Mauritanien d'adoption depuis un service national français effectué à l'Ecole nationale d'administration mauritanienne (Février 1965 . Avril 1966), je souhaite dialoguer ce que je continue d'apprendre de la Mauritanie, et - avec mes amis mauritaniens - ce que je sais du legs de leur fondateur moderne : Moktar Ould Daddah, qui me surnomma Ould Kaïge (Mars 1974). L'accompagnant à son retour d'exil (Juillet 2001), j'eus l'honneur de relire ses mémoires. - b.fdef@wanadoo.fr
jeudi 30 juin 2011
mercredi 29 juin 2011
mardi 28 juin 2011
lundi 27 juin 2011
dimanche 26 juin 2011
samedi 25 juin 2011
vendredi 24 juin 2011
jeudi 23 juin 2011
mercredi 22 juin 2011
mardi 21 juin 2011
journal de maintenant - mardi 21 juin 2011
Mardi 21 Juin 2011
Dialogue dans une réception parisienne mettant en présence différents éditorialistes, chercheurs et journalistes. Un Français ayant servi en Afrique se fait présenter un jeune chercheur mauritanien. C’est ce dernier qui raconte. S’étant nommé, il s’entend demander : "vous êtes de quelle tribu ?" – Moi, je répond "pardon ?". L’autre assure : "je ne sais pas si ça se dit encore de nos jours mais, dans le temps, les Mauritaniens se présentaient en précisant la tribu". Je réplique "pardonnez-moi, mais d'habitude, lorsque je dis que je suis Mauritanien, on me demande de situer le pays sur la carte, c'est la première fois qu'on demande ma tribu". Je suis confirmé dans la manière de voir de la plupart des « coloniaux », avec laquelle Moktar Ould Daddah a absolument voulu rompre, jusqu’aux régions ne portant plus que des numéros. Mais mon correspondant mauritanien semble y voir une connaissance étendue du pays chez son interlocuteur, il est vrai hassanophone de sucroît. Il est vrai que – factuellement – avec les moyens de locomotion et de communication dont elle disposait l’administration coloniale, connaissait mieux le pays que bien des Mauritaniens : c’est la fonction d’interprète et dans une moindre mesure, celle d’instituteur, qui rendit à ces derniers la connaissance actualisée et nomenclaturée de leur pays, en sociologie à la française. Mais quoi ? un pays n’est pas ce s’appelait « les tableaux de commandement ». Je reconnais cependant que ces tableaux des collectivités et cet ajout à la précision du patronyme, sont utiles, et même satisfaisants pour un esprit français. C’est aussi réduire à peu la liberté et l’originalité d’un Africain qui ne serait donc que le produit de sa société…
Dialogue dans une réception parisienne mettant en présence différents éditorialistes, chercheurs et journalistes. Un Français ayant servi en Afrique se fait présenter un jeune chercheur mauritanien. C’est ce dernier qui raconte. S’étant nommé, il s’entend demander : "vous êtes de quelle tribu ?" – Moi, je répond "pardon ?". L’autre assure : "je ne sais pas si ça se dit encore de nos jours mais, dans le temps, les Mauritaniens se présentaient en précisant la tribu". Je réplique "pardonnez-moi, mais d'habitude, lorsque je dis que je suis Mauritanien, on me demande de situer le pays sur la carte, c'est la première fois qu'on demande ma tribu". Je suis confirmé dans la manière de voir de la plupart des « coloniaux », avec laquelle Moktar Ould Daddah a absolument voulu rompre, jusqu’aux régions ne portant plus que des numéros. Mais mon correspondant mauritanien semble y voir une connaissance étendue du pays chez son interlocuteur, il est vrai hassanophone de sucroît. Il est vrai que – factuellement – avec les moyens de locomotion et de communication dont elle disposait l’administration coloniale, connaissait mieux le pays que bien des Mauritaniens : c’est la fonction d’interprète et dans une moindre mesure, celle d’instituteur, qui rendit à ces derniers la connaissance actualisée et nomenclaturée de leur pays, en sociologie à la française. Mais quoi ? un pays n’est pas ce s’appelait « les tableaux de commandement ». Je reconnais cependant que ces tableaux des collectivités et cet ajout à la précision du patronyme, sont utiles, et même satisfaisants pour un esprit français. C’est aussi réduire à peu la liberté et l’originalité d’un Africain qui ne serait donc que le produit de sa société…
La C.O.D. met au point la feuille de route du dialogue avec le président régnant, selon consenus des chefs des partis d’opposition. Puisse-t-elle se souvenir de la manière dont elle fut embobinée à Dakar, il y a tout juste deux ans. La plupart de ses dirigeants coalisés ont une expérience particulière de la relation avec Mohamed Ould Abdel Aziz. Puisse chacun se souvenir de la manière dont a tourné l’élection présidentielle, censément transparente… puisqu’il s’agit bien d’organiser les élections parlementaires de l’automne.
La C.O.D. met au point la feuille de route du dialogue avec le président régnant, selon consenus des chefs des partis d’opposition. Puisse-t-elle se souvenir de la manière dont elle fut embobinée à Dakar, il y a tout juste deux ans. La plupart de ses dirigeants coalisés ont une expérience particulière de la relation avec Mohamed Ould Abdel Aziz. Puisse chacun se souvenir de la manière dont a tourné l’élection présidentielle, censément transparente… puisqu’il s’agit bien d’organiser les élections parlementaires de l’automne.
lundi 20 juin 2011
dimanche 19 juin 2011
un évêque - évêque de Nouakchott en République Islamique de Mauritanie
présentation biographique de Mgr Robert de Chevigny
Robert de Chevigny, homme de service
- Né le 2 août 1920 à Besançon, Robert sera baptisé le 4. Son enfance se passera essentiellement aux haras du Pin, dans l’Orne, haras nationaux dont son père est directeur.
- Enfance heureuse avec ses 4 frères et ses 2 sœurs. Ils connaîtront les sorties en calèche, apprendront les bonnes manières et enregistreront quelques mots du répertoire des palefreniers.
- Robert a 14 ans quand la famille s’installe à Versailles. Il y passera son Baccalauréat.
- En septembre 1940, Robert prononce ses premiers vœux à Piré-sur-Seiche.
- La guerre est là.
- Philosophie à Langonnet et à Cellule.
- En novembre 1942, il part pour 32 mois en Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne, dans les Sudètes. Après la libération, il y prolongera son séjour afin de rester auprès de camarades malades.
- Le 3 octobre 1948, il est ordonné prêtre à Chevilly-Larue. C’est là qu’il recevra son obédience pour la Guinée : 18 ans d’intense service à Conakry et à Fria. En mai 1967, il est dans le lot des missionnaires étrangers expulsés par le président Sékou-Touré.
- Il est nommé à Lille comme supérieur de la communauté et devient également animateur missionnaire.
- Sénégal. Le grand Séminaire de Sébikotane est en difficulté. Robert y sera supérieur pendant 2 ans.
- En 1973, la démission de l’évêque de Nouakchott, Mgr Michel Bernard, est acceptée. On lit dans une lettre de Robert de Chevigny au provincial de France, Georges-Henri Thibault : « Peut-être fais-tu allusion à Nouakchott ? Si jamais cela me tombait sur le dos, j’ai bien l’intention de refuser car je ne crois vraiment pas avoir les qualités requises – et je ne suis pas le seul à le penser. Ici, à la paroisse Sainte-Thérèse de Dakar, je me sens bien dans ma peau de prêtre et de spiritain. »
- Le 23 février 1974, toujours dans la chapelle de Chevilly-Larue, le Père Robert de Chevigny reçoit l’ordination épiscopale des mains de Mgr Thiandoum, archevêque de Dakar, de Mgr Michel Bernard, archevêque-évêque de Nouakchott, et de Mgr Le Bourgeois, évêque d’Autun. En hommage à Mgr Raymond-Marie Tchidimbo, alors injustement retenu dans les geôles guinéennes, il prendra la même devise que lui : « Spes non confundit » (« l’Espérance ne déçoit pas »).
- En Mauritanie, 5000 chrétiens, tous immigrés vivent au milieu de 2 millions de musulmans. 15 religieuses et 12 religieux sont à leur service. Mgr Robert de Chevigny y vivra 21 ans entièrement donné à tous, nullement effarouché par la multiplicité des cultures qui émaillent ce petit pays.
- Un fait évocateur, un seulement. En mars 1974, Robert arrive à Nouakchott. Il s’adresse au P. Paul Grasser : « Paul, avant ton départ pour 4 ans en France, fais-moi traverser le pays. (1300 km jusqu’à la frontière malienne). – Robert, cela est impossible. Je ne l’ai jamais fait moi-même. Il y a des parties sans piste et la température monte à 50° ! » On se lance. Un certain jour, le midi se passe dans l’épais Borj colonial (maison en pisé) d’un préfet. Très longue sieste. « Robert, et si nous en profitions pour célébrer la messe ? « –« Excellente idée ! » Au partage d’Évangile, on frappe à la porte : arrivent la boisson, le thé, et le préfet. Nous rangeons nos livres de prière. Le soir, dans un autre bivouac, les gens s’endorment. « Robert, et si nous continuions notre messe ? » « – Excellente idée ! » Nous déployons le corporal et sortons les hosties, etc.
- Il était ainsi, notre cher Père évêque… qui, en d’autres circonstances n’aimait guère les excentricités.
- En automne 1995, le Père Martin Happe devient le 3e évêque de Mauritanie. Robert de Chevigny va alors accomplir son rêve secret. Après une année de recyclage à Paris, il repart pour 7 ans en Guinée Conakry. Ce sera dur !
- En janvier 2003, il est affecté à la communauté de Chevilly-Larue : retraite ! Ce sera plus dur encore. Il fera encore quelques échappées pastorales (à Cherence), mais il est usé.
- Sereinement, il expire la veille de la Pentecôte.
- Le magnifique serviteur aura appris à ralentir, laissant au Maître l’honneur de l’approcher pour le servir.
Robert de Chevigny, homme de service
- Né le 2 août 1920 à Besançon, Robert sera baptisé le 4. Son enfance se passera essentiellement aux haras du Pin, dans l’Orne, haras nationaux dont son père est directeur.
- Enfance heureuse avec ses 4 frères et ses 2 sœurs. Ils connaîtront les sorties en calèche, apprendront les bonnes manières et enregistreront quelques mots du répertoire des palefreniers.
- Robert a 14 ans quand la famille s’installe à Versailles. Il y passera son Baccalauréat.
- En septembre 1940, Robert prononce ses premiers vœux à Piré-sur-Seiche.
- La guerre est là.
- Philosophie à Langonnet et à Cellule.
- En novembre 1942, il part pour 32 mois en Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne, dans les Sudètes. Après la libération, il y prolongera son séjour afin de rester auprès de camarades malades.
- Le 3 octobre 1948, il est ordonné prêtre à Chevilly-Larue. C’est là qu’il recevra son obédience pour la Guinée : 18 ans d’intense service à Conakry et à Fria. En mai 1967, il est dans le lot des missionnaires étrangers expulsés par le président Sékou-Touré.
- Il est nommé à Lille comme supérieur de la communauté et devient également animateur missionnaire.
- Sénégal. Le grand Séminaire de Sébikotane est en difficulté. Robert y sera supérieur pendant 2 ans.
- En 1973, la démission de l’évêque de Nouakchott, Mgr Michel Bernard, est acceptée. On lit dans une lettre de Robert de Chevigny au provincial de France, Georges-Henri Thibault : « Peut-être fais-tu allusion à Nouakchott ? Si jamais cela me tombait sur le dos, j’ai bien l’intention de refuser car je ne crois vraiment pas avoir les qualités requises – et je ne suis pas le seul à le penser. Ici, à la paroisse Sainte-Thérèse de Dakar, je me sens bien dans ma peau de prêtre et de spiritain. »
- Le 23 février 1974, toujours dans la chapelle de Chevilly-Larue, le Père Robert de Chevigny reçoit l’ordination épiscopale des mains de Mgr Thiandoum, archevêque de Dakar, de Mgr Michel Bernard, archevêque-évêque de Nouakchott, et de Mgr Le Bourgeois, évêque d’Autun. En hommage à Mgr Raymond-Marie Tchidimbo, alors injustement retenu dans les geôles guinéennes, il prendra la même devise que lui : « Spes non confundit » (« l’Espérance ne déçoit pas »).
- En Mauritanie, 5000 chrétiens, tous immigrés vivent au milieu de 2 millions de musulmans. 15 religieuses et 12 religieux sont à leur service. Mgr Robert de Chevigny y vivra 21 ans entièrement donné à tous, nullement effarouché par la multiplicité des cultures qui émaillent ce petit pays.
- Un fait évocateur, un seulement. En mars 1974, Robert arrive à Nouakchott. Il s’adresse au P. Paul Grasser : « Paul, avant ton départ pour 4 ans en France, fais-moi traverser le pays. (1300 km jusqu’à la frontière malienne). – Robert, cela est impossible. Je ne l’ai jamais fait moi-même. Il y a des parties sans piste et la température monte à 50° ! » On se lance. Un certain jour, le midi se passe dans l’épais Borj colonial (maison en pisé) d’un préfet. Très longue sieste. « Robert, et si nous en profitions pour célébrer la messe ? « –« Excellente idée ! » Au partage d’Évangile, on frappe à la porte : arrivent la boisson, le thé, et le préfet. Nous rangeons nos livres de prière. Le soir, dans un autre bivouac, les gens s’endorment. « Robert, et si nous continuions notre messe ? » « – Excellente idée ! » Nous déployons le corporal et sortons les hosties, etc.
- Il était ainsi, notre cher Père évêque… qui, en d’autres circonstances n’aimait guère les excentricités.
- En automne 1995, le Père Martin Happe devient le 3e évêque de Mauritanie. Robert de Chevigny va alors accomplir son rêve secret. Après une année de recyclage à Paris, il repart pour 7 ans en Guinée Conakry. Ce sera dur !
- En janvier 2003, il est affecté à la communauté de Chevilly-Larue : retraite ! Ce sera plus dur encore. Il fera encore quelques échappées pastorales (à Cherence), mais il est usé.
- Sereinement, il expire la veille de la Pentecôte.
- Le magnifique serviteur aura appris à ralentir, laissant au Maître l’honneur de l’approcher pour le servir.
6 lignes de son testament :
Je remercie la Congrégation de tout le soutien physique et moral qu’elle m’a accordé. La spiritualité du P. Libermann, présentée ou vécue par bon nombre de mes confrères de la Province de France, de Guinée, du Sénégal ou de la Mauritanie m’a fait grandir dans la Foi et l’Amour en Jésus-Christ, notre Sauveur et notre Frère.
Tous nous nous retrouverons bientôt dans sa Paix et sa Joie – avec la Vierge Marie qu’il nous a donnée comme Maman du Ciel. Alleluia.
Fait et écrit de ma propre main à Paris,
Le 25 septembre 2002.
+ R. de Chevigny
*
* *
Chers amis du diocèse de Nouakchott,
vous avez lu la notice biographique du Père Robert de Chevigny, voici un petit complément.
Le Père Robert est donc vraiment mort de vieillesse, tranquillement, la veille de la Pentecôte, fête principale des Spiritains. Le mardi 15 juin, son cercueil posé entre les stalles de la Chapelle de l'ex-grand séminaire de la Congrégation du Saint-Esprit, à l'endroit même où Robert avait prononcé ses voeux définitifs de religieux, reçu l'ordination sacerdotale en octobre 1948 et finalement l'ordination épiscopale le 23 février 1974.
Notre eucharistie, notre "action de grâces", est présidée par son sucesseur Mgr Martin Happe, qui fit des prouesses pour venir de Poponguine via Nouakchott et Dakar jusqu'à Chevilly-Larue.
Les deux familles de Robert, la spirituelle et celle de naissance, rassemblaient près de deux cent personnes. Bien des amis, d'époques et d'horizons différents, bien des représentantes des congrégations féminines étaient présentes. Le Père Paul Grasser présenta la vie de Monseigneur; son neveu, l'Abbé Antoine Mérillon, fit la bénédiction au cimetière, ses nièces, Véronique et Ghislaine prononcèrent de magnifiques témoignages. Le Vicaire Provincial des Spiritains de France fit la prière de l'Absoute.
A l'entrée du cimetière, à deux pas de la tombe de Mgr Michel Bernard, du Père Terlet, de Jean Delcourt et du Frère Félicien (Dakar et Saint-Louis), nous écoutions avec émotion la "Prière à Notre Dame de Mauritanie", dite par le Père René Prévot. Sur demande du Père Robert, cette prière avait été composée à l'occasion du vingtième anniversaire de la fondation du diocèse, par le Père Jacques Meugniot (décédé à Pâques dans son Abbaye de Solesmes). Elle vient d'être rééditée.
L'Ave Maria de Lourdes conclut la prière, le chant du Père Deiss "L'Esprit de Dieu repose sur moi...l'Esprit de Dieu m'a envoyé proclamer la paix la joie." l'avait ouverte.
rédigé 30 rue Lhomond 75005 ce 16 juin 2011 par Paul Grasser
prière d'un ermite chrétien en Mauritanie... pour la Mauritanie
prière à Notre Dame de Mauritanie
O MARIE,
En qui nos frères musulmans reconnaissent la mère virginale de Jésus conçu par l’Esprit du Dieu Tout Puissant,
Toi qu’ils honorent comme choisie par Dieu de préférence à toutes les femmes de l’univers ;
Mère des hommes et des nations,
Notre Dame de Mauritanie
Nous te confions avec foi, ce pays qui nous accueille avec ses craintes et ses espérances.
Ne le laisse pas manquer de la lumière de la vraie sagesse, guide-le dans la recherche de la liberté et de la justice pour tous.
Conduis ses pas sur les routes de la paix.
Donne-nous de lire dans leur soumission au Dieu d’Abraham un appel à davantage d’adoration et de prière.
Fais que tous et chacun rencontrent le Christ, Voie, Vérité et Vie.
Soutiens, ô Vierge Marie, notre chemin de foi, et obtiens-nous la grâce du salut éternel.
O clémente, ô pieuse, ô douce Mère de Dieu et notre Mère.
pour le vingtième anniversaire du diocèse de Nouakchott
composée et dite par Dom Jacques Meugniot, moine de Solesmes
(Père Yacoub : ermite à Atar, Kaédi et Toujounine – 1977.2005)
14 Juillet 1927 + 27 Avril 2011
O MARIE,
En qui nos frères musulmans reconnaissent la mère virginale de Jésus conçu par l’Esprit du Dieu Tout Puissant,
Toi qu’ils honorent comme choisie par Dieu de préférence à toutes les femmes de l’univers ;
Mère des hommes et des nations,
Notre Dame de Mauritanie
Nous te confions avec foi, ce pays qui nous accueille avec ses craintes et ses espérances.
Ne le laisse pas manquer de la lumière de la vraie sagesse, guide-le dans la recherche de la liberté et de la justice pour tous.
Conduis ses pas sur les routes de la paix.
Donne-nous de lire dans leur soumission au Dieu d’Abraham un appel à davantage d’adoration et de prière.
Fais que tous et chacun rencontrent le Christ, Voie, Vérité et Vie.
Soutiens, ô Vierge Marie, notre chemin de foi, et obtiens-nous la grâce du salut éternel.
O clémente, ô pieuse, ô douce Mère de Dieu et notre Mère.
pour le vingtième anniversaire du diocèse de Nouakchott
composée et dite par Dom Jacques Meugniot, moine de Solesmes
(Père Yacoub : ermite à Atar, Kaédi et Toujounine – 1977.2005)
14 Juillet 1927 + 27 Avril 2011
samedi 18 juin 2011
vendredi 17 juin 2011
jeudi 16 juin 2011
journal de maintenant - jeudi 16 juin 2011
Jeudi 16 Juin 2011
Je fais le point de ce que je ressens sur son pays, au plus éminent de mes correspondants mauritaniens.
… quelques lignes, ce soir, sur ce que je ressens de votre pays, ayant depuis la mi-Janvier une note de synthèse du genre de celle que je commis à la veille de l'élection de 2009 (dont je ne pensais pas qu'il y faudrait des guillemets dès qu'elle aurait eu lieu ou aurait été perpétrée), note en suspens et à reprendre totalement.
Depuis le coup du 6 Août, imagination de la mise au tapis de MOAA par un contre-coup. Scenario courant encore tout 2009 et une partie de 2010 mais comme seule issue imaginable, alors même que le lien Ghazouani-MOAA semble indéfectible et que personne en sait rien - à ma connaissance - de ce que pensent les officiers supérieurs et de ce à quoi la troupe, sans doute sous payée et sous-équipée, sauf le BASEP, serait disposée à faire. Espérance de la pression internationale le premier semestre de 2009, puis nouvelle échéance en Juin 2010 avec la réunion des bailleurs de fonds à Bruxelles. Déception, tout le monde a coupé dans le discours de MOAA ou la "communauté internationale" - France et Etats-Unis notamment - juge MOAA le meilleur sécuritaire.
Arrive le "printemps arabe" (titre de Benoist-Méchin sur 1956 et Nasser, sinon le FLN - trilingue, spécialiste de l'Allemagne après 14-18, ministre du maréchal Pétain de Février 41 à Avril 42, la seule alternative stratégique française à celle incarnée par de Gaulle, condamné à mort à la Libération, se convertit à un autre centre d'intérêt, le monde arabe dont il devient le spécialiste avec la biographie d'Ibn Séoud - celle aussi de Mustapha Kémal - conseiller de Barre explicitement, inspirateur probable de Couve de Murville, déjà très initié par son ambassade au Caire de 1950 à 1954 (chute de Farouk, débuts de Nasser et du barrage d'Assouan). Suicide de daoud junior, mouvement du 25 Février : processus tunisien ou égyptien ? rien n'a pris. La place des Blocs rendue indisponible, le mouvement noyauté, pas vraiment la rue en ébullition (elle ne le fut qu'en solidarité avec le président renversé, entre Août 2008 et Mars 2009, elle l'était potentiellement encore en Juin 2009, et le sit-in occupation de l'Assemblée nationale au début de Mai 2009, s'il s'était installé dans la durée aurait eu des conséquences décisives... ce ne fut pas). Aujourd'hui, les palinodies des partis et des personnalités... en fait depuis le voyage de Kouchner en Juillet 2010, Ahmed et Messaoud se relayent pour la pantalonnade des conversations hors COD avec MOAA et l'ADIL avec Yahya est entré dans ce jeu. Ces "dialogues" n'ont aucun sens profond, puisque le pouvoir - dans le système Taya ou MoAA - ne se partage pas. La probabilité c'est de truquer ensemble les élections et de se répartir à nouveau des rôles : MOAA, Messaoud, Ahmed. Les deux personnalités sur lesquelles le président Sidi, dans la période démocratique, avait commencé de s’appuyer : Ould Mouloud et Jemil, sont estimées, sont maintenant ensemble dans l'opposition mais ne parviennent pas à s'imposer à l'ensemble et notamment à supplanter Messaoud et Ahmed.
Ce jeu de la politique - qui rétrospectivement justifie le parti unique et les intégrations d'opposants en groupe ou individuellement à mesure des étapes d'indépendance effective du pays - est hors du réel. Il est sans prise sur des décisions désastreuses, comme la convention de pêche avec la Chine. Il confirme vos compatriotes dans le mépris de cette classe qui n'existait pas initialement et qui double tristement celle des nouveaux riches.
Les vieux conflits et les vieux théâtres subsistent : l'Université, les clivages ethniques sous des couverts linguistiques dans le secondaire et dans le supérieur. La question de l'esclavage combinée de façon complexe avec celle des haratine, voire de la perception des équilibres ethniques et sociaux, n'a peut-être pas ressurgi, plus qu'avant, mais elle est très exprimée dans le pays et à l'étranger.
L'investissement est national et privé. Il semble peu étranger, il n'est plus novateur.
L'éducation est parente pauvre, la connaissance de la Mauritanie par elle-même et ses enfants est faible : l'enseignement ne dit pas la Mauritanie contemporaine.
Plusieurs problèmes - assez nouveaux, sur dix ans...
- les jeunes de trente à quarante ans n'espèrent pas faire carrière selon leurs capacités au pays
- les opposants et les sites internets qui vont avec, sont à l'étranger
- les anciens restés ou revenus au pays vivent de retraites versés par l'étranger ou de locations d'immeubles locaux à des étrangers
- le pays n'étant pas un Etat de droit, toute carrière publique est précaire et les carrières privées, dès qu'elles réussissent vraiment, cherchent l'alliance avec le pouvoir en place quel qu'il soit
Les Mauritaniens et leur pays se referment sur eux-mêmes faute d'un régime ouvert à tous, faute de capitaliser sur l'enseignement.
Facteurs très handicapants : la sécheresse des années 70-80, le déficit alimentaire, la sédentarisation massive sans que l'économie ni l'urbanisation y correspondent...
Voilà quelques réflexions, apparemment tristes, mais vos compatriotes ont tellement de valeur, de vérité que je ne doute pas de l'avenir.
mercredi 15 juin 2011
mardi 14 juin 2011
lundi 13 juin 2011
dimanche 12 juin 2011
journal de maintenant - dimanche 12 juin 2011
Dimanche 12 Juin 2011
Je cherche à accéder aux bulletins quotidiens d’A.M.I. – Agence Mauritanienne d’Information – dont j’ai constaté l’été de 2009 la censure pour toute date antérieure à celle du 6 Août 2008. Cette censure est maintenue. La forme nouvelle des bulletins est frappante. Il ne s’agit plus d’une livraison quotidienne, mais d’une mise en ligne « glissante ». La succession des dépêches édifiante, c’est l’agenda du président régnant, le général Mohamed Ould Abdel Aziz, des ministres. Pour le factuel, ce qui arrange le pouvoir. Ainsi Messaoud Ould Boulkheir est reçu une nouvelle fois – juste aujourd’hui – par le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Et son intervention publique à Nouadhibou est présentée en synthèse : la descente dans la rue n’est pas une solution, dialogue et paix sociale. Rien sur la réintégration par Tawassoul de la coordination de l’opposition démocratique C.O.D. mais un accueil de dissidents de ce parti dans l’U.P.R., le parti présidentiel.
Que conclure sinon que les médias publics ne sont pas équilibrés ni au service de tous, ou au moins dédiés à donner les faits à mesure, même s’ils ne sont ps strictement la relation du pouvoir.
Une bonne nouvelle, le site initi.net – inauguré en Juillet 2010 – démarre vraiment.
Je cherche à accéder aux bulletins quotidiens d’A.M.I. – Agence Mauritanienne d’Information – dont j’ai constaté l’été de 2009 la censure pour toute date antérieure à celle du 6 Août 2008. Cette censure est maintenue. La forme nouvelle des bulletins est frappante. Il ne s’agit plus d’une livraison quotidienne, mais d’une mise en ligne « glissante ». La succession des dépêches édifiante, c’est l’agenda du président régnant, le général Mohamed Ould Abdel Aziz, des ministres. Pour le factuel, ce qui arrange le pouvoir. Ainsi Messaoud Ould Boulkheir est reçu une nouvelle fois – juste aujourd’hui – par le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Et son intervention publique à Nouadhibou est présentée en synthèse : la descente dans la rue n’est pas une solution, dialogue et paix sociale. Rien sur la réintégration par Tawassoul de la coordination de l’opposition démocratique C.O.D. mais un accueil de dissidents de ce parti dans l’U.P.R., le parti présidentiel.
Que conclure sinon que les médias publics ne sont pas équilibrés ni au service de tous, ou au moins dédiés à donner les faits à mesure, même s’ils ne sont ps strictement la relation du pouvoir.
Une bonne nouvelle, le site initi.net – inauguré en Juillet 2010 – démarre vraiment.
samedi 11 juin 2011
vendredi 10 juin 2011
jeudi 9 juin 2011
mercredi 8 juin 2011
journal de maintenant - mercredi 8 juin 2011 . soir
Mercredi 8 Juin 2011 . soir
Je reçois un écho de la conférence de presse de la Coordination de l’Opposition démocratique, telle qu’elle s’est tenue lundi 6
La conférence de presse s'est très bien passée. Jemil a annoncé l'adhésion de son parti à la COD, suite à une analyse approfondie de la situation, qui a abouti à un constat de l'échec de l'échec lamentable de la poltique du pouvoir. Après avoir mené une opposition-conseil pour le pouvoir sans résultat, nous nous inscrivons, désormais, dans une opposition claire et nette a -t-il dit. Au cours de la conférence de presse, un document demandant de mettre la lumière sur la mort du Colonel Med Lemine Ould Ndiayane, ancien Chef d'Etat Major des armées tué lors de la tentative de putsch du 8 juin 2003 a été distribué par la famille de celui. Des voies ont également demandé que le rideau soit levé sur la mort suspecte du Colonel Bouceif (tué en 1979 à Dakar, dans un accident d'avion jamais élucidé) et Colonel Jiddou Ould Salek, mort, à l'époque dans un accident de voiture sur lequel circulent beaucoup de rumeurs.
Jemil - sans doute moins que Mohamed Ould Mouloud, et différemment - sait analyser, penser, produire et décider. Je suis très content de sa décision, sans encore le connaître. Cela va clarifier aussi les choses tant du côté de Messaoud - qui ne pourra plus louvoyer - que du côté d'Ahmed qui considérait Jemil depuis Juillet 2009 comme objectivement du côté du pouvoir.
Bouceif et Jiddou : Mustapha et Haïdalla assurent chacun que ce sont deux accidents. Pour Bouceif, il m'est dit que le pilote - quoique gradé de l'armée de l'air, mais pas Abdel Kader, précisément qui "gardait" la maison - était en fait novice et qu'il aurait été présomptueux car la météo. était mauvaise dès avant le départ de Nouakchott : on voit bien toutes les raisons de l'accident, aussi que Mustapha et Haïdalla avaient chacun intérêt à sa mort. Ce que j'ai lu de l'ambassade de France ne le donne cependant pas à penser. Pour Jiddou, j'ai entendu dire qu'il y avait un filin d'acier tendu sur la route de l'Espoir dans l'attente de sa voiture.
Pour Mohamed Lemine Ould N'Diayane, la responsabilité personnelle de MOAA paraît établie par tous les témoins, pas seulement par ses proches de sang.
Ces investigations me paraissent très salutaires. Mais elles sont belligènes. Tout depuis 1978 est belligène, parce que tout a été occulté : ce qui est encore pire que le mensonge.
Je reçois un écho de la conférence de presse de la Coordination de l’Opposition démocratique, telle qu’elle s’est tenue lundi 6
La conférence de presse s'est très bien passée. Jemil a annoncé l'adhésion de son parti à la COD, suite à une analyse approfondie de la situation, qui a abouti à un constat de l'échec de l'échec lamentable de la poltique du pouvoir. Après avoir mené une opposition-conseil pour le pouvoir sans résultat, nous nous inscrivons, désormais, dans une opposition claire et nette a -t-il dit. Au cours de la conférence de presse, un document demandant de mettre la lumière sur la mort du Colonel Med Lemine Ould Ndiayane, ancien Chef d'Etat Major des armées tué lors de la tentative de putsch du 8 juin 2003 a été distribué par la famille de celui. Des voies ont également demandé que le rideau soit levé sur la mort suspecte du Colonel Bouceif (tué en 1979 à Dakar, dans un accident d'avion jamais élucidé) et Colonel Jiddou Ould Salek, mort, à l'époque dans un accident de voiture sur lequel circulent beaucoup de rumeurs.
Jemil - sans doute moins que Mohamed Ould Mouloud, et différemment - sait analyser, penser, produire et décider. Je suis très content de sa décision, sans encore le connaître. Cela va clarifier aussi les choses tant du côté de Messaoud - qui ne pourra plus louvoyer - que du côté d'Ahmed qui considérait Jemil depuis Juillet 2009 comme objectivement du côté du pouvoir.
Bouceif et Jiddou : Mustapha et Haïdalla assurent chacun que ce sont deux accidents. Pour Bouceif, il m'est dit que le pilote - quoique gradé de l'armée de l'air, mais pas Abdel Kader, précisément qui "gardait" la maison - était en fait novice et qu'il aurait été présomptueux car la météo. était mauvaise dès avant le départ de Nouakchott : on voit bien toutes les raisons de l'accident, aussi que Mustapha et Haïdalla avaient chacun intérêt à sa mort. Ce que j'ai lu de l'ambassade de France ne le donne cependant pas à penser. Pour Jiddou, j'ai entendu dire qu'il y avait un filin d'acier tendu sur la route de l'Espoir dans l'attente de sa voiture.
Pour Mohamed Lemine Ould N'Diayane, la responsabilité personnelle de MOAA paraît établie par tous les témoins, pas seulement par ses proches de sang.
Ces investigations me paraissent très salutaires. Mais elles sont belligènes. Tout depuis 1978 est belligène, parce que tout a été occulté : ce qui est encore pire que le mensonge.
journal de maintenant - mercredi 8 juin 2011 . matin
Mercredi 8 Juin 2011
Après avoir mis à jour mes contacts électroniques à la Commission de Bruxelles, je saisis le successeur du directeur Manservisi, qui avait signé avec Moulaye Ould Mohamed Laghdaf la lettre d’intention de Décembre 2009. Nick Westcott, le nouveau patron d’une DG Développement qui a changé un peu de configuration et de compétences, est d’origine britannique et a représenté au Ghana son pays. – J’adresse le même courriel à Yannis Alexandros qui suit, au cabinet de Catherine Ashton les questions d’Afrique, les affaires maritimes et la pêche, en brodant un peu l’excellent souvenir que je garde de son pays : la Grèce où j’avais été affecté comme patron des services économiques et commerciaux en 1982-1984.
----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: UE - DG ambassadeur Nick Westcott
Cc: UE - Manuel Lopez-Blanco ; UE - Filiberto Ceriani-Sebregondi . DG ACP
Sent: Wednesday, June 08, 2011 11:04 AM
Subject: pays stratégique à risque du fait de son mode de gouvernement - Mauritanie et pêcheries - un accord avec la Chine imposé par le pouvoir actuel à sa propre majorité parlementaire -
Monsieur l'Ambassadeur,
j'avais l'honneur et le plaisir de correspondre avec votre prédécesseur, le directeur Manservisi, tout à fait au fait des risques de notre relation avec la Mauritanie du fait de son actuel gouvernement.
Ce régime, à la légitimation duquel après un putsch en 2008 mon pays, la France, a malheureusement beaucoup contribué, ne remplit pas ses engagements au titre du traité et des procédures de Cotonou, telles qu'en l'espèce ils ont été actualisés par un accord - grandement forcé par la France - à Dakar entre toutes les parties mauritaniennes en Juin 2009, puis à Nouakchott-même en Décembre 2009 par une lettre d'intentions signée par votre prédécesseur et le Premier ministre du lieu, et enfin lors d'une table-ronde organisée par vos services à Bruxelles avec les bailleurs de fonds en Juin 2010.
Fondamentalement, il s'agit d'un système de gouvernement non ouvert aux contrôles, y compris les nôtres, et a fortiori ceux de l'opposition nationale, d'un système fonctionnant par clientélisme et corruption. C'est ainsi qu'un début de "printemps" en Février dernier - à l'instar des révolutions tunisienne et égyptienne - a été noyauté et acheté alors même qu'il dénonçait de honteux marchés immobiliers sur la place-même où était revendiquée une ouverture démocratique.
L'épisode en cours n'est pas que de politique intérieure. Il nous concerne pas seulement parce qu'un accord de pêcherie avec la Chine va ruiner tout un secteur national traditionnel, décisif socialement et ethniquement, mais parce qu'il s'agit - par vénalité - d'une étape de plus dans les avancées de la Chine au Sahel. La fenêtre maritime du Sahara, comme on le voit depuis trente ans à propos de l'ancienne possession espagnole, est décisive en matière de terrorisme et aussi pour ses ressources halieutiques.
La procédure est en cours. Voici comment j'en suis averti. Il est encore temps d'agir contre. C'est vraiment le cas d'école du refus de pratiquer le dialogue prescrit par nous, et convenu. Et la matière est décisive. MOAA = le général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de la garde présidentielle depuis qu'il l'a fondée en 1987 et en gardant le commandement personnel après avoir renversé le 6 Août 2008 le seul président élu à un suffrage pluraliste et contrôlé par l'Union, le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi : après seulement quinze mois d'intermède démocratique (où l'on eut le temps de criminaliser la pratique esclavagiste), le pays a renoué avec trente ans de régime autoritaire et militaire plus ou moins défroqué.
Le texte d'une convention très controversée, même au sein de sa propre majorité, que MOAA vient pourtant de faire passer à l'assemblée nationale. Cette convention,comme vous le verrez, donne un liberté absolue et sans contrepartie, à une société de pêche chinoise. celle-ci pêchera dans nos eaux, avec de filets interdits et pourra même faire venir en Mauritanie autant de travailleurs qu'elle voudra. sans compter les annexes au texte qui n'ont jamais été soumis aux députés.Raison de ce blanc-seing accordé à Pékin : les Chinois sont les partenaires "stratégiques" de Mohamed Abdellahi Ould Yaha, proche de MOAA. Au moment du vote, des députés de MOAA ont clairement dits que la convention est dangereuse pour le pays (mais l'ont votée quand même!), d'autres se sont absentés, ceux de l"opposition ont quitté la salle et les pêcheurs artisanaux qu'une meute de chinois viendra, grâce à cette convention, concurrencer dans leur gagne pain ont envahi l'hémicycle. Mais rien n'y a fait : la convention est passée!
Je joins à la présente le rappel de mon propre parcours. Ancien ambassadeur moi-même mais tout à fait ailleurs, je suis les choses et les gens de Mauritanie depuis que j'y fis, il y a quarante-cinq ans, mon service national en coopération enseignante et m'y attachais au président-fondateur, remarquable et sainte figure à tous égards (M° Moktar Ould Daddah). J'y joins aussi les textes de références : accord de Dakar et lettre d'intentions entre la Commission et la Mauritanie. Et enfin le texte de la convention en cours de ratification. Il saute aux yeux qu'elle est dangereuse. Et les Mauritaniens n'en veulent pas, sauf leur chef actuel et celui de ses clients qui va en profiter.
J'ai, enfin, pensé que cette réflexion d'un ami malgache pourrait vous inspirer aussi une vue d'ensemble. La démocratie est la meilleure sécurité. La Chine a une politique. Nous devons en avoir autrement que sur le papier.
Je suis naturellement à votre disposition et à celle de vos collaborateurs pour toute indication qui vous manquerait, et d'une manière plus générale sur la Mauritanie - je compte d'ailleurs tenter ces jours-ci une note de synthèse, comme je n'en ai plus fait depuis deux ans, et vous la communiquerai.
Sentiments déférents et confiants.
Après avoir mis à jour mes contacts électroniques à la Commission de Bruxelles, je saisis le successeur du directeur Manservisi, qui avait signé avec Moulaye Ould Mohamed Laghdaf la lettre d’intention de Décembre 2009. Nick Westcott, le nouveau patron d’une DG Développement qui a changé un peu de configuration et de compétences, est d’origine britannique et a représenté au Ghana son pays. – J’adresse le même courriel à Yannis Alexandros qui suit, au cabinet de Catherine Ashton les questions d’Afrique, les affaires maritimes et la pêche, en brodant un peu l’excellent souvenir que je garde de son pays : la Grèce où j’avais été affecté comme patron des services économiques et commerciaux en 1982-1984.
----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: UE - DG ambassadeur Nick Westcott
Cc: UE - Manuel Lopez-Blanco ; UE - Filiberto Ceriani-Sebregondi . DG ACP
Sent: Wednesday, June 08, 2011 11:04 AM
Subject: pays stratégique à risque du fait de son mode de gouvernement - Mauritanie et pêcheries - un accord avec la Chine imposé par le pouvoir actuel à sa propre majorité parlementaire -
Monsieur l'Ambassadeur,
j'avais l'honneur et le plaisir de correspondre avec votre prédécesseur, le directeur Manservisi, tout à fait au fait des risques de notre relation avec la Mauritanie du fait de son actuel gouvernement.
Ce régime, à la légitimation duquel après un putsch en 2008 mon pays, la France, a malheureusement beaucoup contribué, ne remplit pas ses engagements au titre du traité et des procédures de Cotonou, telles qu'en l'espèce ils ont été actualisés par un accord - grandement forcé par la France - à Dakar entre toutes les parties mauritaniennes en Juin 2009, puis à Nouakchott-même en Décembre 2009 par une lettre d'intentions signée par votre prédécesseur et le Premier ministre du lieu, et enfin lors d'une table-ronde organisée par vos services à Bruxelles avec les bailleurs de fonds en Juin 2010.
Fondamentalement, il s'agit d'un système de gouvernement non ouvert aux contrôles, y compris les nôtres, et a fortiori ceux de l'opposition nationale, d'un système fonctionnant par clientélisme et corruption. C'est ainsi qu'un début de "printemps" en Février dernier - à l'instar des révolutions tunisienne et égyptienne - a été noyauté et acheté alors même qu'il dénonçait de honteux marchés immobiliers sur la place-même où était revendiquée une ouverture démocratique.
L'épisode en cours n'est pas que de politique intérieure. Il nous concerne pas seulement parce qu'un accord de pêcherie avec la Chine va ruiner tout un secteur national traditionnel, décisif socialement et ethniquement, mais parce qu'il s'agit - par vénalité - d'une étape de plus dans les avancées de la Chine au Sahel. La fenêtre maritime du Sahara, comme on le voit depuis trente ans à propos de l'ancienne possession espagnole, est décisive en matière de terrorisme et aussi pour ses ressources halieutiques.
La procédure est en cours. Voici comment j'en suis averti. Il est encore temps d'agir contre. C'est vraiment le cas d'école du refus de pratiquer le dialogue prescrit par nous, et convenu. Et la matière est décisive. MOAA = le général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de la garde présidentielle depuis qu'il l'a fondée en 1987 et en gardant le commandement personnel après avoir renversé le 6 Août 2008 le seul président élu à un suffrage pluraliste et contrôlé par l'Union, le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi : après seulement quinze mois d'intermède démocratique (où l'on eut le temps de criminaliser la pratique esclavagiste), le pays a renoué avec trente ans de régime autoritaire et militaire plus ou moins défroqué.
Le texte d'une convention très controversée, même au sein de sa propre majorité, que MOAA vient pourtant de faire passer à l'assemblée nationale. Cette convention,comme vous le verrez, donne un liberté absolue et sans contrepartie, à une société de pêche chinoise. celle-ci pêchera dans nos eaux, avec de filets interdits et pourra même faire venir en Mauritanie autant de travailleurs qu'elle voudra. sans compter les annexes au texte qui n'ont jamais été soumis aux députés.Raison de ce blanc-seing accordé à Pékin : les Chinois sont les partenaires "stratégiques" de Mohamed Abdellahi Ould Yaha, proche de MOAA. Au moment du vote, des députés de MOAA ont clairement dits que la convention est dangereuse pour le pays (mais l'ont votée quand même!), d'autres se sont absentés, ceux de l"opposition ont quitté la salle et les pêcheurs artisanaux qu'une meute de chinois viendra, grâce à cette convention, concurrencer dans leur gagne pain ont envahi l'hémicycle. Mais rien n'y a fait : la convention est passée!
Je joins à la présente le rappel de mon propre parcours. Ancien ambassadeur moi-même mais tout à fait ailleurs, je suis les choses et les gens de Mauritanie depuis que j'y fis, il y a quarante-cinq ans, mon service national en coopération enseignante et m'y attachais au président-fondateur, remarquable et sainte figure à tous égards (M° Moktar Ould Daddah). J'y joins aussi les textes de références : accord de Dakar et lettre d'intentions entre la Commission et la Mauritanie. Et enfin le texte de la convention en cours de ratification. Il saute aux yeux qu'elle est dangereuse. Et les Mauritaniens n'en veulent pas, sauf leur chef actuel et celui de ses clients qui va en profiter.
J'ai, enfin, pensé que cette réflexion d'un ami malgache pourrait vous inspirer aussi une vue d'ensemble. La démocratie est la meilleure sécurité. La Chine a une politique. Nous devons en avoir autrement que sur le papier.
Je suis naturellement à votre disposition et à celle de vos collaborateurs pour toute indication qui vous manquerait, et d'une manière plus générale sur la Mauritanie - je compte d'ailleurs tenter ces jours-ci une note de synthèse, comme je n'en ai plus fait depuis deux ans, et vous la communiquerai.
Sentiments déférents et confiants.
mardi 7 juin 2011
journal de maintenant - mardi 7 juin 2011
Mardi 7 Juin 2011
J’alerte qui je peux atteindre au Quai d’Orsay, guère que le ministre lui-même, ce qui est peu, et à l’Elysée – mon contact haabituel, parfois ouvert, parfois prudent. – Je donne copie à notre représentant permanent à Bruxelles, puisqu’il a suivi de près l’année putschiste tandis qu’il dirigeait le cabinet du ministre d’alors, Bernard Kouchner.
----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: Alain Juppé abs Quai d'Orsay
Cc: André Parant
Sent: Monday, June 06, 2011 9:11 PM
Subject: nouvelle étape d'une main-mise chinoise organisée par le pouvoir régnant en Mauritanie
Cher Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre,
je suis depuis une quarantaine d'années et plus les choses et les gens de Mauritanie ; je vous l'ai fait savoir comme je le peux, en vous écrivant à Bordeaux, dès votre prise de fonctions.
J'ai vu en Mauritanie le démarrage - au temps ou Jean-François Deniau était notre ambassadeur à Nouakchott - de la coopération avec la Chine. Elle était équilibrée car le président Moktar Ould Daddah circonscrivait les coopérations à des secteurs publics non concurrentiels : infrastructures portuaires et hospitalières, et comptait énormément dans le jeu politique de Pékin pour aller de voix en voix vers l'admission aux Nations Unies. Il n'y avait aucune corrpution : les entreprises de Guelfi dans le secteur de la pêche furent ainsi empêchées, par débat en conseil des ministres, le Président suivant l'avis de ses ministres...
Depuis quelques années, la Chine - qui n'est d'ailleurs à aucun égard, vous en êtes bien mieux informé que moi, la même qu'il y a quarante ans - avance au Sahel. En coincidence d'ailleurs des foyers d'insécurité sinon de terrorisme. Nous avons vu sa collusion avec la dictature pour le Darfour.
Je suis alerté d'un passage en force aujourd'hui à l'Assemblée Nationale de Nouakchott, d'une convention décriée par à peu près tout le monde, y compris la majorité du général Mohamed Ould Abdel Aziz.
Le texte d'une convention très controversée, même au sein de sa propre majorité, que MOAA vient pourtant de faire passer à l'assemblée nationale. Cette convention,comme vous le verrez, donne un liberté absolue et sans contrepartie, à une société de pêche chinoise. celle-ci pêchera dans nos eaux, avec de filets interdits et pourra même faire venir en Mauritanie autant de travailleurs qu'elle voudra. sans compter les annexes au texte qui n'ont jamais été soumis aux députés.Raison de ce blanc-seing accordé à Pékin : les Chinois sont les partenaires "stratégiques" de Mohamed Abdellahi Ould Yaha, proche de MOAA. Au moment du vote, des députés de MOAA ont clairement dits que la convention est dangereuse pour le pays (mais l'ont votée quand même!), d'autres se sont absentés, ceux de l"opposition ont quitté la salle et les pêcheurs artisanaux qu'une meute de chinois viendra, grâce à cette convention, concurrencer dans leur gagne pain ont envahi l'hémicycle. Mais rien n'y a fait : la convention est passée!
J’alerte qui je peux atteindre au Quai d’Orsay, guère que le ministre lui-même, ce qui est peu, et à l’Elysée – mon contact haabituel, parfois ouvert, parfois prudent. – Je donne copie à notre représentant permanent à Bruxelles, puisqu’il a suivi de près l’année putschiste tandis qu’il dirigeait le cabinet du ministre d’alors, Bernard Kouchner.
----- Original Message -----
From: Bertrand Fessard de Foucault
To: Alain Juppé abs Quai d'Orsay
Cc: André Parant
Sent: Monday, June 06, 2011 9:11 PM
Subject: nouvelle étape d'une main-mise chinoise organisée par le pouvoir régnant en Mauritanie
Cher Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre,
je suis depuis une quarantaine d'années et plus les choses et les gens de Mauritanie ; je vous l'ai fait savoir comme je le peux, en vous écrivant à Bordeaux, dès votre prise de fonctions.
J'ai vu en Mauritanie le démarrage - au temps ou Jean-François Deniau était notre ambassadeur à Nouakchott - de la coopération avec la Chine. Elle était équilibrée car le président Moktar Ould Daddah circonscrivait les coopérations à des secteurs publics non concurrentiels : infrastructures portuaires et hospitalières, et comptait énormément dans le jeu politique de Pékin pour aller de voix en voix vers l'admission aux Nations Unies. Il n'y avait aucune corrpution : les entreprises de Guelfi dans le secteur de la pêche furent ainsi empêchées, par débat en conseil des ministres, le Président suivant l'avis de ses ministres...
Depuis quelques années, la Chine - qui n'est d'ailleurs à aucun égard, vous en êtes bien mieux informé que moi, la même qu'il y a quarante ans - avance au Sahel. En coincidence d'ailleurs des foyers d'insécurité sinon de terrorisme. Nous avons vu sa collusion avec la dictature pour le Darfour.
Je suis alerté d'un passage en force aujourd'hui à l'Assemblée Nationale de Nouakchott, d'une convention décriée par à peu près tout le monde, y compris la majorité du général Mohamed Ould Abdel Aziz.
Le texte d'une convention très controversée, même au sein de sa propre majorité, que MOAA vient pourtant de faire passer à l'assemblée nationale. Cette convention,comme vous le verrez, donne un liberté absolue et sans contrepartie, à une société de pêche chinoise. celle-ci pêchera dans nos eaux, avec de filets interdits et pourra même faire venir en Mauritanie autant de travailleurs qu'elle voudra. sans compter les annexes au texte qui n'ont jamais été soumis aux députés.Raison de ce blanc-seing accordé à Pékin : les Chinois sont les partenaires "stratégiques" de Mohamed Abdellahi Ould Yaha, proche de MOAA. Au moment du vote, des députés de MOAA ont clairement dits que la convention est dangereuse pour le pays (mais l'ont votée quand même!), d'autres se sont absentés, ceux de l"opposition ont quitté la salle et les pêcheurs artisanaux qu'une meute de chinois viendra, grâce à cette convention, concurrencer dans leur gagne pain ont envahi l'hémicycle. Mais rien n'y a fait : la convention est passée!
C'est édifiant à tous égards sur la nature du régime et sur son irresponsabilité pour courtes vues et vénalité.
Cette convention est socialement mortelle pour toute la pêche artisanale mauritanienne - très ethniquement et socialement située, ce qui accentue les tensions de plus en plus fortes entre communautés de fait, depuis que les textes incriminant l'esclavage sont devenus lettre morte. Elle montre le clientélisme d'un régime que nous avons contribué à légitimer. Comble, le régime fiscal est plus avantageux pour les Chinois que ne le fut la convention de 1959 entre la jeune République Islamique et notre société des Mines de Fer de Mauritanie (Miferma - Rothschild, BRGM, Lero-Beaulieu puis Audibert comme PDG).
La Mauritanie, et nous-mêmes au Sahel, sommes ensemble en danger.
Bruxelles et notre ambassade ont certainement à dire et à faire.
Sentiments très déférents.
Cette convention est socialement mortelle pour toute la pêche artisanale mauritanienne - très ethniquement et socialement située, ce qui accentue les tensions de plus en plus fortes entre communautés de fait, depuis que les textes incriminant l'esclavage sont devenus lettre morte. Elle montre le clientélisme d'un régime que nous avons contribué à légitimer. Comble, le régime fiscal est plus avantageux pour les Chinois que ne le fut la convention de 1959 entre la jeune République Islamique et notre société des Mines de Fer de Mauritanie (Miferma - Rothschild, BRGM, Lero-Beaulieu puis Audibert comme PDG).
La Mauritanie, et nous-mêmes au Sahel, sommes ensemble en danger.
Bruxelles et notre ambassade ont certainement à dire et à faire.
Sentiments très déférents.
lundi 6 juin 2011
samedi 4 juin 2011
vendredi 3 juin 2011
jeudi 2 juin 2011
reçu
Moustapha Ould Limam Chafi, dans une interview exclusive avec les journaux Biladi et Al Akhbar :
‘’Le Général Aziz ne dispose pas de facultés politiques et de qualités de commandement que requiert la direction d’un pays aussi vulnérable que la Mauritanie’’
Biladi/Al Akhbar : Moustapha Ould Limam Chafi, on ne vous présente plus, en Afrique, et même dans le monde, mais certains de vos compatriotes, mauritaniens, ne vous connaissent pas très bien. Tandis que d’autres ne retiennent de vous qu’une image paradoxale voire sulfureuse ; de celle d’un faiseur de coups d’état et de rébellions, à celle d’ami des présidents et à la fois d’opposants? Comment vivez-vous un tel écart?Moustapha Ould Limam Chafi : Pour ceux qui me connaissent, ils vous diront mon attachement à des principes et quelques codes d’honneur, dont la loyauté, l’amitié, et le respect des engagements consentis. Dans ces limites, je me bats quoiqu’il m’en coûte. Ce que je hais le plus au monde, c’est courtiser les hommes surtout quand ils n’ont pour seul mérite que d’avoir usurpé un pouvoir par la force. Si j’étais faiseur de coup d’état ou de rébellion, je pense que je ne bénéficierais pas de toute la confiance et des relations dont je jouis aujourd’hui. Les faiseurs de coup d’état sont connus et s’accrochent au pouvoir, notamment chez nous en Mauritanie, malgré les conséquences douloureuses et le prix incalculable pour toute la nation. Notre pays a connu un retard quasi irrattrapable en matière d’exemplarité démocratique, traversé une période d’instabilité, d’incertitude, de délabrement, de recul à tous les niveaux, sous les pouvoirs militaires successifs depuis 1978. En 2007, avec l’avènement d’un président civil élu, des libertés de presse retrouvées et un pluralisme effectif, la Mauritanie est devenue, le seul pays démocratique reconnu dans le monde arabe, un modèle suscitant l’espoir au-delà de nos frontières. Hélas, un militaire, encore une fois, a fait irruption sur la scène politique. Par sa prise en otage du pays, il l’a relégué au dernier rang. Aujourd’hui où le vent des libertés et de réformes souffle sur le monde arabe, la Mauritanie renoue avec les ténèbres de la dictature, de l’injustice, du populisme, du favoritisme, du mensonge. Le pays s’est retrouvé aux mains d’une bande de copains et de coquins qui ne font plus illusion.Je suis certes ami de Présidents, également d’opposants mais je ne fréquente que des leaders tolérants, respectueux des principes de la différence, de la dignité humaine. Ils comprennent et acceptent la contradiction. Ils savent apprécier les valeurs des uns et des autres.
Après l’entretien que vous aviez accordé, en 2009, à un ou deux organes de presse locale, vous n’avez jamais accepté d’accorder une interview à la presse mauritanienne; qu’est-ce qui motive votre accord aujourd’hui?Malgré mon opposition au coup d’état du 6 août 2008 et mon scepticisme quant à la capacité du général à gérer ce pays, je me suis résolu, malgré tout, à accorder aux militaires une période de grâce, les observer, n’oser aucun acte de subversion, n’encourager nulle action contre eux, leur permettre de mener leur mission dans l’espoir, qu’en dépit de leurs insuffisances et de leur médiocrité, ils pouvaient s’entourer d’hommes et de femmes de compétences et d’expériences qui les aideraient à obtenir des succès, pour le bien de la Mauritanie. Malheureusement, le bilan est amer, la situation économique et sociale se détériore avec une gravité inouïe, dira-je inédite depuis l’indépendance du pays. Au moment où le navire mal gouverné tangue et menace naufrage, il m’a semblé, de mon devoir, pour moi un devoir – impératif- de lancer le signal d’alarme à mes compatriotes.
Vous vivez en Afrique, que signifie la Mauritanie pour vous ?Je réside en Afrique en même temps que je vis pleinement la Mauritanie, chaque instant, devrais-je dire ! Je vis la peine et les misères des Mauritaniens. Il n’y pas une seconde, pas une minute, pas une heure, où mon cœur ne bat au rythme de la Mauritanie. Ma mère qui représente tout ce que j’ai connu de plus cher comme affection et amour y est enterrée. Chaque soir que Dieu fait, avant de m’endormir, mes prières vont vers elle et tous ceux de nos compatriotes qui nous ont quittés. Mon père, très affaibli vit en Mauritanie, mes frères, sœurs et tous ceux qui me sont les plus proches au monde y sont également. La Mauritanie, je la vis aussi, chaque jour, en Afrique, parce que je vis entouré de mes compatriotes de passage, toutes communautés, tous milieux sociaux confondus. Peu d’évènements nationaux, mêmes confidentiels, ne m’échappent, pour peu qu’ils impliquent des mauritaniens. De Fassala Néré à Nouadhibou et de Bababé à Bir Moghrein, je suis présent, à ma manière. On dit que vous êtes riche ; que faites-vous de votre fortune et d’où provient-elle?Vous m’apprenez que je suis riche, je ne sais pas dans quel sens vous parlez de richesse. Je remercie Dieu de la richesse qu’il m’a donné, qui est la plus importante et dont je suis le plus fier, c’est la Foi en Lui. Ma Foi en Dieu est si forte que jamais, ici-bas, rien ne m’a ébranlé. Un père et une mère m’ont dispensé une éducation religieuse et appris le respect de tous et l’amour des faibles. Je pense que tout cela constitue la plus grande des richesses. Al Hamdoulillah, Al Hamdoulillah, Al Hamdoulillah … Le quelque bien matériel dont Dieu m’a doté, j’essaie de le partager avec les autres, parce que je ne l’emporterai pas avec moi dans la tombe. Je ne suis pas porté sur l’accumulation de richesse, malgré mon appartenance à un milieu de vaillants commerçants. Je n’ai jamais occupé de fonction me permettant de gérer les fonds publics. Je n’ai jamais entrepris une activité illicite. J’ai commencé ma carrière dans la philatélie, très jeune avec des partenaires Arméniens ; c’est un métier très subtil et discret où j’ai pu, pendant de nombreuses années, gagner suffisamment d’argent. J’ai ensuite évolué vers d’autres activités, toujours honorables et rentables, que je garde pour moi conformément à la recommandation du Prophète (Psl) qui conseille de ‘’sceller le secret autour de vos affaires’’. En comparaison à la fortune du général Aziz, je ne possède pas un seul sou qui ne soit plus licite et de loin !
Le bruit court également que vous menez des activités séditieuses, en Mauritanie, avec le concours du banquier Mohamed Ould Noueighed…..Je vais vous raconter une anecdote, assez cocasse, maintenant que vous me posiez cette question: le 21 mai dernier, j’ai rencontré, à Yamoussoukro, pendant la cérémonie d’investiture du Président Alassane Ouattara, un richissime homme d’affaires de la sous région, banquier, industriel, pétrolier…, l’une des fortunes les plus solides du Continent, qui était en compagnie d’un Monsieur de type Mauritanien avec une grande calvitie, vêtu d’un costume d’une grande simplicité. Mon ami, entrepreneur, que je connaissais depuis très longtemps, a été surpris de constater que le Monsieur en sa compagnie et moi ne nous connaissions pas et ne nous étions jamais rencontrés ; c’est alors qu’il m’a présenté son collègue, le banquier Mauritanien Mohamed Ould Nouegheid. Il m’a présenté, aussi, à ce dernier qui, visiblement très gêné, n’a pas daigné engager avec moi une quelconque conversation et je le comprends.
Le Président mauritanien et vous étiez invités à l’investiture de votre « grand frère » Ouattara. Avez-vous rencontré Mohamed Ould Abdel Aziz ?
Cela ne m’intéresse pas.
Comment et pourquoi maintenez-vous, en Afrique des relations parfois excellentes (et personnelles) avec les chefs d’état, des artistes, des sportifs, hommes d’affaires et des personnalités de divers horizons sans y parvenir en Mauritanie ?
Je maintiens d’excellentes et respectueuses relations en Mauritanie avec beaucoup de personnalités comme Cheikh Mohamed El Hacen Ould Dedew pour lequel j’ai une très grande admiration. Mes rapports, depuis des années, sont excellents avec Messaoud Ould Boulkheir, Ahmed Ould Daddah, Mohamed Maouloud, Saar Ibrahima, Saleh Ould Hannena et tant d’autres. J’ai entretenu des liens cordiaux avec Ely Ould Mohamed Vall, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, Mohamed Khouna Ould Haidalla...
Et autour du Président Aziz ?Je préfère ne pas répondre, si vous le permettez.
Que pensez-vous du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi ?Au-delà des qualificatifs élogieux sur le patriotisme et la patience de l’homme, il y a lieu de noter trois aspects de sa personnalité qui le prédisposaient au gouvernement vertueux : Il se tenait toujours à l’écart des dissentiments et des rivalités individuelles, n’enquêtait jamais sur les défauts réels ou supposés des gens et se désintéressait de l’argent, en soufi, élevé dans la quête permanente de spiritualité. Ainsi, s’abstenait-il, par exemple, de s’ingérer dans le processus d’attribution des marchés publics, des licences de pêche et laissait ses ministres choisir leurs collaborateurs, sans interférence de la Présidence. Parce qu’il savait la valeur d’arbitrage des institutions et les respectait, Sidi Ould Cheikh Abdellahi appartient à l’école de Mokhtar Ould Daddah, avec son sens de la dignité et son esprit pionnier, bien à l’abri de l’affairisme et des tentations épicières. Par tempérament et modération intellectuelle et sociale, il croyait à la progression, à la graduation, dans le traitement des affaires de l’Etat. Pendant son mandat inachevé, des chantiers de reconstruction du pays ont été engagés et un réel effort de transparence se manifestait par l’autonomie réelle accordée à l’Inspection générale de l’Etat (Ige) dont le dernier titulaire a été choisi, sur instruction du Président qui ne le connaissait pas. L’on peut aussi, citer, dans ce bilan, somme toute satisfaisant, le retour des réfugiés et la détermination à traiter, quant au fond, le passif humanitaire et la réconciliation nationale dans un esprit de vérité et de justice. Hélas, à cause de son indépendance, insoupçonnée par les militaires qui l’avaient soutenu au scrutin présidentiel, Sidi a été écarté. Il voulait gouverner, pleinement, au nom des mauritaniens, ses électeurs. Sa légitimité, de premier Président élu dans une compétition pluraliste, lui conférait un sens élevé du devoir et il y a cru, jusqu’au bout, sans faiblesse quand ses adversaires misaient sur une défection. Pour l’histoire, Sidi n’a pas failli, loin de là!
Pourtant, les militaires étaient ses alliés sûrs pour décrocher le pouvoir?Le général Mohamed Ould Abdel Aziz et sa coterie avaient échoué à convaincre les mauritaniens de soutenir le candidat Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, pendant la campagne. Cet appui encombrant suscitait même le rejet, au sein de l’opinion, à cause du reproche, peu flatteur, d’«homme des militaires’’. Certes, à l’époque, ils comptaient parmi ses principaux protecteurs et l’auraient même résolu à se porter candidat, mais, en dépit d’un concours aussi important, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi ne parvenait à passer au premier tour, déjouant ainsi les pronostics sur la force et l’influence supposée de la junte. Sa victoire restait suspendue aux ralliements des deux candidats arrivés en 3ème et quatrième positions, c‘est-à-dire Zein Ould Zeidane et le Président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir. Réputer, Aziz et ses affidés, artisans de la victoire de Ould Cheikh Abdellahi, relèverait d’un défaut de rigueur dans la perception et l’analyse du rapport des forces électoral.
Comment vous jugez la situation actuelle du pays?Malheureusement, elle se caractérise par l’impasse globale et une perte de crédit, à tous les niveaux : le chômage touche toutes les catégories d’âge et le pays connait un blocage politique sans précédent. Les Mauritaniens ne sont pas restés longtemps dupes des mirages aziziens. Il avait promis de faire baisser le prix du gaz, du gasoil, des produits agro-alimentaire etc.Le gaz domestique, à ce jour, est 30% plus cher ; le gasoil a connu plusieurs augmentations en quelques mois. Tous les tarifs des produits agro-alimentaires ont flambé. Pendant ce temps, lui a pris en main les marchés publics qu’il s’auto-attribue, sous des sociétés-écran, aux noms d’emprunts bien indentifiables ; après tout, il est bien difficile pour un apprenti-tyran de soumettre, en silence, un petit pays : nous sommes peu nombreux et nous nous connaissons, les uns les autres. A Nouadhibou, son associé et lui possèdent, à ce jour, plus de 20 bateaux. La lutte contre la gabegie, version Aziz, revient à sevrer tous les mauritaniens, les appauvrir mais gaver, gaver encore et toujours, 5 à 6 personnes parmi ses obligés et paravents. Et à quelles causes imputez-vous ce tableau sombre?Vous savez, au lendemain du coup d’état de 2005 et de la transition conséquente, nous avions beaucoup espéré. L’attente d’une nouvelle ère a été énorme d’où l’intensité de la déception. Le Général et son putsch de 2008 nous ont contraints à abdiquer certains acquis, puis régresser, loin en fin de peloton. Il a rétabli le système que nous avons tous vigoureusement combattu : démagogie, aventures, mensonges, incertitudes, instabilité administrative, promotion de l’inexpérience, le Général a consolidé les aspects les plus négatifs de l’ère Ould Taya. A titre d’exemple, le plus flagrant, il choisit, parmi ses collaborateurs, les hommes les plus médiocres, les plus faibles et les plus incompétents.Le Général Aziz ne dispose pas de facultés politiques et de qualités de commandement que requiert la direction d’un pays aussi vulnérable que la Mauritanie. Sa présence à la tête de l’Etat est une erreur de casting comme l’histoire en produit souvent et de manière tragique. L’homme, je le crains, n’a pas encore livré le pire de lui-même.Vous qui en côtoyez beaucoup et depuis longtemps, comment évaluez-vous l’homme d’Etat Mohamed Ould Abdel Aziz ? De tous ceux qui ont présidé le pays, depuis l’incomparable Mokhtar Ould Daddah, Aziz est le seul dépourvu de toute aptitude à conduire la communauté de destin et dont le niveau scolaire s’avère le moins performant. En tant que militaire, il reste l’un des rares officiers à n’avoir subi aucune formation digne des fonctions qu’il a occupées. Malheureusement, en pur produit du système érigé depuis juillet 1978, il a cumulé les promotions fulgurantes, lesquelles, à aucun moment, ne tenaient compte de son cursus dans le rang. Aziz a été propulsé sur le devant de l’histoire, envers et contre toutes les règles et procédures d’avancement.Sa mission essentielle, aux yeux de ses employeurs successifs, se résumait à celle d’un garde-chiourme, commis à la sûreté de son maître car sa loyauté était acquise. Imaginez une multinationale, florissante, qui décide de doter son premier responsable à la sécurité de tous les moyens d’assumer pleinement sa mission, avec la possibilité de choisir, lui-même, ses éléments à sa convenance et selon ses seuls critères. Fort de son dispositif, ce responsable de sécurité décide, un jour, de destituer le PDG de l’entreprise, d’user de la signature et de s’autoproclamer désormais seul et unique responsable de celle-ci. La société, ne peut être vouée, dès ce moment qu’à la faillite retentissante.C’est exactement ce qui arrive à la Mauritanie, depuis le 6 août 2008, surtout que notre général n’est doté d’aucun savoir-faire, ni de savoir-vivre qui auraient pu compenser ses carences. Il prétend diriger le pays, conduire une nation vers des lendemains meilleurs, alors qu’il ne manifeste de respect, d’égard, de considération encore moins d’empathie, à aucun de ses concitoyens ; ses collaborateurs proches ploient sous le mépris, l’arrogance et la suffisance du personnage.
Vous avez contribué à la chute de O. Taya, assisté à la fin du règne de Sidi et vous dites actuellement que le pays est instable. Comment voyez-vous son avenir ?Ould Taya n’est plus aux affaires, je ne souhaite donc pas parler de lui. Je ne suis pas de ceux qui l’ont servi et ne lui dois ni carrière, ni promotion, contrairement au Général Aziz. Mon éducation et mon savoir-vivre m’imposent de ne pas le dénigrer. Je constate qu’Aziz, l’a courtisé. Il fayotait pour lui et se servait d’alliances matrimoniales pour se faire accepter dans son cercle. Il est sa création, lui doit toute sa carrière et sa fortune mais s’est donné la mission de le vilipender, de l’humilier sa famille et lui, et de le traiter de tous les noms. C’est ainsi que le genre Aziz exprime sa reconnaissance.Quant à mon opposition au président déchu Ould Taya, elle relevait d’un combat contre un système de clientélisme tribal, de népotisme, de gabegie, d’impunité des violations graves des droits de l’Homme, de passe-droit, de déni de liberté, d’élections tronquées, d’opposition muselée, etc. Aujourd’hui, le système se reproduit et aucun de ses acteurs principaux n’a subi la sanction méritée parce que Aziz est leur protecteur, l’un des leurs et sans doute le meilleur gardien des privilèges dont il canalise juste le cours, à son avantage et au profit des siens.Bref, je ne puis disserter sur l’avenir politique du pouvoir de Aziz parce qu’à mes yeux, il ne possède aucune faculté de s’enraciner. Les fondements immoraux de son édifice tremblent d’où son instabilité, c’est un constat clinique, devrais-je dire. Tout au plus, pourra-t-il négocier des périodes de répit, plus ou moins brèves, qui ne sauraient permettre la moindre perspective ni d’ailleurs cette nécessaire projection au-delà de 6 mois sans quoi toute politique dérive dans le bricolage ; Aziz est un dilettante, coincé dans un rouage de l’histoire. Je ne suis certes par fort en mécanique mais l’expérience enseigne que ce genre d’attelage ne va jamais très loin.
Un mot sur les événements actuels en Mauritanie, particulièrement le mouvement des jeunes ?La jeunesse mauritanienne est consciente, civilisée et en phase avec la mondialisation techno-médiatique. Les diverses formes de marginalisation et de chômage qu’elle subit exacerbent ses facultés critiques. Tôt ou tard, malgré le rappel et la mise en œuvre de toutes les instances de démobilisation, notamment par la tribu, cette jeunesse, sans avenir viable, imposera son empreinte sur le devenir de la Mauritanie. Des pouvoirs bien plus puissants et ancrés dans l’histoire que celui de Aziz tombent, un à un, autour de nous. Le régime actuel a acquis une popularité imaginaire au cours de la dernière élection présidentielle, par l’usage d’un discours populiste qui insulte l’intelligence et se résume au credo vide « je suis le président des pauvres’’ ; avec le temps, toute la vacuité du slogan se dévoile et sa puissance d’hypnose s’érode. Le pouvoir de Aziz récolte les fruits de ses fausses promesses. Le peuple sait, désormais, que la lutte contre la gabegie n’est qu’un slogan de campagne ; le ‘’président des pauvres’’ exige une commission, dans les principaux marchés publics, au demeurant distribués entre une poignée de membres de sa tribu et quelques rares autres prête-noms…Ce népotisme est le vecteur de la colère chez la jeunesse arabe, à la source de ses révoltes en Egypte, Tunisie, Libye, Syrie et au Yémen. Il me semble bien naïf de croire que la fameuse «spécificité» de notre pays le ferait échapper à la dynamique de son environnement.
Sur la base de votre expérience dans le domaine, comment trouvez-vous la politique engagée par le régime contre le terrorisme ?La sécurité aux frontières relève autant de l’enjeu de politique étrangère que de la police domestique. Or, avec un pouvoir qui n’a pas de stratégie, ni d’initiative politique, économique ni même diplomatique, la décision se conçoit au moment de sa prise. Du jour au lendemain, la Mauritanie s’affiche tantôt l’amie de l’Occident démocratique et s’aligne, l’instant d’après, sur l’Iran. L’on tente même le diable au Venezuela, sans calcul ou raison que puissent motiver nos intérêts objectifs. Depuis son avènement, le Général a toujours navigué à vue et c’est l’une des raisons de son échec. Un homme d’Etat doit se confronter à ses insuffisances non pas les fuir. Baltazar Gracian, le grand moraliste, prédisait à l’usage du prince espagnol qu’il conseillait par la vertu, bien à l’inverse du cynique Machiavel : « qui se sera maître de soi-même, le sera bientôt des autres ». Or, cette maîtrise salutaire suppose d’apprendre, d’écouter, de chercher conseil, de fouiller ses défauts pour mieux s’en prémunir.Permettez moi donc de dire que la conduite à l’égard des groupes salafistes – je veux dire la politique sécuritaire - s’est beaucoup détériorée. Le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi avait chargé Aziz de s’occuper du dossier, au lendemain de son accession, ô combien controversée, au grade de général. Après cette promotion indue, il y eut l’assassinat des ressortissants français en décembre 2007 et les incidents du genre se multipliaient, résultats d’un défaut de prévention. La Mauritanie ne dispose pas de stratégie en la matière parce que la stratégie requiert des compétences et une vision, au plein sens du mot, avec la conjugaison de la connaissance du terrain à un brin d’audace. Or, Aziz en est démuni, cruellement, handicap qu’il compense par le silence mais ce genre de cache-misère ne tient pas en temps d’épreuve. Le Général prématuré justifia son putsch, contre Ould Cheikh Abdellahi, le 6 août 2008, par l’absence de sécurité ; il tenta même de créditer l’idée farfelue, que ce dernier était salafiste, le poussant à construire une mosquée à la Présidence et y inaugurer, la prière du vendredi. Or, à l’époque des premiers attentats, Aziz était le seul responsable de ce dossier et s’avéra, bien vite, dans l’incapacité d’accomplir la mission.Le pouvoir mauritanien estime qu’il a doté l’armée de moyens sophistiqués et œuvré afin qu’elle soit opérationnelle pour affronter les groupuscules mais la population réclame la sécurité réelle, de proximité. Des voitures piégées sont arrivées jusqu’aux faubourgs de Nouakchott et, pour la première fois, des étrangers avaient été également kidnappés, sur le principal tronçon routier qui relie les capitales politique et économique. Quelle est donc l’utilité des dépenses militaires, si ce n’est la captation de marchés suspects qui enrichissent l’entourage présidentiel ?
Certains vous accusent d’être en contact avec AQMI, de l’aider à localiser les ressortissants étrangers avant de négocier leur libération contre le versement de rançons ? C’est de bonne guerre, voyez-vous : Il s’agit d’une propagande vulgaire, ventilée par la sécurité de Ould Abdel Aziz pour couvrir ses échecs par le transfert de culpabilité. Des sites électroniques, des gens spécialisés dans le commérage de salon ne ratent d’occasion, pour me faire porter la responsabilité de la faillite d’Aziz. Très souvent, je me retrouve cité dans des scandales et des montages dont j’ignorais les noms des protagonistes.Au sujet des négociations pour la libération des otages, je ne travaille pas de manière individuelle mais en partenariat avec différents services de sécurité, occidentaux et africains – parmi lesquels les renseignements espagnols et canadiens ; ces instances sont les mieux informées sur ce qui s’était passé et il est inconcevable qu’elles acceptent d’interagir avec un complice du rapt de leurs ressortissants. Je me suis impliqué, dans des conditions pénibles et non dépourvues de risque, en réponse à une demande de médiation, adressée au Burkina Faso, dans le cadre d’une coopération sous régionale et internationale au bénéfice des otages occidentaux. Notre objectif consistait à obtenir le retour des victimes, en bonne santé et c’est ce que nous avons réussi, toujours de manière officielle, sans détour.
Quelle approche idéale, selon vous, pour combattre le terrorisme ? Le plus important, dans ce domaine, c’est de savoir profiter des expériences, tirer les conclusions qui s’imposent afin de propager la sécurité en Mauritanie et de ramener notre jeunesse à sa vocation de moteur du développement. L’on est obligé de chercher des solutions globales pour faire face à ce phénomène, foncièrement étranger à nos sociétés saharo-sahéliennes, plus festives, spirituelles et tolérantes que dogmatiques. L’imagination et la souplesse devraient prévaloir pour résoudre un conflit qui se déroule dans un environnement islamique où siègent de grands érudits. Cette approche, pour aboutir, sera globale et acceptable, loin de toute pression étrangère qui fait de la Mauritanie une machine militaire entre les mains d’autres parties.
Vous avez de bons rapports avec différents chefs d’état du continent dont certains furent des opposants persécutés ou des chefs de guerre. Quel est le secret dans cette réussite et est-ce que les gouvernements de Nouakchott s’appuient sur vous pour profiter d’une telle aura?Sincèrement, je suis fier de ces relations qui m’honorent. Elles sont bâties sur le respect réciproque et le soutien à des populations opprimés, qui se battent pour recouvrer leurs droits… Elles prospèrent sur le sens de l’honneur, à l’abri de toute flagornerie. Par rapport à la deuxième partie de votre question, je vous assure et vous confirme que je suis fils de la Mauritanie et continuerai à la servir, toujours, y compris par mes amis.
Enfin, un mot sur Kadhafi et sur la Libye….Je crois que ce qui est en train de se passer en Libye est une ‘’vengeance divine’’ à cause des agissements de Kadhafi contre le peuple mauritanien. Après le putsch de Aziz, Kadhafi avait choisi de prendre partie pour les militaires en proclamant, devant le public, son soutien à la tenue d’élections unilatérales, le 6/6/2009, avant l’accord de Dakar. Les putschistes avaient bénéficié, en outre, de l’appui politique et financier de la Libye qui jouait un grand rôle pour infléchir la position de plusieurs états….c’est ce que nous appelons ‘’tazaboutt’’.
Propos recueillis par Biladi/Al Akhbar
‘’Le Général Aziz ne dispose pas de facultés politiques et de qualités de commandement que requiert la direction d’un pays aussi vulnérable que la Mauritanie’’
Biladi/Al Akhbar : Moustapha Ould Limam Chafi, on ne vous présente plus, en Afrique, et même dans le monde, mais certains de vos compatriotes, mauritaniens, ne vous connaissent pas très bien. Tandis que d’autres ne retiennent de vous qu’une image paradoxale voire sulfureuse ; de celle d’un faiseur de coups d’état et de rébellions, à celle d’ami des présidents et à la fois d’opposants? Comment vivez-vous un tel écart?Moustapha Ould Limam Chafi : Pour ceux qui me connaissent, ils vous diront mon attachement à des principes et quelques codes d’honneur, dont la loyauté, l’amitié, et le respect des engagements consentis. Dans ces limites, je me bats quoiqu’il m’en coûte. Ce que je hais le plus au monde, c’est courtiser les hommes surtout quand ils n’ont pour seul mérite que d’avoir usurpé un pouvoir par la force. Si j’étais faiseur de coup d’état ou de rébellion, je pense que je ne bénéficierais pas de toute la confiance et des relations dont je jouis aujourd’hui. Les faiseurs de coup d’état sont connus et s’accrochent au pouvoir, notamment chez nous en Mauritanie, malgré les conséquences douloureuses et le prix incalculable pour toute la nation. Notre pays a connu un retard quasi irrattrapable en matière d’exemplarité démocratique, traversé une période d’instabilité, d’incertitude, de délabrement, de recul à tous les niveaux, sous les pouvoirs militaires successifs depuis 1978. En 2007, avec l’avènement d’un président civil élu, des libertés de presse retrouvées et un pluralisme effectif, la Mauritanie est devenue, le seul pays démocratique reconnu dans le monde arabe, un modèle suscitant l’espoir au-delà de nos frontières. Hélas, un militaire, encore une fois, a fait irruption sur la scène politique. Par sa prise en otage du pays, il l’a relégué au dernier rang. Aujourd’hui où le vent des libertés et de réformes souffle sur le monde arabe, la Mauritanie renoue avec les ténèbres de la dictature, de l’injustice, du populisme, du favoritisme, du mensonge. Le pays s’est retrouvé aux mains d’une bande de copains et de coquins qui ne font plus illusion.Je suis certes ami de Présidents, également d’opposants mais je ne fréquente que des leaders tolérants, respectueux des principes de la différence, de la dignité humaine. Ils comprennent et acceptent la contradiction. Ils savent apprécier les valeurs des uns et des autres.
Après l’entretien que vous aviez accordé, en 2009, à un ou deux organes de presse locale, vous n’avez jamais accepté d’accorder une interview à la presse mauritanienne; qu’est-ce qui motive votre accord aujourd’hui?Malgré mon opposition au coup d’état du 6 août 2008 et mon scepticisme quant à la capacité du général à gérer ce pays, je me suis résolu, malgré tout, à accorder aux militaires une période de grâce, les observer, n’oser aucun acte de subversion, n’encourager nulle action contre eux, leur permettre de mener leur mission dans l’espoir, qu’en dépit de leurs insuffisances et de leur médiocrité, ils pouvaient s’entourer d’hommes et de femmes de compétences et d’expériences qui les aideraient à obtenir des succès, pour le bien de la Mauritanie. Malheureusement, le bilan est amer, la situation économique et sociale se détériore avec une gravité inouïe, dira-je inédite depuis l’indépendance du pays. Au moment où le navire mal gouverné tangue et menace naufrage, il m’a semblé, de mon devoir, pour moi un devoir – impératif- de lancer le signal d’alarme à mes compatriotes.
Vous vivez en Afrique, que signifie la Mauritanie pour vous ?Je réside en Afrique en même temps que je vis pleinement la Mauritanie, chaque instant, devrais-je dire ! Je vis la peine et les misères des Mauritaniens. Il n’y pas une seconde, pas une minute, pas une heure, où mon cœur ne bat au rythme de la Mauritanie. Ma mère qui représente tout ce que j’ai connu de plus cher comme affection et amour y est enterrée. Chaque soir que Dieu fait, avant de m’endormir, mes prières vont vers elle et tous ceux de nos compatriotes qui nous ont quittés. Mon père, très affaibli vit en Mauritanie, mes frères, sœurs et tous ceux qui me sont les plus proches au monde y sont également. La Mauritanie, je la vis aussi, chaque jour, en Afrique, parce que je vis entouré de mes compatriotes de passage, toutes communautés, tous milieux sociaux confondus. Peu d’évènements nationaux, mêmes confidentiels, ne m’échappent, pour peu qu’ils impliquent des mauritaniens. De Fassala Néré à Nouadhibou et de Bababé à Bir Moghrein, je suis présent, à ma manière. On dit que vous êtes riche ; que faites-vous de votre fortune et d’où provient-elle?Vous m’apprenez que je suis riche, je ne sais pas dans quel sens vous parlez de richesse. Je remercie Dieu de la richesse qu’il m’a donné, qui est la plus importante et dont je suis le plus fier, c’est la Foi en Lui. Ma Foi en Dieu est si forte que jamais, ici-bas, rien ne m’a ébranlé. Un père et une mère m’ont dispensé une éducation religieuse et appris le respect de tous et l’amour des faibles. Je pense que tout cela constitue la plus grande des richesses. Al Hamdoulillah, Al Hamdoulillah, Al Hamdoulillah … Le quelque bien matériel dont Dieu m’a doté, j’essaie de le partager avec les autres, parce que je ne l’emporterai pas avec moi dans la tombe. Je ne suis pas porté sur l’accumulation de richesse, malgré mon appartenance à un milieu de vaillants commerçants. Je n’ai jamais occupé de fonction me permettant de gérer les fonds publics. Je n’ai jamais entrepris une activité illicite. J’ai commencé ma carrière dans la philatélie, très jeune avec des partenaires Arméniens ; c’est un métier très subtil et discret où j’ai pu, pendant de nombreuses années, gagner suffisamment d’argent. J’ai ensuite évolué vers d’autres activités, toujours honorables et rentables, que je garde pour moi conformément à la recommandation du Prophète (Psl) qui conseille de ‘’sceller le secret autour de vos affaires’’. En comparaison à la fortune du général Aziz, je ne possède pas un seul sou qui ne soit plus licite et de loin !
Le bruit court également que vous menez des activités séditieuses, en Mauritanie, avec le concours du banquier Mohamed Ould Noueighed…..Je vais vous raconter une anecdote, assez cocasse, maintenant que vous me posiez cette question: le 21 mai dernier, j’ai rencontré, à Yamoussoukro, pendant la cérémonie d’investiture du Président Alassane Ouattara, un richissime homme d’affaires de la sous région, banquier, industriel, pétrolier…, l’une des fortunes les plus solides du Continent, qui était en compagnie d’un Monsieur de type Mauritanien avec une grande calvitie, vêtu d’un costume d’une grande simplicité. Mon ami, entrepreneur, que je connaissais depuis très longtemps, a été surpris de constater que le Monsieur en sa compagnie et moi ne nous connaissions pas et ne nous étions jamais rencontrés ; c’est alors qu’il m’a présenté son collègue, le banquier Mauritanien Mohamed Ould Nouegheid. Il m’a présenté, aussi, à ce dernier qui, visiblement très gêné, n’a pas daigné engager avec moi une quelconque conversation et je le comprends.
Le Président mauritanien et vous étiez invités à l’investiture de votre « grand frère » Ouattara. Avez-vous rencontré Mohamed Ould Abdel Aziz ?
Cela ne m’intéresse pas.
Comment et pourquoi maintenez-vous, en Afrique des relations parfois excellentes (et personnelles) avec les chefs d’état, des artistes, des sportifs, hommes d’affaires et des personnalités de divers horizons sans y parvenir en Mauritanie ?
Je maintiens d’excellentes et respectueuses relations en Mauritanie avec beaucoup de personnalités comme Cheikh Mohamed El Hacen Ould Dedew pour lequel j’ai une très grande admiration. Mes rapports, depuis des années, sont excellents avec Messaoud Ould Boulkheir, Ahmed Ould Daddah, Mohamed Maouloud, Saar Ibrahima, Saleh Ould Hannena et tant d’autres. J’ai entretenu des liens cordiaux avec Ely Ould Mohamed Vall, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, Mohamed Khouna Ould Haidalla...
Et autour du Président Aziz ?Je préfère ne pas répondre, si vous le permettez.
Que pensez-vous du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi ?Au-delà des qualificatifs élogieux sur le patriotisme et la patience de l’homme, il y a lieu de noter trois aspects de sa personnalité qui le prédisposaient au gouvernement vertueux : Il se tenait toujours à l’écart des dissentiments et des rivalités individuelles, n’enquêtait jamais sur les défauts réels ou supposés des gens et se désintéressait de l’argent, en soufi, élevé dans la quête permanente de spiritualité. Ainsi, s’abstenait-il, par exemple, de s’ingérer dans le processus d’attribution des marchés publics, des licences de pêche et laissait ses ministres choisir leurs collaborateurs, sans interférence de la Présidence. Parce qu’il savait la valeur d’arbitrage des institutions et les respectait, Sidi Ould Cheikh Abdellahi appartient à l’école de Mokhtar Ould Daddah, avec son sens de la dignité et son esprit pionnier, bien à l’abri de l’affairisme et des tentations épicières. Par tempérament et modération intellectuelle et sociale, il croyait à la progression, à la graduation, dans le traitement des affaires de l’Etat. Pendant son mandat inachevé, des chantiers de reconstruction du pays ont été engagés et un réel effort de transparence se manifestait par l’autonomie réelle accordée à l’Inspection générale de l’Etat (Ige) dont le dernier titulaire a été choisi, sur instruction du Président qui ne le connaissait pas. L’on peut aussi, citer, dans ce bilan, somme toute satisfaisant, le retour des réfugiés et la détermination à traiter, quant au fond, le passif humanitaire et la réconciliation nationale dans un esprit de vérité et de justice. Hélas, à cause de son indépendance, insoupçonnée par les militaires qui l’avaient soutenu au scrutin présidentiel, Sidi a été écarté. Il voulait gouverner, pleinement, au nom des mauritaniens, ses électeurs. Sa légitimité, de premier Président élu dans une compétition pluraliste, lui conférait un sens élevé du devoir et il y a cru, jusqu’au bout, sans faiblesse quand ses adversaires misaient sur une défection. Pour l’histoire, Sidi n’a pas failli, loin de là!
Pourtant, les militaires étaient ses alliés sûrs pour décrocher le pouvoir?Le général Mohamed Ould Abdel Aziz et sa coterie avaient échoué à convaincre les mauritaniens de soutenir le candidat Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, pendant la campagne. Cet appui encombrant suscitait même le rejet, au sein de l’opinion, à cause du reproche, peu flatteur, d’«homme des militaires’’. Certes, à l’époque, ils comptaient parmi ses principaux protecteurs et l’auraient même résolu à se porter candidat, mais, en dépit d’un concours aussi important, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi ne parvenait à passer au premier tour, déjouant ainsi les pronostics sur la force et l’influence supposée de la junte. Sa victoire restait suspendue aux ralliements des deux candidats arrivés en 3ème et quatrième positions, c‘est-à-dire Zein Ould Zeidane et le Président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir. Réputer, Aziz et ses affidés, artisans de la victoire de Ould Cheikh Abdellahi, relèverait d’un défaut de rigueur dans la perception et l’analyse du rapport des forces électoral.
Comment vous jugez la situation actuelle du pays?Malheureusement, elle se caractérise par l’impasse globale et une perte de crédit, à tous les niveaux : le chômage touche toutes les catégories d’âge et le pays connait un blocage politique sans précédent. Les Mauritaniens ne sont pas restés longtemps dupes des mirages aziziens. Il avait promis de faire baisser le prix du gaz, du gasoil, des produits agro-alimentaire etc.Le gaz domestique, à ce jour, est 30% plus cher ; le gasoil a connu plusieurs augmentations en quelques mois. Tous les tarifs des produits agro-alimentaires ont flambé. Pendant ce temps, lui a pris en main les marchés publics qu’il s’auto-attribue, sous des sociétés-écran, aux noms d’emprunts bien indentifiables ; après tout, il est bien difficile pour un apprenti-tyran de soumettre, en silence, un petit pays : nous sommes peu nombreux et nous nous connaissons, les uns les autres. A Nouadhibou, son associé et lui possèdent, à ce jour, plus de 20 bateaux. La lutte contre la gabegie, version Aziz, revient à sevrer tous les mauritaniens, les appauvrir mais gaver, gaver encore et toujours, 5 à 6 personnes parmi ses obligés et paravents. Et à quelles causes imputez-vous ce tableau sombre?Vous savez, au lendemain du coup d’état de 2005 et de la transition conséquente, nous avions beaucoup espéré. L’attente d’une nouvelle ère a été énorme d’où l’intensité de la déception. Le Général et son putsch de 2008 nous ont contraints à abdiquer certains acquis, puis régresser, loin en fin de peloton. Il a rétabli le système que nous avons tous vigoureusement combattu : démagogie, aventures, mensonges, incertitudes, instabilité administrative, promotion de l’inexpérience, le Général a consolidé les aspects les plus négatifs de l’ère Ould Taya. A titre d’exemple, le plus flagrant, il choisit, parmi ses collaborateurs, les hommes les plus médiocres, les plus faibles et les plus incompétents.Le Général Aziz ne dispose pas de facultés politiques et de qualités de commandement que requiert la direction d’un pays aussi vulnérable que la Mauritanie. Sa présence à la tête de l’Etat est une erreur de casting comme l’histoire en produit souvent et de manière tragique. L’homme, je le crains, n’a pas encore livré le pire de lui-même.Vous qui en côtoyez beaucoup et depuis longtemps, comment évaluez-vous l’homme d’Etat Mohamed Ould Abdel Aziz ? De tous ceux qui ont présidé le pays, depuis l’incomparable Mokhtar Ould Daddah, Aziz est le seul dépourvu de toute aptitude à conduire la communauté de destin et dont le niveau scolaire s’avère le moins performant. En tant que militaire, il reste l’un des rares officiers à n’avoir subi aucune formation digne des fonctions qu’il a occupées. Malheureusement, en pur produit du système érigé depuis juillet 1978, il a cumulé les promotions fulgurantes, lesquelles, à aucun moment, ne tenaient compte de son cursus dans le rang. Aziz a été propulsé sur le devant de l’histoire, envers et contre toutes les règles et procédures d’avancement.Sa mission essentielle, aux yeux de ses employeurs successifs, se résumait à celle d’un garde-chiourme, commis à la sûreté de son maître car sa loyauté était acquise. Imaginez une multinationale, florissante, qui décide de doter son premier responsable à la sécurité de tous les moyens d’assumer pleinement sa mission, avec la possibilité de choisir, lui-même, ses éléments à sa convenance et selon ses seuls critères. Fort de son dispositif, ce responsable de sécurité décide, un jour, de destituer le PDG de l’entreprise, d’user de la signature et de s’autoproclamer désormais seul et unique responsable de celle-ci. La société, ne peut être vouée, dès ce moment qu’à la faillite retentissante.C’est exactement ce qui arrive à la Mauritanie, depuis le 6 août 2008, surtout que notre général n’est doté d’aucun savoir-faire, ni de savoir-vivre qui auraient pu compenser ses carences. Il prétend diriger le pays, conduire une nation vers des lendemains meilleurs, alors qu’il ne manifeste de respect, d’égard, de considération encore moins d’empathie, à aucun de ses concitoyens ; ses collaborateurs proches ploient sous le mépris, l’arrogance et la suffisance du personnage.
Vous avez contribué à la chute de O. Taya, assisté à la fin du règne de Sidi et vous dites actuellement que le pays est instable. Comment voyez-vous son avenir ?Ould Taya n’est plus aux affaires, je ne souhaite donc pas parler de lui. Je ne suis pas de ceux qui l’ont servi et ne lui dois ni carrière, ni promotion, contrairement au Général Aziz. Mon éducation et mon savoir-vivre m’imposent de ne pas le dénigrer. Je constate qu’Aziz, l’a courtisé. Il fayotait pour lui et se servait d’alliances matrimoniales pour se faire accepter dans son cercle. Il est sa création, lui doit toute sa carrière et sa fortune mais s’est donné la mission de le vilipender, de l’humilier sa famille et lui, et de le traiter de tous les noms. C’est ainsi que le genre Aziz exprime sa reconnaissance.Quant à mon opposition au président déchu Ould Taya, elle relevait d’un combat contre un système de clientélisme tribal, de népotisme, de gabegie, d’impunité des violations graves des droits de l’Homme, de passe-droit, de déni de liberté, d’élections tronquées, d’opposition muselée, etc. Aujourd’hui, le système se reproduit et aucun de ses acteurs principaux n’a subi la sanction méritée parce que Aziz est leur protecteur, l’un des leurs et sans doute le meilleur gardien des privilèges dont il canalise juste le cours, à son avantage et au profit des siens.Bref, je ne puis disserter sur l’avenir politique du pouvoir de Aziz parce qu’à mes yeux, il ne possède aucune faculté de s’enraciner. Les fondements immoraux de son édifice tremblent d’où son instabilité, c’est un constat clinique, devrais-je dire. Tout au plus, pourra-t-il négocier des périodes de répit, plus ou moins brèves, qui ne sauraient permettre la moindre perspective ni d’ailleurs cette nécessaire projection au-delà de 6 mois sans quoi toute politique dérive dans le bricolage ; Aziz est un dilettante, coincé dans un rouage de l’histoire. Je ne suis certes par fort en mécanique mais l’expérience enseigne que ce genre d’attelage ne va jamais très loin.
Un mot sur les événements actuels en Mauritanie, particulièrement le mouvement des jeunes ?La jeunesse mauritanienne est consciente, civilisée et en phase avec la mondialisation techno-médiatique. Les diverses formes de marginalisation et de chômage qu’elle subit exacerbent ses facultés critiques. Tôt ou tard, malgré le rappel et la mise en œuvre de toutes les instances de démobilisation, notamment par la tribu, cette jeunesse, sans avenir viable, imposera son empreinte sur le devenir de la Mauritanie. Des pouvoirs bien plus puissants et ancrés dans l’histoire que celui de Aziz tombent, un à un, autour de nous. Le régime actuel a acquis une popularité imaginaire au cours de la dernière élection présidentielle, par l’usage d’un discours populiste qui insulte l’intelligence et se résume au credo vide « je suis le président des pauvres’’ ; avec le temps, toute la vacuité du slogan se dévoile et sa puissance d’hypnose s’érode. Le pouvoir de Aziz récolte les fruits de ses fausses promesses. Le peuple sait, désormais, que la lutte contre la gabegie n’est qu’un slogan de campagne ; le ‘’président des pauvres’’ exige une commission, dans les principaux marchés publics, au demeurant distribués entre une poignée de membres de sa tribu et quelques rares autres prête-noms…Ce népotisme est le vecteur de la colère chez la jeunesse arabe, à la source de ses révoltes en Egypte, Tunisie, Libye, Syrie et au Yémen. Il me semble bien naïf de croire que la fameuse «spécificité» de notre pays le ferait échapper à la dynamique de son environnement.
Sur la base de votre expérience dans le domaine, comment trouvez-vous la politique engagée par le régime contre le terrorisme ?La sécurité aux frontières relève autant de l’enjeu de politique étrangère que de la police domestique. Or, avec un pouvoir qui n’a pas de stratégie, ni d’initiative politique, économique ni même diplomatique, la décision se conçoit au moment de sa prise. Du jour au lendemain, la Mauritanie s’affiche tantôt l’amie de l’Occident démocratique et s’aligne, l’instant d’après, sur l’Iran. L’on tente même le diable au Venezuela, sans calcul ou raison que puissent motiver nos intérêts objectifs. Depuis son avènement, le Général a toujours navigué à vue et c’est l’une des raisons de son échec. Un homme d’Etat doit se confronter à ses insuffisances non pas les fuir. Baltazar Gracian, le grand moraliste, prédisait à l’usage du prince espagnol qu’il conseillait par la vertu, bien à l’inverse du cynique Machiavel : « qui se sera maître de soi-même, le sera bientôt des autres ». Or, cette maîtrise salutaire suppose d’apprendre, d’écouter, de chercher conseil, de fouiller ses défauts pour mieux s’en prémunir.Permettez moi donc de dire que la conduite à l’égard des groupes salafistes – je veux dire la politique sécuritaire - s’est beaucoup détériorée. Le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi avait chargé Aziz de s’occuper du dossier, au lendemain de son accession, ô combien controversée, au grade de général. Après cette promotion indue, il y eut l’assassinat des ressortissants français en décembre 2007 et les incidents du genre se multipliaient, résultats d’un défaut de prévention. La Mauritanie ne dispose pas de stratégie en la matière parce que la stratégie requiert des compétences et une vision, au plein sens du mot, avec la conjugaison de la connaissance du terrain à un brin d’audace. Or, Aziz en est démuni, cruellement, handicap qu’il compense par le silence mais ce genre de cache-misère ne tient pas en temps d’épreuve. Le Général prématuré justifia son putsch, contre Ould Cheikh Abdellahi, le 6 août 2008, par l’absence de sécurité ; il tenta même de créditer l’idée farfelue, que ce dernier était salafiste, le poussant à construire une mosquée à la Présidence et y inaugurer, la prière du vendredi. Or, à l’époque des premiers attentats, Aziz était le seul responsable de ce dossier et s’avéra, bien vite, dans l’incapacité d’accomplir la mission.Le pouvoir mauritanien estime qu’il a doté l’armée de moyens sophistiqués et œuvré afin qu’elle soit opérationnelle pour affronter les groupuscules mais la population réclame la sécurité réelle, de proximité. Des voitures piégées sont arrivées jusqu’aux faubourgs de Nouakchott et, pour la première fois, des étrangers avaient été également kidnappés, sur le principal tronçon routier qui relie les capitales politique et économique. Quelle est donc l’utilité des dépenses militaires, si ce n’est la captation de marchés suspects qui enrichissent l’entourage présidentiel ?
Certains vous accusent d’être en contact avec AQMI, de l’aider à localiser les ressortissants étrangers avant de négocier leur libération contre le versement de rançons ? C’est de bonne guerre, voyez-vous : Il s’agit d’une propagande vulgaire, ventilée par la sécurité de Ould Abdel Aziz pour couvrir ses échecs par le transfert de culpabilité. Des sites électroniques, des gens spécialisés dans le commérage de salon ne ratent d’occasion, pour me faire porter la responsabilité de la faillite d’Aziz. Très souvent, je me retrouve cité dans des scandales et des montages dont j’ignorais les noms des protagonistes.Au sujet des négociations pour la libération des otages, je ne travaille pas de manière individuelle mais en partenariat avec différents services de sécurité, occidentaux et africains – parmi lesquels les renseignements espagnols et canadiens ; ces instances sont les mieux informées sur ce qui s’était passé et il est inconcevable qu’elles acceptent d’interagir avec un complice du rapt de leurs ressortissants. Je me suis impliqué, dans des conditions pénibles et non dépourvues de risque, en réponse à une demande de médiation, adressée au Burkina Faso, dans le cadre d’une coopération sous régionale et internationale au bénéfice des otages occidentaux. Notre objectif consistait à obtenir le retour des victimes, en bonne santé et c’est ce que nous avons réussi, toujours de manière officielle, sans détour.
Quelle approche idéale, selon vous, pour combattre le terrorisme ? Le plus important, dans ce domaine, c’est de savoir profiter des expériences, tirer les conclusions qui s’imposent afin de propager la sécurité en Mauritanie et de ramener notre jeunesse à sa vocation de moteur du développement. L’on est obligé de chercher des solutions globales pour faire face à ce phénomène, foncièrement étranger à nos sociétés saharo-sahéliennes, plus festives, spirituelles et tolérantes que dogmatiques. L’imagination et la souplesse devraient prévaloir pour résoudre un conflit qui se déroule dans un environnement islamique où siègent de grands érudits. Cette approche, pour aboutir, sera globale et acceptable, loin de toute pression étrangère qui fait de la Mauritanie une machine militaire entre les mains d’autres parties.
Vous avez de bons rapports avec différents chefs d’état du continent dont certains furent des opposants persécutés ou des chefs de guerre. Quel est le secret dans cette réussite et est-ce que les gouvernements de Nouakchott s’appuient sur vous pour profiter d’une telle aura?Sincèrement, je suis fier de ces relations qui m’honorent. Elles sont bâties sur le respect réciproque et le soutien à des populations opprimés, qui se battent pour recouvrer leurs droits… Elles prospèrent sur le sens de l’honneur, à l’abri de toute flagornerie. Par rapport à la deuxième partie de votre question, je vous assure et vous confirme que je suis fils de la Mauritanie et continuerai à la servir, toujours, y compris par mes amis.
Enfin, un mot sur Kadhafi et sur la Libye….Je crois que ce qui est en train de se passer en Libye est une ‘’vengeance divine’’ à cause des agissements de Kadhafi contre le peuple mauritanien. Après le putsch de Aziz, Kadhafi avait choisi de prendre partie pour les militaires en proclamant, devant le public, son soutien à la tenue d’élections unilatérales, le 6/6/2009, avant l’accord de Dakar. Les putschistes avaient bénéficié, en outre, de l’appui politique et financier de la Libye qui jouait un grand rôle pour infléchir la position de plusieurs états….c’est ce que nous appelons ‘’tazaboutt’’.
Propos recueillis par Biladi/Al Akhbar