vendredi 28 décembre 2012

congrès de l'U.F.P. - rapport moral en ouverture



Au nom d’Allah, le Clément et le Miséricordieux
Rapport moral du Président du Parti,
Mohamed Ould Maouloud,
au IIIe Congrès de l’UFP

Messieurs les Présidents de la Mauritanie digne et souveraine
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale
Monsieur le Leader de l’Opposition Démocratique
Messieurs les Premiers Ministres et Ministres
Excellences Messieurs les Ambassadeurs
Mesdames et Messieurs les Présidents et représentants des organisations et partis frères et amis de notre sous-région
Monsieur le Président de la Communauté Urbaine de Nouakchott,
Messieurs les Maires
Mesdames et Messieurs les Présidents et représentants des organisations politiques et partis mauritaniens,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Représentants des organisations de la société civile
Messieurs les représentants de la presse nationale et internationale
Honorables invités
Camarades Congressistes
Chers amis
C’est pour moi un grand honneur d’avoir à vous remercier de votre présence à l’ouverture du IIIe Congrès de notre parti, et à souhaiter à tous un bon séjour parmi nous particulièrement à nos hôtes étrangers et aux délégués du Parti venus de loin.
Dans ce rapport que je voudrais concis, laissant le soin aux congressistes d’en discuter et en approfondir les analyses, interrogations et suggestions, je voudrais d’abord rendre compte du chemin parcouru dans la construction du parti depuis le IIe Congrès en avril 2005 ; pour ensuite faire un tour d’horizon sur le contexte général international, sous-régional et national nécessaire pour saisir la portée des grandes questions de l’heure qui nous préoccupent.
Mais auparavant, qu’il me soit permis, au nom du Bureau National, de donner une explication au Parti et à l’opinion concernant le retard pris par rapport à la convocation du présent congrès. Elle tient en fait en un mot : la primauté donnée à l’urgence politique nationale par rapport à l’intérêt spécifique du parti. Depuis le coup d’Etat qui renversa Maawiya Ould Sid’Ahmed Taya en 2005, notre pays est pris dans une tourmente dangereuse. Une situation qui bouleversa tous les projets, programmes d’activités et échéances des instances de notre parti. Pour mémoire rappelons la transition 2005-2007 et ses élections municipales, législatives et présidentielles, la très courte parenthèse de normalisation démocratique (2007-2008) suivie par un nouveau coup d’Etat militaire, fomentée par le même duo d’officiers putschistes qui régentent le pays depuis 2005, aussitôt combattue par une résistance ouverte et massive sans précédent qui déboucha sur un accord de sortie de crise, l’Accord de Dakar, resté lettre morte, et par l’aggravation de la crise politique jusqu’à la confrontation actuelle.
Trois mois avant le putsch d’août 2008, nous avions pourtant décidé un programme donnant la priorité à la campagne de renouvellement des adhésions, prélude indispensable au congrès ordinaire. Cette campagne était avancée au moment du putsch. L’agenda du parti se trouvait subitement en contradiction avec l’agenda du pays. Fallait-il continuer la campagne du parti ou donner la priorité à l’urgence nationale, à la campagne de lutte contre la mise à mort de notre démocratie naissante ? Un parti patriotique comme le notre ne pouvait laisser passer cette humiliation supplémentaire de notre peuple, traité en peuple-enfant, et ses intérêts majeurs objet du jeu d’une poignée de conjurés.
Sans hésiter, nous avons donné la priorité, dans nos moyens modestes, nos ressources humaines et notre temps, à la priorité nationale de mettre en échec le coup d’Etat. L’épreuve de l’instabilité continua jusqu’en 2010, échéance prévue pour le IIIe  Congrès. C’est seulement à la fin de 2010 que nous avons pu, non pas parachever la campagne de renouvellement laissée en plan et devenue caduque, mais organiser une nouvelle campagne qui a duré près d’un an et demi, et qui vient de nous permettre de tenir nos assises actuelles.
Avons-nous bien fait de donner la priorité aux urgences nationales ? A vous d’en juger, camarades congressistes. Quant à nous, nous le pensons, car tout en servant notre pays nous avons aussi fait monter la cote de crédibilité du parti et partant élargi sa base et ses alliances.
Honorables invités, Camarades Congressistes, Chers amis,
Durant la période écoulée depuis le IIe congrès en avril 2005, notre parti s’est préoccupé de quatre questions : élargir et consolider le parti notamment à travers les campagnes électorales et la campagne d’adhésion, combattre le putschisme militaire, construire la plus large unité possible de l’opposition démocratique, veiller en permanence à la préservation de la stabilité et de la paix civile et soutenir, au quotidien, les revendications et luttes légitimes de nos populations.
Depuis 2005, notre parti a conquis une place de premier plan dans la scène politique. D’abord à travers les élections législatives et municipales de 2006 à l’issue desquelles l’UFP devint le deuxième parti à l’Assemblée nationale après le RFD avec 9 députés, compte non tenu de la masse des indépendants. Si à Nouakchott nous n’avons pu être en tête dans aucun arrondissement de la capitale, nous sommes par contre le seul parti d’opposition à avoir conquis des communes à l’intérieur du pays. Neuf communes toutes arrachées de haute lutte au tenant de l’ordre établi, dont une capitale régionale (Tidjikja) , en alliance avec des partenaires locaux, deux chefs lieux de départements (Boghé et Barkeol) et des communes rurales dont certaines du fameux triangle dit de la pauvreté (Moït et Takobra), dans un monde rural, traditionnellement domaine réservé des pouvoirs dominants.
C’est dire combien est fausse l’impression généralement véhiculée sur le compte de notre parti, bien souvent par méconnaissance ou méprise, selon laquelle on le présente comme un parti élitiste.
Il est vrai que notre résultat assez modeste (4%) à l’élection présidentielle quelques trois mois plus tard, en mars 2007, vint refroidir notre enthousiasme. C’est que l’enjeu était autre que celui des élections précédentes où nous nous sommes présentées dans un nombre limité de circonscriptions (une quarantaine sur 216). A l’élection présidentielle, on se bat à l’échelle nationale, dans toutes les communes. Nous ne disposions pas des ressources minimales pour affronter ce défi. De surcroît, notre candidat ne s’était jamais présenté à une élection et le Bureau National de juillet 2006 commit l’erreur d’en retarder l’annonce jusqu’au dernier moment, à un mois à peine avant le démarrage de la campagne présidentielle. Nous dûmes aussi faire face dans nos électorats potentiels à une vive concurrence surtout de caractère identitaire à laquelle nous n’étions pas préparés. Mais tout compte fait, le gain politique est appréciable. Notre parti devenait majeur, son nom et celui de son président et candidat, désormais connus par tous les électeurs. La rencontre avec les populations de toutes nos régions, des villes et des campagnes, est une expérience inoubliable qui nous fit découvrir une autre dimension de la politique que nous ignorions jusqu’alors.
Aujourd’hui, notre parti a l’expérience de la gestion de communes rurales, de villes moyennes et grandes, y compris la Capitale où nous disposons actuellement de maires adjoints dans cinq arrondissements sur les neuf qu’elle compte.
Notre parti s’est aussi élargi considérablement depuis le dernier congrès, à telle enseigne que les structures anciennes durent être réaménagées pour faire de la place aux nouveaux groupes et leaders d’opinions qui avaient adhéré au parti, en attendant la régularisation de leur statut par le renouvellement des adhésions.
A la dernière campagne de renouvellement des adhésions (2011-2012), l’UFP dérogea avec éclat à la vieille tradition PPMiste reprise par le PRDS, en tant que parti-Etat où les rivalités locales gonflent sans vergogne les rangs de ce parti de listes d’adhérents aussi infinies que fictives, et qui tend à se répandre et à rendre de nombreux partis accros de chiffres les plus élevés possibles de membres à afficher. Pour notre part, nous avons édicté des règles strictes devant garantir que les adhérents de notre parti soient des personnes en chair et en os, réellement volontaires et présentes sur les lieux. Ainsi, purent être implantées des sections dans 45 départements sur 53. Le nombre d’adhérents se chiffrant à plus de 20 000 citoyens.
Cette transformation de notre parti en véritable parti de masse, ouvert à tous les citoyens de toutes les couches de notre peuple, mission confiée par le IIe Congrès, est aujourd’hui en bonne voie mais pas encore suffisamment. Notre assise dans le monde rural, singulièrement au sein de la paysannerie pauvre et dans le monde ouvrier est relativement importante. Par contre, la mobilisation de la jeunesse et l’encadrement de notre base féminine laissent à désirer. Un redressement sur ce plan est vital et urgent.
Notre parti est aussi devenu mieux qu’avant 2005 un rassemblement patriotique qui traduit, par sa composition, l’image d’une nation en construction, riche de sa diversité ethnique et régionale, opposé à toutes les tentatives de division de notre peuple sur des bases raciales ou identitaires et qui regroupe des hommes et des femmes de toutes origines sociales, préoccupés par le salut du pays pris dans la tourmente de l’instabilité et les affres du sous-développement et de l’arriération. Seule la persévérance dans cette voie du véritable changement démocratique de notre société en faveur du plus grand nombre permettra au parti de raffermir et de parachever son édification en vue d’assumer son destin historique.
Honorables invités, Camarades congressistes, Chers amis
Notre parti a assumé avec les autres forces démocratiques et patriotiques la mission de faire sortir notre pays de l’ère des juntes militaires et des régimes de pouvoir personnel.
 Généralement, un coup d’Etat est toujours une aventure qui plonge le pays dans l’inconnu. Accompli contre un ordre non démocratique, ce peut-être compréhensible, voire tolérable, s’il ne fait pas courir au pays de graves risques. Ainsi en fut-il du coup d’Etat du 3 août 2005, bien qu’il soit intervenu juste au moment où la classe politique venait de se mettre d’accord, sur le principe de la tenue d’une table ronde des partis pour une sortie de crise qui rende possible l’alternance démocratique. En quelque sorte, le putsch ravissait l’initiative à la classe politique. Nous l’avons condamné pour le principe, tout en cherchant à obtenir sinon une gestion de la transition par les forces politiques, ce que nous avons réclamé le premier jour, du moins un processus concerté. Et, de fait, la transition fut relativement concertée et déboucha sur des élections transparentes et l’avènement du premier président élu démocratiquement, Monsieur Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi.
Le putsch du 6 août 2008 était par contre un assassinat cruel d’une démocratie naissante, bien sûr imparfaite, et qui rehaussait pour la première fois l’image de notre pays désormais présenté dans le monde arabe et même africain en exemple de démocratisation tranquille et prometteuse.
L’UFP n’avait pas attendu l’incendie pour mettre en garde contre les pyromanes. Dès le mois de juin, donc deux mois avant ce jour fatidique du 6 août, l’UFP était l’unique voix à s’élever et à dénoncer le projet putschiste. Nous voulions prévenir la catastrophe. Mais il eut fallu que notre voix ne restât pas isolée. Or, malheureusement, c’est ce qui advint et l’irréparable se produisit. C’est là une leçon à méditer par les forces démocratiques.
Dès la seconde heure du coup d’Etat et alors qu’il était encore en cours, nous l’avons dénoncé et appelé à la résistance sur les medias de masse notamment la chaine Al-Jazira. Cette position valut au parti l’estime de l’opinion et particulièrement celle des autres partis et forces démocratiques qui se retrouvèrent à notre siège le même jour, 6 août 2008, pour constituer le Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD). A partir de ce jour, nous nous sentions investis avec les autres démocrates et patriotes, de la mission de laver l’affront infligé à la volonté et à la dignité de notre peuple par un officier en rébellion, fort seulement du contrôle d’une unité armée, la garde présidentielle.
Pendant près d’une année, nous nous sommes battus contre le coup d’Etat, une première en Afrique. Pour obtenir, à la fin, à travers les accords de Dakar, les trois objectifs que nous étions fixés, à savoir : l’échec du coup d’Etat par la restauration de principe du Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, la libération de son premier ministre et de ses compagnons, l’annulation du processus électoral unilatéral du 6 juin 2009 et l’ouverture d’un nouveau processus de 43 jours dirigé par un gouvernement d’Union nationale. L’enjeu de la bataille contre le coup d’Etat était donc gagné. Nous avons ainsi réussi là ou d’autres peuples, suivant notre exemple dans la même période, n’ont pas réussi bien que jouissant d’un soutien international plus consistant. Ce fut le cas de Madagascar avec les Accords de Maputo et du Honduras et son compromis mirage.
Par contre nous avons perdu la bataille du processus électoral prévu par l’accord parce que nous avons laissé passer un nouveau putsch, cette fois commis par le premier ministre contre l’Accord de Dakar dès le 28 juin, c’est-à-dire au lendemain de son entrée en fonction, à travers la convocation unilatérale et illégale du corps électoral le 18 juillet, écourtant ainsi une transition déjà trop courte, de 43 à 21 jours. Par la suite il refusa de mettre en œuvre toutes les autres dispositions de l’Accord, mise à part l’organisation du scrutin. Les candidats de l’opposition à l’élection présidentielle crurent déjouer une manœuvre visant à les pousser au boycott et à laisser le champ libre à leur adversaire, et sûrs de leurs chances électorales, ne réagirent pas à ce qu’ils estimaient n’être que des provocations d’arrière-garde. Le résultat, on le connaît : la victoire illogique politiquement et électoralement de celui-ci dès le premier tour, exactement comme le pronostiquaient ses proches.
C’est ce sabotage de l’accord de sortie de crise conclu à Dakar le 2 juin 2009, qui est à l’origine de la persistance actuelle de la crise politique née du coup d’Etat d’août 2008.
Pour éviter une confrontation violente, nous avons cherché à obtenir la mise en œuvre de l’accord de Dakar notamment dans ses dispositions relatives à la poursuite du dialogue sur les questions de fond : les mesures pour réorganiser l’armée sur des bases républicaines, le rééquilibrage des pouvoirs constitutionnels, un processus électoral consensuel et le point d’orgue, la définition d’une forme de partenariat dans la gestion du pouvoir dans cette étape, considérée par tous les signataires de l’Accord comme une transition vers un ordre démocratique stabilisé.
Pour cette bataille, nous avons, avec nos autres partenaires du FNDD et du RFD du président Ahmed Ould Daddah, le leader de l’opposition démocratique, créé une nouvelle alliance : la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) qui s’est battue de 2009 à 2012 pour la mise en œuvre de la clause sur le dialogue prévu par l’Accord de Dakar. Le reniement de cet Accord par le pouvoir a conduit à l’impasse et à la confrontation actuelle.
Honorables invités, camarades congressistes, chers amis,
Depuis 2005, le monde qui nous entoure a beaucoup changé. Des mutations considérables sont en cours.
En Occident, ces mutations du vieux capitalisme débouchent sur une crise profonde à travers notamment la crise dite des dettes souveraines, qui explique la dépression en Irlande, en Espagne, au Portugal, en Grèce et en Italie et les graves menaces qui pèsent sur les autres puissances européennes. Ce sont des centaines de milliers de jeunes, de femmes et de travailleurs qui tombent dans le chômage, sont dépossédés de leurs biens et recourent à une résistance multiforme. Les grèves des ouvriers et étudiants dans divers pays, le mouvement des indignés quasi-général, participent du refus des populations de supporter les conséquences de la crise, au bénéfice du système bancaire.
L’autre caractéristique de la crise c’est l’hyperconcentration des richesses notamment financière entre les mains de l’élite économique et politique au service du système bancaire et financier spéculatif mondial, au détriment de la grande majorité des populations. Les bénéfices immenses des banquiers et du système bancaire, en nombre de plus en plus réduit, fondés sur la spéculation, sont l’objet de la vindicte de tous les économistes et de tous les hommes politiques honnêtes même ceux du système capitaliste.
Pour s’en sortir, les pays occidentaux se trouvent confrontés à des contraintes auxquelles ils n’étaient point préparés : austérité, restructuration, ré-industrialisation, désarticulation des marchés et difficultés de l’intégration économique en Europe du fait du retour du protectionnisme etc. sans d’ailleurs garantie de succès en raison des contradictions insurmontables du système et de la forte concurrence des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud etc.)
S’inspirant de l’expérience brésilienne, bon nombre de pays d’Amérique du Sud ont su unir leurs peuples, braver les épreuves, s’émanciper des ingérences de leur puissant voisin et s’engager dans la voie du salut aux plans économique et politique grâce à des politiques populaires volontaires et à la libération des initiatives publiques et privées. Bon nombre d’observateurs reconnaissent cette réalité évidente qui devrait inspirer les pays d’Afrique et du Moyen-Orient.
En Asie, l’autre versant du monde, la situation est particulièrement contrastée. Pendant que le Japon stagne et éprouve de profondes difficultés à surmonter la crise, la Chine, devenue la deuxième puissance économique du monde, malgré la baisse récente de son taux de croissance, se préoccupe surtout de la correction de son modèle de croissance fondé sur les exportations pour la poursuite d’un développement soutenable au plan politique, économique et écologique, dans un contexte d’une accentuation des ambitions hégémoniques des Etats-Unis et de grande rivalité avec ces derniers et le Japon dans le Pacifique.
L’autre géant, l’Inde, continue de faire « côtoyer », à l’intérieur des mêmes frontières et dans des métropoles telles Bombay, les sommets de l’opulence et de la technologie d’une part, et la misère la plus crasse d’autre part, restreignant ses ambitions politiques dans le monde.
L’ensemble de ces pays ont pu émerger par leurs moyens propres, sans l’aval ni la protection des institutions de Bretton Woods : la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International.
Manifestement, une nouvelle période historique est ouverte, mettant fin au diktat des puissances occidentales, donnant naissance à un monde multipolaire plus équilibré. Ce phénomène se traduit également par la tendance au reflux stratégique de l’interventionnisme occidental comme le montre le retrait de leurs troupes de l’Afghanistan et la possibilité, pour le peuple de ce pays, d’assumer son destin propre, au prix de sacrifices inouïs, même si le danger du fanatisme taliban demeure. Il se traduit aussi par l’hésitation desdites puissances à agir par elles-mêmes, contrairement à la période précédente (ère Bush) malgré les atteintes portées contre leurs intérêts dans de nombreuses régions du monde.
Des révolutions véritables continuent de secouer le Maghreb et le Machrek. Le renversement des dictatures sanguinaires de Zeïn El Abidine Ben Ali et de Hosni Moubarak ont marqué la naissance de ce qu’il est convenu d’appeler « Le Printemps arabe ». Ils s’étaient mis au service de pays et d’intérêts étrangers, avaient détourné d’immenses fonds, réprimé férocement leurs peuples et les combattants de la liberté. Ces révolutions sont encore en cours, et dessinent une nouvelle configuration des forces dans cette partie du monde, foyer des tensions et rivalités internationales, où les peuples ont désormais leur mot à dire. Malheureusement, et c’est inévitable, des divergences entre forces révolutionnaires ont surgi qui, si elles ne sont pas bien gérées, risquent de provoquer un retour en arrière ou une situation chaotique. A notre avis, les forces révolutionnaires en Egypte et en Tunisie, qui ont donné l’exemple de la voie à suivre, ne doivent pas décevoir et gagneraient à se ressaisir, à éviter de mettre au premier plan des enjeux non prioritaires pour leurs peuples, à surmonter leurs divergences par des moyens pacifiques et à parvenir à des compromis qui stabilisent la transition démocratique au lieu de la déstabiliser.
Au Proche-Orient, l’État terroriste d’Israël continue de violer les résolutions des Nations Unies, de recourir aux assassinats massifs contre les dirigeants palestiniens, avec le silence assourdissant et complaisant des Etats-Unis d’Amérique et de certains pays européens. C’est ce qui donne un éclat particulier au succès récent de la résistance palestinienne dans la mise en échec de l’offensive israélienne à Gaza.
Dans un tel contexte on ne peut que se féliciter du vote quasi-unanime de l’Assemblée Générale des Nations Unies, approuvant la candidature de la Palestine au statut d’État-membre observateur, traduisant ainsi la volonté unanime des peuples du monde entier. Nous appelons au rétablissement de l’unité palestinienne, seule garantie pour la victoire et l’avènement d’un Etat indépendant avec pour capitale Al Quds.
Le peuple syrien souffre le martyre (des milliers de morts, des milliers de blessés, des centaines de milliers d’exilés), du fait de l’entêtement du régime criminel de Bachar El Assad que plus rien ne peut plus sauver.
Je profite de l’occasion pour adresser un vibrant hommage aux peuples arabes maghrébins et d’Orient engagés dans la révolution et la démocratisation.
Honorables invités, camarades Congressistes, chers amis,
Notre sous-région, elle aussi, est en mutation rapide.
Le retour aux coups d’Etat militaires en Afrique après une longue pause a malheureusement été inauguré par la Mauritanie, immédiatement, il faut le souligner, après la ratification par notre parlement de la charte africaine incriminant les changements anticonstitutionnels. Peu après, le Capitaine Dadis Camara engagea la Guinée sur la même voie. La réaction inconséquente de l’Union Africaine, tantôt gênée tantôt neutralisée et parfois instrumentalisée par le jeu d’intérêts contradictoires de la communauté internationale, a favorisé cette régression.
Mais fort heureusement, cette tendance n’a pas prévalu. Ainsi, le Niger et la Guinée se sont engagés en 2010 dans la direction inverse au travers d’élections transparentes portant au pouvoir, Mahamadou Issoufou et Alpha Condé, leaders des oppositions historiques dans ces pays.
Mais les deux tendances, celle de la régression despotique et celle de la démocratisation, restent toujours en compétition. Le dernier mot n’est pas encore dit. Le Mali, après deux décennies de stabilité démocratique, vient de basculer de la façon la plus inquiétante sous le diktat d’une junte brutale. Mais à l’inverse, le Sénégal par les élections qui viennent de porter au pouvoir le Président Maky Sall, a maintenu sa réputation de modèle pour la démocratie en Afrique et donné du courage à tous les démocrates de notre sous-région. Je profite de ce passage pour féliciter les partis amis du Niger, de la Guinée et du Sénégal pour leurs succès et leurs contributions à l’émancipation de nos peuples.
La grande question de l’heure pour notre sous-région saharo-sahélienne, est la montée de périls inconnus et particulièrement graves.
Les Nations Unies nous préviennent depuis quelques trois à quatre ans que le narcotrafic international ambitionne de contrôler, par la corruption, les Etats de notre sous-région à travers une conquête silencieuse, afin d’en faire des plates-formes de transit en direction de l’Europe et de l’Asie. Déjà un Etat de la région est de plus en plus qualifié de narco-Etat. Ce terrorisme mafieux est une entreprise capitaliste qui ne semble provoquer aucun branle-bas international réel ni l’exercice d’aucune contrainte véritable sur les Etats suspects ou complaisants. Est-ce parce que dans un monde capitaliste, ce qui rapporte de l’argent ne peut être considéré comme dangereux ? Pensons donc aux tragédies dont sont le théâtre le Mexique et d’autres pays d’Amérique latine.
Le second péril qui menace notre sous-région est le terrorisme jihadiste. En se greffant sur la rébellion touarègue, il vient de réussir une ascension fulgurante à travers le contrôle des deux tiers du territoire malien. Cette fois, la mobilisation internationale semble au rendez-vous mais avec ses atermoiements et ses tiraillements liés aux intérêts de puissances parfois rivales pour le contrôle de la sous région.
La crise du Nord-Mali affecte directement notre pays plus que toute autre. L’unité, la paix et la stabilité de la Mauritanie sont indissociables de celles du Mali. Nous devons aider ce pays frère à retrouver son unité et la paix entre toutes les composantes de son peuple, tout en se débarrassant des groupes armés étrangers pratiquant le terrorisme. Il y va également de la sécurité et de la stabilité de la Mauritanie et des pays voisins.
Mais nous sommes inquiets des conséquences d’une intervention internationale mal cadrée et précipitée qui, au lieu d’éteindre l’incendie, risque de l’étendre, et qui, au lieu de restaurer l’entente entre les composantes du peuple malien, peut provoquer une rupture difficilement réversible, au lieu de laisser l’initiative et la responsabilité aux maliens et de se contenter de leur venir en aide, risque de se substituer à eux et leur ôter tout contrôle sur l’évolution ultérieure des événements. L’exemple de l’Afghanistan et de la Somalie sont édifiants sur un tel risque et sur ses conséquences désastreuses sur le long terme.
Pour notre part, nous considérons que c’est au Mali de faire face au problème et aux autres seulement de l’aider. La rébellion est une affaire intérieure à gérer par les seuls Maliens sauf s’ils ont besoin de facilitateurs ou de médiateurs pour s’entendre. Ce à quoi tous les amis du Mali, en particulier la Mauritanie, doivent contribuer. Mais auparavant notre pays doit restaurer la confiance traditionnelle entre les autorités des deux pays largement abimée par notre implication supposée ou réelle dans les malheureuses initiatives du Président Sarkozy contre ATT. Nous devons aussi continuer à offrir les meilleures conditions possibles d’accueil et de sécurité aux populations maliennes réfugiées.
Quant à la stratégie sécuritaire pour débarrasser le Nord du Mali des groupes jihadistes, elle relève également de l’initiative et de la conduite du Mali, mais avec le concours de ses amis. Quant à la Mauritanie, face au danger de l’embrasement de la zone, notre priorité est de faire sortir au plus vite notre pays de la crise politique interne et de sécuriser notre frontière sans nous impliquer d’aucune manière dans un engagement militaire international mal défini, mais en empêchant que notre territoire serve de refuge ou de base arrière à des groupes armés hostiles au Mali.
Le conflit du Sahara occidental continue de bloquer le projet de construction du Maghreb arabe et de menacer la stabilité de cette partie du monde. Notre position reste invariable : le soutien au droit à l’autodétermination du peuple sahraoui conformément à la légalité internationale, la neutralité positive et stricte de notre pays dans le conflit et enfin le soutien à la recherche d’un compromis juste entre nos frères du Maroc et du Polisario qui serve de base à l’expression de ce droit à l’autodétermination.
Honorables invités, chers congressistes, chers ami,
A l’heure actuelle notre pays doit faire face à plusieurs défis :
Le défi sécuritaire consécutif à la crise du Nord-Mali que nous avons évoqué plus haut et auquel nous devons faire face dans l’unité et dans l’urgence.
La confrontation entre l’opposition démocratique et le pouvoir en place. Elle est le prolongement de la crise née du coup d’Etat de 2008, aggravée par le sabotage puis le reniement de l’Accord de Dakar. Nous considérons que les élections présidentielles de juillet 2009 n’ont pas été honnêtes ni respectueuses de cet accord de Dakar. Et cependant nous en avons accepté le résultat dans l’espoir que la suite de l’accord serait appliquée. De 2009 à 2012, l’opposition a cherché à résoudre le contentieux par le dialogue, mais seulement par un dialogue sérieux, et non un dialogue de faire-valoir pour gagner du temps et diviser l’opposition.
C’est le refus d’un dialogue sérieux, respectueux des engagements pris à Dakar, l’irrespect des échéances électorales et la prolongation illégale et unilatérale du mandat de la majorité par elle-même, la fuite en avant pour mettre en œuvre un processus électoral qui exclut la COD et la concentration excessive et accélérée du pouvoir et de la richesse entre les mains d’un petit lobby, la propension à user de la violence contre les mouvements syndicaux et sociaux qui décidèrent l’opposition démocratique à appeler au départ du président en place. Notre pays est donc dans une crise de quasi rupture qui menace de le faire basculer dans l’instabilité.
La recherche d’une sortie de crise est l’affaire de tous. Des initiatives louables se sont déjà manifestées. Citons en particulier celle de Président de l’Assemblée Nationale Messaoud Ould Boulkheir qui est une bonne base de discussion. La COD elle-même vient de proposer à toute la classe politique et à la société civile une concertation sans exclusive. La solution peut être trouvée dans le cadre d’un large forum national. Mais en attendant, le droit de l’opposition est de refuser un projet qui l’écarte et qui consacre, à ses yeux, la légitimation des putschs contre la constitution et la démocratie et l’édification de la dictature d’un lobby d’affaires. Face à ce défi, notre parti continuera à œuvrer pour le renforcement de l’unité de l’Opposition et de toutes les forces et personnalités soucieuses de la souveraineté, de la démocratie, de la sécurité et de la stabilité de notre pays.
La crise socio-économique. Sa perception ne relève plus de l’analyse mais des sens, elle est visible, palpable, audible. La prétendue « lutte contre la pauvreté » à conduit à l’appauvrissement général de tous les Mauritaniens. L’agriculture et l’élevage dont vivent la majorité des Mauritaniens sont laissés à l’abandon. La sécheresse de 2011-2012 a décimé plus de 50% de notre cheptel, sans que nos éleveurs obtiennent un concours véritable de l’Etat, et nul ne sait le sort de la quarantaine de milliard dégagé à cette fin.
Le secteur minier est une affaire gérée dans l’opacité et les relations entre le pouvoir et les sociétés étrangères suscitent beaucoup d’interrogations. La hausse des prix, la détérioration du pouvoir d’achat, le marasme du secteur informel avec comme corollaire un chômage qui dépasse toutes les estimations, la crise des secteurs de la santé et de l’éducation complètent le tableau d’une situation explosive.
Les risques structurels de tensions identitaires. La gestion des questions pendantes du passif humanitaire lié aux événements de 1989 ainsi d’ailleurs que la question de l’esclavage avaient connu une grande avancée durant le brève présidence de Monsieur Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi : les déclarations historiques du 30 juin 2007, le débat parlementaire d’août de la même année et les journées de concertation de tous les acteurs politiques et sociaux ont conduit à un consensus national sans précédent : des lois, des décrets et une feuille de route. Il s’agit aujourd’hui, pour avancer, de consolider le consensus acquis et d’avancer dans la mise en œuvre de la feuille de route adoptée par les journées de concertation nationale.
Le défi de la mondialisation. Je n’en mentionnerai que la question pressante de l’impact négatif de la contre-culture qui oriente tous les consommateurs de ces produits : films, jeux vidéo, vers la violence, la perversion et autres formes de délinquance. Des enfants sont ainsi transformés en monstres meurtriers, le crime se banalise et la cohésion sociale se disloque. Tout cela pour que l’industrie du spectacle en Occident accumule des profits immenses. On peut et on doit faire face au problème. Il n’y a pas de fatalité à ce que nous connaissions les drames de massacres gratuits qui défraient la chronique en Occident. Mais il faut agir vite. D’abord au plan international, réclamer la qualification de cette contre culture comme une incitation à la violence qui doit être combattue par le droit international comme l’est la propagande terroriste. Ensuite utiliser nos médias de masses et l’école comme instruments pour diffuser nos valeurs et pour combattre cette influence néfaste et corrosive.
La crise de la jeunesse laissée à l’abandon, au chômage, au désespoir et toutes les tentations aventuristes. C’est le grand échec du modèle social actuel et le mal qui risque de compromettre durablement l’avenir du pays. Nous devons prendre en main cette question et préconiser une nouvelle stratégie en la matière.
Honorables invités, Camarades Congressistes, chers amis
L’identité de notre parti comme l’a souhaité le IIe Congrès, demeure fermement établie et nous donne une place singulière sur l’échiquier politique national. Elle ne peut prêter à aucune confusion en s’inscrivant dans la tradition des forces de changements qui ont toujours été à la pointe des combats menés par notre peuple multinational, de génération en génération, depuis la pénétration coloniale et le déclenchement des luttes de résistance nationale et sociale.
Cette identité s’inscrit dans une société musulmane, attachée aux principes et valeurs universelles de l’Islam et dans le même temps assoiffée de progrès et d’ouverture sur le monde. Notre parti est patriotique et ne transige jamais sur la souveraineté nationale, il est démocratique et combat tout despotisme et toutes les formes d’oppressions sociales ou politiques, il est progressiste et a toujours pris le parti des opprimés et des couches déshéritées et s’oppose à toutes les tares et toutes les chaînes qui handicapent l’émancipation des Mauritaniens, qu’il s’agisse des pratiques esclavagistes, de la marginalisation de la femme etc. Il est unitaire et œuvre à l’égalité et à la cohésion entre les composantes de notre peuple sur la base de l’égalité en droit et du respect de leurs spécificités identitaires et reste à la pointe du combat pour la réparation des préjudices subis et le rejet de toute discrimination. Notre parti prône l’unité arabe, l’unité africaine et la paix dans le monde et œuvre à la solidarité avec tous les partis frères et amis soucieux de défendre les même idéaux et particulièrement au Maghreb et en Afrique de l’Ouest.
Notre peuple veut la liberté, notre peuple veut la justice, notre peuple veut profiter de la croissance économique et des richesses de son pays. Notre peuple veut en finir avec la gouvernance actuelle, il veut un pouvoir honnête qui respecte son droit à la dignité, à des conditions de vie meilleures et à une gestion transparente et démocratique de ses affaires.
Sur cette base, le troisième Congrès a pour mission d’approfondir toutes les questions évoquées dans ce rapport et de dégager l’orientation du Parti pour les cinq années à venir pour l’avènement d’une Mauritanie unie, souveraine, réellement démocratique et prospère, et pour construire un parti de masse susceptible de gagner la confiance de la majorité des Mauritaniens et de gouverner.
Il ne me reste plus qu’à déclarer ouverts les travaux du IIIe Congrès de l’UFP auxquels je souhaite plein succès.
Wa assalamu alaikum wa rahmatu llahi wa barakatuhu

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