----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: UE - DG Développement - Stefano Manservisi
Sent: Friday, May 14, 2010 4:03 PM
Subject: Mauritanie - vers la confrontation violente
Je me permets, cher Directeur général, de revenir vers vous alors que mon message du 11 Mai avait sa réponse en bonne partie dans la mise en garde publique du délégué de la Commission à Nouakchott, ce jour-là.
La situation se tend de plus en plus.
L’opposition, bien coordonnée entre ses principales composantes et surtout ses principaux chefs, organise demain, samedi 15, à Nouadhibou une manifestation – à la tête de laquelle vont marcher Ahmed Ould Daddah et Messaoud Ould Boulkheir, respectivement président du plus important des partis d’opposition, et président de l’Assemblée nationale, ainsi que Yahya Ould Waghef, dernier des Premiers ministres du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi (en fait le Premier ministre de son esprit avec une composition gouvernementale d’union nationale en Avril-Mai 2008).
Le pouvoir contre-attaque sur les lieux en organisant même heure et même jour une manifestation des siens - en pratique en faisant tout pour matériellement obliger les opposants soit à se déclarer tel soit à se terrer soit à retourner. Selon des témoins...
Depuis hier, le pouvoir met le paquet à Nouadhibou pour faire échouer le meeting de l’opposition démocratique. Ainsi, la Wilaya et la Commune de la Capitale économique ont mis tous leurs moyens matériels, logistiques (engins de terrassement, camions, véhicules), humains et financiers à la disposition de l’UPR pour préparer son meeting. De même, les autorités régionales ont décidé que les fonctionnaires et employés des sociétés d’Etat seront pointés demain dans leur lieu de travail, avec leurs familles, et directement vers le meeting du pouvoir, encadrés par leurs administrations réciproques, comme gage de leur non appartenance à l’opposition.
Une distribution de poisson a lieu actuellement sous la supervision du sénateur de la ville pour appâter les citoyens, dont les domiciles sont systématiquement violés pour leur ordonner d’assister au meeting de l’UPR s’ils ne veulent pas être taxés d’opposition.
Les coordinateurs régionaux de l’opposition ont demandé à rencontrer les wali à ce sujet. Mais celui-ci a refusé de les recevoir.
Tout cela à quelques jets de pierre de la frontière, au contact du conflit saharien et là où passent circuits de la drogue et des « immigrations clandestines ». Dans une agglomération qui a été particulièrement défavorisée par Maaouyia Ould Sid'Ahmed Ould Taya à la fin des années 1990 et ne s'en remet pas vraiment, malgré la liaison routière avec Nouakchott, fonctionnant au détriment du port marchand du nord.
La manifestation pacifique des dockers de Nouakchott, hier jeudi, a été l’occasion d’une démonstration des manières actuelles de la police : tabassages en règle comme réponse à des demandes fermes mais polies d’une augmentation des rémunérations à la tonne. Cette répression qui a débordé dans la capitale laisse pressentir ce qu’il peut se passer demain à Nouadhibou.
Dans le même temps, les intimidations - au niveau politique - continuent. L’ancien Premier ministre Ould Waghef a été convoqué en justice pour hier, et cela ne s’est décommandé qu’à la dernière minute, toujours les circonstances de la faillite d’Air Mauritanie – à quoi il a été amplement répondu, sans compter les répliques aux vices de procédure. Le président Messaoud Ould Boulkheir verrait les comptes de l’Assemblée nationale « épluchés » - rumeur et soi-disant menace qui pèsent sur lui depuis le putsch du 6 Août 2008 qu’il avait aussitôt et vivement condamné. La tentation d'une nouvelle comédie électorale - pour ravauder déjà la façade vis-à-vis de la "communauté internationale" - grandit : dissoudre l'Assemblée nationale qui n'est en principe pas renouvelable avant un an et demi.
Dans ce contexte, les besoins d’argent que devrait exposer sous peu Mohamed Ould Abdel Aziz à l’Elysée pour y trouver avocat auprès de vous et de la Commission, semblent complètement décalés.
Le régime donne la sensation aux Mauritaniens d’être bloqué, autiste. Dès l’ouverture du nouveau cours – sans reposer la question de légitimité qui à mon sens demeure la clé de toute interprétation du système politique mauritanien actuel – il était prévisible que la psychologie du putschiste ne donnerait aucune perspective ni visibilité au pays. Nous avons aujourd’hui affaire 1° à l’accentuation des régimes autoritaires que le pays subit depuis trente ans, 2° à une question de personne.
Il me semble que s’en remettre à un hypothétique nouveau coup militaire pour sortir de l’impasse, est dangereux aussi bien pour nos amis mauritaniens que pour le décisif partenaire que nous sommes. Nous ne pouvons rester passif et regarder opérer le hasard. Déjà, demain est très dangereux. Et nous avons cautionné (pour ne pas écrire plus nettement) l'accord de Dakar.
Sentiments que vous savez attentifs et déférents. Confiants, surtout.
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: UE - DG Développement - Stefano Manservisi
Sent: Friday, May 14, 2010 4:03 PM
Subject: Mauritanie - vers la confrontation violente
Je me permets, cher Directeur général, de revenir vers vous alors que mon message du 11 Mai avait sa réponse en bonne partie dans la mise en garde publique du délégué de la Commission à Nouakchott, ce jour-là.
La situation se tend de plus en plus.
L’opposition, bien coordonnée entre ses principales composantes et surtout ses principaux chefs, organise demain, samedi 15, à Nouadhibou une manifestation – à la tête de laquelle vont marcher Ahmed Ould Daddah et Messaoud Ould Boulkheir, respectivement président du plus important des partis d’opposition, et président de l’Assemblée nationale, ainsi que Yahya Ould Waghef, dernier des Premiers ministres du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi (en fait le Premier ministre de son esprit avec une composition gouvernementale d’union nationale en Avril-Mai 2008).
Le pouvoir contre-attaque sur les lieux en organisant même heure et même jour une manifestation des siens - en pratique en faisant tout pour matériellement obliger les opposants soit à se déclarer tel soit à se terrer soit à retourner. Selon des témoins...
Depuis hier, le pouvoir met le paquet à Nouadhibou pour faire échouer le meeting de l’opposition démocratique. Ainsi, la Wilaya et la Commune de la Capitale économique ont mis tous leurs moyens matériels, logistiques (engins de terrassement, camions, véhicules), humains et financiers à la disposition de l’UPR pour préparer son meeting. De même, les autorités régionales ont décidé que les fonctionnaires et employés des sociétés d’Etat seront pointés demain dans leur lieu de travail, avec leurs familles, et directement vers le meeting du pouvoir, encadrés par leurs administrations réciproques, comme gage de leur non appartenance à l’opposition.
Une distribution de poisson a lieu actuellement sous la supervision du sénateur de la ville pour appâter les citoyens, dont les domiciles sont systématiquement violés pour leur ordonner d’assister au meeting de l’UPR s’ils ne veulent pas être taxés d’opposition.
Les coordinateurs régionaux de l’opposition ont demandé à rencontrer les wali à ce sujet. Mais celui-ci a refusé de les recevoir.
Tout cela à quelques jets de pierre de la frontière, au contact du conflit saharien et là où passent circuits de la drogue et des « immigrations clandestines ». Dans une agglomération qui a été particulièrement défavorisée par Maaouyia Ould Sid'Ahmed Ould Taya à la fin des années 1990 et ne s'en remet pas vraiment, malgré la liaison routière avec Nouakchott, fonctionnant au détriment du port marchand du nord.
La manifestation pacifique des dockers de Nouakchott, hier jeudi, a été l’occasion d’une démonstration des manières actuelles de la police : tabassages en règle comme réponse à des demandes fermes mais polies d’une augmentation des rémunérations à la tonne. Cette répression qui a débordé dans la capitale laisse pressentir ce qu’il peut se passer demain à Nouadhibou.
Dans le même temps, les intimidations - au niveau politique - continuent. L’ancien Premier ministre Ould Waghef a été convoqué en justice pour hier, et cela ne s’est décommandé qu’à la dernière minute, toujours les circonstances de la faillite d’Air Mauritanie – à quoi il a été amplement répondu, sans compter les répliques aux vices de procédure. Le président Messaoud Ould Boulkheir verrait les comptes de l’Assemblée nationale « épluchés » - rumeur et soi-disant menace qui pèsent sur lui depuis le putsch du 6 Août 2008 qu’il avait aussitôt et vivement condamné. La tentation d'une nouvelle comédie électorale - pour ravauder déjà la façade vis-à-vis de la "communauté internationale" - grandit : dissoudre l'Assemblée nationale qui n'est en principe pas renouvelable avant un an et demi.
Dans ce contexte, les besoins d’argent que devrait exposer sous peu Mohamed Ould Abdel Aziz à l’Elysée pour y trouver avocat auprès de vous et de la Commission, semblent complètement décalés.
Le régime donne la sensation aux Mauritaniens d’être bloqué, autiste. Dès l’ouverture du nouveau cours – sans reposer la question de légitimité qui à mon sens demeure la clé de toute interprétation du système politique mauritanien actuel – il était prévisible que la psychologie du putschiste ne donnerait aucune perspective ni visibilité au pays. Nous avons aujourd’hui affaire 1° à l’accentuation des régimes autoritaires que le pays subit depuis trente ans, 2° à une question de personne.
Il me semble que s’en remettre à un hypothétique nouveau coup militaire pour sortir de l’impasse, est dangereux aussi bien pour nos amis mauritaniens que pour le décisif partenaire que nous sommes. Nous ne pouvons rester passif et regarder opérer le hasard. Déjà, demain est très dangereux. Et nous avons cautionné (pour ne pas écrire plus nettement) l'accord de Dakar.
Sentiments que vous savez attentifs et déférents. Confiants, surtout.
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D'un Européen, ayant vêcu à Nouadhibou au milieu des années 1960 et qui y séjourne de nouveau pour quelques mois, je reçois ce témoignage :
Je vais essayer de donner qq éléments de la situation qui bouge énormément. Bien sûr, demain sera une journée peut-être cruciale à NDBOU. Pour le moment, les affrontements sévères entre police, garde nationale d'un côté et 'dockers' de l'autre sont inquiétants. Hier à la messe du soir, je voyais des religieuses un peu effrayées qui venaient de passer non loin de zones d'affrontements avec le parfum âcre des grenades lacrymogènes. Quand on parle de 'dockers', il faut comprendre qu'il s'agit plutôt de 'porteurs' pour le compte des grands (ou petits) commerçants qui forment une population - peut-être devrais-je dire une caste dans la mesure où l'on trouve à la fois des 'harratines', des 'noirs'mauritaniens ou d'autres pays subsahariens- trés précaire. Ils gagneraient aux environs de 500 ougiyas la tonne transportée et veulent 1000 mais on ne voit guère de dialogue dans cette affaire qui peut vite dégenéreren conflit 'racial'...
Concernant la situation générale, je serai prudent: il faut toujours se méfier des 'chitaris' que l'usage du téléphone portable n'a fait qu'augmenter. A court terme, les politiques ne semblent pas trés lisibles et on a la curieuse impression d'un régime à la fois peu démocratique dans ses manières mais en même temps d'une certaine agitation ou faiblesse dans la conduite des affaires dont on pourrait donner bien des exemples. Peut-il continuer ainsi trés longtemps?
A moyen ou long terme, la Mauritanie aprés 50 ans d'indépendance, ne semble pas encore avoir trouvé sa place...
Hier matin, dans le journal de Nenni 'NKT-INFO' en général favorable au pouvoir en place, le billet habituel du colonel Mbareck o/ Bouna Moctar ancien chef d'état-major bien connu. Il se fait l'écho d'une blague entendue par un député de la majorité: une voiture vide s'arrête devant la Présidence de la République, le président de l'Assemblée Nationale en descend. L'auteur se demande l'origine de cette blague sans savoir que son auteur était Churchill qui, furieux que l'électorat de l'aprés-guerre l'ait renvoyé à ses chères études et méprisant à l'égard de son successeur travailliste, avait dit " une voiture vide s'arrête devant le 10 de Downing Street. Mr Attlee en descend..." Ce qui me paraît intéressant, c'est l'appréciation qu'en fait notre colonel sous le couvert de propos sybillins et en se demandant si le Pdt Messaoud mérite une telle appréciation aprés son discours en début de session parlementaire. Tenant du pouvoir actuel, l'auteur le pense sans doute mais comme on dit "in cauda venenum" et le billet se termine en affirmant que les discours de certains citoyens "laissent entrevoir les affres de leur éducation primitive" car "on est toujours fidèle à sa filiation... et rien ne pourra changer la nature d'un individu ni sa modernité ni le titre qu'il porte ni les honneurs qu'on lui fait, il sera toujours le fils de son père"...Je crois comprendre par là qq chose du genre: hartani tu étais, hartani tu resteras.
Concernant la situation générale, je serai prudent: il faut toujours se méfier des 'chitaris' que l'usage du téléphone portable n'a fait qu'augmenter. A court terme, les politiques ne semblent pas trés lisibles et on a la curieuse impression d'un régime à la fois peu démocratique dans ses manières mais en même temps d'une certaine agitation ou faiblesse dans la conduite des affaires dont on pourrait donner bien des exemples. Peut-il continuer ainsi trés longtemps?
A moyen ou long terme, la Mauritanie aprés 50 ans d'indépendance, ne semble pas encore avoir trouvé sa place...
Hier matin, dans le journal de Nenni 'NKT-INFO' en général favorable au pouvoir en place, le billet habituel du colonel Mbareck o/ Bouna Moctar ancien chef d'état-major bien connu. Il se fait l'écho d'une blague entendue par un député de la majorité: une voiture vide s'arrête devant la Présidence de la République, le président de l'Assemblée Nationale en descend. L'auteur se demande l'origine de cette blague sans savoir que son auteur était Churchill qui, furieux que l'électorat de l'aprés-guerre l'ait renvoyé à ses chères études et méprisant à l'égard de son successeur travailliste, avait dit " une voiture vide s'arrête devant le 10 de Downing Street. Mr Attlee en descend..." Ce qui me paraît intéressant, c'est l'appréciation qu'en fait notre colonel sous le couvert de propos sybillins et en se demandant si le Pdt Messaoud mérite une telle appréciation aprés son discours en début de session parlementaire. Tenant du pouvoir actuel, l'auteur le pense sans doute mais comme on dit "in cauda venenum" et le billet se termine en affirmant que les discours de certains citoyens "laissent entrevoir les affres de leur éducation primitive" car "on est toujours fidèle à sa filiation... et rien ne pourra changer la nature d'un individu ni sa modernité ni le titre qu'il porte ni les honneurs qu'on lui fait, il sera toujours le fils de son père"...Je crois comprendre par là qq chose du genre: hartani tu étais, hartani tu resteras.
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COORDINATION REGIONALE DE L’OPPOSITION DEMOCRATIQUE
DE DAKHLET-NOUADHIBOU.
DECLARATION
En violation flagrante des libertés démocratiques, des lois et règlements, du principe de la neutralité de l’Administration et de l’exigence du maintien de la paix sociale, le Wali de Dakhlet –Nouadhibou vient de démontrer son attitude partisane en faveur du parti du Général Mohamed Ould Abdel Aziz (UPR) par les décisions suivantes :
l’autorisation au profit de ce parti d’organiser un meeting le même jour (15/05/2010) que celui prévu par l’Opposition Démocratique 2 semaines auparavant ;
l’autorisation accordée au Parti-Etat d’organiser son meeting sur une voie publique en divisant la ville en deux et en barrant la route aux militants et sympathisants désireux de se rendre au lieu du meeting de la COD ;
la mobilisation des populations pour le meeting de l’UPR par voie de recommandations et d’ordres directs ainsi que la mise sur pied d’une cellule de supervision dans ce sens avec le DG de la SNIM et le Coordinateur régional de l’UPR. A titre d’illustration de cette tendance, il a reçu le jeudi 13/05/2010 un groupe de représentants de populations locales mécontents de ses agissements et de ceux de l’UPR pour les convaincre vainement de sa bonne foi en les incitant à se rendre au meeting de l’UPR ;
la distribution dans les différents quartiers, du poisson « yaye boye », du blé, du sucre, de l’argent, la promesse des lots de terrains à quiconque assistera au meeting de l’UPR et même le collage des photos du Général Aziz sur les voitures chargées de la publicité du meeting;
les ordres donnés aux directeurs régionaux des entreprises publiques de convoquer leurs travailleurs le samedi 15/05/2010 à 16H en vue de les dissuader d’assister au meeting de la COD et de leur recommander celui de l’UPR.
Ayant eu connaissance des faits précités, la Coordination Régionale de l’Opposition Démocratique a demandé l’audience du Wali le 14/05/2010 pour lui faire part de ses observations à ce sujet, mais il a refusé de la recevoir sans aucune explication.
Malgré le comportement irresponsable de cette autorité administrative, la Coordination Régionale de l’Opposition Démocratique, réaffirme sa ferme volonté de tenir un grand meeting populaire à Nouadhibou à la date et au lieu initialement prévus. Elle tient également à dénoncer ces faits auprès de l’opinion publique et à mettre encore une fois le pouvoir en place face à sa responsabilité dans toute détérioration de la situation.
Nouadhibou, le 14/05/2010
La Coordination Régionale de la C.O.D
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