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lundi 26 mai 2014
Quel sens peut avoir une candidature harratine en Mauritanie ?
On peut être d’accord ou pas sur la légitimité des élections présidentielles en Mauritanie. Certains partis de l’opposition ont décidé de les boycotter. D’autres non. En effet, le champ politique mauritanien est un espace globale médiocrité où des forces aveugles s’affrontent. Il est le reflet d’une société apathique où l’esprit critique est quasi-inexistant. Il se caractérise par une agitation où chacun prétend être à la hauteur des défis.
Dans une société où l’on pense être
en capacité de tout faire, on est certain qu’on est dans un univers où la
suffisance imbécile domine. Ainsi, dans ce pays des aveugles, les borgnes
sont rois.
On peut se poser des questions pour
savoir pourquoi Birame Ould Abeid s’est présenté aux élections présidentielles.
Mais là n’est pas mon sujet. Ce qui m’intéresse est qu’il d’origine
Harratine. Il s’agit d’une candidature d’une des grandes figures de la lutte
contre l’esclavage en Mauritanie.
J’ai toujours dit à Birame qu’une
candidature à la présidentielle se prépare et doit se faire autour d’un
programme réfléchi et pragmatique. Maintenant qu’il a décidé de se présenter,
l’heure n’est pas à la polémique.
Il me semble que ce qu’il faut
prendre en considération est ce qu’il représente en tant que symbole. Au-delà
de lui-même, il porte la voix de la communauté la plus commandée de la
Mauritanie et pour cette cause, je pense que sa candidature mérite que
l’on y prête attention.
Depuis que la Mauritanie est
indépendante, ce sont les mêmes groupes dominants qui dirigent le pays.
La première candidature d’Ibrahima Sarr avait suscité beaucoup d’espoir
mais l’homme a déçu. Pourquoi alors ne pas donner sa chance à une personne
issue d’un des groupes les plus dominés de ce pays. Birame ne peut pas être
pire que ceux qui ont dirigé ce pays jusqu’à ce jour.
De la même manière que je soutiens
le combat Birame, je soutiendrai celle d’un forgeron maure.
Une chose est plus ou moins sûre,
Birame à la tête de la Mauritanie va participer à la libération d’êtres
humains soumis à la pire des conditions.
La violence physique, morale, les
viols, leur déshumanisation dont les esclaves font l’objet doit révolter toute
personne qui se réclame de mériter le qualificatif d’humain. Ne serait-ce que
pour cette raison, il me parait judicieux de prêter main forte à la candidature
de Birame. Ceci ne doit pas seulement concerner les Harratines mais
toutes les autres composantes de la Mauritanie.
"L'homme n'est vraiment que
parmi d'autres hommes également libres; et comme il n'est libre qu'à titre
humain, l'esclavage d'un seul homme sur la terre, étant une offense contre le
principe même de l'humanité, est une négation de la liberté de tous."
[Mikhaïl Bakounine - 1814-1876 - Catéchisme révolutionnaire]
Chacun doit prendre ses
responsabilités. Birame n’est pas un homme parfait mais il représente une
cause. C’est cela qu’il faut prendre en considération. En certains moments de
l’histoire, il faut savoir passer outre certaines considérations pour maintenir
un peu d’humanité dans un pays.
En 1995, de nombreuses personnes qui
n’aimaient pas Chirac ont voté pour lui pour empêcher l’arrivée au pouvoir de
Jean Marie le Pen. Il en est de même aujourd’hui en Mauritanie, quelque
soient les critiques que l’on pourrait adresser à Birame. Il est donc important
de ne pas le laisser seul. En France, c’est la République que l’on défendait et
non Chirac. En Mauritanie, c’est l’égalité des citoyens, préalable à toute
émergence d’une nation que l’on doit défendre.
La France a une longue tradition
démocratique, elle a donné au monde des valeurs essentielles, il n’en demeure
pas moins, qu’aux dernières élections, on n’avait le choix qu’entre François
Hollande et Sarkozy. De Gaulle doit se retourner dans sa tombe. Mendes France
doit prier Dieu pour la fin de la souffrance de son peuple.
L’heure est cruciale, il faudra
mettre de côté ses sentiments et être lucide. Mandela disait :
« Etre libre, ce n'est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c'est
vivre d'une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. »
C’est donc pour le combat de la liberté
que j’écris cet article. J’ai toujours été proche de Birame non par sa
manière de faire, ni par son génie mais pour la cause qu’il défend et son
courage. J’assume donc mes idées car l’histoire est le seul juge des hommes.
Je prends toujours mes responsabilités
quand il le faut, même si je ne suis pas compris. Ce qui est important ce
n’est pas d’être compris mais d’être fidèle à ses idées même si on se trompe.
Il faut accepter de les assumer devant l’histoire.
Mon combat est celui de la liberté,
ma liberté, la liberté de chaque être humain. « C'est quoi une vie d'homme
? C'est le combat de l'ombre et de la lumière… C'est une lutte entre l'espoir
et le désespoir, entre la lucidité et la ferveur… Je suis du côté de
l'espérance, mais d'une espérance conquise, lucide, hors de toute
naïveté. [Aimé Césaire]
Oumar Diagne,
Ecrivain
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