lundi 30 juin 2014

chronique d'Ould Kaïge - publié déjà par Le Calame . 1er Juillet 2008



29 .




1er Juillet 1957 & 5 Juillet 1980

L’appel aux Mauritaniens de la Tiris el Gharbia à l’Azaouad
&
Décisions du Comité militaire pour l’éradication de l’esclavage



Le 1er Juillet 1957 – seulement accompagné de Villandre et Ahmed Bazeid Ould Ahmed Miske, ses directeur et chef de cabinet  –, Moktar Ould Daddah, est à Atar : il a été élu par l’Adrar au printemps, il est vice-président du conseil de gouvernement depuis six semaines.

C’est avec une émotion toujours renouvelée, que je me retrouve dans ce cadre de l’Adrar immortalisé par le poète qui a chanté les noms prestigieux de « Gour Hamogjar, du Batem, du Dhar Tiffojjar » et surtout au milieu de vous tous à qui je dois la place que j’occupe maintenant. Je tiens à vous remercier à nouveau de la confiance que vous m’avez accordée, me permettant ainsi d’accéder aux plus hautes responsabilités. Je puis vous assurer que cette confiance ne sera pas déçue. (…) Je vous convie aujourd‘hui à regarder avec moi au-delà de la falaise du Dhar, au-delà des dûnes de l’Akchar et de l’Azefal, pour embrasser d’un seul coup tout le « Trab el Beïdane » c’est à dire la Mauritanie.
C’est à dessein que je choisis l’Adrar pour évoquer, pour la première fois publiquement, des questions qui intéressent non seulement l’ensemble de notre pays mais débordent au-delà de ses frontières. La Mauritanie n’est plus ce vaste désert  jadis si difficile à traverser et qui constituait entre le monde méditerranéen et l’Afrique noire une sorte de barrière que franchissaient mal les idées et les hommes.

Le discours est fondateur parce que non seulement la personnalité mauritanienne est affirmée face aux prétentions du Maroc, mais un appel est lancé aux populations maures vivant dans l’ensemble du Sahara, quelles que soient les frontières coloniales ou inter-territoriales. Il évoque en effet «une même communauté de l’Atlantique au Soudan. » : « cette solidarité déborde nos frontières, elle englobe les populations Maures du Sahara Espagnol et des confins Marocains ».

Je convie donc nos frères du Sahara espagnol à songer à cette grande Mauritanie économique et spirituelle à laquelle nous ne pouvons pas ne pas penser dès maintenant. Je leur adresse et je vous demande de le leur répéter, un message d’amitié, un appel à la concorde de tous les Maures de l’Atlantique à l’Azaouad et du Draa aux rives du Sénégal.
L’heure est passée des rezzou et des luttes fratricides opposant les uns aux autres. J’engage nos frères du Tiris, de l’Adrar Soutoff, du Zemmour, de la Séguia El Hamra, de l’Imrikli, de la Gaad et du Chebka, à se tourner ensemble vers un avenir commun, à partager avec nous les heureuses perspectives que nous réservent l’exploitation des richesses de notre sol et la mise en valeur de notre pays.
L’Adrar et le Zemmour sont ouverts à leurs troupeaux, nos palmeraies les accueillent pour la « guetna » ; ils peuvent y venir en sécurité, profiter de l’hospitalité mauritanienne mais encore faut-il qu’eux aussi accueillent sans réticence nos troupeaux et nos tentes, lorsque les nécessités du pâturage nous amènent à nomadiser au-delà de cette limite artificielle qu’est une frontière que nous voulons voir disparaître de nos cœurs avant qu’elle ne s’efface sur les cartes.
D’aucun voudraient que cette hospitalité fût à sens unique et que soit interdit le Sahara espagnol aux Mauritaniens n’ayant pas fourni l’aide ou donné de gage au Djich Tharir. D’aucuns même n’ont pas hésité à violer les lois sacrées de l’hospitalité beïdane pour plaire aux ordres d’étrangers nouveaux venus au Sahara où ils voudraient imposer leurs lois au nom d’une prétendue libération. Les Maures ont toujours été des hommes libres. Jamais ils ne se sont laissés imposer leurs chefs. Ils n’accepteront pas plus ceux-là qui sont aussi dépaysés dans notre Sahara que nous le sommes nous-mêmes dans leurs bruyantes cités du nord ; sans doute, sont-ils attirés chez nous par les richesses découvertes dans notre sol, mais l’appât du gain ne saurait leur servir de titre de propriété et encore moins leur conférer le droit au commandement ; si nous accueillons tous ceux qui veulent travailler avec nous, nous ne voulons à aucun prix recevoir l’ordre d’intrus venus pour nous dresser les uns contre les autres, se prétendant en cela meilleurs musulmans que nous.
Ils appliquent la formule « diviser pour régner » et cherchent à nous lancer dans une lutte fratricide. Nous ne serons pas dupes. A ces Réguibats du Sahel et du Charg, nomades de la Ségui el Hamra et du Rio, Tekna Larroussyines, Oulad Tidrarine, Oulad Delim et Ahel Cheikh Ma el Aïnin, nous disons : Soyons unis et ne nous laissons plus divisés par des étrangers.
« Si deux groupes de croyants se mettent à se faire la guerre, conciliez-les ; si l’un de ces groupes cherche à opprimer l’autre, battez-vous contre lui jusqu’à ce qu’il revienne à l’ordre de Dieu ».
Voilà, hommes de l’Adrar, chres compatriotes et amis, le message de fraternité que je vous demande de répéter dans tous les campements du Sahel.
Me tournant maintenant vers le nord, je voudrais de la même façon me faire entendre de nos voisins et amis marocains.
En votre nom et au nom de tous les Mauritaniens, je leur adresse notre salut amical et tiens à les assurer de notre désir sincère d’entretenir avec eux comme avec tous les peuples voisins les relations de bon voisinage que nous n’avons jamais cessé d’avoir avec eux. Nous leur demandons de respecter notre personnalité et l’intégrité de nos frontières comme nous respectons les leurs, de nous laisser suivre sagement le chemin de notre propre évolution, sans intervenir pour nous conseiller et nous imposer une destinée dont le choix n’appartient qu’à nous et à nous seuls.
« Travaillez ! Dieu regarde votre travail, ainsi que son Envoyé et tous les croyants. »
« O Seigneur, accorde-nous ta miséricorde et donne-nous le succès dans nos entreprises. ».

Le lendemain, Moktar Ould Daddah est à Aïn Ben Tili, puis à Fort-Trinquet et Fort-Gouraud. A vrai dire, le plus difficile n’est pas encore survenu : une opération militaire franco-espagnole (Ecouvillon) sera nécessaire, dont la jeune équipe gouvernementale connaîtra peu et après coup seulement, et elle sera suivie du ralliement officiel de Mohamed V aux thèses de l’Istiqlal. Le conflit devient international, avant la lettre.

L’intervention du très jeune chef de gouvernement avait posé la question mauritanienne, tant vis-à-vis de l’opinion internationale et marocaine, que vis-à-vis de la métropole française, d’une manière tout à fait différente de celle des élus ou des autorités.

Certes, il était dûment mandaté. Son texte avait été adopté sans réserve le 27 Juin par le Conseil de gouvernement tandis que sur le terrain reprennent les travaux de bornage du Rio de Oro en commission franco-espagnole. La semaine précédente, le Conseil avait examiné la situation dans le nord du Territoire et s’était prononcé à l’unanimité pour les “mises au point nécessaires” : “le Vice-Président se propose de faire une tournée dans l’Adrar où il aurait l’occasion de prendre publiquement la parole et de définir la position mauritanienne”.

Mais Moktar Ould Daddah pouvait surtout s’appuyer sur un fait nouveau coincidant avec la mise en place des nouvelles institutions. La tentative de coup de main de l’ “Armée de libération” marocaine – ou plutôt les combats qui se déroulent du 12 Janvier au 14 Février 1957, le long de la frontière avec le Rio de Oro pour ”neutraliser” certains groupes de l’A.L. fortuitement repérés [1] - révèlent soudain de quel côté penche la Haute Mauritanie ; l’action efface le doute. Alors qu’au moment de la « pénétration française », de 1905 à 1913, l’attentisme du Tagant et de l’Adrar signifiait pratiquement la complicité, cette fois “les attaques marocaines ont un effet absolument contraire à celui qu’elles recherchaient, c’est à savoir de susciter une vigoureuse réaction de défense et l’affirmation encore hésitante du particularisme, si ce n’est même de nationalisme mauritanien, qui jusqu’à ce jour pouvait être tenu pour inexistant”  [2]. Devant l’ “Armée de Libération”, les guerriers de l’Adrar et du Tagant ont demandé des armes et surtout ont empêché les éléments de cette dernière de se diluer dans la population mauritanienne : la tactique du “poisson dans l’eau” comme les allégations d’Horma Ould Babana et de l’Istiqlal ont perdu tout fondement sur le terrain, dès leur première épreuve. Il ne peut plus être question de séparer les “goumiers mercenaires” de l’ensemble des tribus guerrières, ce qui est d’autant plus remarquable que l’année précédente encore, l’Adrar n’avait pas renié Horma Ould Babana au moment de l’élection du député à l’Assemblée nationale française. [3] “Les assaillants avaient l’illusion qu’ils ne rencontreraient pas grande résistance de la part des autochtones et même peut-être que ceux-ci s’ajouteraient à eux” ; or “toutes les tribus ... toutes ont eu la même volonté de lutter contre l’adversaire commun”[4]. Cette analyse du député est reprise par le Ministre de la France d’Outre-mer. Mais la démonstration de loyalisme n’est pas le seul fait que notent les porte-paroles du Territoire : la résistance frontalière est la défense ”au prix de n’importe quels sacrifices” du “patrimoine de nos pères” [5]. Ces appréciations des événements de l’Adrar ne sont pas seulement celles du Tzarza, mais aussi des gens du Hodh et de partout ailleurs : Hamoud ould Ahmedou assure à l’instar de Sidi el Moktar N’Diaye et de Souleymane ould Cheikh Sidya : “sans doute les liens culturels et religieux nous relient-ils au Maroc, mais personne en Mauritanie n’admet les prétentions d’un pays qui ne sait même pas s’administrer lui-même. Et depuis le dernier rezzou l’unanimité s’est faite pour condamner ceux qui viennent porter le trouble chez nous” [6].


Le 5 Juillet 1980, sous la présidence du lieutenant-colonel Mohamed Khouna Ould Haïdalla, la réunion plénière du Comité militaire de salut national (C.M.S.N.), « après un débat approfondi autour de l’ensemble des aspects de cette question », décide l’abolition de l’esclavage, moyennant d’éventuelles compensations examinées par une commission comprenant des oulémas, des économistes et des fonctionnaires. Les débats ont été provoqués par une prise de conscience générale dans le pays de la persistance du problème : au marché d’Atar en Mars, il avait été procédé à la vente aux enchères publiques d’une esclave noire. Le communiqué du pouvoir militaire indique notamment que :
. « le CMSN a acquis la ferme conviction qu’une écrasane majorité de nos ouléms, tout en reconnaissant le bien fondé de l’esclavage tel qu’il est énoncé dans la cheriaa islamique émettent des réserves sur ses origines en Mauritanie et les conditions dans lesquelles l’esclavage est pratiqué dans notre pays »
. « les oulémas estiment que l’Etat peut se substituer aux maîtres pour affranchir leurs esclaves, tout comme il a compétence pour exproprier les biens individuels dans l’intérêt de la nation »
. « l’esclavage constitue l’un des problèmes les plus importants qu’affronte notre société et une maladie anachronique qui continue à obstruer la voie des efforts déployés dans le sens de la réalisation de nos objectifs d’indépendance nationale et de justice sociale ».

La décision du régime militaire parut pour l'étranger l’aveu d’une réalité qui donne une image commode d'un pays peu connu. Propre aux clichés, sous couvert de traditions qu'on ne cherche pas à comprendre, qui flattent les penchants pour l'exotisme, alimentent l'esprit de supériorité, et qui permettent surtout de ne pas étudier les politiques mises en oeuvre pour transformer ce qui eut son fond prétendûment traditionnel. Pour les nationaux, c’était surtout la constatation que le problème n’était pas réglé – ce qu’avait proclamé d’ailleurs El Hor [7] et ce que continueront ensuite à publier les F.L.A.M.

En réalité, le Comité militaire n’a pas été le premier. Moktar Ould Daddah s’y était employé, mais le plus concrètement possible et dans le cadre du Parti. La Charte adoptée au congrès des 15-22 Août 1975 dispose que tout travail non rémunéré, non contractuel, non garanti, qu’il s’agisse de domesticité, de métayage ou de gardiennage de troupeaux, doit être éliminé .    La première Constitution d’Etat indépendant, celle du 20 Mai 1961, en son article 1er, alinéa 2, supprime, de jure, l’esclavage en proclamant La République assure à tous les citoyens, sans distinction de race, de religion ou de condition sociale, l’égalité devant la loi ”.

Le président-fondateur explique [8] que – citation – « pour des raisons conjoncturelles – l’examen de notre candidature aux Nations Unies et les menaces intérieures et extérieures contre notre unité nationale naissante et l’intégrité territoriale de notre pays - cette suppression n’était pas suffisamment explicite. Néanmoins, pour nous, elle était réelle dans son principe. Raison pour laquelle le Parti et le Gouvernement ont, dès le début, mené une politique anti-esclavagiste, discrète certes mais véritable et conforme à l’Islam originel et à la Constitution de 1961. Cependant, pour éviter de graves troubles que n’auraient pas manqué de provoquer une attaque frontale du problème, attaque dont nous n’avions ni les moyens judiciaires, ni les moyens policiers, nous avons du biaiser. Et alterner la persuasion et la fermeté, suivant les cas. Dans ce sens, des directives ont été données aux responsables politiques et administratifs. Ainsi, la fermeté était-elle prescrite aux autorités administratives et policières (gendarmerie et police) saisies de cas concrets. Lesquels cas devaient toujours être tranchés en faveur “des serviteurs” auxquels il devait être rappelé - tout comme à “leurs maîtres” - qu’ils étaient complètement libres.
Dans le même esprit, le ministre de la Justice, par circulaire n°  8 du 5 Décembre 1969 dessaisissait les cadis de tous les cas concernant “ la main d’oeuvre servile ”. Cas qui devaient relever exclusivement des tribunaux de droit moderne. La circulaire, dont j’avais personnellement pesé chaque terme, fut signée par deux Gardes des Sceaux successifs [9] ; je tenais en effet d’une part à ce que la répétition ancre le principe dans les esprits, et d’autre part à ce que la hiérarchie de nos magistrats soit directement responsabilisée par le ministre. L’importance de la question et l’ampleur des critiques souvent mal informées me conduisent à donner ici l’intégralité de ce texte [10].

O b j e t  : Main d’œuvre servile.

Mon attention a été attirée sur certains litiges nés à propos de l’utilisation de la main d’œuvre servile.
A cette occasion, je crois devoir vous rappeler que l’avènement à l’indépendance dans tous les Etats modernes a toujours consacré la suppression systématique de l’escalavage ainsi que celles de toutes les pratiques analogues. Aux idées réactionnaires artificielles, on pourrait obbjecter facilement que l’escalavage avait été à l’origine autorisé dans le Livre saint en vue de faciliter la soumission des infidèles et par suite leur conversion à la religion musulmane ; que cette « arme » devait être conbsidérée comme un moyen et non comme une fin ; que, de ce fait, l’esclavage n’aurait plus sa raison d’être dans une société musulmane à cent pour cent, que sa pratique  est donc incompatible avec le nouvel ordre social tel qu’il est défini par la Constitution et les lois de la République prises dans le cadre de la Charte des Nations Unies et des conventions internationales.
En effet, la Constitution du 20 Mai 1961, après avoir fait référence, dans son préambule, à la Déclaration française de 1789 sur les droits de l’homme, et à la Déclaration universelle du 10 Décembre 1948 affirme, en son article 1er alinéa 2 : «  La République Islamique de Mauritanie assure à tous les citoyens sans distinction de race, de religion ou condition sociale, l’égalité devant la loi ».
Cette disposition constitutionnelle vient donc supprimer, de façon claire et sans équivoque, toute discrimination raciale, religieuse ou sociale, et elle s’impose, non seulement dans l’application de la loi moderne, mais aussi dans l’application de la loi musulmane et droit coutumier qui ne sont, somme toute, qu’une partie intégrante du droit national mauritanien.
Dans le domaine social proprement dit, une loi de 1963 instituant un Code du travil en République Islamique de Mauritanie, interdit formellement le travail forcé ou obligatoire en donnant à cette fâcheuse institution la même définition que celle donnée dans les conventions internationales de 1926 et de 1956, je cite : «  tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré ». Fin de citation.
De même, le Code pénal actuellement en vigueur en République Islamique de Mauritanie réprime, sous des qualifications tantôt correctionnelles, tantôt criminelles, toute atteinte à la liberté d’autrui ainsi que tout acte de brutalité et de menace.
En particulier, toutes les conventions ayant pour objet d’aliéner la liberté d’une personne, sont réprimées par ce Code.
Or, j’apprends que certaines personnes présentent souvent aux autorités cette question « serviteur » sous des aspects divers et artificiels. Les cas suivants seraient les plus fréquents :
- parfois, il s’agit d’un « maître » qui s’approprie les bien de son « serviteur », sous le fallacieux prétexte que celui-ci, lui-même objet de propriété, ne pourrait rien posséder qui n’appartienne à « son patron »,
- tantôt, le « maître » tente d’empêcher le mariage de ses « serviteurs » si son consentement n’est pas demandé au préalable,
- tantôt, il s’agit d’un « maître » qui cherche vainement à rétablir son autorité sur ses prétendus serviteurs en « fuite » et il invoque à leur encontre de prétendues « créances » s’il ne les accuse pas, devant la juridiction répressive, de détournement ou de vol,
- tantôt enfin, il s’agit de conventions passées effectivement et ayant pour cause ou pour objet d’attribuer à une ou à plusieurs personnes la propriété totale ou partielle d’un prétendu « serviteur », d’une prétendue « servante » ou de leurs enfants.
Toutes ces pratiques sont anacrhoniques et nuisent au renom et à la réputation de notre pays et ne sont en tout cas conformes ni à notre droit interne, ni au droit international.

En conséquence, je vous demande de bien vouloir y mettre fin et de vous abstenir dorénavant de tout ce qui peut en permettre le retour direct ou indirect.


Je dois à la vérité de reconnaître que cette politique et ces directives n’étaient pas toujours appliquées à la lettre, surtout dans les coins reculés du pays où il n’y avait pas d’autorités étatiques, lesquelles, là où elles existaient, étaient parfois influencées par l’environnement conservateur pour ne pas dire réactionnaire. Mais, au niveau de la direction nationale, il n’y avait, quant au fond, aucun doute au sujet du but à atteindre, à savoir : l’élimination de cette plaie de notre société. Ce fut l’un des thèmes de la première conférence des responsables régionaux administratifs et politiques, tenue sous ma présidence du 27 au 31 Janvier 1969.
Pour assurer la libération et l’intégration de cette composante de notre peuple, une politique, claire quant à son contenu, mais insuffisamment explicitée pour des raisons tactiques déjà mentionnées - une politique claire a été définie par le Parti et le Gouvernement. La conception de cette politique résultait de notre conviction que la libération et l’intégration réelles de nos compatriotes “d’origine servile” devait se faire en particulier dans les secteurs de l’éducation, en encourageant la scolarisation des enfants, dans celui du travail en favorisant le recrutement des travailleurs, manuels et intellectuels, et dans le domaine militaire, en facilitant le recrutement par l’armée et les forces de sécurité de compatriotes de cette origine.
En 1978, cette politique, sans nous avoir permis d’accomplir des miracles, donnait déjà des résultats positifs. En particulier dans le domaine de la reconversion des mentalités. En effet, personne n’osait plus soutenir, ni même évoquer publiquement la pratique honteuse de l’esclavage. Personne n’osait plus “réclamer son bien”, s’agissant des “serviteurs” qui s’émancipaient de plus en plus nombreux, à mesure qu’ils devenaient plus indépendants économiquement : travailleurs salariés, fonctionnaires et agents de l’Etat, soldats, etc...
    C’est par la détermination inébranlable des pouvoirs publics d’y mettre fin, par tous les moyens appropriés, et par l’indépendance économique des intéressés, que ce fléau social disparaîtra de notre société. » -  fin de citation  -


 



[1] - bulletin de renseignements du 12 mars 1957 360 SR/APA

[2] - déclaration à Rosso le 20 février 1957 de Sidi el Moktar N’Diaye, rapportée dans  “Paris-Dakar” du 19 Février 1957

[3] - Sidi El Moktar N’Diaye, bien plus nettement qu’en 1951, l’avait emporté (sauf en Adrar) par 106.603 voix contre 17.371 à son prédécesseur

[5]  - déclaration de Souleymane Ould Cheikh Sidya, rapportée par Paris-Dakar du 19 Février 1957

[6] - Hamoud ould Ahmedou à Ernest Milcent : le Monde du 23  Février 1957

[7] - la charte constitutive de l’Organisation de libération et d’émancipation des haratines est adoptée le 5 Mars 1978 à Nouakchott ; elle ne sera « actualisée » qu’en 1998

[8] - Moktar Ould Daddah, dans ses mémoires La Mauritanie contre vents et marées (Karthala . Octobre 2003 . 669 pages – disponible en arabe et en français)  pp. 564 à 568, expose « le problème de l’esclavage que, par pudeur honteuse, nous avons pris l’habitude de ne pas appeler par son nom »

[9] - Mohamed Lemine Ould Hamoni, ensuite Président de la Cour suprême, et Maloum Ould Braham

[10] - il fut adressé aux Préfets et Chefs d’arrondissements s/c des Gouverneurs des Régions et du district de Nouakchott, au Président du Tribunal de Nouakchott, au Procureur de la République, aux Juges des sections, aux présidents des Tribunaux de cadis,  ainsi qu’à tous les postes de gendarmerie de notre pays

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