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17 Mai 1959 & 13 Mai 1977
Premières élections à l’Assemblée
nationale
&
Accord de
défense mutuelle entre la
Mauritanie et le Maroc
Le 13 Mai
1977, un accord de défense mutuelle entre la Mauritanie et le Maroc,
est signé à Nouakchott par
Ahmed Laraki, ministre d’Etat marocain aux Affaires étrangères et Ahmed Ould
Mohamed Salah, ministre d’Etat à la souveraineté interne [14].
Il prévoit l’installation de 1.200 à 1.500 militaires marocains en territoire mauritanien
[15]
et a été très préparé.
Déjà, depuis le début de l’année, avaient
lieu des opérations conjointes, telle le 3 Janvier un « ratissage »
entre Metlani, Bou Craa, Smara, Amgala et Guleta. Mais la concertation
s’institutionnalise, à partir du 28 Mars, quand Ahmed Ould Mohamed Salah se
rend à Marrakech, accompagné du colonel M’Barek Ould Bouna Moktar, ministre de la Défense et du lieutenant
colonel Ahmed Ould Bouceïf, chef d’état-major national. Le 10 Mai, Ahmed Ould
Mohmaed Salah et Mohamed Ali Cherif, secrétaire général de la présidence de la République reviennent à
Rabat et font le bilan de la coopération militaire : l’assistance marocaine
ne peut suffire à tout, et notamment n’empêche pas le départ de l’assistance
technique française à la S.N.I.M.
sur le site de Zouératte [16]
et la veille de la signature, le colonel M’Barek Ould Bouna Moktar, ministre de
la Défense les
relayait auprès d’Hassan II. Six
semaines plus tard (les 20 et 21 Juin), se tient à Nouakchott, la première
réunion du Haut comité de défense maroco-mauritanien [17],
sous la présidence de Moktar Ould Daddah. La délégation marocaine est
imposante : le Premier ministre Ahmed Osman, Ahmed Laraki, ainsi que les
ministres des Finances, des Travaux publics, le secrétaire d’Etat à l’
Intérieur, et le secrétaire général de la Défense nationale.
L’accord
mauritano-marocain a été directement provoqué par l’attaque de Zoueratte par le
Polisario, le 1er Mai. Six Français ont été enlevés et un couple de
médecins tués. Dès le
lendemain, un DC8 affrêté par la
SNIM rapatrie en France 157 femmes et enfants (sur un
effectif total de 187 femmes et 262 enfants). Le ministre français des Affaires
étrangères, Louis de Guiringaud, met en cause des forces d’agression qui viennent d’un pays
voisin, mais le voyage prévu de Robert Galley, ministre de la Coopération n’est pas
remis. Le Monde titre « la Mauritanie en danger » et donne un entretien
avec le président Moktar Ould Daddah. L’ambassadeur de France à Nouakchott,
Michel Removille, est reçu par le Président de la République :
« cette épreuve
commune ne peut que contribuer à renforcer l’amitié qui existe entre les deux
pays ». Le 4 Mai, plus
de 1.500 soldats mauritaniens s’établissent pour barrer la route d’Atar à une
colonne de 400 Polisario venant de Zouératte. Ceux-ci se retirent mais avec de
nouveaux otages. Le surlendemain, le 6 Mai, Robert Galley est en Mauritanie. Le
président Moktar Ould Ddah lui précise ne pas souhaiter d’aide militaire en
personnel, mais des instructeurs et des ventes de matériels et d’armements. Ce
qui est aussitôt entendu, tandis que de son côté, le roi Hassan II reçoit Ahmed
Ould Mohamed Salah et Mohamed Ali Cherif et que la France demande officiellement
à Kurt Waldheim, secrétaire général des Nations Unies, d’intervenir pour la
libération des otages. Sa réponse ne peut qu’irriter la Mauritanie, il aurait
assuré, le 11, à l’Algérie « sa totale disponbilité pour rechercher les conditions d’une
solution pacifique et juste du problème du Sahara occidental ».
Co-président du « Club des amis du
Sahel », Moktar Ould Daddah est à Montréal les 31 Mai et 1er
Juin pour ensuite déjeuner avec le président Giscard d’Estaing à Paris. Questionné
sur une aide sénégalaise, il élude [18],
puis s’entretient le lendemain avec le Roi à Rabat. Se succèdent à Nouakchott
les fidèles voisins : les 16 et 17
Juin, Moussa Traoré en visite d‘amitié de Moussa Traoré [19],
puis les 18 et 19, le Premier
ministre sénégalais, Abdou Diouf en visite privée.
Le
9 Juin, « dans la simplicité et le recueillement, fête des forces armées
et de sécurité » : Chaab titre sur « une armée qui a mérité la
confiance ». Le 22, le Président de la République procède à
l’Ecole inter-armes d’Atar au baptême de la promotion
« colonel-Soueïdatt ». L’Ecole est dirigée par le colonel Ahmed Salem
Ould Sidi. Est-ce la dernière rencontre entre le fondateur de la légitimité
mauritanienne et l’un des martyrs de celle-ci ? (Le Calame du 11 Mars 2008 – chronique aniversaire de la tentative
du 16 Mars 1981). Le
lendemain, à Paris, Robert Galley déclare à l’Association française des
journalistes que « la situation en Mauritanie est
dangereuse ». De fait, le 3 Juillet, juste après une visite du colonel
Dlimi, homme de confiance du Roi, nouvelle attaque du Front Polisario contre
Zoueratte coordonnée avec une nouvelle tentative contre Nouakchott. Celle-ci
avat été déjouée dans la nuit, le commando étant connu mais non repéré depuis
l’avant-veille. Le Front Polisario communique : « maître du terrain et attaquant où et
quand elle veut, l’armée populaire de libération sahraouie s’oppose à
l’agression maroco-mauritanienne » mais la
République sahraouie essuie un nouvel et spectaculaire échec
diplomatique au sommet de l’Organisation de l’Unité africaine à Libreville,
qu’elle avait cherché à impressionner. Une troisième attaque contre Zoueratte
est lancée les 15 et 16 Juillet : sept heures de combat, cinq tués côté
mauritanien, trente-sept côté sahraoui. Le 17, un avion Défender piloté
par le lieutenant-colonel Abdelkader est abattu par le Polisario au nord-est de
Zoueratte ; il peut se poser en catastrophe et cet autre futur martyr de
la légitimité (Le Calame du 11 Mars 2008 – chronique
aniversaire de la tentative du 16 Mars 1981), peut être recueilli par l’armée.
Pendant la bataille-même, d’importants changements sont effectués à la
tête de l’armée mauritanienne « pour améliorer la qualité de
l’encadrement supérieur par souci d’efficacité ». Le colonel M’Barek Ould
Mohamed Bouna Moktar, ministre de la Défense
cumule sa respoonsabilité gouvernementale avec la fonction de chef de l’état-major national. Le colonel
Viah Oud Mayouf, jusques-là ministre de la Construction, reprend
le commandement de la Tiris
el Gharbia. Le colonel Ahmed Ould Bouceïf quitte la position de chef
d’état-major pour la région militaire du Nord, et le colonel Mustapha Ould
Mohamed Saleck quitte la direction de SONIMEX pour le commandement de la région
d’Atar.
Ainsi l’accord de défense conclu avec le
Maroc n’est nullement une inféodation mauritanienne [20]
; tout au contraire, la
Mauritanie y gagne davantage d’initiative stratégique sans
rien perdre d’un jeu diplomatique supérieur [21]
à celui de Rabat où l’on pâtit des vieux antécédents de la revendication sur
l’ensemble du Sahara jusqu’au fleuve Sénégal et à Saint-Louis et de la
non-ratification du traité de Tlemcen signé en 1972 avec l’Algérie. La Mauritanie, un an avant
le pustch du 10 Juillet 1978 – qui peut être considéré comme une
« anti-fondation » – est encore intacte. Clôturant, le même 15
Juillet 1977, la session ordinaire de l’Assemblée Nationale, son président,
Abdoul Aziz Sall déclare qu’ « il existe un Etat mauritanien et un état d’esprit mauritanien. La
guerre, que nous ne souhaitons pas, ne fait que renforcer l’un et l’autre ».
:
[1] - il avait auparavant existé, dans chacune des colonies
françaises d’Afrique occidentale, un conseil général, équivalant d’une
« assemblée représentative territoriale », institué par décret du 25
Octobre 1946, mais un décret, antérieur de trois jours, avait imposé la
condition de savoir lire et écrire en français pour être candidat à cette
institution élective
[2] - l’UPM confirme la défaite du premier député de
Mauritanie, l’année précédente : Horma Ould Babana en obtienant 17 sièges
tandis que l’Entente, le parti de celui-ci n’en emporte que 4 et les
indépendants 3
[3] - les abstentions passent de 42% en 1956
(pour la réélection de Sidi El Moktar N’Diaye comme député à l’Assemblée
nationale française) à 28, 60% et l’U.P.M. emporte 33 sur les 34 sièges (le
dernier allant à un indépendant) par 250,000 voix contre 13,000 à des listes
d’opposition (Bloc démocratique du Gorgol, Union pour la défense des intérêts
du Guidimaka, Indépendants)
[8] - 28 Février 1959,
circulaire du secrétaire général du PRM sur les "contacts
politiques" avec la Nahda
[9] - le 20 Mai 1959, soit trois jours après
le scrutin, Radio-Dakar diffuse un
communiqué de la section PRM de Dakar favorable à la Fédération du Mali, communiqué émanant de ses cinq
délégués eu Comité exécutif du parti – à quoi réplique dès le lendemain et par
écrit, Moktar Ould Daddah en tant que secrétaire général du PRM : " votre communiqué constitue un appel public à la dissidence du Parti …
des membres du Comité exécutif jugent utile de faire rebondir une affaire que
nous pensions avoir clarifiée et résolue pour de bon, et cela parce que
d'aucuns se croient lésés lors des dernières investitures "
[12] - avec pour bureau provisoire : Hadrami Ould
Khattri, président - Hassane Ould Salah, secrétaire général - Abdallahi Ould
Limam, trésorier général - Mohamed Ghali, presse et propagande
[13] - session extraordinaire du 6 au 13 Avril 1964, entérinant
les décisions de ce congrès, lui aussi extraordinaire par rapport aux statuts
initiaux du Parti du Peuple mauritanien
[14] - il ne sera confirmé à Rabat et à
Nouakchott que le 18 Juin sous l’appellation d’ « accord d’assistance
mutuelle en matière de défense »
[15] - ce ne sera que les 18 et 19 Juillet, que transporté par 3
Hercules 130, arrivera à Zoueratte le
premier bataillon marocain à Zoueratte :
600 hommes. Les troupes marocaines sont présentes désormais à Dakhla, Bir Oum
Greïne, Aïn Ben Tili et Nouadhibou mais le nouveau commandant de la région
nord, le colonel Ahmed Ould Bouceïf indique qu’ « aucune tâche
particulière ne leur a encore été assignée »
[16] - évaluée à 276 agents pour la S.N.I.M., auxquels ajouter
ceux employés par COMINOR, soit au total 320 Français
[17] - créé le 13 Mars précédent, il
n’existait jusques-là que sur le papier
[18] - le 30 Avril précédent, l’Algérie avait qualifié de très dangereux l’éventuel
soutien militaire sénégalais à la
Mauritanie – le 26, en effet, des propos d’Assane
Seck, ministre sénégalais des Affaires étrangères, avaient présenté le renforcement
militaire de son pays comme une aide possible aux troupes mauritaniennes à la
frontière nord
[19] - ce qui est suivi, le 18 Juillet, à Nara
au Mali), d’une rencontre d’Ahmed Ould Mohamed Salah avec le ministre malien de
la Défense au
sujet des infiltrations du Polisario
[1] - Moktar Ould Daddah révèle dans ses mémoires : La
Mauritanie contre
vents et marées (Karthala
. Octobre 2003 . 669 pages), p. 477 qu’« il s’est
agi d’abord d’une disposition spéciale de l’accord de défense signé à Nouakchott, entre nos deux pays, le 3 Mai
1977. Il s’agit de la disposition selon laquelle si l’autorité légale de l’une
des parties est dans l’impossibilité d’agir normalement pour requérir
l’intervention de l’autre, cette dernière interviendrait automatiquement. Voyant
dans cette disposition un abandon de souveraineté, je l’ai refusée contre
l’avis de tous mes collaborateurs. Pour me convaincre, le Roi m’a cité son
propre exemple à Skhirat où, pendant plusieurs heures, il lui était impossible
de donner le moindre ordre. “... Si
j’avais eu un allié auquel j’aurai été lié par la clause que je vous propose,
il m’aurait automatiquement secouru et délivré ...”. Par fidélité aux principes et par jalousie de
l’indépendance et de la dignité de mon pays, j’ai maintenu mon refus et la
clause en question n’a pas été incluse dans l’accord. »
[1] - Moktar Ould Daddah le fait remarquer, op. cit. p. 476 : « Je dois à la vérité de dire que, durant cette période,
combien cruciale pour nos deux pays, le comportement du Roi à notre égard
futest irréprochable. Bien sûr nous sommes alliés, mais deux alliés dont l’un
est faible, menacé dans son existence même puisque l’ennemi concentre ses
attaques contre lui pour l’abattre en tant que maillon faible de l’alliance.
Donc, un allié faible qui, pour résister, est obligé de faire constamment appel
à l’autre allié, le plus fort, pour lui demander son aide en moyens humains et
matériels.
Durant cette période - combien
pénible pour nous -, le Roi ne cessa de faire preuve de délicatesse, de finesse
psychologique. Il comprenait parfaitement ma grande gêne d’être sur le plan
militaire toujours en position de demandeur. Aussi, avec beaucoup de savoir
faire, s’employa-t-il à me mettre à l’aise. C’est ainsi qu’à chaque rencontre,
il me répétait : “... en aidant la Mauritanie à se défendre, j’assure la défense
éloignée du Maroc. En vous aidant à défendre Zoueratte ou Nouadhibou, je
défends Agadir, Marrakech ou même Rabat... » Ce leitmotiv revient
constamment, non seulement dans nos tête-à-tête, mais aussi en présence de nos
collaborateurs civils et militaires.
Mais, si nous étions plus
faibles militairement que nos alliés, il n’en était est pas de même sur le plan
diplomatique. En effet, grâce à la crédibilité dont jouit notre pays à
l’extérieur et, particulièrement en Afrique, crédibilité sans commune mesure
avec son poids spécifique, grâce aussi aux solides liens d’amitié qui me
liaient à un grand nombre de collègues pour plaider le dossier saharien devant
les instances et les gouvernements africains. La République Islamique
de Mauritanie était beaucoup mieux placée que le Maroc pour plaider le dossier
saharien devant les instances internationales et les gouvernements
africains. Ainsi, par exemple, à l’Ile
Maurice, en 1976, c’est grâce à la délégation de la République Islamique
de Mauritanie fermement soutenue par des délégations amies - celle du Maroc
étant absente - que le sommet a rejeté le projet de résolution proposé par le
Conseil des Ministres, projet qui condamnait la politique saharienne du Maroc
et de la Mauritanie. Le
Président Senghor joua un rôle déterminant dans la discussion de la question.
Ce rôle diplomatique de la Mauritanie, Hassan II
le reconnaissaitt sans complexe et le mettait en exergue. Il en faisait un
second leitmotiv qu’il répètait aussi souvent que le précédent, toujours dans
le but de me mettre à l’aise. Fréquemment, il rappellait le que la guerre qui
nous est imposée par l’Algérie comporte deux volets complémentaires aussi
importants l’un que l’autre : le volet militaire et le volet diplomatique. Le
Roi précisait en effet que “... si le Maroc a plus de moyens humains et
matériels, la
République Islamique de Mauritanie a une diplomatie
particulièrement dynamique et efficace ... Donc, chacun des deux alliés
supporte bien sa part du fardeau commun...”.
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