mardi 15 juillet 2014

chronique Ould Kaïge - déjà publié par Le Calame . 21 Avril 2009




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19 Avril 1961 & 18 Avril 1992

L’Assemblée générale des Nations Unies se déclare favorable à l’admission de la République Islamique de Mauritanie
&
Le colonel Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya
inaugure ses fonctions de président de la République






L’histoire contemporaine de la Mauritanie ne commence pas le 6 Août 2008. Chacun le sait, même si ce n’est plus dit officiellement.

Ce n’est pas la première fois que la légitimité du pouvoir politique à Nouakchott dépend en partie de l’aval de la « communauté internationale ». Et le scenario du président d’une junte militaire se faisant élire dans des conditions contestables puis tâchant de former un gouvernement d’union nationale n’est pas davantage d’aujourd’hui.


Le 19 Avril 1961, l'Assemblée générale des Nations Unies se déclare favorable à l'admission de la République islamique de Mauritanie par 63 voix contre 15 et 17 abstentions (dont l'Union Soviétique).

Une querelle de cinq ans est vidée, quoiqu’elle laisse deux pays tête-à-tête pour encore huit ans, ce sera le génie personnel de Moktar Ould Daddah que de gagner une à une les sympathies de chacun des Etats arabes, qui avaient originellement fait bloc pour soutenir la revendication marocaine. Ce n’étaient pas que prétentions. Ce fut aussitôt un problème national en Mauritanie car les opposants – à commencer par l’ancien député, Horma Ould Bababa, battu en 1951 et qui n’avait pu prendre sa revanche en 1956 – passèrent ouvertement à la cause marocaine [1], ou ne la désavouèrent que fort tard : ce fut tout l’itinéraire de la Nahda, moyennant d’ailleurs des scissions, et un climat politique longtemps incertain en Adrar. C’était aussi une confrontation militaire – déjà – au Sahara occidental que dût résoudre une opération militaire française combinée avec les Espagnols du Rio de Oro et de la Saguyat Al Hamra [2]. Ce fut enfin une bataille internationale sur deux théâtres : obtenir le financement de la B I R D pour que soit mise en exploitation la ressource en fer de la Kedia d’Idjill, et entrer dans l’enceinte de l’Organisation des Nations Unies comme tous les autres Etats de l’Afrique d’expression française. Pour le Maroc, c’était d’abord une question de politique intérieure, comment le Roi tiendrait-il en respect l’Istiqlal dans la surenchère nationaliste, alors que la France entretint de 40 à 25.000 hommes sur son territoire plus de quatre ans après l’indépendance du fait de la guerre d’Algérie. C’était aussi la question de Tindouf qui – encore – aujourd’hui est la clé des conflits sahariens.

Ayant militairement échoué, le Maroc s’oppose politiquement à la reconnaissance de l’indépendance mauritanienne avec beaucoup d’atouts. Le 17 Août 1956, Si Bekkai, président du Conseil marocain, déclarait que le Maroc s’en tiendrait à ses “frontières naturelles et historiques”, les 7et 8 Mars 1957, Ahmed Balafrej séjournant à Dakar et s’entretenant avec le Haut-Commissaire avait assuré que le Maroc respecterait la volonté des Mauritaniens, et décliné toute responsabilité vis-à-vis des éléments “incontrôlés” qui opèrent dans le sud, mais à l’issue de l’opération « Ouragan », le 25 Février 1958, à M’Hamid du Draa, Mohamed V avait présenté la revendication officielle du Maroc sur la Mauritanie (Le Calame, 26 Février 2008 – chronique anniversaire). Un mois plus tard, deux ministres de Moktar Ould Daddah, les anciens lieutenant d’Horma Ould Babana, et plus grave encore, l’émir du Trarza, Fall Ould Oumeïr font acte d’allégeance au roi du Maroc [3].

Mais Moktar Ould Daddah et son gouvernement ont entretemps marqué un point concret : du 9 au 11 Avril 1958, les experts de la B.I.R.D. sont à Port-Etienne et à Fort-Gouraud. Une délibération de l’Assemblée territoriale intervient aussitôt pour fixer les catégories d’entreprises susceptibles de bénéficier d’un régime fiscal de longue durée. Déposé le 5 Août, le mémorandum marocain à la B.I.R.D. tombe à plat et cinq semaines plus tard le courrier régulier Paris-Casablanca-Dakar fait exceptionnellement escale à Fort-Gouraud pour y déposer dix-huit techniciens de Miferma. La concession minière est accordée le 20 Octobre. Le président du Conseil de gouvernement part aussitôt pour les Etats-Unis où il reste dix jours, s’entretenant d’abord à Washington, avec les autorités de la B.I.R.D. puis au Département d'Etat. A New-York, il rencontre le secrétaire général des Nations-Unies Dag Hammarksjoeld, puis les délégués du Brésil, du Canada, de l'Inde, de l'Irak, du Soudan, de la Lybie, de l'Allemagne, de la Tunisie, de l'Italie, du Pakistan, du Liberia, de l'Arabie Saoudite, du Yémen et du Ghana. Fortuitement, il croise sur un quai de gare les "transfuges" venus aux Nations-Unies plaider le dossier marocain : aucune parole n'est échangée [4].

Le 24 Octobre 1959, est signée la convention d'établissement de Miferma et, le 28, la BIRD prend une décision de principe favorable à l’octroi du prêt à Miferma. La bataille pour le financement – qui n’est pas seulement celui d’un consortium minier privé où la Mauritanie n’a que 5% de participation au capital, mais qui est bien celui de l’indépendance budgétaire du pays – et la bataille pour l’admission aux Nations Unies vont dès lors de pair. Du 3 au 6 Février 1960, le roi du Maroc est reçu officiellement au Liban ; le "caractère marocain" de la Mauritanie est souligné. La Ligue arabe – acquise à toute cause hostile à la France tant que perdure la guerre en Algérie – compense la défaite chérifienne à la B I R D. Le 17 Mars 1960, en effet, est signé à Washington, signature le prêt de la B.I.R.D. à Miferma, prêt garanti par la France et la RIM : " reconnaissance internationale, avant la lettre, du gouvernement de la République Islamique de Mauritanie " s’exclame aussitôt Moktar Ould Daddah, reçu par le Secrétaire d'Etat américain, Christian Herter.

Le 20 Août 1960, le Maroc décide alors de demander l'inscription de la Mauritanie à l'ordre du jour de la prochaine session de l'Assemblée générale des Nations Unies (ce qui est formellement fait le 22 Août) et dans une note à la  France assure que " le Maroc n'a jamais fait abandon ni implicitement ni explicitement de ses droits sur des régions qui de tout temps ont fait partie intégrante du royaume et que seul le régime du protectorat a artificiellement séparées du territoire national " et soutient que " contre la volonté des populations mauritaniennes, le Gouvernement français envisage de prendre en Mauritanie des mesures graves qui … tendent à rompre artificiellement les liens séculaires qui lient ce territoire à l'ensemble du Maroc ". Le même 22 Août 1960, à Chtaurah (Liban), s'ouvre la conférence de la Ligue arabe avec la question mauritanienne à l'ordre du jour sur demande marocaine. Le Premier Ministre mauritanien télégraphie à chacun des Chefs d'Etat arabes : "Peuple et gouvernement mauritaniens escomptent le soutien fraternel des nations arabes" et qu'elles refuseront de "cautionner les ambitions impérialistes du Gouvernement marocain". Moktar Ould Daddah se rend, le 25 Août, à Paris, il s’y entretient avec Jean Foyer, secrétaire d'Etat aux relations avec la Communauté et avec Maurice Couve de Murville, ministre des affaires étrangères et concerte avec les Français leur note rejetant la revendication marocaine : " les négociations proposées en 1956 avaient pour objet la coopération économique dans les régions sahariennes, non les revendications territoriales ; elles n'ont pu avoir lieu faute que le Maroc ait désigné ses représentants ". A quoi répond-on à Rabat, le lendemain, 26 Août, que " le Maroc est toujours disposé à engager des négociations avec la France au sujet de la Mauritanie, Mais il s'oppose à ce que la France dispose unilatéralement de ce territoire qui fait partie intégrante du Maroc ". Le 27, Al Istiqlal titre : "la Mauritanie, au besoin par les armes " et le 28 Août, à Chtaurah, le Comité politique du Conseil de la Ligue arabe décide de soutenir le Maroc dans sa demande de récupérer la Mauritanie en tant que partie intégrante de son territoire national et d'appuyer la démarche marocaine aux Nations Unies. Moktar Ould Daddah réplique dans Le Monde : " Ce n'est pas à la veille de son indépendance et de son admission à l'O N U  que la République islamique de Mauritanie va accepter de renoncer à cette indépendance pour devenir une marche lointaine de l'Empire chérifien ". En effet, tandis que Français et Marocains s’accordent sur l'évacuation des dernières troupes françaises, admission aux Nations Unies treize Etats africains, dont onze parrainés par la France, sont admis aux Nations Unies (21 Septembre 1960). L’inscription de la question de Mauritanie à l'ordre du jour de l'Assemblée générale des Nations Unies se fait sans opposition, le 23.

Le gouvernement mauritanien aborde ce débat aux Nations Unies avec assurance. Pour deux raisons. Le 19 Octobre 1960, a été signé l’accord particulier portant transfert des compétences de la Communauté à la République islamique de Mauritanie et l’indépendance sera formellement proclamée le 28 Novembre, second anniversaire de l’option pour le statut d’Etat membre de la Communauté. Surtout, un allié imprévu – mais qui va s’avérer absolument décisif –entrave, sur le front diplomatique, la manœuvre marocaine. Trente mois auparavant, le 29 Avril 1958, s’était tenu à Tanger, la conférence des partis maghrébins (Istiqlal, Neo-Destour et F.L.N.) ; elle avait " apporté sa solidarité agissante à la lutte menée par les populations mauritaniennes pour leur libération de la domination coloniale et leur retour à la patrie marocaine ", mais le 21 Juin suivant, à Tunis, lors de la ratification du traité de Rabat de solidarité marocco-tunisienne, le communiqué final avait été muet sur la Mauritanie. Et à Chtaurah, le 22 Août 1960, la Tunisie est absente. Habib Bourguiba s’est pris d’un vif intérêt pour le jeune Etat, n’importe la guerre d’Algérie ; d’ailleurs, il a confiance en de Gaulle sur le sujet. Quand le 23 Novembre 1960, aux Nations Unies, reprend le débat sur la Mauritanie en Commission politique, la Tunisie indique qu’elle reconnaîtra l'indépendance de la Mauritanie, se fera représenter à Nouakchott et parrainera la candidature de le RIM à l'ONU. Peine cependant perdue, le 26, la Commission politique ne peut adopter aucune résolution concernant la Mauritanie. Rabat " considère que l'attitude tunisienne met en danger la solidarité du Maghreb arabe et compromet l'édification de son unité ". Par télégramme du 1er Décembre, la diaspora mauritanienne remercie le président Bourguiba pour son soutien. Le surlendemain, les chefs de la Nahda télégraphie au secrétaire général des Nations Unies : le parti " approuve sans réserve l'accession de notre pays à l'indépendance et à la souveraineté internationale ". Moktar Ould Daddah arrive à New-York, le même jour, pour assister à la séance du Conseil de sécurité consacrée à la Mauritanie. Neuf voix contre deux pour inscrire à l’ordre du jour la demande mauritanienne d’admission. La résolution franco-tunisienne favorable à cette admission recueille huit voix contre deux et une abstention, mais parmi les deux voix hostiles, il y a le veto soviétique qui empêche la Mauritanie d'être admise parmi les Nations Unies. Sans doute, le 5 Décembre, le Chef de l'Etat mauritanien peut déclarer que " le Maroc est le vaincu de la semaine, car désavoué par tous les Etats africains il a recherché l'alliance de l'URSS acceptant ainsi d'introduire la guerre froide en Afrique ". Sans doute aussi, les onze Etats dits du "groupe de Brazzaville" peuvent déposer, le 18, un projet de résolution pour que soit admise la République islamique de Mauritanie. Au total, l’xeamen de la candidature mauritanienne est reportée à la seconde partie de la session qui s'ouvrira le 7 Mars 1961.

La situation ne se débloquera que par la désunion du groupe de Casablanca, puisque la Guinée et le Ghana reconnaîtront l’indépendance  mauritanienne, les 22 et 27 Décembre. L’accession au trône, le 26 Février 1961, du prince Moulay Hassan, rendra moins virulente la prétention marocaine [5]. Le lendemain, à Rambouillet, de Gaulle et Bourguiba s’en entretiennent et, le 13 Mars, la délégation mauritanienne dans les couloirs des Nations Unies rapporte que " Bourguiba s'est entretenu très longuement avec Hassan II au sujet de la Mauritanie et que ce dernier aurait bien compris et envisagé de changer complètement de position ". Ce flottement dans l’attitude du Maroc coincidera avec une attitude compréhensive de la Chine nationaliste qui accepte qu’en même temps que la Mauritanie, soit admise aux Nations Unies son adversaire tactique, la Mongolie extérieure. Dès lors, c’est gagné.




Le 18 Avril 1992, le président du Comité militaire de salut national, au pouvoir depuis le 12 Décembre 1984 pour avoir renversé son collègue le colonel Mohamed Khouna Ould Haïdalla, est officiellement installé dans les fonctions de président de la République.

 Le titre n’avait plus été porté depuis le renversement de Moktar Ould Daddah, par une junte dont faisait déjà partie le jeune lieutenant-colonel Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya : près de quatorze ans auparavant. La Constitution, adoptée par referendum l’année précédente, a censément organisé un régime parlementaire : un Premier ministre, deux chambres. L’élection à la magistrature suprême a été remportée dès le premier tour par le président en place du Comité militaire selon la proclamation officielle : 62,8% contre 32,9% à Ahmed Ould Daddah, les abstentions étant estimées à 50%. Mais la sincérité du scrutin est contesté [6], au point que les opposants décident de boycotter les élections parlementaires, après avoir vainement réclamé, le 13 Février, le report des législatives. En réunion publique de plus de vingt mille personnes à Nouakchott, Ahmed Ould Daddah affirme que l’opposition poursuivra la lutte pour l’avènement de la démocratie et qu’elle le fera dans le calme. A l’ouverture de la campagne, le 20, il apparaît que huit des quatorze partis officiellement reconnus vont participer au scrutin, mais les cinq partis d’opposition dont l’U. F.D. (qui deviendra le R.F.D.) boycottent pour protester contre « la gestion unilatérale du processus par le régime », malgré une rencontre entre Mohameden Ould Babah, premier coordinateur de l’U.F.D. et Maaouyia Ould Sidi’Ahmed Taya, en tant que président élu. Déjà, au début de son règne – version en uniforme, au début de 1985 – une telle entrevue avait eu lieu et des propositions de portefeuille ministériel clairement faite. Le patriote, qui avait, par son discours de distribution des prix au Lycée de Nouakchott, en Juin 1965, posé pour la première fois en public la question de la langue officielle, n’avait pas succombé à la séduction. Cette fois, il s’agit clairement de détacher l’U.F.D. d’Ahmed Ould Daddah [7], qui n’en fait pas théoriquement partie, quoiqu’il en ait été le candidat à l’élection présidentielle. Echec de la manœuvre, mais le résultat est que seul, le P.R.D.S., machine du pouvoir en place, est donc présent dans toutes les régions.

Le scrutin pour l’Assemblée nationale est particulièrement confus. Le 6 Mars, malgré le boycott des oppositions, 159 listes sont en présence. D’anciens ministres de Moktar Ould Daddah : Ahmed Killy et Mohamed Ould Amar se présentent à Boutilimit, quoique se disant d’opposition, et Ismaïl Ould Amar à Aleg. Le pouvoir doit reconnaître que la participation n’est que de 38,89% … deux ministres en exercice sont battus et, au dernier moment, à Boutilimit, Ahmed Killy s’est rétracté. Les trois quarts des sièges reviennent au PRDS, le reste, une dizaine à Ahmed Ould Sidi Baba, contribule du président élu ou aux « indépendants ». Louleïd Ould Waddad, directeur du cabinet d’Ould Taya, est élu à Ouadane avec 85% des voix. Le 13 Mars, pour le second tour, sur 17 sièges en ballotage, 15 vont au PRDS. La participation tombe à 33,38%. Mais sur 79 sièges, 67 vont au PRDS, 1 au Parti mauritanien du renouveau (majorité présidentielle) et 1 au RDU (Rassemblement pour l’unité et la démocratie). Ce mouvement a boycotté le second tour et, son président, Ahmed Ould Sidi Baba, contribule du président élu, estime que le parti du chef de l’Etat accélère par son comportement la chute du régime qui vient d’être mis en place. Dix « indépendants » et pas de femme, malgré quatre candidatures féminines. Le 3 Avril, les élections sénatoriales permettent au PRDS d’enlever 35 des 56 sièges  [8]. Seize vont à des « indépendants ». Deux sièges sont en ballotage. Les Baasistes n’ont personne au Parlement.

Dès lors, le nom du Premier ministre est supputé. Pour les « ambassades occidentales », ce sera Ahmed Ould Sidi Baba ou Hamdi Ould Mouknass, chacun a été ministre de Moktar Ould Daddah. L’ouverture de 1985 semble devoir se rééditer sept ans après – entretemps, il y a eu les complots, les massacres, le réveil des clivages inter-ethniques et les si graves événements d’Avril-Mai 1989. Le 17 Avril, l’UFD appelle à un gouvernement d’union nationale de transition.

Dès son investiture, le 18, Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya nomme Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubacar : surprise, mais aussi une nomination dont les conséquences ne sont pas aussitôt mesurées (Le Calame du 6 Janvier 2009 – chronique anniversaire de son limogeage, le 2 Janvier 1996 et évocation de sa seconde période à ce poste sous le Conseil militaire pour la justice et la démocratie 2005-2007). Le ministre des Finances – alors âgé de trente quatre ans seulement, il est en place depuis le 21 Octobre 1990 – était de retour de Washington, depuis le 12, et y avait mené des négociations avec le Fonds monétaire international : enjeu, tenu secret, la dévaluation de la monnaie nationale. 42% exigé par le FMI  et 25% admis par la Mauritanie. Le nouveau gouvernement – dont la liste est publiée le 19 [9]– ne comprend qu’un seul militaire, le colonel Ahmed Ould  Minnih, ancien chef de l’état-major, inamovible au gouvernement depuis quinze ans, qui troque l’Intérieur contre le ministère de la Défense. Censément opposant, Mohamed Ould Amar qui avait soutenu la candidature présidentielle d’Ahmed Ould Daddah, est ministre de l’Equipement : il avait été ministre aussi bien de Moktar Ould Daddah que de Mohamed Khouna Ould Haïdalla. Lui aussi ancien ministre de Moktar Ould Daddah et chargé des chantiers de la « route de l’Espoir », Hasni Ould Didi, a participé au gouvernement sans discontinuer depuis 1984, sauf quelques semaines avant l’investiture [10] : il devient ministre de l’Intérieur. Des compatriotes du Fleuve reçoivent les portefeuilles des Finances, de la Justice et de la Santé. Une femme, Mariem Mint Ahmed Aicha, est secrétaire d’Etat à la condition féminine. Le ministre des Finances, Cheikh Kane, et Mohamed Ould Amar à l’Equipement, ainsi que le secrétaire général de la présidence de la République, Soulèye Ba, appartiennent censément à l’UFD. Un baasiste est secrétaire d’Etat à l’alphabétisation : Khattry  Ould Taleb Jiddou, chef du « parti de l’avant-garde nationale ». La composition et les dosages semblent impeccables. L’arrivée aux Affaires étrangères de Mohamed Abderrahmane Ould Meine, ambassadeur au Koweit, dément les propos dubitatifs qu’avait tenus Hasni Ould Didi, minimisant dans un journal marocain l’importance des relations avec les monarchies du Golfe pétrolier ; il avait rallié dès le début l’Alliance pour une Mauritanie démocratique, s’opposant à partir de 1980 au colonel Ould Haïdalla et proche de Moktar Ould Daddah. Le colonel Ould Taya est habile, son règne n’est pas encore à la moitié de sa durée…
Le processus s’achève le 27 Avril. L’Assemblée nationale se donne Cheikh Sid’Ahmed Ould Baba pour président  et Dieng Boubou Farba est élu président du Sénat. Le premier – membre des comités militaires à partir d’Avril 1980 au grade de commandant – a toujours été proche du président dont il a été quelques mois le ministre des Affaires étrangères pendant la période cruciale de la tension et de la rupture avec le Sénégal  en 1989. Le second avait été évincé de la Banque centrale en Septembre 1987. Ce qui va – assez vite – être appelé la « démocratie de façade », commence. Ahmed Ould Daddah, présenté comme le « coordonnateur de l’opposition » dénonce, dès ce début, un « régime sanguinaire et déstabilisateur ».




[1] - le 17 Juin, le Prince Moulay hassan arrive au Caire pour les cérémonies anniversaires de l’évacuation britannique tandis qu’arrive de Suisse en compagnie du Dr El Khatib, chef de l’A.L., l’ancien député de la Mauritanie, qui, le 23 le Maroc à “faire valoir sa souveraineté sur Tindouf et la Mauritanie” lors d’une réception donnée par le Prince héritier du Maroc ; il déclare à l’AFP que le “Maroc et la Mauritanie sont un même  pays”. Le 12 Août 1956, à rabat, Horma tient réunion avec le Comité directeur de l’Istiqlal

[2] - le 14 Février 1957, le combat d’Agui, au nord de Fort-Trinquet, causant la mort de trois officiers et de dix-sept hommes, n’avait pas donné matière à exercer le droit de suite. Il n’en est pas de même le 25 Janvier 1958. l’accrochage à Houmat-el-Ham (50 kms au nord de Fort-Trinquet) fait fixer fixer au 6 Février ce qui depuis le 14 Janvier précédent, a été mis au point, à Las Palmas : l’opération “ouragan” (“ecouvillon” pour les Français et “Teide” pour les Espagnols) qui consiste à détruire l’A.L. dans le Saguyat-El-Hamra et à “nettoyer” le Rio.

[3] - le 25 Juillet 1958, le Roi nommera les "transfuges" à des postes de conseillers de l'administration : Dey Ould Sidi Baba et Mohamed El Moktar Ould Bah  pour les Affaires Etrangères, Horma Ould Babana pour l’Intérieur et Cheikh Ould Ahmedou à l’Education. L'émir du Tzarza, évidemment déposé en Mauritanie, demeure aux côtés du souverain. 
 
[4] - Moktar Ould Daddah évoque ces jours et cette rencontre en détail, dans ses mémoires :  La Mauritanie contre vents et marées (Karthala . Octobre 2003 . 669 pages – disponible en arabe et en français)  pp. 173 et 174
[5] -  le 9 Juin 1960, le futur Hassan II avait déclaré au Monde : " ce n'est pas notre intérêt que des caïds marocains administrent la Mauritanie …. Ce que nous souhaitons c'est une sorte d'union personnelle, une association d'Etat à Etat "

[6] - officiellement, la « communauté internationale » donne quitus au régime militaire. Pour Henri Saby, président de la commission de coopération pour le développement au Parlement européen qui était observateur : l’élection « peut être considérée comme fiable ». Daniel Bernard, porte-parole du Quai d’Orsay, a « déploré les incidents » mais «  La France enregistre avec satisfaction que cette élection a été tenue dans le cadre d’un processus dont la prochaine étape doit être des élections à l’Assemblée nationale ». Mais le 4 Février 1992, dans une lettre ouverte à Ould Taya, des parlementaires allemands présents à Nouakchott lors des élections présidentielles du 24 Janvier affirment que « le grand nombre et la gravité des irrégularités constatées ont influencé considérablement le résultat électoral. Il aurait donc été nécessaire d’organiser un deuxième tour ». Ils rappelent leur protestation effectuée auprès du ministère des Affaires étrangères, au lendemain du scrutin contre la façon « dont les médias publics ont retransmis de manière incomplète les points essentiels de leur compte-rendu ».

[7] - le président élu invite, au début de Mars, à dîner dans sa résidence Mohameden Ould Babah, en compagnie du ministre de l’Intérieur Ahmed Ould Minnih

[8] - trois sièges sont réservés aux Mauritaniens de l’étranger : un pour ceux qui résident en Europe, essentiellement en France – un pour l’Afrique, notamment les résidents en Côte d’Ivoire – un pour l’Asie, en fait ceux qui se sont établis, souvent sans retour en Arabie séoudite et dans une moindre mesure en Jordanie

[9] - Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubakar

Ministre secrétaire général de la présidence de la République – Mustapha Ould Abeïderrahmane

Affaires étrangères – Mohamed Abderrahmane Ould Meine

Défense nationale – colonel Ahmed Ould Minnih

Intérieur, Postes & Télécommunications – Hasni Ould Didi

Plan – Mohamedou Ould Michel

Justice – Sow Abou Demba

Finances – Kane Cheikh

Commerce, Artisanat et Tourisme – Rachid Ould Saleh

Pêches & Economie maritime – Ahmed Ould Ghanahallah

Développement rural & Environnement – Mahfoudh Ould Deddache

Mines & Industrie – Lemrabott Sidi Mahmoud Ould Cheikh Ahmed

Hydraulique & Energie – Mohamed Lemine Ould Ahmed

Education nationale – S’Gheyer Ould M’Bareck

Fonction publique, Travail, Jeunesse & Sports – Moktar Ould Haye

Santé & Affaires sociales – Camara Modi

Culture & Orientation islamique – Abubekrine Ould Ahmed

Equipement & Transports – Mohamed Ould Amar

Communication & Relations avec le Parlement – Ismaïl Ould Yahi

secrétaires d’Etat

chargé des Affaires de l’Union du Maghreb Arabe – Cheyakh Ould Ely

chargé de l’Alphabétisation – Khattry Ould Taleb Jiddou

chargée de la Condition féminine – Mariem Mint Ahmed Aïcha

[10] - le 27 Février, Ismaël Ould Yahi, précédemment directeur adjoint de l’ENA, le remplace comme ministre des Affaires étrangères


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