samedi 2 août 2008

30ème anniversaire - 10 Juillet 1978, les militaires prennent le pouvoir et sont reconnus internationalement



10 . 20 . 28 Juillet 1978

les militaires prennent le pouvoir, sans coup férir à l’intérieur
& sont reconnus internationalement




Avertissement – avant de proposer une analyse personnelle du putsch du 10 juillet 1978 et de ses conséquences pour la Mauritanie et pour les Mauritaniens, il me semble que la simple présentation des faits, dans leur déroulement chronoloique, et surtout les déclarations de l’époque – à rapporter aux indications rétrospectives des principaux acteurs du coup, dont
Le Calame a commencé la publication – sont nécessaires pour la mémoire collective.



Le lundi 10 Juillet 1978, à l’aube, les membres du Bureau politique national et du gouvernement sont arrêtés à leur domicile respectif. Premier d’entre eux – à quatre heures du matin –, le président de la République, secrétaire général du Parti unique de l’Etat, à qui son propre aide-de-camp signifie que les forces armées lui retirent leur confiance (sic [1]) : il est mené au camp du Génie, où l’ « accueille » le capitaine Athié. Moktar Ould Daddah allait s’envoler dans la journée pour Khartoum, où va se tenir le sommet de l’Organisation de l’Unité africaine. Mariem, son épouse, est à Dakar depuis trois jours, pour un congrès de juristes. Les enfants dorment encore à la résidence.

Les communiqués se succèdent dans la matinée : « les forces armées, dépositaires en dernier recours de la légitimité nationale, conscientes de leurs responsabilités ont pris le pouvoir, ou plutôt ont repris le pouvoir à ceux qui l’ont lâchement spolié pour sauver le pays et la nation de la ruine et du démembrement, pour sauvegarder l’unité nationale et défendre l’existence de l’Etat » - « dissolution » de la Constitution, du Gouvernement, du Parlement, du Parti du peuple. « Le Comité assume tous les pouvoirs jusqu’à la mise en place d’institutions démocratiques » et demande « à la population d’observer le calme et la discipline et d’obéir aux consignes qui seront données par la radio ». Il est assuré que la Mauritanie aura un gouvernement civil qui appliquera la loi islamique et qu’elle respectera ses engagements islamiques, arabes et internationaux.

Le couvre-feu est instauré de 18 heures à 6 heures du matin

Dans la soirée, publication par Radio-Mauritanie [2] de la composition du « comité militaire de redressement national » C.M.R.N. (orthographe publiée – souvent incorrecte) : président lieutenant-colonel Mustapha Ould Mohamed Salek – membres : les lieutenants-colonels Ahmed Salem Ould Sidy, Mohamed Mahmoud Louli, Mohamed Khouna Ould Haïdalla, Maaouya Ould Sid Ahmed Taya, Cheikh Ould Baida, Ahmed Ould Abdallah, les commandants Dia Amadou, Thiam El Hadj, Soumare Silman, Moulay Ould Boukhriss, Jeddi Ould Salek, Hann Amadou, les capitaines Athier Amath et Mohamed Mahmoud Ould Dey [3], les lieutenants Ahmed Ould Aida et Moulay Hachem Ould Moulay Ahmed (c’est ce dernier, qui a arrêté le président de la République, en sa qualité d’aide-de-camp), enfin le commissaire de police Ly Mamadou.

Le directeur général de la Société nationale industrielle et minière (S.N.I.M. successeur pour l’essentiel de Miferma), Ismaël Ould Amar, déclare à l’AFP qu’il se félicite de l’action entreprise par le Comité militaire de redressement national. Le président du C.M.R.N. reçoit l’ambassadeur de Libye, doyen du corps diplomatique depuis 1975 ; l’audience antérieure de l’ambassadeur de France n’est pas rendue publique.

Il se trouve que, ce jour-là, séjournent en même temps, à Paris, le président Bourguiba, le commandant Jalloud, chef du gouvernement libyen et Abdelaziz Bouteflika, le ministre algérien des Affaires étrangères.


Le 11 Juillet, Reda Guedira, conseiller du roi Hassan II, et le colonel Dlimi, directeur des aides de camp du roi, se rendent à Nouakchott pour « s’informer de la situation en Mauritanie ».

Radio Mauritanie annonce, en fin de matinée, la formation d’un gouvernement. Président du gouvernement, lieutenant colonel Moustapha Ould Mohamed Salek - Affaires étrangères, Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf -Intérieur, commandant Jiddou Ould Salek - Justice et Affaires religieuses, Ba Ould Ne (ancien ministre et président de l’Assemblée nationale avec Moktar Ould Daddah) - Finances et commerce, Sid Ahmed Ould B’Neijara (qui avait succédé le 31 Mai à Ahmed Ould Daddah pour diriger la Banque centrale) – Equipement, lieutenant-colonel Ahmed Salem Ould Sidi - Transports, postes et télécommunications, artisanat et tourisme, colonel Viah Ould Mayouf - Plan et Mines, Mohamed el Moktar Ould Zamel - Industrie et Pêche, lieutenant-colonel Ahmed Ould Bouceif (qui ne fait pas encore partie du Comité militaire) - Développement rural, Dr. Ba Oumar - Education nationale, Sek Mame N’Diack -Culture et Information, Mohamed Yehdih Ould Breideleil - Santé et affaires sociales, Dr. Diagana - Contrôle et enquêtes, lieutenant-colonel Mohamed Mahmoud Ould Ahmed Louli - Secrétaire permanent du comité, chargé de l’administration du ministère de la Défense, lieutenant-colonel Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya.

Sur Radio France, Edouard Sablier assure que « contrairement à ce que semblent souhaiter les autorités algériennes, les nouveaux dirigeants de Nouakchott paraissent décidés à défendre, avec peut-être plus de vigueur qu’auparavant l’indépendance et à renforcer leurs liens d’amitié avec le Maroc ». L’AFP à Dakar confirme que les vols militaires français vers la Mauritanie ont eu leur fréquence habituelle depuis le début du coup d’Etat. A Paris-CDG, arrivée de Hamdi Ould Mouknass, ministre des Affaires étrangères depuis Avril 1970, venant du conseil des ministres de l’O.U.A. à Khartoum

Radio Mauritanie diffuse un entretien de Mustapha Ould Mohamed Saleck à Visnews. Les raisons du coup sont « le marasme économique », « le danger quotidien de révolte et de soulèvement populaire entrainés par la banqueroute qui menace le pays ». « Cette situation, et à défaut de toute tentative de solution menée par l’ancien régime, a fait que les Forces armées ont décidé de mettre fin au désordre et à l’anarchie politique et économique de l’ancien régime »

A Saumur, l’AFP confirme que Salek a suivi le peloton des élèves officiers de l’école d’application de l’armée blindée de cavalerie du 4 Avril au 5 Septembre 1960


Le 12 Juillet : cessez-le-feu unilatéral du Polisario vis-à-vis de la Mauritanie. « La guerre expansionniste contre le peuple sahraoui est la cause de tous les problèmes dans notre région, les peuples sahraoui, marocain et mauritanien ont lourdement souffert de ses conséquences injustes et criminelles. Le redressement qui s’opère en Mauritanie est le signe que les peuples ne peuvent pas rester longtemps dans la résignation et faire les frais de l’entêtement des responsables anti-nationaux. Nous sommes sûrs aussi qu’une situation plus grave prévaut au Maroc et qu’il n’est pas impossibke aux patriotes marocains de la dépasser. Ainsi face aux derniers événements en Mauritanie des iunstructions ont ét donées à l’armée de libération polulaire sahraouie poiur cesser momentanément les opérations militaires en territoire mauritanien, comme geste de bonne volonté et par désir de e pas augmenter la tension. L’occasion est ainsi offerte aux nouveaux dirigeants de la Mauritanie de réviser la position criminelle du chef déposé, car c’est l’unique condition à tout redressement en Mauritanie » .
Aussitôt, l’Aosario, qui défend la légitimité du Maroc et de la Mauritanie au Sahara occidental, communique l’« existence d’un plan insurrectionnel, conçu et téléguidé à partir d’Alger et de Tripoli ».

Le pape Paul VI télégraphie à Mgr. Pierre de Chevigny, premier évêque de Nouakchott : la Mauritanie, je me rappelle l’avoir autrefois vue d’avion. Sollicitude inquiète pour le pays.

En conférence de presse, Mustapha Ould Mohamed Saleck souhaite consolider les liens particuliers existant avec la France et le maintien des Jaguar en Mauritanie « aussi longtemps que pèsera sur elle la menace d’une agression ». Il assure que « les institutions républicaines étaient bafouées, le pays était arrivé à la banqueroute. L’ancien gouvernement s’était montré incapable de faire face à cette situation. Notre entreprise répond fidèlement à la volonté profonde du peuple de voir ériger des nouvelles institutions démocratiques librement choisies par lui. Nous respecterons la volonté populaire » et que « le redressement du pays est probablement conditionné par l’évolution du conflit. Avec le Maroc, nous allons sûrement établir un calendrier de travail pour engager un processus qui mène à la paix ». A France Inter, il confirme qu’il « souhaite naturellement » le maintien de l’assistance technique française.

Chaab reparaît, après deux jours d’interruption : « les forces armées ont repris le pouvoir à ceux qui l’ont spolié », et publie un entretien avec le président du Comité militaire : « nous avons repris le pouvoir à un moment où notre peuple avait plus que jamais besoin d’être sauvé ».
Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf, le nouveau ministre des Affaires étrangères : « nous sommes disposés à étudier toute initiative de paix d’où qu’elle vienne ».

A Nouakchott, première manifestation de soutien aux nouveaux dirigeants. A Rabat, il est dit que Hassan II, dès qu’il fut informé du coup, « a donné des instructions très fermes au contingent marocain stationné dans le pays de n’intervenir sous aucun prétexte ». A Khartoum, en conseil des ministres de l’O.U.A., Mhamed Boucetta, ministre des Affaires étrangères marocain assure que « les engagements du Maroc à l’égard de la Mauritanie restent inchangés ». A Paris, Abdelaziz Bouteflika, ministre algérien des Affaires étrangères, est reçu par le président Giscard d’Estaing dans l’après-midi : « il manquait aux rapports franco-algériens la dimension de la concertation politique que je suis venu inaugurer aujourd’hui ».


Le 13 Juillet, Paris Match publie un entretien avec Hassan II : « le Maroc ne peut que continuer à apporter son soutien et sa solidarité au nouveau gouvernement mauritanien ». Il voit en Mustapaha Ould Mohamed Saleck : « un homme pondéré, calme, ayant le sens de ses responsabilités, et un homme extrêmement courtois » et pense que les raisons du coup sont liées à des « problèmes d’ordre économique et financier, et je le crois aussi une crise d’autorité particulièrement gênante dans cette période où la Mauritanie a besoin de décisions fermes et rapides, et non contradictoires ». Mais il redit « toute son estime » pour Moktar Ould Daddah et assure que « même ceux qui ont fait le coup d’Etat, ont pour lui la plus grande estime et le plus grand respect »

Dans un discours radiodiffusé, le président du Comité analyse que « le pouvoir personnel a réduit à néant les institutions en vigueur depuis 1960 ». « L’armée reprend le pouvoir qui vous avait été confisqué pour vous le remettre dans les plus brefs délais, elle n’est pas une armée de coup d’Etat », le multipartisme est promis, et comme « le pouvoir personnel avait réduit le pays à la ruine », l’économie libérale sera instaurée. Au Sahara, continue-t-il, « nous sommes déterminés à lui trouver une solution conforme aux intérêts du peuple mauritanien et en accord avec le Royaume frère du Maroc qui est concerné au même degré que nous ». Enfin, il s’agit de restaurer la « morale islamique dans sa pureté, sa générosité, son don de soi, son ouverture et sa rigueur morale »

Le gouvernement tient sa première réunion depuis « sa constitution à la suite de l’action héroïque du 10 Juillet »

Chaab publie l’intégralité de l’entretien de Mustapha Ould Mohamed Saleck à France Inter : « nous voulons que notre pays puisse renaître et refaire des institutions véritablement démocratiques consenties et librement choisies par le peuple » et des photographies de la veille : « premier bain de foule pour le président et les membres du comité militaire de redressement national ».


Le 14 Juillet, Michel Removille, l’ambassadeur de France, reçoit trois des nouveaux ministres pour la réception traditionnelle : Mohamed el Moktar Ould Zamel, Seck Mame Diack, Sid’Ahmed Ould Bneïjara. Un nouvel ambassadeur du Maroc est nommé : Ahmed Snoussi, précédemment ambassadeur en Algérie (antérieurement ministre de l’Information de 1967 à 1971 puis président de Lafarge-Maroc).

Accompagné par Habib Ould Souleymane, émir du Trarza -, Bocar Alpha Ba, ancien ministre des Finances -, Cheikh Ould Aimine, ancien secrétaire général de l’U.T.M. -, Ahmed Ould Ouafi, directeur de la société arabo-mauritanienne de métallurgie -, le nouveau ministre des Affaires étrangères, Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf, se rend à Rabat avec un message personnel pour le roi Hassan II : « nous sommes venus à Rabat afin d’assurer le roi du Maroc et les autorités de ce pays qu’entre nous il n’est pas possible qu’il puisse exister le moindre nuage. Notre coopération ne peut que se renforcer avec le Maroc » . En réponse, le roi souhaite « plein succès à l’expérience entreprise par le Comité militaire de redressement national ». Le ministre se rend ensuite à Khartoum où il représentera la Mauritanie. Pour la première fois, depuis la fondation de l’O.U.A., Moktar Ould Daddah n’assiste pas à son sommet : par force.

Le 15, à la nuit encore noire [4]et secrètement, Moktar Ould Daddah est emmené de Nouakchott à Oualata, via Aïoun et Nema. Chaab indique que « la reprise du pouvoir par nos forces armées à l’aube de la journée historique du 10 juillet continue de susciter d’importantes manifestations de joie et de soutien chez notre peuple qui a longtemps souffert de la politique de corruption et de trahison nationale du gouvernement déchu ». Dès qu’il est libéré, Tijani Ould Kerim, président du Conseil supérieur des jeunes du Parti du Peuple, déclare que « sous le précédent régime, la situation était devenue bloquée, les perspectives de solution étaient quasi inexistantes. Il fallait de nouveaux hommes, de nouvelles forces pour réaliser la paix »

A Dakar, le président Senghor reçoit dans la soirée le lieutenant-colonel Ahmed Salem Ould Sidi, membre du Comité et ministre de l’Equipement.


Le 16 , une « gigantesque marche pour soutenir le programme du C.M.R.N. » est organisée par la C.E.A.M. (confédération des employeurs et artisans de Mauritanie, le patronat).

Robert Galley, le ministre français de la Coopération dément les propos que Reuter lui a prêtés le 14 : « M. Robert Galley, ministre français de la Coopération, a demandé à ce qu’on fasse part de sa stupéfaction devant l’interprêtation erronnée donnée à certains de ses propos par une agence de preesse. Il a tenu à faire savoir aux autorités mauritaniennes qu’il n’a jamais, ni par communication publique, ni en privé, porté de jugement de quelque nature que ce soit sur le nouveau gouvernement mauritanien. Il en veut pour preuve l’intérêt qu’il porte à la venue prochaine à Paris d’une mission conduite par le ministre de l’Equipement, mission qui sera reçue aussi bien à la présidence de la République, qu’au ministère des Affaires Etrangères et à celui de la Coopération ».

De fait, les 18 et 19 Juillet, à Paris, le lieutenant-colonel Ahmed Salem Ould Sidi, est reçu par René Journiac, chargé des affaires africaines à l’Elysée, puis par Louis de Guiringaud et Robert Galley, respectivement ministre des Affaires étrangères et ministre de la Coopération. Il entend « apporter un certain nombre d’informations au nom du gouvernement mauritanien au gouvernement français. Ces entretiens se sont déroulés dans un climat empreint de chaleur, d’amitié et de franchise à l’image des liens de toute sortes qui nous unissent à la France et que nous voulons voir se développer et se renforcer toujours davantage ». A Dakar, le bureau de la fédération internationale des femmes de carrière juridique, demande que les enfants de Moktar Ould Daddah puissent rejoindre leur mère, Mariem.


Le 20, quoique datée du jour-même du putsch, la Charte constitutionnelle du C.M.R.N. est rendue publique. Mohamed Khouna Ould Haidalla, qui commandait la 1ère région = Tiris El Gharbia, est nommé chef d’état-major national en succession à Mustapha Ould Mohamed Saleck, avec le maintien en second du lieutenant-colonel Ahmedou Ould Abdallah, commandant de la 6ème région militaire = Nouakchott. De Koweit, parvient la rumeur que le président sénégalais a demandé aux militaires – secrètement – la libération du président Moktar Ould Daddah.


Le 23, une « délégation de travailleurs » se rend chez le président du Comité militaire pour lui réclamer l’ « arrêt de la guerre fratricide et (des) initiatives rapides de paix juste et négociée entre toutes les parties concernées ».

Le 24, pour raisons de santé, Abdallahi Ould Boyé, responsable de la permanence du Parti, est libéré, et Le Monde fait état de l’attente de ses enfants par Mariem à Dakar.

Enfin, le 27 Juillet, le président Giscard d’Estaing reçoit le lieutenant-colonel Ahmed Salem Ould Sidi et Sid’Ahmed Ould Bneijara, le nouveau ministre des Finances. Il n’est pas question pour la Mauritanie de réintégrer la zone franc, qu’elle a quittée depuis plus de cinq ans. Les deux confirment à l’Elysée que Moktar Ould Daddah « est toujours en résidence surveillée et est bien traité ». Le fort de Oualata, résidence ? les malheureuses victimes des purges de 1987 à 1990 l’attestent…


Et le lendemain, 28, le porte-parole français, Pierre Hunt, communique que « après la visite des ministres mauritaniens à l’Elysée, le Président de la République a indiqué que la France est favorable à un processus de retour à la paix au Sahara occidental et que les circonstances nouvelles permettent aujourd’hui de progresser dans la recherche d’une solution acceptable par toutes les parties intéressées ».

Ould Kaïge


[1] - Moktar Ould Daddah, commence ses mémoires (La Mauritanie contre vents et marées Karthala . Octobre 2003 . 669 pages – disponible en arabe et en français) par le récit de ce qu’il a vêcu du putsch pp. 20 et ss.

[2] - le père-fondateur – il a obtenu dans la journée un Coran et un poste de radio à piles – , apprend ainsi la liste de ceux qui l’ont renversé : « la même radio Nouakchott commence à ‘taper’ sur ‘le régime déchu’. Le plus naturellement du monde elle se fait la griotte zélée des putschistes qui, à len croire, allaient faire vivre au pays une ère paradisi aque. En écoutant les listes – vraies ou fausses – de ceux qui soutiennent les putschistes, alors que la veille ils rivalisaient d’ardeur militante au sein du PPM, je ne peux m’empêcher de sourire. Et de méditer, plus profondément encore, sur la fragilité, le caractère volage des sentiments et des comportements humains. Lieux communs, diraient certains… Il est vrai que je ne suis pas du tout surpris : j’ai souvent dit qu’en tant qu’homme politique, je m’attendais à tout, de la part de tous. Sans être sceptique et, tout en faisant foncièrement confiance à l’homme, j’ai souvent douté de la sincérité de ceux qui déclarent à qui veut les entendre leur attachement et leur dévouement aux puissants du moment. C’est pourquoi, dans mes relations personnelles, seules les amitiés antérieures à 1957 me paraissent avoir pu être sincères et désintéressées : elles ont existé entre Moktar et untel et non entre untel et le Président Moktar. Il y a bien sûr – et heureusement – des exceptions, mais des exceptions qui confirment la règle. L’opportunisme des auteurs des messages de soutien lus à la radio me fait penser au prototype de l’opportuniste évoqué par un gave qui pourrait approximativement se traduire ainsi : ‘Sidi qui est maintenant avec vous, était auparavant avec nous. A présent, peu importe qu’il soit avec vous ou qu’il soit avec nous… » op. cit. p. 23 & 24

[3] - le premier, gardien du président Moktar Ould Daddah au Génie, et le second, le convoyant de Nouakchott à Néma

[4] - « Cap sur l’aéroport de Nouakchott. En bout de piste, ‘la familale’ stoppe tout près d’un petit Defender, à l’arrêt. Tout le monde descend. Je fais seul quelques pas dans la fraîcheur de la nuit finissante de Nouakchott. Nouakchott endormie sous ses lumières publiques éparses et souvent pâles. Rien alentour ne m’indique que quelque chose a changé en République Islamique de Mauritanie : le même ciel encore constellé d’étoiles dont certaines sont scintillantes, le même silence profond de la nuit que je voyais et sentais lorsqu’il m’arrivait de décoller vers la même heure matinale pour effectuer des tournées à l’intérieur du pays ou des voyages à l’étranger », Moktar Ould Daddah, op. cit. p.25

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