Certains prêchent la patrie des Françaises
et Français pour qu’elle retrouve le chemin de la foi.
Qu’entendent-ils par là ? et comment
sont-ils compris ?
Les racines chrétiennes de la France que je suis de
Clovis à ces manifestations depuis longtemps – pillule et avortement – ou
contre la possibilité légale du mariage et des filiations ouverte à tous,
quelque orientation amoureuse que l’on ait ? Une lecture historique de la
paix sociale et du défrichement, du bâti des sols de la France de la chute de
l’Empire romain à l’union du trône et de l’autel ? Les scandales
procéduraux que furent les exécutions de Jeanne d’Arc ou du chevalier de La Barre ? Les guerres de
religion, l’affaire Dreyfus ? des supériorités par le nombre ou par les
institutions que légitimeraient une conception du christianisme à imposer aux
compatriotes et aux autres, comme si soi – en chacune des Français, en chacun
des Français – n’était pas un champ de bataille suffisamment ardent et
périlleux pour que l’emporte la générosité sur l’égocentrisme ? La lecture
des faits doit elle enfermer l’avenir ou en être le terreau accueillant.
Métissage et actualité. D’autres races et
d’autres prières, d’autres origines viennent à la France, à son sol, à son
histoire. Je suis métisse, dit la
France comme la belle du Cantique dit à son aimée qu’elle est
noire de peau et de corps. L’actualité n’est pas inerte, elle est un produit.
La volonté d’une nation, d’un pays, d’un accueil n’est pas une décision mais
une prise de conscience.
La foi, les Françaises et les Français de
tous âges, la plus jeune de leur génération en osmose avec les moyens de
communication, de recherche, de création produits par les techniques de
maintenant, et les plus anciennes avec leur vague mémoire de la Résistance et de la Libération, leur
souvenir divers de « Mai 68 » voire des mouvements de
Novembre-Décembre 1995, la foi en moi, la France, la France universelle de toutes époques, exemplaire
et belle comme la princesse des contes chère à de Gaulle, dressée comme
l’incarnèrent Clemenceau ou Hessel, foi et France existent et se sont
manifestées dimanche.
A l’appel du sang et des circonstances.
Même les trois assassins qui remplirent le vide intérieur auquel sans doute
nous les avions acculés par la passion d’un châtiment et d’un recommencement
ont eu une foi française, version djihadiste, comme il y eut une foi française,
version colonialiste, version Collaboration, version O.A.S., comme il y a en version vocation religieuse
et imagination des structures d’une charité efficiente, celle des saints
fondateurs comme Coluche et l’abbé Pierre, d’une prière des rues et du métro à la Madelein Delbrêl.
La foi des héros, des enfants et des jeunes femmes fusillés ou torturés, des
gloires de France en 1879-1871 ou 1941-1945.
Chemin de la foi, chemin vers Dieu,
l’échelle humaine que sut écrire Léon Blum ou mains jointes de l’espérance
selon Brasillach et Aragon, la conscience de France et de ce qui unit
Françaises et Français en moi, quand ils viennent marcher en silence, se
signalant les uns autres du début ou de l’aboutissement de leur cortège :
la foi, elle existe en France. Le cortège où notre fille et moi faisions
mélange avec tous, quand il longeait à Vannes les remparts beaux et célèbres,
les parterres végétaux et l’eau des anciennes douves était autant foi que
rempart, contre l’horreur des folies. Le désespoir est chemin de mort. Le
martyr n’a de fécondité que pour la liberté.
Monument à Spassk pour les
« malgré-nous » inhumés si loin de la patrie, pensée pour les trois
assassins de la semaine dernière, gloire et bonheur du rassemblement en toutes
villes et villages dimanche. Foi en la France parce qu’elle vient de France, qu’elle
vient de loin, qu’elle est actuelle et qu’elle exige à présent de toute fille
et de tout fils de France, à peine né ou dirigeant notoire en morale, en
religion, en économie, en intelligence, en politique : un dépassement, une
ouverture. Le cœur et la foi s’écoutent.
Ce qui était défi, caricature et rigolade
et pouvait se critiquer, faire choc a connu son fruit et sa mûe. Dans le sang
au sol des échafauds, il y a le foulard qu’on trempe, il y a le ciel blanc des
matins encore sans date et il y a le bleu qu’à l’air libre le soleil donne à
midi au zénith.
France et Français, chrétiens de toutes
espèces, croyants ou incroyants juifs et musulmans, défroqués ou franc-maçons,
distraits ou pieux, nous voici, depuis dimanche, au constat de ce que nous
sommes. Debout, en marche, en foule, à l’unisson, en prière donc.
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