mercredi 11 décembre 2013

Quelle responsabilité de la France ? publié par le Calame dans son édition du 9 décembre





Commisération de certains observateurs de l’actualité mauritanienne, une actualité de quatre ans pour un putschiste et ses opposants se faisant face depuis cinq ans. En appeler à l’ancienne métropole soit pour en être soutenu au motif sécuritaire, arrangé bien avant le crime contre la démocratie par des événements organisés et une complaisance de certains services de cette métropole, soit pour être appuyé en privant l’homme fort de ce soutien. Quelle émancipation mentale ! celle dont, bien plus que factuellement, Moktar Ould Daddah voulait émanciper son pays : la vocation à l’indépendance sans l’aval du chef du territoire encore à peine en gestion commune, loin de l’autonomie interne, celle-ci votée comme chemin de l’indépendance et l’indépendance sans le préalable des accords de coopération et ces accords révisés par une demande surprenant les destinataires.

Pauvreté d’une opposition, incapable de pratiquer les moyens décisifs. Un boycott total de toute élection, une candidature unique à l’élection présidentielle décidée et pourvue très longtemps à l’avance. Des coordinations, des fronts, des coalitions qui à chaque approche de scrutin volent en éclats à cet été, l’appât de l’élection et l’illumination du parieur croyant en sa chance et qu’il gagnera seulement en participant. Dialoguistes, poarticipationnistes, boycottistes… tous perdants. Y compris l’homme fort, qui ressassant ses victoires électorales et ses fraudes, ne parvient pourtant pas à effacer le péché d’origine : le putsch, et quel putsch, la trahison de celui dont on commande la garde et dont on dirige l’état-major particulier.

Cette situation est de la responsabilité de la France. Elle est lamentable pour les Mauritaniens. Elle explique ce paradoxe que cinquante après l’indépendance, la France est davantage impliquée en Afrique subsaharienne dans des opérations militaires qu’elle ne ‘lavait jamais été depuis sa conquête coloniale. Son administration et les mutations vers l’indépendance, sauf au Cameroun, n’avaient pas été guerrières. Simplement, la France a été aveugle au dévoiement de la plupart des Etats qui lui avaient succédé. Et elle y ajouté la liberté de quelques-uns de ses ressortissants de corrompre en Afrique et même en France du fait d’une Afrique corrompue.

Exemplaire le soutien acheté – en euros – de la France en la personne du secrétaire général de la présidence de la République, sous Nicolas Sarkozy, et presque à l’insu de celui-ci. La France achetée pour soutenir le renversement du seul président en Mauritanie, mais sans doute dans beaucoup d’autres Etats, élu au suffrage pluraliste, à deux tours, contrôlé internationalement du recensement électoral à la transmission des dépouillements (un an de présence sur place de l’Union européenne et de l’O.I.F. et une dépense d’environ deux euros par électeur). Soutien à la légitimation d’un putschiste, prouvant – heureusement ? tristement ? – l’influence demeurée de la France et l’expertise que la « communauté ingternationale » lui croit encore en Adfriqye, alors depuis la Côte d’Ivoire il y aura bientôt vingt ans qu’y est mort « le doyen » elle n’a rien vu venir… influence telle qu’elle inverse la position européenne à prendre au titre de l’article 96 du traité de Cotonou, juste sous sa présidence semestrielle, et qu’elle convainc l’Union Africaiane, il est vraie alors présidée par le Guide libyen…

Cas exemplaire d’une élection légitime, d’un pouvoir réparateur des horreurs ou erreurs des vingt années précédentes de dictature militaire en uniforme ou défroquée : loi criminalisant la pratique de l’esclavage, consensus sur le rapatriement des réfugiés au Sénégal et au Mali par force dans le drame de Mai 1989, ouverture franche du dossier dit du drame humanitaire (les massacres de militaires dans « les années de braise » à raison de de leur ethnie et au prétexte mensonger de projets de putsch raciste qu’aurait organisée une minorité… pas même séparatiste, s’il était jamais possible), cas exemplaire d’une condamnation internationale unanime, consacrée à Paris par un communiqué du président régnant, Nicolas Sarkozy, d’une netteté rare t immédiate.

Cas exemplaire de trahison d’une ancienne métropole qui empêche la démocratie et l’Etat de droit dans une zone réputée de son influence.

Pour réparer, pour laver sa propre honte (et d’abord commencer de la ressentir), la France doit tout simplement soutenir le rétablissement de la démocratie et au besoin l’inventer. C’est simple. Annuler les élections en cours. Les reporter jusqu’à les tenir en même temps que la prochaine élection présidentielle, soit jusqu’à l’été de 2014. délai qui est celui aussi de la mise en place d’un contrôle internation de bout en bout du processus électorale, des recensements jusqu’aux transmission des brodereaux de dépouillement et l’ultime compilation à Nouakchott. Refonte de la Commission électorale nationale indépendante. En tout cela, le modèle réussi et efficace de 2006-2007 après des journées de concertations détaillées et absolument consensuelles, peut servir pour 2013-2014. Cette implication de la France, au rebours total des cinq années passées, suffira – sans doute et s’il est fortement expliqué, au besoin tête-à-tête par le président français à son « homologue » mauritanien – à déstabiliser psychologiquement le général Mohamed Ould Abdel Aziz qui ne triomphe dans l’ombre puis sur le pavois que par défaut des autres : Mauritaniens qui étaient au pouvoir, France aveugle. Celle-ci avait même empêché, plus ou moins directement, le colonel Ely Ould Mohamed Vall de transgresser sa promesse de ne pas se présenter à l’élection présidentielle de 2007. Comment a-t-elle pu tout faire à Dakar en 2009 pour que le général Mohamed Ould Abdel Aziz à la succession anticipée par l’abnégation de celui qu’il avait renversée, et aller ainsi à une élection bâclée et sans contrôle, dont les résultats furent reconnus dès le soir du premier tour (un second n’était évidemment pas nécessaire) avant que les résultats soient proclamés et alors que le président de la Commission électorale, en formation éphémère, démissionnait rien qu’à constater la manière dont se dépouillait les résultats.

Je prie pour mon pays – la France – plus encore que pour la Mauritanie./.



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