mercredi 30 juillet 2014

chronique d'Ould Kaïge - publié déjà dans Le Calame . 13 Avril 2010



63 .


15 Avril  1991   &    15 Avril 2008


Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya annonce une Constitution
et des élections présidentielle et parlementaires
&
Mohamed Ould Abdel Aziz se démet de ses fonctions
dans l’appareil putschiste et annonce sa candidature
à une élection présidentielle inconstitutionnellement anticipée




Le 15 Avril 1991, à deux heures du matin, le colonel Maaouyia Oul Sid’Ahmed Taya prononce  le discours d’usage pour l’Aïd el Fitr) : « Conformément au désir d’un grand nombre de nos compatriotes, un referendum sera organisé pour l’adoption d’une Constitution et ce avant la fin de l’année en cours. Après l’adoption de cette Constitution, des élections libres seront organisées pour choisir une Assemblée nationale et un Sénat. L’autorisation de la création de partis politiques sans limitation de nombre constituera la toile de fond de toute cette action ». Cet engagement vers le multipartisme et une Constitution au bout de treize ans de dictature militaire ne paraît spontané à personne. La rumeur court que le président du Comité militaire de salut national, au pouvoir personnellement depuis six ans et demi, tient ainsi des promesses faites au ministre français des Affaires étrangères, Roland Dumas, venu à Nouakchott au début du mois. Celui-ci avait été précédé, le 5 Mars, par Michel Vauzelle, président de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française. Les baassistes crient au « complot français ».

Dix mois auparavant (du 19 au 21 Juin 1990), à La Baule, en France, François Mitterand devant ses pairs africains d’expression française [1], a développé des thèses essayées quelques jours auparavant dans l’Océan Indien où il était reçu aux Seychelles, à Maurice, aux Comores et à Madagascar. Le président français, lui-même longtemps opposant dans son propre pays, se montre sensible à la critique de beaucoup d’Africains à l’encontre de systèmes nationaux autoritaires et corrompus ; il souhaite en dégager la France, mais avec prudence, se gardant de cette « forme subtile de néocolonialisme (qui consiste, remarque-t-il) à faire la leçon en permanence aux pays africains… Impossible de proposer un système tout fait… La France n’a pas à dicter je ne sais quelle loi constitutionnelle qui s’imposerait de facto à l’ensemble des peuples ». Mais il conclut : « La France liera tout son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté ». L’Abbé Pierre, figure emblématique de l’humanitaire en France, aurait été approché par l’opposition guinéenne pour sensibiliser, à la veille-même du sommet de La Baule, le président de la rencontre… Sénégal, Ouganda, Gabon applaudissent. Le Togo assure que le multipartisme n’est pas d’actualité, le Rwanda fait valoir les chefferies traditionnelles, le Tchad relève la contradiction entre une rénovation politique et des pratiques financières internationales limitant les souverainetés nationales. L’évolution-type sera celle – à l’époque – de la République populaire du Congo où le comité central du Parti unique se prononce dès le 4 Juillet 1990 pour le multipartisme ce qui aboutit à une conférence nationale tenue à Brazzaville du 25 Février au 10 Juin 1991 : onze cent représentants de soixante-sept partis et cent trente quatre associations, présidée par l’évêque catholique d’une ville secondaire du pays. C’est le Bénin (ex-Dahomey) qui avait inauguré cette manière de transition, moyennant une conférence nationale tenue du 19 au 27 Février 1990, soit avant le sommet de La Baule, et – première en Afrique – le 24 Mars 1991, le président en place (général Mathieu Kérékou) est chassé par les urnes du pouvoir qu’il avait conquis par un putsch (26 Octobre 1972) [2].les urnes (victoire du Premier ministre, Nicéphore Soglo). Le Niger, plus tardivement, du 29 Juillet au 3 Novembre 1991, aura lui aussi sa conférence nationale. Le Burkina-Faso opte pour le multipartisme dès le 18 Janvier 1991. En revanche, la Guinée, dont le système politique, depuis la mort de Sékou Touré le 26 mMars 1984, n’a pas évolué, procède à un referendum constitutionnel le 23 Décembre 1990 et n’ira au multipartisme que le 3 Avril 1992.

Quoi qu’il en soit, Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya ne cache pas sa mauvaise humeur à son retour de La Baule. Les partisans du changement doivent se contenter d’élections municipales dans 208 communes les 7 et 14 Décembre 1990. A l’avant-veille du second tour, Ould Taya vante la « voie mauritanienne » vers la démocratie, mais sans multipartisme ni rétablissement de la Constitution. Le scrutin a cependant fait apparaître, notamment à Nouakchott, des organisations politiques même si les listes sont désignées seulement par des couleurs : crème (Messaoud Ould Boulkheir, ministre de 1984 à 1988), orange (Abderahmane Ould El Ghadi, profsseur d’économie à l’Université), vert (Cheikha Ould Boidya , patron des dockers), bleu (Dah Ould Cheikh, ministre de 1987 à 1989, qui emportera la mairie). Rétrospectivement, le scrutin, peu couru : 19% de participation au premier tour, pas 30% au second, et la campagne ne marquent guère puisque la fin de l’année est sinistrement marquée en Mauritanie par la nuit d’Inal (dakhlet Nouadhibou), au trentième anniversaire de l’indépendance : le 4 Décembre 1990, le ministre de l’Information, Mohamed Lemine Ould Ahmed, annonce l’arrestation d’un nombre indéterminé de personnes impliquées dans une tentative de coup d’Etat qui devait avoir lieu le 27 Novembre. Ce sont  des réfugiés au Sénégal qui l’auraient fomenté. Des représailles terribles, sans procès, à l’insu-même du conseil des ministres, se succèderont jusqu’à la fin de Mars 1991 : on ne parle alors que de deux cent morts dont les trente-trois par pendaison à Inal (Le Calame du 26 Février 2008 – chronique anniversaire du « tri » du 28 Février 1991). La réalité est plus du double. Quant aux rafles, pendant plus de deux mois, elles auraient concerné trois mille personnes, selon Amnesty international. Le 28 Mars 1991, alors qu’il se trouve en stage militaire, en France, à Fontainebleau, l’adjudant Cheikh Fall, demande l’asile politique : il témoigne aussitôt à Libération.

A défaut d’explications dans le moment ou de mémoires peut-être en cours de rédaction aujourd’hui, ce qui détermine au changement celui que beaucoup de compatriotes ressentent comme un dictateur sanglant, semble avoir été le renversement de son homologue malien. Des émeutes éclatent à Bamako, puis dans tout le pays, les 20 et 22 Mars 1991, elles sont réprimées par la force jusqu’au 25 : plus de cent cinquante morts. La conclusion est brutale, un coup d’Etat militaire met fin, le 26, aux vingt-deux ans du pouvoir absolu exercé par le tombeur de Modibo Keïta, le général Moussa Traoré, très peu gradé à l’époque de son « haut fait ». Constitution suspendue, Conseil de réconciliation nationale, arrestation de l’homme fort qui sera condamné à mort en 1997, accusé notamment d’avoir transféré à l’étranger douze milliards de francs donct six en Suisse. Il aura pour défense à son procès que tous ses homologues, en Afrique, font ou ont fait ainsi, « sauf le président Moktar » … !

Cinq jours avant le discours de fin du Ramadan, le 10 Avril 1991, avait circulé une lettre ouverte signé par une cinquantaine de cadres et personnalités dont le secrétaire général démissionnaire de la présidence de la République : Abdoulaye Baro, trois anciens ministres dont Messaoud Ould Boukheir, le président de la Ligue mauritanienne des droits de l’homme Ghali Ould Abdelhamid, notamment. Ils  réclamaient en lettre ouverte « l’avènement d’un véritable Etat de droit, la liberté d’opinion, d’expression et d’association » en référence aux promesses du 12 Décembre 1984 (Le Calame du 12 Décembre 2007 – chronique anniversaire) d’une restauration de l’Etat de droit. Selon eux,  « notre pays s’enfonce dans la dictature et le désordre. Votre régime a, en effet, imposé une politique de terreur sans précédent à l’ensemble de notre peuple et de discrimination raciste et chauvine à sa composante négro-africaine, tout particulièrement aux Hal-Pular’en… Aujourd’hui, les plus graves incertitudes pèsent sur l’existence même et la survie de notre patrie. La poursuite de la politique actuelle, en alimentant le cycle infernal répression-rébellion, ne peut que conduire à son éclatement au seul profit de puissances étrangères expansionnistes ». C’était commenter l’ouverture, le 9 Avril précédent à Idini, devant un tribunal d’exception et à huis clos, du procès de soixante-quatre « négro-mauritaniens » (Libération – quatre-vingt-treize selon l’A.F.P. Dakar) parmi quelque 1500 originaires de la Vallée du Fleuve, détenus depuis trois mois. C’était faire écho au tract de El Hor : « notre conscience individuelle et collective est profondément choquée ».

Le Conseil économique et social avait été annoncé lors du discours sur l’état de la Nation, le 28 Novembre 1990, quand le président du C.M.S.N. avait évoqué la poursuite du processus de démocratisation «  loin des échos de l’actuelle campagne internationale, de l’improvisation, de la précipitation et de l’aventurisme générateur d’instabilité et d’anarchie » et la préparation  « méthodique et consciente des citoyens ». Le président de cette institution qui n’est pas nouvelle [3], est nommé le 24 Avril : Deidar Ould Sidi Mohamed, précédemment professeur à l’Ecole normale de Nouakchott, en même temps que sont libérés soixante-quatorze originaires de la Vallée du Fleuve. Ce qui n’empêche pas la circulation d’une nouvelle lettre ouverte : des femmes de disparus réclament une commission d’enquête. Le 4 Avril, l’U.T.M. forte de ses 45.000 adhérents, l’avait déjà demandée, en même temps qu’un procès public des responsables. Mahmoud Ould Mohamed Rhady, le secrétaire général, réclame une conférence nationale sur le sujet : droits de l’homme = démocratisation. Le défilé du 1er Mai se fait sur ces thèmes. Le 23 Mai suivant, devant le ministère de l’Intérieur, manifestation de femmes noires réclamant de nouveau une commission d’enquête sur les disparus. Encore, le 12 Août, cent cinquante femmes qui seront brutalement dispersées : quarante seront blessées.

C’est dans cette ambiance – d’autant plus tendue qu’augmente soudainement le prix du pain tandis que sont bloquées les négociations salariales dans le secteur public, alors dominant – que va donc se préparer la première « transition démocratique » treize ans après le premier coup militaire. Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya a le mérite de la franchise. S’exprimant dans Le Monde, le 8 Mai , sur le processus de normalisation de la vie politique, il assure que tout sera achevé dans le délai d’un an au plus : « nous avons préféré commencer par la base plutôt que par le sommet car il fallait familiariser le peuple au jeu démocratique… la Constitution sera rédigée par le Comité militaire de salut national assisté de juristes » . Il n’est pas question d’associer les groupuscules, ceux-ci seront libres de la refuser par le referendum. Une conférence nationale comme ailleurs ? ce serait « ridicule et antidémocratique ». « Mal préparée », la brève expérience de mise en place d’un régime civil en Décembre 1980 « avait failli aboutir à de graves désordres » [4]. Quant au complot découvert en Novembre 1990, il s’est bien agi d’une « tentative de coup d’Etat minutieusement préparée et doublée d’une élimination de populations civiles » mais il n’y a plus de détenus politiques dans les prisons mauritaniennes. Enfin, selon le président du C.M.S.N., chef de l’Etat, la France a été partisane dans le conflit sénégalo-mauritanien de 1989 (Le Calame du 22 Avril 2009 – chronique anniversaire des événements des 24 et 25 Avril 1989 à Nouakchott et à Nouadhibou).

Aussi,  l’entente, le 12 Mai,  des formations d’opposition pour réclamer en lettre ouverte la tenue d’un forum démocratique et d’une Assemblée constituante (les unes tenaient pour une conférence nationale et les autres pour une Assemblée) est comptée pour rien. Hasni Ould Didi, le ministre des Affaires étrangères, qui, dans les derniers gouvernements du président Moktar Ould Daddah, avait été chargé du Commerce, des Transports puis de  la Justice, affirme qu’« aujourd’hui, la direction politique tire sa légitimité d’un consensus national mais aussi de la nécessité d’assurer la sécurité du pays ». Le referendum du 12 Juillet 1991, concluant à l’adoption de l’actuelle Constitution, sauf quelques amendements acceptés par le referendum du 25 Juin 2006, aura donc lieu sur un texte élaboré secrètement, sans que les partis politiques soient encore autorisés et sans que le pays ait été appelé – comme d’autres – à en délibérer à sa manière, c’est-à-dire en journées de concertation ou en conférence nationale.




Coincidence voulue ? c’est aussi le 15 Avril (2009) que « en respect de la loi et en application de ses dispositions, le général Mohamed Ould Abdelaziz a proclamé, mercredi soir au Palais présidentiel à Nouakchott, sa démission de la présidence du Haut conseil d'Etat et de la fonction de chef d'Etat ». Il l’avait organisée dans la matinée en réunion spéciale de la junte [5]
Les divers communiqués ne précisent pas comment le démissionnaire était entré dans ces fonctions. Le Haut Conseil d’Etat demeure en place jusqu’à son auto-dissolution, le 28 Juin, date à laquelle il constituera le Conseil supérieur de la défense nationale, apparemment au sens de l’article 34 de la Constitution qui en confie d’ailleurs la présidence au chef de l’Etat [6]. En réalité, la junte se maintiendra – encore aujourd’hui – à l’appellation près dans la mission qu’elle s’est donnée en renversant le 6 Août 2008, le président de la République élu le 25 Mars 2007. Cette mission lui a fait prendre la suite des comités militaires qui, depuis le renversement du président Moktar Ould Daddah, le 10 Juillet 1978, assurent que chacun d’eux « est, par la volonté des forces armées dont il est l’émanation, le seul dépositaire de la souveraineté et de la légitimité nationale » [7]. « Confiantes en la toute-puissance d’Allah (les Forces armées s’affirment) dépositaires en dernier recours de la légitimité nationale. » [8]

En revanche, la fonction de chef de l’Etat, prévues et décrites par les articles 23 et 24 de la Constitution, est élective et c’est pour l’occuper dans les formes constitutionnelles que le putchiste est candidat à l’élection prévue pour avoir lieu le 6 Juin. Qu’il en ait porté le titre dès le 11 Août 2008 [9], ne correspond pas même à l’ordonnance de portée constitutionnelle que la junte a publiée le 11 Août 2008 (analyse dans Le Calame du 19 Août 2008) : son article 2 [10] prévoit au contraire un exercice collégial des fonctions qui ont été arrachées au président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. L’intérim que vient aussitôt exercer le président du Sénat [11] n’est donc ouvert à aucun égard puisque le général Mohamed Ould Abdel Aziz ne peut se démettre d’une fonction qui n’est qu’élective et que même ses propres textes ne lui avaient pas attribuées [12]. Parodiant la démarche de 2005-2006, une Commission nationale électorale indépendante est composée par le dernier conseil des ministres que préside le général putschiste, juste avant de démissionner : au contraire de la précédente, elle n’est pas nommée par consensus mais unilatéralement par le futur candidat. Le même Conseil entend de lui « une communication relative à ses visites à l'intérieur du pays. A cette occasion, le Conseil présente ses félicitations aux populations, élus locaux et acteurs de la société civile des deux Hodhs, du Guidimagha, du Tagant, de l'Adrar et de Dakhlet Nouadhibou pour leur accueil chaleureux et leur mobilisation qui dénotent de leur prise de conscience et de leur engagement aux orientations du mouvement de rectification du 6 Août. Le Président du Haut Conseil d'Etat a renouvelé ses instructions au Gouvernement à persévérer dans la réalisation de son programme en mettant un accent particulier sur la rigueur dans la gestion en vue d'améliorer autant que possible les conditions d'accès des populations aux services sociaux de base. »

En réalité, le putchiste du 6 Août 2008, dont le régime fait l’objet des sanctions de l’Union européenne depuis le 3 Avril 1991, joue le scenario présenté par son compère le général El Ghazaouani au secrétaire général de l’Elysée, à Paris, alter ego du président français, Nicolas Sarkozy. Un maintien au pouvoir pourvu qu’il sorte des urnes et qu’un abandon de l’uniforme et de la possession d’état des fonction briguées fassent illusion. En revanche, le programme du candidat est à sa totale discrétion et plus encore le ton de sa campagne, qui ne dévie pas du discours tenu depuis le matin du putsch. L’annonce de la démission [13], le soir du 15, plus encore qu’un discours-bilan est le rappel d’une manière d’être au pouvoir par opposition à « une poignée de citoyens (qui) réclamaient, et continuent de le faire, des sanctions contre notre pays pour la seule raison qu'ils ont perdu la source de leurs intérêts personnels et que leurs poches ont commencé à s'assécher des revenus illicites. Ces gens là, le peuple mauritanien a découvert leur jeu dès les premiers moments et le monde autour de nous est désormais conscient de leurs manoeuvres après la lumière faite sur les rumeurs tendancieuses et les mensonges trompeurs. » L’opposition est prévenue : soit elle n’existe pas, soit elle sera sanctionnée. « Il ne fait pas de doute que le mouvement de la rectification a renforcé l'esprit de lutte, en particulier parmi les jeunes et les femmes qui sont des franges aspirant mieux que toute autre à dépasser la situation où prévalent le chômage et la pauvreté et à bénéficier d'un environnement meilleur empreint de liberté, de justice et d'équité. Le mouvement du 6 août a également favorisé un plus grand éveil parmi les citoyens désormais enclins à revendiquer leurs droits dans le respect de la loi et des normes civiques, loin de toute anarchie et de toute atteinte à l'ordre public.  Et contrairement à ce que certains milieux prétendent, la liberté d'expression s'est consolidée ces derniers temps et il n'y a plus aucun  prisonnier d'opinion dans le pays et ce, en dépit des atteintes criantes que commettent, à coup de provocations et de mobilisation, certains parmi les nostalgiques de la gabegie. Je voudrais souligner de nouveau que les forces de l'ordre traiteront avec toute la rigueur tous ceux qui essayeraient, d'une manière ou d'une autre, de transgresser la loi. En tout état de cause, celle-ci demeurera de mise dans le pays et tout celui qui essayera de la transgresser fera l'objet de rigoureuses sanctions, quel qu'en soit le prix .»  Quant à la situation du pays, le 12 Avril, à Nouadhibou, le général Mohamed Ould Abdel Aziz en a redonné la synthèse. Elle a le mérite de situer les responsabilités et d’en dater l’origine : la date-même de l’indépendance ! Il y aura ensuite deux contradictions à commettre, l’une d’appeler à juxtaposer 1960 et 2009, photos. affichées, l’autre de dénoncer le colonialisme. « De par ce que nous avons vu, nous pouvons certifier du niveau de votre conscience de l'importance de ce changement dont le peuple mauritanien a été le premier et le dernier bénéficiaire ", a affirmé le chef de l'Etat .
Il a indiqué que la ville de Nouadhibou mérite beaucoup plus que la réalité dans lequel elle se trouve aujourd'hui, relevant qu'elle manque d'infrastructures et de services sanitaires et sociaux et que ses richesses ont été pillées pendant près de 5 décennie. Le chef de l'Etat a aussi dit que la gabegie a touché tous les aspects de la vie en visant des secteurs vitaux comme l'enseignement, la santé et la justice. Il a révélé avoir reçu des informations affirmant que certains enseignants pratiquent des travaux n'ayant aucun rapport avec leur domaine au moment où ce secteur est dans le plus grand besoin de cadres compétents. Pour lui, cela ne relève pas de la responsabilité des enseignants mais plutôt de celle des administrations et régimes qui se ont succédé au pouvoir depuis l'indépendance .
» Nouadhibou, 13 avr (AMI)  
Alors qu’en 1991, l’environnement international – sinon la communauté internationale, concept seulement naissant et à propos de la premièree guerre du Golfe, tous contre l’Irak ou presque (la Mauritanie n’en était pas) – avait joué un rôle décisif pour poussert l’autocratie militaire vers l’Etat de droit, en 2009, ce sera une influence inverse. Contrairement aux assertions du président de la République française en conférence de presse conjointe à Niamey [14] avec son homologue nigérien en principe interdit de briguer un troisième mandat – ce qu’il transgressera peu après et causera sa chute – il existe en Mauritanie une opposition expresse au processus putschiste. Si le principal parti d’alors – le Rassemblement des forces démocratiques R.F.D. – a manifesté sa compréhension pour le renversement de l’élu du 25 Mars 2007, en revanche, il fait de la candidature de l’homme au pouvoir de fait, le casus belli. Il a refusé de participer au gouvernement faute d’engagement des militaires de ne pas se présenter au prochain scrutin et il n’a pas avalisé le compte rendu des « états-généraux de la démocratie » qui, au contraire, présagent déjà cette candidature. Le boycott de l’opposition est donc certain qu’il s’agisse de ce parti ou de la coalition du Front national pour la défense de la démocratie F.N.D.D. qui persiste à faire du retour au pouvoir du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi le préalable de toute anticipation du calendrier électoral constitutionnel. De fait, quatre candidatures seulement sont enregistrées, elles sont toutes favorables au fait-même du putsch, sinon au putschiste candidat [15]. C’est la communauté internationale – explicitement conduite par la France pendant les trois phases de la négociation dite de Dakar – qui imposera, extraordinaire marché de dupes, à l’opposition, soit d’opportunité (le R.F.D.), soit de principe légitimiste (le F.N.D.D.) de participer à l’élection présidentielle, moyennant trois concessions de pure forme du putschiste : 1° reculer au 18 Juillet la date du premier tour, ce qui ne permet pas davantage qu’à la date précédemment décidée, un contrôle effectif des opérations (l’Union européenne experte en la matière, a besoin de trois mois), 2° composer consensuellement la Commission électorale (ce sera fait le 1er Juillet, mais son nouveau président démissionnera le soir-même du scrutin…), 3° former un gouvernement d’union nationale mais sans que change le Premier ministre. Abandonné par tous les opposants de première ou de dernière heure, le seul acteur non dupe, le président renversé ne pourra pas refuser sa signature : personne, dans le moment, ne l’aurait compris. Sidi Ould Cheikh Abdallahi rend alors régulière l’anticipation de sa succession et permet à la communauté internationale de se satisfaire du scrutin – de son résultat – avant même que les autorités nationales elles-mêmes l’aient proclamé.
Le colonel Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya qui n’avait pas eu onze mois, mais sept ans pour préparer son élection et une « démocratie de façade », avait fait moins bien…


                                                                  



[1] - depuis Février 1978, la Mauritanie participe au sommet franco-africain périodique mais informel. A la Baule, trente cinq délégations autour du président de la République française dont vingt-deux conduites par un chef d’Etat : absents de marque cette fois-là Félix Houphouet-Boigny et Mobutu Sese Seko. A la francophonie, se sont joints l’Ougandais Yoweri Museveni, président en exercice de l’Organisation de l’Unité africaine, et le mozambicain Joaquim Chissano. La Namibie, indépendante depuis le 21 Mars 1990, est représentée.

[2] - il est vrai qu’il prendra sa revanche sur Nicéphore Soglo le 18 Mars 1996 et l’emportera à nouveau le 22 Mars 2001

[3] - mais elle avait été supprimée par une loi du 4 Mars 1968
 
[4] - l’homme fort d’alors, le lieutenant-colonel Mohamed Khouna Ould Haïdalla avait, le 12 Décembre 1980, annoncé dans une déclaration radiodiffusée,.un gouvernement civil : le Premier ministre sera responsable devant le C.M.S.N. qui « entend naturellement continuer à contrôler et orienter l’action du gouvernement jusqu’à la mise en place effective des institutions démocratiques » ; il sera « chargé en particulier, tout en consolidant les acquis dans tous les domaines de préparer la mise en place des institutions démocratiques » ; une Constitution sera soumise à referendum (la date prévue était le 8 Mai 1981). Le président du Comité militaire avait conclu : « j’en appelle maintenant au sens civique et à la maturité de tous les Mauritaniens pour saisir la portée et l’importance d’une telle décision » et le 15 Décembre avait été formé le gouvernement civil, avec pour chef, Sid’ Ahmed Ould Bneijara, premier ministre de fait “chargé de l’exécutif” . Le 16 Décembre, un communiqué du C.M.S.N. avait  annoncé l’adoption du projet de Constitution avec instauration du multipartisme qui « garantira les libertés et écartera à jamais la menace de la dictature ». Mais la tentative de renversement du régime, perpétrée par deux anciens membres du Comité militaire, le 16 Mars 1981, avait fait renoncer à tout et c’est un militaire : le lieutenant-colonel Maaouyia Ould Sid’Ahmed Taya, qui avait remplacé le Premier ministre civil.

[5] - selon son communiqué, « le Haut Conseil d'Etat a examiné et adopté l'ordonnance constitutionnelle N° 2009/001 modifiant et complétant l'ordonnance constitutionnelle n° 2008/002 du 13 août 2008 régissant les pouvoirs provisoires du Haut Conseil d'Etat. Par ailleurs, le général Mohamed Ould Abdel Aziz a, à cette occasion, annoncé sa démission de ses fonctions de Président du Haut Conseil d'Etat, Chef de l'Etat. »

[6] - « Mauritanie / Politique / Défense
Communiqué du Conseil Supérieur de Défense Nationale
Nouakchott - 28 - juin - (AMI) -Le Conseil Supérieur de Défense Nationale a salué l'évolution positive des négociations et l'entente conclue entre les protagonistes favorisant un nouveau climat politique dans le pays empreint de sérénité et de concorde nationale, gages d'une bonne élection présidentielle le 18 juillet 2009 .
Le Conseil Supérieur de Défense Nationale rappelle, pour sa part, que si les forces armées et de sécurité ont pris leurs responsabilités le 6 août 2008, c'était bien pour sauver le pays et défendre les acquis démocratiques .
Dix mois se sont écoulés au cours desquels tout a été mis en oeuvre pour améliorer les conditions de vie des citoyens, rétablir l'autorité et la crédibilité de l'Etat et enfin préserver les libertés individuelles et collectives .
Aussi, l'on ne peut que se féliciter aujourd'hui que le processus engagé par les forces armées et de sécurité a conduit à un consensus national qui s'est traduit par des accords conclus entre les trois pôles démocratiques mauritaniens .
C'est dans ce contexte que l'institution ayant dirigé le mouvement du 6 août 2008 a pris l'appellation de Conseil Supérieur de Défense Nationale .
Ce dernier, conscient de ses responsabilités envers la Nation, entend accomplir ses tâches conformément à la constitution et aux lois dela République.
 Le Conseil Supérieur de Défense Nationale restera toutefois vigilant vis-à-vis de toute action tendant à porter préjudice au climat de paix et de sécurité dans le pays .
Enfin, le Conseil Supérieur de Défense Nationale tient à saluer l'effort considérable consenti par les médiateurs internationaux en vue de rapprocher les points de vue des 3 pôles politiques mauritaniens. Il tient aussi à féliciter les dirigeants de ces trois pôles mauritaniens pour leur sens élevé de responsabilité et leur capacité à parvenir à une solution consensuelle »

[7] - J.O.-R.I.M. 30 Mai 1979, p. 241 – 23 Septembre 1981, p. 408 – 27 Mars 1985, p. 149
   
[8] - J.O.-R.I.M. 25 Avril 1979, p. 223

[9] - premières dépêches d’AMI lui donnant ce titre :
Mauritanie / Redressement
L'initiative du regroupement des cadres du changement déclare son appui au Haut Conseil d'Etat
Nouakchott, 11 août (AMI) -   L'initiative du regroupement des cadres du changement a déclaré lundi soir à Nouakchott lors d'un meeting son appui au Haut Conseil d'Etat sous la conduite du général Mohamed Ould Abdel Aziz, Chef de l'Etat.
 M. Mohamed Ould Maawiya a, au nom de l'initiative, indiqué que ce regroupement englobe un certain nombre de parlementaires de chefs de partis politiques, de promoteurs d'initiatives et de personnalités importantes qui ont pris conscience du danger de la dérive qui menaçait le pays.   . . .
  
Mauritanie / Mouvement du redressement
Des partis et des institutions de la société civile organisent une marche de soutien au Haut Conseil d'Etat
Nouakchott, 11 août (AMI) -  Des partis politiques, des syndicats de travailleurs, des regroupements de commerçants et des organisations de la société civile ont organisé lundi soir à Nouakchott une marche populaire de soutien au Haut Conseil d'Etat sous la conduite du général Mohamed Ould Abdel Aziz, Chef de l'Etat.







 
 

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