vendredi 30 novembre 2018

malaise - expression de la Mauritanie de toujours et maintenant : Hanna mint Cheikh Ma El Aïnin

 
J'admire infiniment ce texte, reçu de mon ami Mohamed El Hacen qui l'a ensuite commenté. Merci à eux deux.
 
Hanna Cheikh Malainine, Malaise je dis ton nom

Je m'appelle Hanna.
Je suis une jeune femme mauritanienne ambitieuse. Maman d'une adorable petite fille de 3 ans. Économiste de formation. Têtue. Parfois drôle et souvent maladroite.

Cette juxtaposition d'adjectifs me qualifie. Vous renseigne sur la personne que je suis. Cependant, aucun de ces qualificatifs pris séparément ne pourrait vous dresser un portrait exhaustif de ma personne. Je ne suis pas seulement femme. Ni uniquement économiste. Pas même seulement mère. Je suis la somme de toutes ces choses et toutes ces choses, c'est moi !

L'analogie vous paraîtra sans doute prétentieuse, mais je suis semblable à la Mauritanie. À ma Mauritanie ! Ma Mauritanie est multiple. Définie par sa pluralité. Bien plus qu'une simple juxtaposition, de toutes les parties qui la composent, elle est la somme heureuse d'une diversité assumée.

Le caractère hybride de notre pays pris entre une arabo-berberité revendiquée et une africanité assumée en fait un pays trait d'union. Le trait d'union, pour rappel, est ce Vecteur de rapprochement entre deux entités parallèles.

Nous sommes ainsi ce pays où se mêlent la fausse pudeur d'une melahfa et l'explosion des couleurs du bazin. Où les chants de griots s'entremêlent aux appels du muezzin. Où l'on sert un thiéboudiène au déjeuner et, bien que trop calorique, un couscous au dîner.

Nous sommes riches. Riches en poissons, en minerais. Paraît-il même que nous sommes riches en poètes. Mais nous sommes d'abord et surtout riches de nous-mêmes : 3,8 millions d'individus, 3,8 millions d'individualités. Différentes. Singulières. Et si semblables. Quand il s'agit de se prosterner, front à terre, nous le faisons tous dans la même direction.

Et s'il venait que notre intégrité territoriale soit bafouée, c'est d'une seule voix que nous dirions NON ! 

Nous sommes nés un 28 novembre, 1960, il y'a de cela une soixantaine d'années ! Nous sommes si jeunes. Souvent immatures. Des bêtises, ma Mauritanie en a faites et trop peu assumé. Ma Mauritanie doit se regarder dans la glace et embrasser sa réalité. Car notre Histoire n'a parfois pas été glorieuse. Nos écoles ont failli dans leur rôle de ciment social. Et nos politiques d'unité nationale désastreuses.

Résultat : Ma Mauritanie melting-pot ne serait que vœu pieux ! Ce mythe d'une fusion heureuse des populations ne résiste que peu à l'analyse de la distribution économique des richesses et politique du pouvoir. J'ai souvent mal à mon pays. Mal, quand en regardant le journal télévisé je me rends compte qu'il manque la mélanine aux postes de décision. 

J'ai mal en visitant les écoles publiques qui ne sont malheureusement plus le terreau de la mixité sociale. J'ai mal lorsque le principe méritocratique est tordu au nom d'une pseudo-représentativité tribale. J'ai davantage mal lorsque l'Occident, manipulé par une main invisible mal intentionnée, ne voit en moi - Maure Blanche issue des beaux quartiers - qu'une misérable esclavagiste ! 

Ceci est mon cri. Il n'est pas seulement le cri d'une jeune fille, entre 17h et 19h, dans une salle du palais des congrès nouakchottois. Ce cri se veut l'écho des frustrations d'une génération. De celles et ceux qui, au-delà des principes familiaux, tribaux, régionaux et monochromatiques, souhaitent une Mauritanie d'opportunités. Une Mauritanie émergente. 

Qui, au lieu de crispations identitaires vaines, s'arme de sa diversité pour une entrée confiante dans la marche du développement. Et le développement, parlons-en. Puisque celui-ci nécessite la croissance. La croissance nécessite l'énergie. Et l'énergie se puisera en chacun d'entre nous. La Mauritanie, simplement.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire