La balle du 13 Octobre : quelles leçons à tirer ?
La crise systémique, multiforme et multidimensionnelle dans laquelle se débat notre pays depuis les accords de Dakar, a atteint son paroxysme le 13 Octobre dernier des suites de l’incident sécuritaire qui a alité depuis ce jour le général Mohamed Ould Abdel Aziz .
Voilà plus de 30 jours ,qu’en l’absence de ce dernier ,la gestion du pays est de façon plus visible ,aux mains du Haut Conseil d’Etat (HCE),exclusivement composé de militaires et théoriquement dissous depuis le travestissement en civil de l’ impatient patient de PERCY .
Durant cette longue période, par respect à des valeurs que ,méthodiquement ce système s’est employé ,depuis son avènement, à détruire ,nous avions tant que faire se pouvait ,gardé un silence non coupable sur les questions de fond qui se profilent derrière cet incident .
Cette attitude d’expectative, nous y avons été amenés pour deux raisons essentielles :
1-On crie à tue tête autour de nous que nous vivons en plein exercice de la démocratie. Dans ce cas, avions -nous jugé, qu’on serait en droit de nous attendre à ce que l’incident ouvrît la voie à une cascade de démissions de tous ceux qui en endosseraient ,à quelque degré que ce fût ,la lourde responsabilité .
2-Attendre le rétablissement et le retour du Général au pays -qu’on nous disait imminent- pour continuer notre combat contre les méthodes spartiates et surannées de ce régime .
Et , par pudeur non atavique ni affectée nous avions ,comme le commandent les règles de morale, eu quelque bon scrupule à dédaigner combattre un homme, même celui là ,réduit ne serait ce que momentanément, à l’état grabataire et qui ,plus est, se trouve hors du pays .
Mais ,aux dernières nouvelles la machine de propagande du régime qui, seule ,a été épargnée par la paralysie qui enserre tout le spectre institutionnel , administratif et politique dans notre pays ,nous apprend que le général, requinqué à l’extrême, multiplie, dans sa plus belle forme, les rencontres , les interviews et même les ordres à ceux qui ont pris le relais. C’est à nos yeux plus que suffisant pour que soit mis fin à notre silence .
C’est d’autant plus urgent que beaucoup sinon toutes les questions ayant trait à cet incident restent en suspens .
On se souvient certainement que le pouvoir targuait de privilégier le tout sécuritaire au détriment de toutes autres politiques et que son chef lui-même sortait tout frais de ce moule où, vingt années durant il a veillé à la sécurité des chefs d’Etat , même s’il fut aussi leur tombeur, les uns après les autres .
Le flot des contre-vérités qui s’est déversé sur nos esprits quelques heures après cette journée du 13 octobre tient à faire accroire que la balle qui s’est logée dans le corps du général n’a pas visé que son bras et résultait d’un accident mineur causé par inadvertance et imputé à un officier d’une armée que nous croyions professionnalisée et constituant l’ossature d’un système sécuritaire bien rodé .
Là, on est en droit de se demander comment un incident aussi gravissime pouvait advenir dans un tel système qui a sacrifié notre projet démocratique et tous les secteurs de la vie de notre pays aux seules exigences sécuritaires, au premier rang desquelles, sa sécurité personnelle.
D’avoir pu être victime d’une telle bavure, devrait suffire pour que le Général ould Abdel Aziz rende sa démission comme cela se passe pour beaucoup moins dans toutes les démocraties du monde, parmi lesquelles nous croyons compter.
Cet acte courageux de démission qui n’a pas eu lieu a tout de même révélé le pressant besoin de restructurer la garde prétorienne du général, son armée dont est issu l’officier –mitrailleur, la hiérarchie de ce dernier ainsi que l’ensemble du système instauré et basé sur la force ,pour pouvoir -non par l’exercice du pouvoir politique dissipant , corrupteur et pervertissant - assurer la sécurité et la survie de la nation à un moment crucial de son histoire où les tambours de la guerre résonnent à ses frontières orientales.
Face à l’opacité qui enveloppait lourdement les circonstances de l’incident, nous avons pu penser qu’on était en face ,l’habitude aidant , à une nouvelle façon d’opérer les coups d’Etat , par solidarité de corps afin de nous livrer dans un nouvel emballage le même système aujourd’hui essoufflé par les ilacunes criantes du général blessé et son incapacité avérée de gérer un Etat moderne. Cela est d’autant plus vrai que nous traversons une époque marquée par la résurgence des peuples et des nations et la renaissance de la démocratie !
La faculté explicative des raisons officiellement invoquées , ne comporte aucune vertu absolutive de la faute commise .Dans le cas d’espèce ,elle n’a fait d’ailleurs qu’amplifier le doute sur les circonstances réelles de l’incident donnant lieu à des extrapolations que la pudeur sincère et pure nous empêche d’aborder sauf quand on nous le transforme en haut fait de bravoure et de dignité .
La balle qui a atteint en plein corps , le général Aziz dans ses déboires, même si elle est à déplorer a été tout de même éclairante en ce qu’elle a mis à nu les prétentions sécuritaires de ce dernier et mis au goût du jour , l’urgence qu’il ya, tant les fait sont patents , à exiger
-La démission immédiate d’Ould Abdel Aziz:
-La dissolution ou l’intégration dans les rangs de l’armée nationale du BASEP longtemps déstabilisateur récidiviste des institutions républicaines et aujourd’hui se incapable d’assurer la sécurité de son chef. Ce bataillon n’excelle, décidément, que dans la destitution illégale des Présidents mais s’inscrit au registre des absents quand il s’agit de leur prodiguer la sécurité.
-La hiérarchie de l’officier-baroudeur doit, elle aussi, rendre son tablier.
-Les responsables dans le département de la justice et apparentés qu’on a empêché d’enquêter sur l’incident et dont on a ignoré le rôle en accordant, avant enquête et procès, « la grâce présidentielle » à l’auteur du carnage du 13 octobre, doivent démissionner, eux aussi, ne serait- ce que par acte de protestation.
Et comble de l’ironie : ce qui était tenu pour être son point fort, la sécurité est devenue en l’espace d’une journée son talon d’Achille. Une nouvelle occasion, qu’il ne saura certainement pas saisir, lui est offerte aujourd’hui pour méditer sur son sort en décryptant de manière lucide les signes divins avertisseurs. Si, par un de ces retournements ineffables de la vie , il y arrive, il saura que l’accident qui est venu mettre un terme à un autre accident , celui de l’histoire qui l’a placé là où il ne devait jamais se trouver .Cette remise en cause de sa propre personne ,doit le mener si elle est bien conduite , à décider de lui- même de démissionner .
Les raisons en seront claires : car il a , par mépris de son peuple ,fait primer sa vie privée sur les responsabilités nationales ,en se faisant attaquer de la sorte en pleine villégiature. Il l’a fait parce que convaincu que le pays, ses ressources, l’honneur et la dignité de son peuple sont sous ses bottes et il peut en user et abuser à volonté.
Il l’a aussi fait parce que, se connaissant mieux, et quoi qu’ayant passé prés de sept années au pouvoir occulte ou apparent, il continue de battre campagne. .
Cette longue durée ne l’a pas aidé à intérioriser l’idée qu’il préside aux destinées d’un peuple et au devenir d’un pays tout entier .Pour se repentir et faire acte de contrition véritable , il doit également faire l’amère constat que les mines explosives qu’il a placées dans chaque recoin de notre vie nationale ont été désamorcées. Toutes ses méthodes, pratiques et discours alambiqués, sont aujourd’hui frappés d’obsolescence politique irréversible.
En un mot , notre peuple sensibilisé par ses élites intellectuelles et politiques n’attend plus rien de positif venant de vous car , du temps ,il y’a à juste moins de 40 jours , où vous jouissiez de toutes vos facultés physiques et morales , vous nous avez précipité à vive allure dans le gouffre de la mal gouvernance sous toutes ses formes .
Aujourd’hui, vos facultés et vos forces profondément diminuées, vous savez, vous et ceux qui vous instrumentalisent, même par la maladie, que vos efforts doivent être concentrés exclusivement sur la surveillance permanente de votre état de santé.
Dans l’état actuel des choses, s’occuper des affaires de l’Etat pourrait nuire à votre santé et l’état de votre santé pourrait nuire à la santé, déjà fragilisée, de notre Etat.
Mohamed Ould Mohamed El Hacen et Brahim Ould Abdallahi
Professeurs et Consultants
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