FORUM NATIONAL POURLA DEMOCRATIE ET L’UNITE(FNDU)
Memorandum
sur la gabegie du pouvoir
de Ould Abdel Aziz
Nouakchott, le 30 Juillet 2014
Le Général Mohamed Ould Abdel
Aziz, on s’en souvient, avait justifié son coup d’Etat militaire en août 2008
par la prétendue impasse politique due, selon lui, au refus du gouvernement
d'organiser une session parlementaire extraordinaire. Il s’est engagé, après sa
prise du pouvoir à supprimer les causes de cette impasse par la réduction des
pouvoirs du Président de la
République, à renforcer le rôle du Parlement, à élargir le
champ des libertés, à consacrer de saines pratiques politiques, à consolider
l'unité nationale, à améliorer les conditions de vie des citoyens, et à lutter
contre la pauvreté et la gabegie.
Ce programme qui consistait, en fait,
en une « appropriation » du discours de l’opposition traditionnelle,
avait séduit, dans un premier temps, une partie de l’opinion, Ould Abdel Aziz
se présentant comme un réformateur décidé à résoudre tous les problèmes de
mauvaise gestion qui handicapaient l’essor de l’Etat mauritanien depuis
l’indépendance. Cependant, il s’est rapidement avéré que ce n’était que
propagande et mensonges, les pratiques du pouvoir venant, chaque jour, démentir
les slogans réformateurs de l’homme et témoigner d’une mal gouvernance sans
précédent.
Après
six années de pouvoir, les mauritaniens ont découvert le vrai visage de Ould
Abdel Aziz et la vraie nature de son régime dont trois caractéristiques
essentielles résument aujourd’hui, de l’avis de tous les observateurs,
l’essence autocratique et mafieuse :
1° Une
absence totale de repères moraux : En témoigne la série de scandales, très
médiatisés, dans lesquels le Chef de l’Etat s’est trouvé personnellement
empêtré et qui sont tout à fait étrangers aux mœurs de notre société et aux
valeurs culturelles et pratiques politiques de notre peuple. Il s’agit, entre autres affaires
troubles, de la balle du 13 octobre, des graves accusations de trafic de drogue
et de blanchiment d’argent et des doutes sérieux qui planent sur l’origine de
la fortune faramineuse du général lui-même et de certains de ses proches. A ce sujet, la grâce accordée à un
narcotrafiquant notoire, la libération des trafiquants arrêtés à Lemzereb, les relations confirmées
avec des personnalités impliquées dans le trafic de drogue, l’affaire des
valises de fausse monnaie reconnue par le chef de l’Etat lui-même ne
constituent que la partie immergée du gigantesque iceberg de la délinquance
morale prêtée au régime d’Ould Abdel Aziz à qui les affaires douteuses ont, en
quelque sorte, personnellement « collé à la peau » et auraient dû le
disqualifier pour l’exercice de la magistrature suprême ;
2° Un
autoritarisme sans limite et un profond mépris de loi : Cela se manifeste
par la concentration des pouvoirs entre les mains du général, la transformation
des institutions de la
République en coquilles vides et le recours systématique aux
mascarades électorales dont la dernière fut celle du 21 juin 2014, largement
boycottée par le peuple mauritanien, à l’appel du FNDU ;
2° Une
propension maladive à l’enrichissement illicite : Ould Abdel Aziz a mis le
pays en coupe réglée, afin d’assouvir son appétit démesuré d’accumulation
d’argent à son profit personnel à celui de son clan familial. Cette propension
maladive à l’enrichissement illicite et le refus obstiné de publier sa
déclaration de patrimoine, comme l’exige clairement la Loi, trahissent le caractère
mensonger des slogans « Le Président des Pauvres » et « La lutte
contre la gabegie », brandis par le régime cleptomane pour abuser de la
crédulité des citoyens de bonne foi.
C’est,
justement, pour édifier le peuple mauritanien et ses partenaires au
développement que le FNDU se propose
d’établir, dans ce qui suit, un recueil d’une partie des manifestations
de la gabegie ahurissante à laquelle s’adonne le pouvoir du général Ould Abdel
Aziz,. Cet éclairage aidera à faire la lumière sur l’énorme préjudice occasionné par la gestion de Ould Abdel Aziz
à la collectivité nationale; préjudice et pertes qui se chiffrent en certaines
de milliards d’ouguiyas !
Cet
inventaire portera, dans un premier temps, sur des dossiers se rapportant
aux secteurs des Mines, de l’Energie et
du Pétrole, de l’Equipement et des Transports, des Finances, de la Banque Centrale et
du CSA. Nous aborderons, dans une seconde étape, d’autres secteurs de
l’économie nationale.
Ampleur de la gabegie
sous Ould Abdel Aziz
Ministère des Mines, du
Pétrole et de l’Energie
La SNIM
La
principale entreprise du pays, la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM)
qui exploite le minerai de fer est devenue, depuis l’avènement du pouvoir
actuel, une boite noire pour toutes les manœuvres frauduleuses. Nous donnerons,
ici, des indications révélatrices de l’ampleur du pillage opéré dans cette
entreprise qui constitue le fer de lance de notre économie dont l’importance
stratégique pour le pays a toujours dissuadé les pouvoirs successifs de la
« domestiquer ».
Au lieu
de mener une gestion prudente de cette entreprise - qui a bénéficié d’une
conjoncture très favorable entre 2008 et 2013 à cause du prix élevé de la tonne
de fer (passé de 80 à 140 US $) et de la préparer à la compétition soutenue que
connait le secteur et aux retournements de conjonctures dans un environnement
international incertain, le régime s’est livré à un pillage systématique de ses
ressources à des fins personnelles et
particulières.
Ainsi,
et bien que la convention avec les bailleurs de fonds qui ont financé un projet
d’avenir pour le pays, le projet Guelb II, prévoit des conditions restrictives
sur les engagements majeurs et sur la gestion de la SNIM elle-même, la direction
actuelle de la société continue à dilapider les ressources de celle-ci sans
rendre compte, ni aux créanciers, ni aux actionnaires de l’entreprise, autres
que le Gouvernement mauritanien ! Osons l’énumération de quelques uns des
dossiers de gabegie qui pullulent à la
SNIM, en demandant au lecteur d’apprécier de lui-même
l’ampleur du gâchis et en exigeant l’ouverture d’enquêtes indépendantes pour
faire toute la lumière sur ces dossiers :
La SNIM a été
mise au service des politiques populistes du pouvoir et détournée de sa propre
mission pour servir les intérêts d’une poignée de proches du Président. A
titre d’exemples, citons les opérations suivantes, où l’argent de la SNIM a été utilisé, en
violation des procédures, pour financer des activités sans rapport avec la
mission et les intérêts de la société :
L’achat
d’avions au profit de la compagnie des transports aériens pour plus de
cinquante millions de dollars avec un appui permanant à la trésorerie de
Mauritania Airlines, sans aucun lien avec l’activité de l’entreprise ;
L’acquisition
de bus d’occasion (!) pour la société de transport public à Nouakchott ;
L’achat
d’importantes quantités de vivres, d’aliments de bétail et de camions de
transport au profit du CSA ;
La
construction d’usines de poteaux en béton (22 millions d’euros) et de tuyaux
(en béton également) à Aleg ;
La
construction d’infrastructures au profit de l’armée dans plusieurs localités du
pays ;
La
création de plusieurs sociétés en association avec les membres de famille du
Président dont les participations symboliques leur permettent de profiter des
ressources de la SNIM
tout en leurrant l’opinion publique en lui faisant croire qu’il s’agit de
sociétés publiques, alors que ce ne sont que des sociétés privées (Chami Steel,
une société faite pour faire main-basse sur la ferraille de la SNIM, une Société
d’Assurance, les usines d’Aleg, l’usine de nitrate avec des partenaires
« marocains », etc.) ;
Le
recrutement abusif des membres de famille du général président pour remplacer
les techniciens de la société à des postes stratégiques (direction
commerciale) ;
La mise
en place d’une organisation caritative au service de la politique du pouvoir
dont l’objectif est de réaliser des actions « humanitaires » en
dehors de toute procédure ;
Le
financement de sociétés privées défaillantes en dehors de toutes les règles de
l’art (prêt de 15 milliards d’ouguiyas à la société en charge de la construction
de l’aéroport de Nouakchott);
Le
financement d’hôpitaux qui n’ont rien à voir avec l’activité de la société
;
Le
financement de routes à Nouakchott et à Nouadhibou ;
Le
financement de travaux au niveau de la Présidence et des ranchs privés du président
;
Le
décaissement de dizaines de millions de dollars pour des forages miniers de
complaisance confiés, en dehors de tout cadre règlementaire, aux proches du
Président, le plus souvent sans réalisation effective ;
Les
procédures de gestion de l’entreprise ont été bafouées et le pouvoir
discrétionnaire a pris la place de la règle ;
Le
projet Guelb II connait un retard considérable ayant occasionné un surcoût que
certains experts estiment à plus de 30%, en raison des marchés de complaisance
(tous les appels d’offre qui n’ont pas été gagnés par les sociétés appartenant
à l’entourage du général président ont été déclarés infructueux puis relancés
et attribués aux hommes de celui-ci avec des avenants !) et de la
démotivation de l’encadrement qui est dégouté par la gestion de l’entreprise
(voir la lettre ouverte des cadres de la SNIM).
La
construction d’un building au centre ville de Nouakchott qui ne correspond à
aucun besoin identifié par la
Société suivant des critères objectifs de bonne gouvernance.
L’emprise
de la famille présidentielle sur la
SNIM est connue de tout le monde et les points évoqués
ci-dessus ne représentent que la partie visible de la gabegie au niveau du
fleuron de l’économie nationale.
Nous
attirons l’attention de l’opinion publique sur le fait qu’un retournement de la
conjoncture, de plus en plus probable avec la baisse de 30% déjà observée au
niveau des prix du minerais par rapport à décembre 2013, pourra conduire, s’il
n’est pas mis fin à de telles pratiques délictueuses, à la faillite de la SNIM, avec toutes les
conséquences imaginables pour l’économie du pays, dont la société minière
représente le premier contributeur.
Nous
sommes en droit de douter de la pertinence de ces dépenses engagées par la SNIM et de ces
« filiales » privées qu’elle a créées. Si le gouvernement est
convaincu de leur utilité, c’est sur les ressources budgétaires de l’Etat
qu’elles devaient être réalisées, surtout qu’on parle d’excédent record
dépassant les cent milliards d’ouguiyas et de réserves en devises de l’ordre du
milliard de dollars !
En
réalité, la seule explication est l’absence de procédures au niveau de la SNIM et son opacité, ce qui
permet de garder cette gabegie hors des regards indiscrets.
TAZIAZET et MCM
Ces
deux entreprises, qui contribuent pour environ 40% du chiffre d’affaires du
secteur minier, auraient dû voir leurs conditions contractuelles révisées afin
de permettre à la communauté nationale d’en tirer le plus grand
profit comme c’est l’usage dans tous les pays miniers ; le potentiel du
pays en ressources minières étant devenu certain. Au lieu de cela, des parents et hommes de
confiance du général Ould Abdel Aziz ont été placés au sein de leurs hautes
instances dirigeantes, afin d’assurer à l’entourage familial du régnant et ses
partenaires en affaires un monopole quasi absolu sur toutes les prestations
réalisées par des nationaux au profit de Taziazet et MCM et de canaliser vers
le même milieu tous les avantages qui peuvent être tirés de leurs activités. A
cet effet, nombre de sociétés détenues par l’entourage présidentiel ont été
créées.
En
raison de la cupidité de cette camarilla, l’administration a perdu toute
emprise sur ces entreprises qui continuent de licencier nos compatriotes, alors
qu’elles recrutent des étrangers et de dégrader notre environnement sans aucune
réaction des autorités.
Des
informations concordantes font état d’un découragement des deux entreprises et
d’une constante révision à la baisse de
leurs investissements, en raison des arnaques dont elles font l’objet de la
part de personnalités influentes du régime.
Les permis miniers
L’octroi
des permis miniers a connu une augmentation exponentielle durant les six
dernières années. Ainsi, depuis que la
vocation minière du pays a été confirmée avec le début de l’exploitation de la
mine d’or de Taziazet, le pouvoir a attribué un nombre impressionnant de permis
(voir les communiqués du conseil des ministres) et particulièrement aux membres
de l’entourage familial du chef de l’Etat. Des permis ont été retirés
d’investisseurs étrangers pour être attribués à certains proches du général,
seuls ou en association avec des partenaires étrangers (Tamaghout, le quartz,
le phosphate, etc.). Cette gabegie a retardé beaucoup d’entreprises qui auraient
dû, dans une situation normale, avoir déjà commencé l’exploitation de leur
permis. Elle a conduit d’autres à différer leurs explorations à cause de
l’environnement exécrable des affaires.
L’exploration pétrolière
Depuis
son accession au pouvoir, Ould Abdel Aziz a consacré la mainmise d’une
compagnie pétrolière (Tullow) dirigée par un de ses hommes de main, alors
qu’elle ne détenait qu’un infime pourcentage du puits de Chinguetti. C’est elle
qui est désormais le leader de l’exploration, de la production et de la
commercialisation du pétrole brut en off shore. C’est aussi elle qui a le
monopole des champs gaziers et de leur exploitation avec des contrats d’achat
de son produit par les centrales électriques de la Société de Production de
l’Electricité à partir du Gaz (SPEG) à un prix fortement majoré, réduisant
considérablement l’intérêt que devrait constituer la production de
l’électricité à partir du gaz naturel pour notre économie !
Face au
refus de lui renouveler ses permis et aux multiples problèmes qui lui auraient
été créés, l’opérateur du projet Chinguetti (Petronas) - qui était le chef de
fil dans le secteur - a été obligé de céder sa place à la société de
l’entourage du Président. Petronas serait en instance de quitter le pays.
Les marchés de la SOMELEC
La SOMELEC n’a
pas échappé, elle aussi, à la main mise de l’entourage du Président, qui en est
le fournisseur principal. Tout le monde
se souvient encore de la polémique autour de la centrale de 120 MW qui a été
confiée au fournisseur le plus cher au grand dam du moins disant qui était
représenté par une entreprise de la place bien connue. On se rappelle également
la polémique autour des 60 MW que devait financer la Banque Islamique
de Développement et qui devaient être confiés, par marché de gré à gré, à une
entreprise de l’entourage présidentiel. Ce n’est un secret pour personne que ce
même membre de la famille du Président est le représentant d’un grand
fournisseur de matériel solaire ; ce qui explique que, depuis quelque
temps, les grandes artères de Nouakchott et d’autres villes du pays ont été
envahies par ses poteaux et que la part du solaire dans notre production
électrique progresse à grande vitesse.
Une très bonne chose pour le pays n’eut été la surfacturation et le
népotisme qui en sous-tendent l’octroi des marchés.
Les hydrocarbures
liquides raffinés
Dès son
installation au pouvoir, l’actuel Chef de l’Etat a crée sa propre société de
commercialisation des hydrocarbures (National Petroleum, NP, que certains
appellent Notre Président) au mépris des textes légaux et réglementaires. En
effet, les textes exigent des compétences techniques et des ressources
financières que la nouvelle société n’avait pas, venant d’être créée de toutes
pièces. Depuis lors, cette NP a eu tous les monopoles du marché public et est
partenaire local, comme par hasard, de tous les fournisseurs du marché
mauritanien en hydrocarbures raffinés !
Ministère de
l’Equipement et des Transports
L’aéroport de Nouakchott
La
plupart des experts en la matière s’accordent à dire qu’à ce stade du volume de
trafic aérien en Mauritanie, la construction d’un nouvel aéroport ne se
justifie pas. La piste d’atterrissage et les installations techniques de
l’actuel aéroport répondent aux critères techniques requis. Le seul besoin essentiel pour permettre à
l’aéroport actuel de satisfaire à tous les critères techniques est l’extension
de l’actuelle aérogare ou la construction d’une deuxième.
Indépendamment
de l’inopportunité de ce projet, c’est la nature même de la transaction qui
montre l’essence mercantiliste et les méthodes mafieuses du régime qui ne
recule devant rien pour transgresser toutes les règles, pourvu que cela procure
à son chef et à son entourage des avantages matériels. L’accord prévoit la
construction d’un aéroport d’une capacité de deux millions de passagers (le
marché actuel n’atteint pas les deux cent mille passagers et les plus grands
aéroports de la sous région, Dakar et Abidjan, n’atteignent pas le million de
passagers) avec deux pistes (60% du coût pour les pistes et 40% pour le
bâtiment) en contrepartie de quatre millions cinq cent dix mille (4.510.000) m2
dans les quartiers de Tevragh Zeina et du Ksar pour un délai d’exécution de 24
mois. Il n’y a eu aucune étude pour estimer, ni les coûts de la construction de
l’aéroport, ni la valeur des terrains inclus dans ce troc d’un autre âge !
Une mission du FMI avait, en 2012,
estimé la transaction à 200 à 300 millions de dollars US, soit à peu près 80
milliards d’ouguiyas. Il s’agit donc d’un gré à gré de 160 milliards - soit
plus de deux fois l’investissement public financé sur ressources propres de
Etat cette année là - hors budget et sans en référer au Parlement. Plus grave
encore, l’entreprise à laquelle le marché a été attribué n’a à son actif aucun
km de piste ; elle venait d’être créée pour l’occasion !
Le secteur routier
Le
secteur routier constitue l’une des priorités de la politique des gouvernements
successifs depuis de nombreuses années. Un programme important,
initié depuis 2006, et qui approche les 2000 km, est en cours. Son coût global est
proche de 2.000 milliards d’ouguiyas, déjà décaissés à 80%, pour un niveau de
réalisation qui n’atteint pas les 50%. Tous les chantiers connaissent des
retards considérables, pouvant parfois dépasser le double de la période prévue
pour leur réalisation. Les exemples précis ne manquent pas :
Kiffa-Tintane, Kiffa-Kankossa, Nouakchott-Nouadhibou, Atar-Tidjikja,
Aweyvia-Keur Macen, Tiguend-Méderdra, etc…
Ces
retards constituent des gaspillages considérables en raison des surcoûts qu’ils
occasionnent. Les experts estiment qu’un retard de 12 mois, pour un projet dont
la réalisation était prévue en 24, occasionne un surcoût de plus de 20% du
budget initial. Le « génie » du général président a consisté à mettre
en place un système qui lui permet de s’arroger le monopole de ce secteur à
travers des institutions publiques qui deviennent des prête-noms pour lui et
pour ses proches. Ces institutions s’appellent ENER, ATTM, SNAT et le Génie Militaire.
Elles bénéficient à elles seules de plus 80% des marchés du secteur routier,
mais aussi du secteur hydraulique, un autre secteur d’absorption prioritaire
des investissements publics. L’ATTM est particulièrement engagée dans ce
processus de gabegie. Le système fonctionne à travers l’attribution des marchés
aux institutions « publiques » précitées, lesquelles les
sous-traitent intégralement aux proches du président ou les réalisent en
faisant appel à la location du matériel des sociétés de celui-ci et de ses
proches (ce n’est un secret pour personne que le Président est le premier
propriétaire d’engins de travaux publics et de forages hydrauliques et miniers
dans le pays). La sous-traitance se fait
à des prix parfois supérieurs aux prix du marché initial tout en permettant au
sous-traitant, après avoir été payé plus de 50% des travaux sans avoir réalisé
grand-chose, de se retirer avec un arrangement qui lui permet de ne pas
rembourser les décaissements déjà reçus, en laissant à l’entreprise « publique »
son projet sur les bras, occasionnant ainsi des retards considérables et des
pertes que la SNIM
ou le Trésor public devront prendre en charge. Tout le monde sait que
l’ensemble des routes réalisées par ATTM à Nouakchott en 2010-2012 sont
actuellement en reprise totale par l’ENER ! L’on peut donc imaginer
l’ampleur de la gabegie dans ce secteur, combien elle coûte au pays et rapporte
au Président et à son entourage.
Mauritanian Development
Corporation (montage des avions)
La Mauritanian Development Corporation
(MDC), société écran qui n’a d’existence que le nom, a bénéficié d’un marché de
plus de 7 milliards d’ouguiyas (23. 650. 000 USD) sans qu’aucune
procédure de dépense de l’argent public n’ait
été respectée (pas d’appel d’offre) pour monter une usine
d’assemblage d’avions à Nouakchott. Une avance de plus de deux milliards
d’ouguiyas (7.095.000 USD) a été versée à cette société fictive avec une
attribution d’un terrain de quelques hectares à proximité du fameux nouvel
aéroport de Nouakchott. Le détournement de deniers publics que constitue cette
affaire est doublé d’une opération de surfacturation manifeste.
Jusqu’aujourd’hui, cinq mois avant la date de réception prévue de ces avions,
aucune trace de cette société n’est visible à Nouakchott, encore moins de la
fameuse usine de montage des avions !
La Société des Transports de Nouakchott
La
mauvaise expérience de la STPN
n’a pas empêché Ould Abdel Aziz de créer, sans étude préalable, une société de
transport public à Nouakchott. Des bus d’occasion (!) dont la durée de vie n’a
pas atteint deux ans ont été acquis, à cet effet, auprès de l’Etat d’Iran dans
des conditions d’opacité totale. D’autres bus, toujours d’occasion pour ceux
d’entre eux qui circulent déjà, ont été acquis récemment sur financement de la SNIM. On ne sait pas
encore combien de temps ils vont fonctionner. Nous ne disposons pas
d’informations précises sur ces transactions pour le moins opaques, sinon que
de fortes présomptions de malversations pèsent sur elles.
Le Programme de ISKAN (Chami
et N’Beiket Lahouach)
Au
moment où des secteurs vitaux comme la santé et l’éducation font face à des
difficultés considérables faute de moyens financiers, des dizaines de milliards
d’ouguiyas ont été gaspillés pour construire et équiper des villes fantômes
auxquelles on a donné les noms de Chami et de M’Beiket Lahouach. Tout au long
des trois dernières années, ces deux villes fantômes ont englouti
près de 30 milliards d’ouguiyas ! L’examen des derniers appels d’offre
lancés par la SOMELEC
montre que l’électrification de la seule ville de Chami coûte plus de trois
milliards d’ouguiyas au contribuable mauritanien.
Ministère des Finances
La douane et les impôts
Depuis
qu’il s’est emparé du pouvoir en 2008, le général Ould Abdel Aziz a mis les
services de la douane et des impôts au service de son entourage en créant un
monopole de fait au profit des sociétés de ses proches par le biais d’une
fiscalité douanière préférentielle rendant impossible toute concurrence. Des
centaines de milliards d’ouguiyas liés à des entrepôts fictifs n’ont jamais
fait l’objet de régularisation, occasionnant des manque à gagner considérables
pour le trésor public. Au niveau des impôts, les redressements fiscaux ciblés
ont caractérisé cette période.
La distribution des
terrains à Nouakchott et à Nouadhibou
Si la
volonté de Ould Abdel Aziz et de son clan réduit de piller le pays et de mettre
la main sur ses richesses se manifeste au niveau de tous les secteurs
économiques, elle atteint des proportions
inqualifiables dans le domaine foncier. Ici, le ravage a lieu au grand
jour et sans vergogne. Qu’on en juge :
Distribution,
sur la route de Nouadhibou, de terrains de plusieurs dizaines de milliers de m2
(on a pu constater des concessions d’un millions de m2 !) à des particuliers
sous l’appellation de « concessions rurales » ou soit disant pour la
construction de projets immobiliers. En réalité, ces terrains ne sont destinés
qu’à la spéculation immobilière et à l’enrichissement rapide de la coterie de
Ould Abdel Aziz ;
Distribution
de toute la zone comprise entre la plage des Pêcheurs et le Port de Nouakchott,
amputant parfois sur le domaine portuaire inaliénable, au profit de l’entourage
du Président ;
Distribution
des meilleurs terrains sur l’Avenue AL MOUQAWAMA à la parentèle proche du
général régnant, soit disant pour construire une « zone
industrielle ». Ces terrains sont en fait destinés à la construction de
ranchs particuliers et de résidences secondaires ;
Distribution
des meilleurs terrains de l’Avenue SOUKOUK aux mêmes personnes ;
Cession
des terrains dits des « Blocs » au général Ould Adebl Aziz en
personne et à ses proches avec obligation de mise en valeur en 24 mois,
alors que depuis 5 ans rien n’a été encore réalisé et aucune sanction n’a été
prise à l’encontre des bénéficiaires ;
Morcellement
d’une partie des terrains abritant le Stade Olympique et l’Ecole de Police et
cession des superficies prélevées à de proches parents du général pour
construire des boutiques ou des centres commerciaux. Crime innommable que cette
amputation d’édifices publics vitaux, pour en faire des boutiques
privées ! Plus scandaleux encore, il semble que les attributaires ne sont
en fait que des prête-noms ; les vrais propriétaires étant Ould Abdel Aziz
lui-même et son clan familial.
Vente
de plusieurs autres équipements collectifs aux proches du Président (siège des
fanfares à l’ilot G, hôtel Marhaba, etc.).
Les 50 millions USD de
l’Arabie Saoudite
A la
demande des autorités de l’époque, l’Arabie Saoudite avait accordé à notre pays
un don de 50 millions de dollars USD pour renforcer les moyens de l’armée
nationale suite aux attaques terroristes en 2007 et 2008. Le pouvoir issu du
coup d’Etat de 2008 avait trouvé le montant dans son intégralité dans les
comptes du Trésor public et avait immédiatement procédé à son utilisation sans
se soucier des procédures, ni des règles en la matière. L’opposition continue
depuis 2009 à réclamer toute la lumière sur le sort réservé à ce pactole dont
l’utilisation n’a laissé aucune trace visible. Le Parlement, seule autorité
habilitée à autoriser les dépenses publiques, n’a jamais été saisi au sujet de
ce don !
Les 200 millions USD de
la transaction SENOUSSI
Dans une opération que seul un
Etat voyou peut entreprendre, le pouvoir en place aurait, moyennant une forte
rétribution, assuré à l’ancien directeur général de la sûreté de Kadhafi que sa
famille et lui pourraient venir s’installer en toute sécurité en Mauritanie,
avant de le livrer aux nouvelles autorités de Libye contre une rançon de 200
millions de dollars US ! Le Gouvernement libyen, qui a refusé de verser
cet argent sur des comptes personnels, a effectué un transfert à la Banque Centrale de
Mauritanie. Dans un pays comme le nôtre, connu pour son hospitalité et son
respect des valeurs islamiques, toute la lumière doit être faite sur une telle
opération et les différents acteurs qui y ont pris part doivent répondre de
leurs actes devant les tribunaux de la république.
La BCM et le système bancaire
Les nouveaux agréments
bancaires
Les
cinq dernières années ont connu la création d’une dizaine d’institutions
financières, soit pratiquement le double de ce qui existait en 2008, dont six
banques et quatre sociétés de crédit leasing. Ces institutions ont été créées
au mépris des textes en vigueur. Au lieu d’étudier les besoins du marché et de
prendre en compte les critères de l’expertise et de la disponibilité des
ressources financières, les agréments ont été distribués à des individus, tous
en association avec l’entourage présidentiel, sans compétences ni ressources,
dans le seul but de les enrichir rapidement en leur donnant le pouvoir de
création de la monnaie. La
Banque Centrale a dû déroger à toutes les règles pour
permettre la création de ces institutions financières. Elle a carrément ignoré
les exigences des fonds propres (six milliards d’ouguiyas) et a, quelquefois,
donné elle-même à de nouvelles banques les ressources nécessaires pour avoir
les fonds propres requis. Les heureux bénéficiaires se sont retrouvés du jour
au lendemain sur la liste des
milliardaires du pays.
L’allocation des devises
Malgré
des réserves en devises dépassant le milliard de dollars, la Banque Centrale de
Mauritanie n’accorde les devises qu’à un groupe de privilégiés appartenant à
l’entourage immédiat du Président. Elle a instauré, avec la douane, un monopole
de fait au profit d’un petit groupe de gens, en lui accordant des devises à des
prix préférentiels et une fiscalité douanière préférentielle, sans aucun souci
des conséquences pour les autres acteurs économiques et pour les consommateurs
ainsi soumis à un marché monopolistique.
La
manipulation du taux de change
Des
informations de plus en plus persistantes font état d’une manipulation
fréquente des taux de change pour favoriser davantage le groupe réduit des
bénéficiaires des devises de la Banque Centrale. Cette manipulation se fait de
façon ponctuelle au moment des transferts de certains importateurs privilégiés.
Plus que tous les crimes économiques commis par le pouvoir actuel, une telle
pratique dépasse tous les entendements possibles et imaginables. Certains estiment que la Banque Centrale
est redevenue, elle aussi, une boite noire avec des pratiques beaucoup plus
mafieuses et plus dangereuses pour notre économie que toutes les pratiques des
temps les plus sombres.
Le Commissariat à la Sécurité Alimentaire
Le
Commissariat à la
Sécurité Alimentaire est accaparé par les trois principaux
hommes d’affaires les plus introduits auprès du Président. Ceux-ci bénéficient
de l’exclusivité des ventes par le CSA de l’aide alimentaire (italienne,
japonaise, etc.). C’est aussi auprès d’eux, presqu’exclusivement, que le CSA
achète les produits destinés aux boutiques EMEL, dont la raison d’être
semble-t-il, n’est autre que d’engraisser davantage les commerçants proches du
pouvoir.
Les
différents dossiers évoqués dans ce mémorandum, ne représentent qu’une infime
partie de la gabegie institutionnalisée par l’actuel pouvoir ; celle
strictement limitée à l’entourage immédiat du Président. Nous ne pouvons pas
être exhaustifs, tant la gabegie touche à tous les secteurs de l’économie.
Nous
n’avons pas parlé du secteur agricole et de ses marchés d’engrais, de grillage
de protection, ni du crédit agricole, ni des équipements achetés par la SNAT pour une dizaine de
milliards d’ouguiyas et dont une grande partie n’a, semble-t-il, jamais été
livrée (voir le problème actuel de la moisson de la contre saison). Nous
n’avons pas évoqué la santé et les scanners de seconde main qui n’ont fonctionné
que quelques semaines, malgré le tapage médiatique que l’on sait, pas plus que
la pêche, la défense, etc.
Nous
envisageons, dans une étape ultérieure, de passer en revue l’ensemble des
secteurs de l’économie pour mieux informer le peuple mauritanien sur le pillage
méthodique par le pouvoir en place des ressources du pays, en essayant si
possible de donner des estimations des pertes occasionnées par cette gestion
chaotique sous forme de détournement et de gaspillage. Notre objectif pour le
moment est d’attirer l’attention des mauritaniens sur la gravité de la
situation et sur la vraie nature de la personne qui gouverne notre pays depuis
six ans à son propre profit et s’obstine à continuer à le faire malgré la
volonté de notre peuple. Nous lançons, ici, un appel à tous les patriotes pour
ouvrir les yeux et regarder la situation du pays en face. Aux soutiens du
régime, nous rappelons que quand il s’agit, comme c’est le cas
aujourd’hui, des intérêts supérieurs du
pays, il est puéril de courir derrière de miettes ou se gargariser du confort
d’être du côté du « camp
fort ». Il ne s’agit plus, désormais, d’une question de démocratie ou de
pouvoir, ni de majorité ou d’opposition ; il s’agit de la survie de notre
pays. Les pratiques instaurées par le pouvoir en place ne peuvent conduire qu’à
l’explosion sociale et à l’effondrement de l’Etat. Il est de notre devoir de
dépasser tous nos clivages et de dire ensemble que cela ne peut pas continuer.
Il est de notre devoir de travailler ensemble pour jeter les bases d’une
société démocratique basée sur la liberté, le respect de la chose publique, la
justice sociale et la saine compétition dans un Etat de droit.
Ce
mémorandum s’adresse aussi à nos partenaires étrangers, avec lesquels nous
avons des intérêts communs et qui sont concernés par notre sécurité et notre
stabilité, pour qu’ils prennent conscience de la nature du pouvoir qui nous
gouverne et des conséquences prévisibles de ce mode de gouvernement. Ils sont
appelés à découvrir le vrai visage de l’homme qui tient la Mauritanie, de prendre
conscience, eux aussi, des graves menaces que sa présence au pouvoir fait peser
sur notre peuple et sur les relations bilatérales. Ould Abdel Aziz n’est pas un
partenaire fiable, cela crève les yeux. Les partenaires au développement de
notre pays doivent enfin le voir !
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