après-midi du vendredi
26 Décembre 2014
Ouad Naga en
Janvier 2005, concluant la série des procès et arrestations politiques
inaugurée par Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya en 1987. L’autre trame avait été la
répression – atroce – des soi-disant complots toucouleurs. Et la troisième
avait été l’ « échange » de pogroms de part d’autres du Fleuve,
atrocités contre les commerçants maures au Sénégal, attisées par un Abdoulaye
Wade alors opposant à Abdou Diouf, puis chasse aux Noirs par des harratine
encore sous commandements de soi-disant maîtres : Nouadhibou, Nouakchott.
Catastrophes sociales et cependant l’unité nationale avait survécu, et le
régime ne mourut que de mort par euthanasie. Le procès, de simple politique,
devint celui d’une dictature de vingt ans, les réquisitoires ne furent pas
suivis, l’emprise avait subitement cessé. Dans les mois qui vinrent ensuite
rapidement, une affaire – dont la matéralité et la chronologie restent à
élucider –fut le prétexte pour les deux sécuritaires de l’époque, les colonels
Mohamed Ould Abdel Aziz et Ely Ould Mohamed Vall : la mort du roi Fahd et
un putsch tranquille, qu'on avait d'abord prévu de perpétrer quelques jours plus tard que sa date de hasard, pendant le voyage présidentiel au Hodh Chargui.
Aujourd’hui,
le procès touche au profond et à l’être mauritanien. Les questions sont
sincères. Ce qui s’expliquait depuis la fin des années 1950 et le mouvement de
fusion des forces politiques, à la suite de l’indépendance, en termes ethniques
et nord sud, les gens du Fleuve, les sédentaires, des enseignants francophones
s’estimant débordés et en voie de submersion par les Maures, les
« beidanes », les Arabes (la question berbère depuis la
« colonisation » française, surtout au Maroc méridional et en Algérie
orientale, complètement occultée et diabolisée). Cela se résorba-t-il ? l’autorité
et le prestige tutélaire du père-fondateur faisait miracle mais aussi silence.
Réveil : une vente d’esclave, une jeune fille, au marché d’Atar, une
protestation vive et déjà de solidarité sociale, le fondateur d’El Hor en 1978,
préfet de Rosso en 1980 tandis que se fait un procès, non aux commerçants de la
honte mais aux dénonciateurs (« remake » depuis 2008, les pratiquants
et persévérants en exploitation servile parmi les plus publics, sont apparentés
à l’actuel dictateur…), et la junte, que préside en moeurs collégiales, Mohamed
Khouna Ould Haïdalla proclame l’abolition de l’esclavage. Mais rien ne suit, et
surtout pas une réforme foncière approfondie. Des oulémas publient une
consultation de bon sens : la piété et la foi religieuse ne peuvent être
une propagation et une justification de l’esclavage.
Depuis Biram
Dah Ould Abeid - dont il n’est toujours pas éclairci à qui ses révoltes et ses
manifestations spectaculaires, sinon provocatrices, « servent » ou ne
« servent » - quelque chose de nouveau est en route :
l’esclavage persistant dès que le garant de la loi de Septembre 2007 a été renversé, Sidi
Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, l’interrogation éclate. Le fondement de cette
pratique ne serait-il pas dans une interprétation, plus que discutable, de
l’Islam en Mauritanie ? et cette pratique-même est-elle celle des Blancs
seulement ? ne se retrouve-t-elle pas au moins chez les Poulaar ?
D’un débat sur les possibilités de carrière dans la fonction publique
mauritanienne naissante des années 1960, que Moktar Ould Daddah sut empêcher de
dériver vers des pétitions micro-nationalistes (fédération, sinon sécession,
exigée ! par des originaires de la vallée du Fleuve), on est venu à
secouer les colonnes du temple : l’Islam fauteur d’injustice, de discrimination.
Alors même que la dernière décennie dew Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya –
délibérément ou par évolution sociologique naturelle, pacifique même – voyait
des descendants d’affranchis et d’esclaves parvenir aux plus hautes fonctions
de l’Etat, un Premier ministre, un président de l’Assemblée nationale considéré
même en 2009 comme le possible candidat à l’élection présidentielle aussi bien
de l’aristiocratie de Haute-Mauritanie que de l’immense classe anciennement
servile et totalement métissée de sang et de culture, la dictature en permettant
le viol des textes les plus impératifs casse quelque chose.
Quoi sera le
plus solide, l’excitation – provoquée par une tardive résolution européenne – d’un
nationalisme de race et de classe, accaparant la nation entière sous un drapeau
étriqué que brandit, en cache-sexe la dictature ? et son propre
accaparement, non plus mental, mais matériel et financier du pays ? ou
bien le bon sens ? Le péril n’est pas la question abrupte : quoi donc
cimente le pays, quoi donc met en danger la cohésion ? quels remèdes pour
une égalité véritable ? il est dans le schéma éculé d’un anticolonialisme
qui, pour la Mauritanie,
n’a pas la moindre lettre de noblesse. D’ailleurs, aussi bien la réelle et
courageuse résistance armée à la pénétration française, plus dans les années 20
ou 30 que 5 ou 10 du dernier siècle, que le hamallisme voire le parcours de
Horma Ould Babana restent à étudier, et donc à écrire et à vulgariser. A enseigner
en même temps qu’il faut enseigner la fondation et ses piliers à l’époque
sereine de Moktar Ould Daddah. A cela (ce dernier point), je puis – modestement
et parcellairement – contribuer, esquissant des cadres qu’enseignants,
patriotes et universitaires mauritaniens pourront remplir.
Il y a aussi à
étudier comment se maintient une dictature. On sait comment en Mauritanie elle
s’établit : très peu d’officiers, abusant de la solidarité d’une majorité
d’autres, intimidant les résolus, les légalistes (analyse pour 1978 comme pour
2008, toujours l’été, toujours la justification orgueilleuse que ce que l’on
renverse est lamentable, corrompu, à bout de source et de course et que ce que
l’on établit est voulu par le peuple, et n’est que restauration, « rectification »),
et le concours de civils (les noms pour 1978 et maintenant pour 2008 sont
connus…). On croit savoir comment elle se finit : par l’établissement d’une
autre… numéros de dictature, comme il peut y avoir la numérotation des Républiques…
Mohamed Ould Abdel Aziz ne fait plus de la corruption de son entourage ou des
services de renseignement : les moyens de Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya, sa
manière de demeurer au pouvoir. Les anciens moyens sont simplement les agents
de sa fortune personnelle, matérielle, financière. Non, il commence à présent
dans le mental, la pire corruption pour un pays. La France en vit une autre
version, encore plus perverse. Ce n’est pas directement notre sujet de maintenant
quoique le putsch de 2008 et sans doute celui de 1984 doivent beaucoup à l’ancienne
métropole… Cette corruption, moyen désormais de Mohamed Ould Abdel Aziz pour
tenir, va être, a commencé d’être le nationalisme le plus étroit, étroit en
substance intellectuelle, étroit en couches sociales appelées à le pratiquer –
une façon déjà tentée par les Afrikaner à partir de 1948 selon le système Malan
de l’apartheid, une minorité raciale et intellectuelle accapare tout un pays,
toute une histoire, au lieu d’assumer le beau rôle d’une mise en valeur des
ressources humaines et matérielles d’un mpays magnifique… Nationalisme et aussi
conception mnémo-technique de la religion, obscurantiste, nullement
spirituelle. Ni fondée scripturairement, ni réfléchie avec culture et
critiquée, ni priée selon la recommandation-même du Dieu de toute compassion,
de toute justice.
Apparemment,
le dictateur jouerait le simplisme et le bas-ventre. Je crois au contraire qu’il
se passe le noeud coulant, encore lâche, autour du cou qu’il a gras selon les
caricatures que nous donnent le Coran et la Bible des repus, des accapareurs…
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