jeudi 9 janvier 2014

lettre ouverte à Mohamed Ould Bouamatou






Monsieur le Président,

dans l’urgence et compte tenu de l’enjeu considérable pour votre pays et pour le mien, je recours à l’obligeance de ceux de vos compatriotes, visitant ce blog. et qui vous transmettront sans doute ce message. En effet, malgré tous mes efforts et les indications qui m’ont été données de personnes censées pouvoir vous approcher et me mettre en relation directe avec vous, je ne suis pas parvenu à établir autrement notre correspondance.

Selon ce que j’ai appris, par bribes successives, vous êtes – seul – en position de défaire ce que vous avez contribué à faire : la reconnaissance internationale sans précédent d’un coup militaire sans précédent, puisque c’est l’ancienne métropole qui s’est portée caution d’un militaire ayant renversé le seul président élu en Mauritanie selon un scrutin pluraliste, tenu à deux tours, préparé pendant des mois et contrôlé internationalement par des centaines d’experts et la mise à disposition d’une Commission électorale nationale indépendante composée consensuellement, de nombreux matériels et logiciels. Reconnaissance faisant en sus bon marché d’une réelle résistance, aussi résolue que pacifique, de beaucoup de vos compatriotes, qui firent – avec une maturité rare dans le monde actuel – passer leur attachement à l’Etat de droit avant les critiques que certains d’entre eux pouvaient opposer au président légitime, idi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi.

La légitimation de ce putsch dont votre pays et vos compatriotes continuent de subir les conséquences, tiendrait beaucoup à vous. Et peut-être aussi le financement de sa préparation.

Selon des mobiles ou des liens personnels qui vous appartiennent et que je ne suppose pas, vous auriez mis en relation les putschistes avec l’Elysée qui avait pourtant aussitôt communiqué sa condamnation absolument formelle. Par Karim Wade, passant lui-même par M° Robert Bourgi, chacun recevant son enveloppe, vous auriez fait recevoir le général Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed dit El Ghazouani, pourtant interdit de visa par l’Union européenne, et les putschistes grâce à vous auraient eu les moyens d’acheter le secrétaire général de la présidence de la République française.

Un million d’euros en liquide qu’il aurait été compliqué, même pour vous, de mobiliser sur la place de Nouakchott : plusieurs banques ont été mises à contribution puisqu’il fallait des billets. Et tout de suite.

Si tout cela est vrai, le nom des banques, la date de ces achats de devises, celles du déjeuner putschiste avec Karim Wade et les premiers voyages du général El Ghazouani, d’abord reçu au Bristol à Paris, puis dans le bureau-même de Claude Guéant, vous seraient familiers. Le revirement de la France, spectaculaire, et décisif s’expliquerait bien tristement pour le pouvoir de l’époque : mon pays présidait même le comité euro-africain chargé de faire rendre raison aux putschistes de leur coup.

Le pôle financier du parquet de Paris enquête, depuis cet automne, sur les sommes détenues en espèces par Claude Guéant, qui a passé des heures en garde à vue. Du million, il n’y aurait plus que cinq cent mille euros de reste, selon les indiscrétions de la presse française. Les enquêteurs continuent de chercher l’origine de ces fonds et la cause de cet enrichissement d’un si haut fonctionnaire et important politique.

J’ai appris aussi, en racompagnant de son exil le président Moktar Ould Daddah et en reprenant ainsi pied dans votre pays qui m’est cher depuis que j’y ai accompli mon service national français comme enseignant à la future Ecole nationale d’administration de Nouakchott, combien votre générosité a été et demeure grande et efficace. Votre capacité à organiser et aentreprendre a permis – tant par la Fondation ophtalmologique qui porte votre nom que par des initiatives importantes mais restées discrètes –à nombre de vos compatriotes incurables ou dans le besoin d’être soignés, secourus, guéris.

Je sais donc que vous êtes patriote et j’ai tendance à croire par conséquent qu’à l’expérience de ces cinq ans – si ce que je viens de rappeler est exact – vous regrettez tout. Vous regrettez d’avoir permis en grande partie ce changement du cours mauritanien et d’avoir ainsi soutenu la personnalité maintenant au pouvoir. D’elle, vous savez d’ailleurs beaucoup aussi.

En acceptant une convocation du parquet de Paris ou en l’informant spontanément de ce que vous savez de cet enrichissement sans cause…, en tant qu’auteur direct ou indirect, par vos avocats dont l’un – remarquable défenseur des sans-papiers et des demandeurs d’asile en France – est inscrit au barreau de Paris, vous défaites le maléfice de 2008. Vous montrez la forfaiture d’un pouvoir français indigne de l’histoire franco-africaine commune et si glorieuse dans les guerres mondiales, dans les grandes mises en valeur de l’ouest et du centre du continent, dans la décolonisation. Vous forcez l’ancienne métropole à se désolidariser du pouvoir régnant actuellement dans votre pays – selon la promesse faite par l’actuel président de la République française au soir de son élection, quand il prit congé de ses administrés de Tulle et déclara aux Français, à l’Afrique citation - Nous ne sommes pas n’importe quel pays, nous sommes la France, la paix, la liberté, le respect, la capacité de donner aux peuples de s‘émanciper des dictatures et des règles illégitimes de la corruption. - fin de citation et laissez – donc seul, sans référence que son origine politique – le général Mohamed Ould Abdel Aziz solliciter l’été prochain sa reconduction et un redoublement factice de sa légitimité.

Ce n’est pas même vous racheter. Je me garderai de faire de la morale en histoire nationale mauritanienne, mais vous fonderez. Vous permettez au pays de rebondir, vous rendrez à vos compatriotes et à la France, honteusement égarée, ce discernement, cette vue que l’on donne ou rend physiquement, thérapeutiquement dans votre établissement. Le mouvement de générosité et de patriotisme sera le même. La médication analogue.

Je souhaite donc vivement vous rencontrer pour parler avec vous de cela, pour entendre de vous la vérité sur des actes qu’on vous aurait à tort attribués, vérité dont alors je me porteraui fort et que je publierai. Pour vous accompagner si vous le souhbaitez, dans cette démarche réparatrice et salvatrice.

Le Calame et Cridem qui me font l'honneur de publier ce que je comprends de votre pays, ainsi que vos deux avocats mauritanien et français, ont mes coordonnées internet et téléphonique.


Bertrand Fessard de Foucault,
ancien ambassadeur

Le

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