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Avant de lire
les propositions de l’UPR, il faut partir du principe qu’elles
sont présentées par des soldats dont le seul souci est de rendre service aux
intérêts du chef du moment. Si l’intérêt du peuple y est pour quelque chose, il
ne peut l’être que sous l’impulsion du chef en question mais jamais de
ses soldats de formation civile que sont les membres de l’UPR comme
l’étaient avant eux ceux du PRDS.
Ce n’est la
faute de personne, c’est culturel : soutenir le pouvoir quel
qu’il soit pour survivre, mieux vivre, bien vivre ou au-delà… Le chef lui-même
n’y est presque pour rien car sitôt qu’il devient chef, il
est obligé d’avoir une armée pour tenir en respect les civils et une armée de
civils pour ferrailler avec les opposants et ce au nom du peuple.
Le processus
démocratique en Mauritanie est mal parti depuis le début à
cause du suffrage universel direct qui permet au pouvoir qui tient l’état,
l’institution religieuse et les médias de masse de faire
démocratiquement ce qu’il veut du peuple comme si ce dernier pouvait,
à la lecture d’une constitution, en connaître les ressorts et les
attrape-nigauds.
Mais il est
trop tard pour
faire machine arrière. Le suffrage universel direct est là et d’ailleurs s’il
n’était pas là, c’eût été peut-être pire car alors les petites
chefferies locales eussent certainement fait main basse sur le
processus d’émancipation des masses.
La démocratie,
la liberté individuelle de choisir ses dirigeants est un travail à
plein temps de la conscience citoyenne qui doit toujours être
en alerte, toujours engagée, toujours cherchant l’information, déjouant la
désinformation. Qui a le temps pour cela surtout quand on est
illettré, ignorant ou juste occupé à joindre les deux bouts pour sauver
sa famille ou sa peau ? En Europe ce devoir de la conscience citoyenne a créé
des générations d’abstentionnistes dégoûtés de la politique et ayant laissé la
place à une minorité souvent mal agissante ; que dire alors
d’un peuple d’un pays du tiers-monde comme le nôtre sous-éduqué, mal
nourri, mal soigné, manipulé de partout par des intellectuels borgnes au
royaume des aveugles, quelques-uns de bonne foi mais impuissants pendant
que d’autres sans vertu et bouffis de complexes jouent avec les
malheurs et les rêves du peuple manipulé même par les religieux ?
Le pouvoir
militaire devenu civilisé a compris avec la génération Aziz qu’on
pouvait diriger ce pays sans crimes physiques juste avec les armes
politiques. Entre nous, je le dis comme je le pense, vu l’état de
la scène civile, on peut être heureux que l’institution militaire ne soit
pas dans le même état.
La liberté
d’expression sans précédent en Mauritanie a permis à chacun de vider
régulièrement son sac en paroles vite oubliées ne laissant rien à
mettre à l’actif de l’action or seule l’action compte ; le
verbe n’en est que le moteur. Les civils n’ont jamais pu faire reculer en rien
le pouvoir sous l’autorité militaire civilisée.
Un
porte-parole du gouvernement peut mentir plus d’une fois et
dire mille bêtises, il reste en place pendant qu’on envoie un gosse en
prison pour 3 ans car il lui a jeté une chaussure. 3 ans ! Pire que
tout, 3 de ses amis manifestent dans le tribunal leur mécontentement, ils
écopent aussi de 3 ans de prison ferme et sont vite oubliés. Pourtant
c’est la jeunesse qui est ainsi brisée car les vieux qui tiennent le pouvoir
craignent la jeunesse comme le pouvoir craint la jeunesse dans
un pays où 70% de la population a moins de 30 ans.
Passons.
Dans un
pays pareil, avec
une scène politique et une société civile pareilles, le pouvoir a compris que
tout était permis. Il suffit de faire loi n’importe quoi et
cette loi devra être respectée car loi !
Après avoir
fait voter tout et n’importe quoi par une assemblée nationale à majorité
présidentielle, l’heure est de toucher à la constitution pour en faire
une constitution monarchique c’est-à-dire au service d’un
président-roi en attendant la suite....
Ainsi quand
on lit n’importe quoi venant de l’UPR, il faut savoir que c’est fait pour faire avaler
des couleuvres à la démocratie quitte à en faire une caserne du
chef du moment.
Que l’on
soit d’accord : personnellement,
j’ai toujours pensé que la Mauritanie ne pourrait avancer qu’avec un homme fort
ayant les pleins pouvoirs pour faire passer la Mauritanie de la
préhistoire à l’histoire encore faut-il que celui qui aura de tels
pouvoirs en fasse quelque chose comme un Napoléon ou un Atatürk, toute
proportion gardée, et pas seulement de quoi en faire un roitelet entouré
de ministres automates terrorisés de perdre leur poste
avec un clown comme porte-parole.
Examinons
les propositions de l’UPR.
Nous avons
déjà parlé des bandes rouges qu’on présente au peuple comme symboles du sang
versé par les martyrs alors que c’est manifestement un signe de
l’arabité qu’on veut faire avaler aux autres peuples de Mauritanie qui
devraient refuser cela et n’accepter un changement de drapeau qu’à condition
d’y mettre un symbole manifeste de l’unité nationale blanc et
noir.
Au sujet
des langues dans
la constitution nouvelle :
Encore une
fois, on refuse
de sortir de l’aberration actuelle à propos du français qui figure partout sur
nos billets de banque, nos pièces d’identité, partout dans l’administration et
même au milieu du dialogue en cours sur une banderole géante sans que personne
ne veuille remettre dans la constitution le français comme deuxième langue de
travail.
Cette
hypocrisie collective est lâche...
Les nationalistes
arabes ont réussi à complexer même les négro-mauritaniens en
leur disant qu’ils devraient défendre leurs langues nationales et non la langue
du colon. Ainsi on voit les négro-mauritaniens satisfaits de voir dans la
constitution, la mention de leurs langues nationales même si cela n’engage en
rien le pouvoir car il n’y a que deux langues dans
l’administration l’arabe et le français.
D’ailleurs les
autres langues nationales, n’ayant pas de graphie propre, doivent utiliser soit
les lettres latines soit les lettres arabes mais il n’y a pas de quoi être
complexé, la tradition orale n’a rien à envier à l’écriture. La musique arabe a
eu son heure de gloire alors qu’elle ignorait le solfège. De là
d’ailleurs qu’elle a périclité mais c’est un autre sujet. Les
négro-mauritaniens comme tous les mauritaniens qui parlent hassania et
français ne doivent pas tomber dans le piège d’abandonner le français
et d’accepter cette dictature de l’arabe parlé par une minorité et pas
des plus lumineuses.
Promouvoir
l’arabe, langue du coran, bien sûr et peut-être demain langue
pratiquée par toute la république mais pas de cette façon abusive et
contreproductive sinon il faut que les ennemis du français cessent de
l’employer en premier les gens de l’UPR et bannir le français de partout or
c’est impossible… Alors il faut remettre le français comme deuxième
langue de travail et en finir avec ce vide constitutionnel.
Voici 10
aménagements discutables
1- Bodiel qui
se plaint de voir se perpétuer la règle Tayiste d’un premier ministre
de l’Est pourra subir la rigueur de cet article « La loi punit tout
appel séparatiste et toute propagande ayant un caractère régionaliste, raciste
ou ethnique "
2- Voici une
phrase qui commence bien et réduite à néant par le dernier mot «
autorisée »
« Liberté de
création des partis politiques et des associations et d’adhérer à une
institution politique ou syndicale autorisée »
Prenons le
cas du parti FPC de
Thiam Samba, ancien Flam, toujours non reconnu par le fait du prince. Pourtant
cela n’empêche pas le pouvoir de les inviter au dialogue. Aussi il faudrait se
demander comment le pouvoir invite au dialogue officiel un parti qu’il
refuse de reconnaître ? C’est là encore un jeu détestable car le
pouvoir a besoin de partis pour le dialogue vu le nombre de boycotts alors le
pouvoir accepte tout le monde et demain les FPC seront à la rue comme
l’IRA qui a servi le temps d’une présidentielle.
Le
pouvoir sait jouer de la soif d’avoir une tribune pour les
opposants et sait comment les monter les uns contre les autres. Cela réussit à
tous les coups. Encore une fois, comme Birame avant l’élection
présidentielle, les FCP auraient dû réclamer leur récépissé avant
de participer au dialogue mais l’envie d’exister même quelques jours a pris le
dessus sur la vision à long terme.
3- Messoud
peut être heureux, son
conseil économique et social qui avale 350 millions par an et ne sert à rien
sera reconduit et doté d’un nouveau titre « conseil
économique social et environnemental ». Voilà de quoi le calmer pour
longtemps et s’en servir à souhait.
4- Pour
échapper à la CPI voilà
qui est dit « « Aucun citoyen ne peut être extradé vers un autre pays ou
institution étrangère. Personne ne peut être extradée en dehors du territoire
national que conformément aux lois et conventions relatives à l’extradition. »
5- Quand Obama met son veto à une
loi, elle repasse par le congrès qui peut contourner le veto par un vote de 2/3
des élus, en Mauritanie pour les amendements à une loi s’ils ne
plaisent pas au président car touchant à son autorité, il peut
notifier à l’assemblée son opposition et l’assemblée ne peut faire
autrement que d’en tenir compte !
Et si le
président dissout l’assemblée il peut gouverner par des ordonnances qui ont
force de loi ! Pourquoi se gêner ?
« Le Président
de la République peut s’opposer aux amendements de l’Assemblée Nationale sur un
projet de loi s’il considère qu’ils touchent le fond dudit projet et les
objectifs que lui a fixé le pouvoir exécutif dans le domaine de sa
responsabilité réglementaire. Dans ce cas, le Président de la République
adresse à l’Assemblée Nationale son opposition à laquelle est joint le projet de
loi avec les amendements pour une seconde lecture. L’Assemblée Nationale est
tenue de prendre en considération le contenu de cette opposition». « En cas de
dissolution de l’Assemblée Nationale, le Président de la République peut
légiférer par ordonnance ayant force de loi. Lesdites ordonnances sont soumises
à l’adoption de l’Assemblée Nationale dans sa session ordinaire suivante ».
6- Ici on arrive à quelque
chose d’extraordinaire car c’est une nouveauté ! Pour la première
fois, l’intérim en cas de vacance du pouvoir pourra être assuré par un premier
ministre non élu ! avant le président de l’assemblée nationale et ce
pour une durée qui peut aller jusqu’à 120 jours ! car la
période de 60 jours peut être renouvelée une fois
7- Ici
l’assemblée nationale doit savoir que le budget lui plaise ou non, le dernier mot revient au
chef de l’état qui l’établit d’office au cas où le vote n’est
pas acquis.
« « Si
l’Assemblée Nationale n’a pas voté le budget avant le 31 décembre, ou si elle
ne l’a pas voté en équilibre, le Président de la République renvoie le projet
de loi de finances dans les dix (10) jours à l’Assemblée nationale qui est
convoquée en session extraordinaire. L’Assemblée Nationale doit statuer dans
les huit (8) jours. Si le budget n’est pas approuvé à l’expiration de ce délai,
le Président de la République l’établit d’office par ordonnance sur la base des
recettes de l’année précédente. »
8- Ici
c’est un coup d’état contre la volonté d’un élu qui ne peut plus refuser en toute
conscience de voter, il doit suivre les indications de son parti. Adieu
aux frondeurs ! Vive la démocratie !
«
Partant du principe que le siège parlementaire est l’apanage du parti et
non celui du député élu nous proposons de lier le vote de celui-ci au sein de
l’Assemblée Nationale aux indications qu’il aura reçues de son parti: « Le droit
de vote est un attribut personnel pour les membres de l’Assemblée Nationale
conformément aux indications de leurs partis. »
9- Ici
c’est incroyable, le
conseil constitutionnel qui était déjà une tour de Pise devient
la cour constitutionnelle. Eh bien ! La moitié de cette cour
est choisie par le chef de l’état et surtout son président qui a « voix
prépondérante en cas de partage ». Vive l’indépendance !
« Partant du
principe que le siège parlementaire est l’apanage du parti et non celui du
député élu nous proposons de lier le vote de celui-ci au sein de l’Assemblée
Nationale aux indications qu’il aura reçues de son parti. « Le droit de vote
est un attribut personnel pour les membres de l’Assemblée Nationale
conformément aux indications de leurs partis. »
10- Ensuite la CENI et la HAPA font leur
apparition dans la constitution, ce qui est une bonne chose et
« Le Président de la République peut directement soumettre au référendum
l’initiative de révision de la Constitution. ».
Alors après
avoir voté ces mesures monarchiques faisant de la future troisième république
une république monarchique, on se demande à qui tout cela va servir…
Le
porte-parole du gouvernement a dit que le peuple est au-dessus de la
constitution et qu’il peut en faire ce qu’il veut, après tout il a
raison car aucune génération ne peut imposer éternellement ses lois aux
générations futures mais le porte-parole a oublié qu’Aziz a dit
publiquement que l’islam est au-dessus de la démocratie or il a
juré qu’il ne se présenterait pas à un autre mandat et qu’il ne soutiendrait
aucune initiative à ce sujet.
Que penser
alors de laisser
le porte-parole et d’autres ministres parler librement de parjure islamique ?
Dieu suffit
comme témoin. Aziz doit faire très attention en prenant
Dieu à témoin, tout le reste le regarde.
Personnellement, je crois que la Mauritanie ne peut pas
être laissée actuellement à nos politiques. En désespoir de cause, je
suis pour la tutelle militaire tant qu’elle reste civilisée mais une tutelle
engagée pour la Mauritanie plurielle or ce n’est pas encore le cas. Demain
peut-être, inchallah...
En attendant c’est du bricolage au service d’un homme captif du pouvoir car en Mauritanie les statistiques sont claires, tous les présidents sont partis par la force. Aziz sera-t-il l’exception ? C’est tout ce qu’on lui souhaite mais qui dit qu’après lui ce sera mieux ? Depuis 1978, la caque sent toujours le hareng : c’est la malédiction du péché originel. Désormais, c’est l’impasse politique pour les plus démocrates et l’obligation d’assumer pour les autres…
Publié il y a 2
hours ago par vlane.a.o.s.a
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