’accession de la République Islamique de Mauritanie à la souveraineté internationale, par transfert de compétences au cours de l’année 1961 ». Recevant, commentaire à l’appui, le texte de cette résolution, dès le 24 Février, de Gaulle avait dit l’approuver.

Dernière étape de la détermination : du 8 au 17 Juillet, une longue tournée de prise de contacts en Adrar, qui à l’époque couvre Bir-Moghrein, Ain Ben Tili, Chegatte et Fort-Gouraud, tandis que le Congo belge accède à l’indépendance «  en catastrophe » et que le 11, Moïse Tshombé proclame la sécession  du Katanga. L’Assemblée nationale est rétive, elle contraint le gouvernement à une date d’élections municipales pour la commune de Nouakchott qui vient d’être créée, elle se consacre du 15 au 22 Juillet, en session extraordinaire, au plan triennal de développement 1960-1962. Tandis que se tient un séminaire de l'association des étudiants et élèves de Mauritanie sur le thème : "La jeunesse estudiantine et la construction nationale " et qu’à Rosso, se constitue le syndicat des enseignants arabes de Mauritanie. Le 19,le Conseil des ministres examine " dans la perspective de l'accession prochaine de la République Islamique de Mauritanie à l'indépendance les problèmes que le Gouvernement aura à résoudre ". La jeunesse pousse à l’unité des partis politiques, tandis que l’Assemblée rechigne devant la perspective de l’indépendance. Moktar Ould Daddah la déborde alors. Du 20 au 22 Juillet 1960, une conférence des cadres du  parti gouvernemental (le P.R.M. constitué à Aleg, ce congrès qui avait pourtant affirmé deux ans auparavant la « vocation à l’indépendance » du pays) comprenant le gouvernement, les députés et les secrétaires généraux des sections. En conclusion, l'Assemblée nationale ne peut se dessaisir. Elle confie à la conférence des cadres et au groupe parlementaire du PRM le soin d'adopter une résolution fixant la date de l'indépendance de la République islamique de Mauritanie. Conférence des cadres et groupe parlementaire décident, alors, de la demande du transfert des compétences et de la négociation d'accords de coopération avec la France de telle sorte que l'indépendance soit proclamée le 28 Novembre 1960. C’est le message que le Premier ministre porte au général de Gaulle le surlendemain à Paris.



Le 30 Juillet 1968, sont promulguées les lois 68-242 et 243 portant organisation générale de l’administration territoriale et portant organisation des régions et du district de Nouakchott. C’est la régionalisation qui constitue toujours l’ossature des gestions décentralisées de la Mauritanie.

C’est la fin d’un long débat autant sur l’organisation territoriale que sur les modes de la gestion et de la démocratie locale. Pendant dix ans, l’option a été celles des communes, particulièrement les communes rurales, tandis que les divisions administratives héritées du système de « commandement » français étaient restées intangibles, sauf à créer un nouveau cercle, celui du Tiris Zemmour.

Le processus s’est engagé à Aïoun-el-Atrouss, lors du IIème congrès ordinaire du Parti, en Juin 1966 (chronique anniversaire Le Calame – 30 Mai 2009), décidant la réunion, entre autres, d’une commission nationale d’études sur les questions économiques. Ce sont les travaux de celle-ci [7] qui avaient fait les décisions du IIIème congrès, tenu à Nouakchott au début de l’année. L’étude des expériences des pays voisins (Sénégal, Mali, Guinée) en matière de régionalisation économique, y avaient aussi contribué.

Reste  « le découpage régional ». En session ordinaire, les 3 et 4 Mai, le Bureau Politique National l’avait décidé, en réservant le régime administratif de Nouakchott :
1ère région (Hodh oriental – actuellement El Gharbi) = Néma
2ème région (Hodh occidental – El Charbi) = Aioun-el-Atrouss
3ème région (Guidimaka, Assaba moins N’Bout, plus Boumdeid = Kiffa
4ème région (Gorgol plus M’Bout) = Kaédi
5ème région (Brakna, Tagant) = Aleg
6ème région (Inchiri, Trarza moins Nouakchott) = Rosso
7ème région (Adrar, Tiris-Zemmour, Baie du Lévrier) = Atar
Protestations immédiates à Tidjikja : le 9 Mai, le commandant de cercle du Tagant fait état de vives réactions de la population à la nouvelle du découpage régional et le 16, les élèves contre la régionalisation qui fait dépendre le Tagant du Brakna [8]. Les événements de Zoueratte (chronique anniversaire Le Calame – 2 Juin 2009) ont d’ailleurs fait anticiper ceette réorganisation : le chef lieu de l’administration nationale autour de la mine a été délocalisé à F’Derick, et Kane Tidiane, le remarquable commandant du cercle de l’Adrar, est chargé cumulativement de la délégation du gouvernement à Port-Etienne.

Réunissant du 20 au 22 Mai, à Nouakchott, les commandants de cercle, le Président commente la mise en place des nouvelles structures régionales et, avec regret, constate donc l’échec des communes rurales. Le cap reste plus que jamais : détribaliser, opérer un recensement effectif, traitet à ces deux occasions le problème des serviteurs de tout milieu et de toute ethnie de la même manière. Le 6 Juillet 1968, le Conseil des ministres adopte les projets de lois portant organisation générale de l’administration territoriale, portant organisation des régions et du district de Nouakchott [9]. La réforme n’est qu’apparemment une redistribution des circonscriptions et leur dénomination la plus neutre possible pour détacher les populations et les chefferies ou influences traditionnelles de leurs habitudes régionales ataviques. La régionalisation est en fait la lutte déclarée contre tribalisme et régionalisme. « Au lieu d’avoir, comme les anciens cercles, des noms de tribu ou de groupes de tribus (Brakna, Trarza) ou de régions géographiques identifiées à des collectivités tribales ou ethniques (Adrar, Gorgol), les nouvelles entitées étaient désignées, d’une manière anonyme, par un numéro : 1ère région, 2ème, 3ème etc. et ainsi de suite. Ce n’est pas poétique, avaient commenté certains conservateurs, et autres nostalgiques. Mais le but recherché était atteint. En effet, le nouvel énoncé n’évoquait, a priori, aucun souvenir particulier – d’une tribu ou d’une ethnie. Le citoyen qui entendait la nouvelle appelation de sa région ne pensait pas spontanément en tribal. Il pensait – confusément certes, mais il pensait – régional. De la sorte, il lui sera plus facile de penser « national ». C’était l’un des buts essentiels de la réforme. » [10] . Décolonisation aussi puisque les appellations de l’époque française disparaissent au profit de la willaya et du wali.

L’organisation et le choix [11] des institutions sont novateurs : un gouverneur plénipotentiaire, mais une commission régionale disposant de vraies ressources et de compétences propres. Il restera à articuler le dispositif avec celui du Parti sur place, jusqu’à la fusion des fonctions administratives et politiques, longue à décider et pas facile à exercer.

La tranquillité apparente et la continuité de la démarche ne doivent pas tromper. Le moment est particulièrement dense, sinon tendu politiquement [12]. C’est celui d’une réforme des modes de gouvernement : chaque question soulevée par l’application des décisions du Congrès « doit faire l’objet d’une pré-étude faite en commun par le membre du Comité permanent responsable et les ministres intéressés par le secteur étudié avec la participation le cas échéant des Conseil supérieurs concernés ». Un nouveau règlement intérieur du Parti est adopté [13]. Au 1er Juillet 1969, doit démarrer le prochain Plan quadriennal ce qui suppose son adoption par le Conseil National du Parti lequel ne s’est encore jamais réuni. C’est la crise consécutive au drame de Zouératte. C’est le début de la crise syndicale [14] qui va mettre pendant trois ans le régime en difficulté et créer une ambiance politique telle que vont se développer pour la première fois depuis dix ans, des mouvements d’opposition. Enfin, c’est l’épisode d’une crise ministérielle pour faits de corruption. Le  28 Juin Fall Papa Daouda, ministre de l’Industrie, de l’Artisanat et des Mines, est démis de ses fonctions. Le lendemain, Birane Mamadou Wane, ministre des Affaires Etrangères, est démis de ses fonctions ; il signe conséquemment sa démission du Bureau Politique National. Le surlendemain, l’ex-ministre de l’Industrie, de l’Artisanat et des Mines est arrêté pour détournement de deniers publics. Imperturbablement, Moktar Ould Daddah continue de prendre le pouls du pays : tournée dans le Gorgol en Mai, puis au Trarza au début de Juillet [15]. Le gouvernement est donc remanié et d’importantes nominations effectuées [16].

Le 31 Juillet, Moktar Ould Daddah peut partir pour la France où il va passer ses vacances et surtout rencontrer le général de Gaulle, tout juste vainqueur – lui aussi – des très difficiles « événements de Mai », concommitants donc avec le drame de Zoueratte.



[1] - le lendemain, 4 Juin, est promulguée la loi portant révision des articles 85 et 86 de la Constitution du 4 Octobre 1958 : " Un Etat membre de la Communauté peut également par voie d'accords, devenir indépendant sans cesser de ce fait d'appartenir à la Communauté " et le secrétariat d'Etat aux relations avec la Communauté précise que suivant l'article 78 de la Constitution " le transfert des compétences s'effectue par négociations concuremment avec la conclusion des accords de coopération. Il n'y a pas de troisième voie ". Jean Foyer est aussitôt démenti par Félix Houphouët-Boigny : les Etats de l'Entente refusent de négocier des accords avec la France préalablement à leur accession à l'indépendance. C’est la voie que suivra la Mauritanie, mais pour d’autres raisons et nullement de prestige ou de ressentiment à l’ivoirienne. – Le 2 Juillet, contrairement à ce dont ils étaient convenus le 17 Mai précédent, les Etats de l'ex-Afrique équatoriale française négocieront chacun avec la République française au lieu que ce soit leur union en tant que telle. Le modèle fédéral a vêcu.

[2] - le 20 Juin, à Dakar, Moktar Ould Daddah assiste aux cérémonies de l'indépendance du Mali et il se tient au courant de la signature, le surlendemain à Paris, par la France, le Mali et Madagascar d'accords multilatéraux (convention sur la conciliation et la cour d'arbitrage, accord sur les droits fondamentaux des nationaux des Etats de la Communauté, et surtout des accords de coopération et de participation à la Communauté entre la France et la Mali, tels que paraphés depuis le 4 Avril

[3] - c’est là-dessus qu’achoppent du 25 au 29 Juin, à Melun, les premiers entretiens entre la France et le "G.P.R.A."

[4] - le 6 Juin, Mohamed V nomme Mohamed el Moktar Bah, directeur de la radiodiffusion chérifienne, et Deye Ould Sidi Baba dirige le cabinet royal : tous deux avaient été membres du premier conseil de gouvernement mauritanien

[5] -  « Durant l’année 1960, nous avons dû simultanément, et entre autres activités, chercher à réaliser nos deux options : unité politique et préparation de l’accession à l’indépendance. J’ai dit, plus haut, que la première option – l’unité politique – avait fait de grands progrès. Quant à l’indépendance, la majorité du groupe parlementaire ne lui était pas favorable : on y était plus hostile qu’à l’unité politique ! Pour les mêmes raisons déjà mentionnées et souvent répétées, depuis le Congrès d’Aleg. Nous devons avoir l’honnêteté de reconnaître que les anti-indépendantistes étaient confirmés dans leurs craintes par l’agressivité, à l’égard de notre pays, aussi bien des deux Etats fédérés du Mali et que du Maroc. Donc, pour eux, et ils avaient en partie raison, il fallait nous accrocher à notre seule planche de salut qu’était la France, et ne rien faire qui pût nous en éloigner. Penser et surtout agir autrement, ne pouvait être que «  des hallucinations de ceux qui sont frappés par les jnouns [5] ». Quand on faisait remarquer à ces compatriotes que les pays voisins qui avaient subi la même colonisation que nous, qui en étaient, à peu près, au même stade d’évolution économique, sociale et technologique que nous, allaient vers l’indépendance et qu’il nous était difficile sinon impossible de ne pas faire comme eux, ils répondaient en susbtance : «  Que la France nous donne un drapeau et un hymne, soit ! Mais qu’il soit entendu par tous que cela ne changerait rien dans nos rapports avec elle ». Moktar Ould Daddah dans ses mémoires :  La Mauritanie contre vents et marées (Karthala . Octobre 2003 . 669 pages – disponible en arabe et en français)  pp. 205 à 207
                Dans cette ambiance, la même majorité ne cessait de tergiverser quant à la fixation d’une date à proposer à la France pour le début des négociations devant nous permettre, d’accord parties, de déterminer celle de la proclamation de notre indépendance. Or, nous étions un certain nombre de responsables – la minorité du groupe – à considérer que notre pays devait impérativement, et comme tous ceux de la Communauté franco-africaine, accéder à l’indépendance avant la fin de 1960. Cependant, pour atteindre notre objectif, il nous fallait biaiser avec la majorité.

[6] - cette décision du groupe parlementaire visait à accélérer les procédures et à concentrer le pouvoir. Parce que quand on réunit toutes les instances, d’abord il faut le temps de la convocation et des réunions successives, et puis ces instances avaient tendance à se préoccuper davantage des questions locales

[7] - ouvrant les travaux de la Commission Nationale des Affaires Economiques,  le 10 Juillet 1966, Moktar Ould Daddah déclare: « … notre développement économique apparaît, jusqu’ici, dans ses effets comme un simple placage d’une économie moderne en plein essor sur une économie traditionnelle de subsistance… Il convient de porter, en premier lieu, nos efforts sur le secteur qui concerne le plus grand nombre de Mauritaniens, le secteur rural qui, avec ses deux éléments complémentaires, agriculture et élevage, pourra, si les Mauritaniens le veulent, rétablir un équilibre actuellement compromis… Avant d’entreprendre le développement des différents secteurs de l’économie traditionnelle, il faudra d’abord modifier nos structures économico-administratives directement léguées par le système colonial… C’est pourquoi, suivant en cela les propositions exposées dans mon rapport moral, le Congrès d’Aïoun, a retenu le principe d’une régionalisation économico-administrative, dont l’examen sera l’une des tâches de votre Commission… Cette régionalisation s’avère indispensable malgré les conséquences budgétaires qu’elle ne manquera pas d’avoir. En effet, l’immensité de notre territoire, la diversité deséconomies locales, nécessitent l’élaboration de petits plans régionaux dans le cadre du Plan national. Ces plans régionaux devront s’appuyer sur de nouvelles structures locales qui, depuis l’indépendance, nous font, il faut l’avouer, cruellement défaut. Il va de soi que cette régionalisation économico-administrative devra être réalisée suivant des critères précis. La regionalisation consistera donc à regrouper certains cercles en fonction de la complémentarité de leur économie et, en fonction aussi, des moyens de communications régionaux. Les chefs-lieux de région devront, à leur tour, répondre à certaines exigences tenant les unes à la situation géographique, les autres aux possibilités d’accès, à l’ensemble de l’infrastructure existante, enfin à l’importance de l’économie du lieu par rapport à l’ensemble de l’économie régionale. Le gouvernement aura ainsi à jouer un rôle de coordination aussi bien à l’égard des nouvelles régions administratives qu’à l’égard de nouvelles régions économiques qui recouvriront exactement les précédentes… »  Le 22 Juillet, la commission des Affaires Economiques se répartit en quatre sous-commissions d’études. Les membres de la sous-commission de la régionalisation. Les membres de cette dernière étaient Birane Mamadou Wane, Bouyagui Ould Abidine, Moktar Ould Haïba, Youssouf Koïta, Mohamed Bâ, Andallahi Ould Cheïkh, Ibrahima Kane. Bouyagui Ould Abidine fut désigné comme rapporteur de cette sous-commission. Trois de ses membres de cette dernière, Abdellahi Ould Cheïkh, Ibrahima Kane et Moktar Ould Haïba allaient parcourir l’ensemble du pays pour déterminer le découpage territorial à proposer au B.P.N. et au Gouvernement. Moktar Ould Daddah dans ses mémoires :  La Mauritanie contre vents et marées (Karthala . Octobre 2003 . 669 pages – disponible en arabe et en français)  pp. 205 à 207

[8] - j’ai été témoin, en tournée « dans la quatrième », au printemps de 1974 de la manière dont délibérait Moktar Ould Daddah sur ce genre de sujets : aller par la route d’Aleg à Tidjikja tout en s’arrêtant le temps qu’il fallait dans chacune des préfectures, montrait que l’administration ou bien épuisait les responsables ou bien négligeait les populations tant les distances et les obstacles naturels sont manifestes. A l’inverse, l’émirat du Tagant a dû se « décentraliser » pour rejoindre ses populations le long de la route de l’Espoir. Ce furent donc des délibérations en réunions de cadres locaux, des entretiens avec les ministres et les responsables de la Permanence du Parti, qui pendant le voyage aboutirent à la création de la région réinstituant l’ancien cercle.

[9] - c’est à ce Conseil qu’est décidée pour être effective le 9 Juillet, la nomination de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, comme directeur du Plan, donc en charge de l’élaboration du prochain plan et des débats à prévoir en Conseil national du Parti, dont il n’est pas adhérent… il aura pourtant à proposer et des modalités de participation de la base à l’élaboration du Plan »et des modalités de participation de la base à l’élaboration du Plan »

[10] - Moktar Ould Daddah, op. cit. p. 364

[11] - Moktar Ould Daddah dans ses mémoires, l’explique longuement, op. cit.  pp. 365 à 371 « la régionalisation permettait la mise en commun des moyens humains et matériels de la région sous la même autorité, celle du gouverneur, ce qui en augmentait l’efficacité et la rentabilité. D’où la possibilité, avec un budget régional bien géré et avec l’aide de l’Etat, de réaliser un plan régional de développement plus ou moins ambitieux. Il est vrai que certaines régions étaient pauvres et ne pouvaient vivre qu’avec l’aide de l’Etat et grâce à la solidarité d’autres régions plus riches. Du reste, cette notion de solidarité régionale concrète était une des idées-forces de la régionalisation. Pour la concrétiser, les textes régissant l’institution avaient prévu la création d’un fonds inter-régional de solidarité, alimenté par un pourcentage du budget régional dont j’ai oublié le montant. Ce pourcentage était considéré comme une dépense obligatoire, donc prélevée, parmi les dépenses prioritaires, sur les recettes de la région. Le même pour toutes les régions.  Il était payé surtout par les rares régions riches qui s’en acquittaient sans trop d’empressement à vrai dire ! D’ailleurs, les organes des régions riches, gouverneurs et conseillers régionaux, en réclamaient la suppression. Enfin, la régionalisation devait permettre d’initier les citoyens à la gestion des affaires régionales. En particulier, les conseillers régionaux qui, par exemple, votaient le budget régional, devaient en contrôler l’exécution assurée par le Gouverneur. Au niveau régional, c’était un bon apprentissage de la démocratie.
Les instances étatiques de la région étaient au nombre de deux : le Gouverneur et ses deux adjoints, et la Commission régionale. Je ne cite pas ici la fédération du Parti dont j’ai déjà parlé.
Le Gouverneur était le rouage central – donc essentiel – de cette nouvelle collectivité de l’Etat. Les textes lui donnaient des pouvoirs étendus, nombreux et variés, ce que certains compatriotes, aimant les comparaisons imagées, exprimaient en disant que le Gouverneur était « un petit président de la petite république-région ». Ses pouvoirs étaient donc sans commune mesure avec ceux du Commandant de cercle. La loi sur la régionalisation, dans son article 2, dispose que le Gouverneur  est dans la région représentant du pouvoir exécutif et représentant de la région. Il administre les biens de la région.  Chef de l’administration régionale, le Gouverneur exerce les attributions qui lui sont dévolues par le décret n° 68-345 du 24 Décembre 1968. Ces attributions englobent un vaste domaine : exécution des lois, des règlements et de toutes décisions ou instructions du gouvernement, mesures de maintien de l’ordre, contrôle de diverses sortes, gestion des personnels, coordination des activités administratives, économiques et sociales de tous les services régionaux.  Le Gouverneur est assisté de deux adjoints : l’un d’eux est chargé, suivant le décret précité, des questions d’ensemble de l’administration régionale, l’autre, plus particulièrement, des questions d’ordre économique et social. A chacun d’eux, le Gouverneur peut consentir des délégations de signature dont il fixe les limites dans le cadre de leurs attributions respectives. Représentant du pouvoir central, le Gouverneur est amené à prendre une série d’actes : fournir des renseignements aux autorités supérieures, effectuer les enquêtes demandées par le Président de la République et les Ministres, procéder à la publication des lois, décrets et règlements, exécuter des mesures de sûreté générale, exercer les fonctions spéciales que lui attribuent les lois.
La deuxième institution régionale était la Commission régionale. C’était l’organe délibérant de la région. Ses membres, les conseillers régionaux, étaient, pendant une période transitoire, désignés par décret, sur proposition des fédérations du Parti. Il était prévu que, par la suite, ils seraient élus par le suffrage universel, ce qui ne put se faire avant Juillet 1978. Pourquoi ? Parce que, échaudés par l’expérience décevante des communes rurales, dont les conseils furent directement  élus d’emblée, nous avions préféré roder la nouvelle institution des Conseils régionaux, en désignant leurs membres le temps d’une phase transitoire, avant de les faire élire au suffrage universel. Mais, la sécheresse d’abord et la guerre de réunification nationale ensuite, ne nous avaient pas permis d’organiser des élections régionales au suffrage universel.
Les Commissions régionales avaient, de par les textes les régissant, des pouvoirs réels et importants dans la gestion des affaires régionales. En particulier, elles votaient les budgets régionaux dont elles contrôlaient l’exécution par le Gouverneur en sa qalité de représentant de la région. Aussi, après l’échec des communes rurales qui provoqua leur suppression, après quatre années seulement d’existence, échec dû à l’incapacité – du reste explicable, pour ne pas dire justifiable – des présidents des Conseils ruraux (les Chefs de subdivision) qui les avaient transformées en conseils de notables de l’époque coloniale, nous avions fondé beaucoup d’espoir sur cette nouvelle expérience de démocratisation de nos structures régionales. Il est vrai que, là aussi, certains gouverneurs qui n’étaient pas encore parvenus à extirper « la mentalité de mon commandant » [11], tentaient de freiner la volonté de démocratisation véritable et authentique du Parti. Il n’empêche que cette démocratisation aurait sûrement fait des progrès certains, si notre contexte d’alors avait été autre. En effet, dans la plupart des régions, quelques conseillers régionaux commençaient à émerger et à comprendre le rôle que le Parti voulait les voir jouer pour concrétiser notre volonté de démocratisation progressive et réelle de  nos institutions.
                Dans sa vie quotidienne, la région était, en principe, dirigée par un triumvirat : le Gouverneur, le Secrétaire fédéral et le président de la Commission régionale. Quand les trois s’entendaient – surtout les deux premiers – la région était tranquille et les responsables pouvaient travailler normalement. Dans le cas contraire, elle était agitée et rien de valable ne s’y faisait. Ce fut d’ailleurs, pour lutter contre les méfaits du dualisme en cas de mésentente entre le Gouverneur et le Secrétaire fédéral, pendant la période difficile que traversait le pays, que le Congrès extraordinaire de Janvier 1978 décida une réforme profonde : la suppression, qui, du reste, devait être provisoire – du poste de Secrétaire fédéral au profit du Gouverneur. Ce dernier exerçait, cumulativement désormais, ses attributions précédentes et celles du Secrétaire fédéral. Changeant de titre, et s’appelant désormais Délégué régional, ce dernier était secondé dans sa nouvelle tâche d’animation et de coordination des activités du Parti par un adjoint spécialement désigné à cet effet. »

[12] - le 29 Juillet, en réunion du Bureau Politique National, le secrétaire général, Moktar Ould Daddah « décrit l’atmosphère politique de ces dernières semaines que des pêcheurs en eau trouble et de santé-porté se sont efforcés d’infecter au moyen de tracts mensongers et d’akhbar amplifiés et intentionnellement déformés » et une réunion commune des membres du Gouvernement et du B.P.N. envisage les « moyens d’instaurer et de renforcer l’esprit d’équipe, condition première du succès », décide une « lutte devenue de plus en plus nécessaire contre le parasitisme »

[13] - le 15 Juillet, circulaire du Secrétaire général du Parti : « L’option pour un parti de masses implique sous peine d’aller droit à la dégénérescence et à l’inertie que les organismes de base de notre Parti fonctionnent régulièrement et non de façon spasmodique »

[14] - réuni du 5 au 8 Juillet, le 8ème congrès des enseignants arabes laisse présager une crise générale de la centrale syndicale, alors même qu’une modification du le Code du Travail justement en cours va renforcer son rôle dans la conciliation préalable pour le règlement des différends

[15] - il donne aussi, le 17,  en tant que secrétaire général, une explication de ces démissions et arrestations de membres du gouvernement par une circulaire aux instances du Parti

[16] - le 12 Juillet, est créé le secrétariat général de la Présidence de la République, confié à Ahmed Killy, et le 15 Juillet, le commandant M’Bareck Ould Bouna Moktar, qui avait « mauritanisé » le poste de chef d’état-major national est nommé inspecteur général de l’armée nationale, pour être remplacé à son poste par le capitaine Moustapha Ould Mohamed Saleck


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