samedi 18 août 2012

Repères pour la Mauritanie nouvelle - annexe 2

2 .

Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi

I

premier discours radiotélévisé depuis son investiture présidentielle,
adressé à la nation, le 29 Juin 2007


Chers compatriotes,
La consolidation de l'unité nationale et le raffermissement de la cohésion sociale ont été placés au premier rang des priorités du programme électoral que j'ai eu l'honneur de proposer aux suffrages de mes compatriotes lors du dernier scrutin présidentiel. Une primauté que j'ai confirmée dans la lettre de mission du Premier ministre.

Chers compatriotes,
L'unité nationale et la cohésion sociale requièrent l'instauration de la concorde entre toutes les composantes de notre peuple sur la base du respect des principes d'égalité, de justice et de dignité. Notre devoir est de faire de sorte que tous les Mauritaniens puissent éprouver la légitime fierté d'appartenir à une grande nation. Qu'ils sentent que la République les protège et les traite sur un même pied d'égalité, tous sans exclusive.

Tout au long d'une riche histoire, marquée notamment par l'édification de vastes empires dont le rayonnement dépassa largement les frontières de notre pays,  nos communautés ont toujours su vivre ensemble dans une fraternelle harmonie. Notre histoire récente a été cependant jalonnée de péripéties difficiles et parfois douloureuses.

Au cours des années 80, notre pays a été le théâtre d'atteintes massives aux droits de l'homme qui devaient culminer en 1989-90-91. Des citoyens mauritaniens à l'intérieur et à l'extérieur du pays ainsi que des résidents établis en Mauritanie ont été victimes d'exactions graves et injustifiées. Des populations mauritaniennes paisibles se sont vues contraintes à quitter leur pays. Des atteintes cruelles à la dignité, des abus et dénis de droit d'une grande ampleur ont été commis.

Chers compatriotes,
Je voudrais ici, au nom de la République, exprimer ma compassion à l'égard de toutes les victimes de ces années sombres. Je voudrais dire à chaque veuve, à chaque orphelin, à chaque réfugié, à chaque opprimé blessé dans sa dignité, que je partage l'intimité de leurs souffrances.
Assumer cette part d'ombre dans notre passé requière de faire preuve de tolérance et d'ouvrir dans notre histoire une nouvelle page où plus jamais ce genre de pratiques absurdes et d'un autre âge ne pourra se reproduire.  C'est également pour cela que la recherche des voies et moyens appropriés pour le retour dans la dignité des concitoyens réfugiés, le règlement du passif humanitaire et l'éradication des séquelles de l'esclavage continuent de mobiliser nos efforts et notre réflexion.

Il nous faut d'abord rétablir la confiance propice à une véritable réconciliation des esprits et des coeurs. A cet effet, l'Etat assumera entièrement sa responsabilité pour assurer le retour dans la dignité de tous les citoyens actuellement réfugiés à l'extérieur du pays. Il se tiendra à côté de toutes les victimes et de leurs ayant droit pour réparer équitablement les injustices subies et permettre à tous de participer dans la dignité et l'égalité à la construction de notre avenir commun.

Tous les Mauritaniens réfugiés pourront retourner au pays et bénéficieront d'un programme de réinsertion dans leurs terroirs d'origine avec l'appui du HCR, de l'Etat mauritanien, de l'effort de solidarité nationale et le concours de nos partenaires au développement. Des mesures seront mises en place pour s'assurer que tous les mauritaniens concernés pourront bénéficier de ce programme de retour organisé.

Toutes les mesures seront prises pour faciliter le retour de nos compatriotes dans leur pays. J'en appelle à l'ensemble des Mauritaniens pour qu'ils se mobilisent afin de réserver à nos concitoyens de retour le meilleur des accueils possibles, dans la tolérance, la fraternité et la solidarité.

Ce faisant, notre pays montrera sa grandeur et sa capacité à résoudre ses problèmes sur la base de ses propres valeurs.  Nous sortirons ainsi renforcés de cette épreuve et nous serons armés pour affronter les autres défis de la construction de l'Etat de droit.

Chers compatriotes,
Le combat pour l'égale dignité des citoyens dans un Etat de droit est aussi un combat contre l'esclavage dans toutes ses formes, traditionnelle et moderne. Pas plus tard qu'hier, le gouvernement a approuvé un projet de loi portant incrimination et répression de cette pratique abominable.  Parallèlement aux efforts visant l'élimination des séquelles de l'esclavage, une grande vigilance sera observée pour réprimer les formes contemporaines de ce phénomène comme l'exploitation des mineurs, le trafic des personnes et toutes les autres formes d'exploitation de l'homme par l'homme.

Chers compatriotes,
Notre objectif est en somme d'instaurer un Etat égalitaire, où la dignité et les droits des citoyens et de tous les hommes sont pleinement respectés. Tenir la promesse d'égalité, c'est réussir l'égalité des droits et des chances, et faire en sorte que nos diversités soient vécues non pas comme un facteur d'exclusion mais bien comme un facteur d'enrichissement et que tous se reconnaissent dans les valeurs d'honneur, de fraternité, de justice, qui sont celles de notre République Islamique.

Au-delà de l'horizon national, ce choix garantira à notre pays une place éminente dans le concert des nations, place par laquelle il pourra affirmer sa personnalité et son identité propres, ancrées dans son environnement arabo-africain et dans ses valeurs islamiques.

II

texte empêché d’être prononcé, à Lemden, pour la fête nationale

28 Novembre 2008

Mes chers compatriotes,

Je m’adresse aujourd’hui à vous, en ce quarante-huitième anniversaire de l’indépendance de notre pays alors que celui-ci traverse une phase particulièrement grave de son histoire.

Grave, en effet, car les espoirs nés des dernières élections législatives et présidentielles qui devaient permettre à notre peuple de s’engager enfin, grâce à la stabilité institutionnelle et à la concorde nationale, sur la voie d’un développement économique, social et culturel durable, ont volé en éclat le 6 Août dernier. L’ambition d’un homme a mis fin, par la force des armes, à la légalité constitutionnelle, foulant aux pieds et la volonté populaire traduite à travers le verdict des urnes et les engagements pris devant la communauté internationale.

Ce verdict me donnait mandat, en conformité avec le programme sur lequel vous m’avez élu, d’engager, sur tous les plans, une politique novatrice en totale rupture avec les politiques et usages du passé.

C’est ainsi que je me suis interdit l’exercice solitaire du pouvoir, donnant au gouvernement et aux autres institutions de l’Etat la plénitude de leurs prérogatives, tout comme j’ai investi les chefs des forces armées et de sécurité d’un appui déterminé et d’une confiance totale en ce qui touche aux problèmes de sécurité.
                          
M’efforçant d’être le Président de tous mes compatriotes, j’ai eu à cœur de me concerter souvent avec les acteurs politiques et sociaux du pays, élus, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition ou opérateurs économiques. J’ai eu également à cœur de me mettre à la  disposition de mes autres compatriotes et de tenir à chacun le langage du respect et de la bienveillance, mais toujours celui de la vérité, loin de toute démagogie comme de tout autoritarisme.

Je sais que cette attitude a pu être parfois interprétée par certains, habitués qu’ils étaient pendant quelques décennies aux pouvoirs personnels et au culte de l’Etat, comme un signe de faiblesse, alors qu’elle traduisait en fait une volonté délibérée d’accréditer dans le pays une nouvelle culture politique, fondée sur la liberté et la dignité du citoyen.

Quant à la majorité qui, jusqu’au déclenchement de la crise provoquée, soutenait l’action du gouvernement, je lui ai demandé d’agir comme un aiguillon et un censeur de l’action du gouvernement, et non comme un soutien aveugle et flagorneur de cette action. Dans le même temps, l’opposition jouissait de toutes les garanties que lui conférait la loi et de toute la concertation avec le pouvoir dont elle exprimait le souhait.

Par ailleurs, la restauration de la concorde nationale à travers le retour des réfugiés, la réalisation de l’émancipation sociale par la criminalisation de l’esclavage en vue du renforcement de l’unité de notre peuple, ainsi que la refondation de l’état de droit dans tous ses aspects, ont été entrepris en tant que prémices indispensables à tout développement économique et social.

Sur le plan économique, et comme chacun le sait, la situation au lendemain de mon investiture était, pour le moins, préoccupante. De fortes contraintes pesaient sur les finances publiques, avec un endettement global de l’Etat d’environ 700 milliards d’ouguiyas dont près du tiers sous forme de dette intérieure correspondant aux engagements du trésor et aux dettes des principales  entreprises publiques. Le budget initial de 2007 dégageait un déficit non prévu de près de 30 Milliards, avoisinant le montant du budget d’investissement sur ressources intérieures. Les difficultés d’alimentation en eau potable et en énergie électrique, aussi bien à Nouakchott qu’à l’intérieur du pays, rendaient difficiles les conditions de vie des citoyens et handicapaient sérieusement l’activité économique. Le système éducatif ne parvenait pas à remplir sa mission de formation et d’éducation en réponse à la demande économique et sociale du pays. Dans le même temps, la plupart des indicateurs de notre système de santé étaient alarmants.

Aussi était-il indispensable et prioritaire de concevoir les réformes économiques et sociales appropriés à cette situation, assorties d’un programme d’investissement public ambitieux pour assurer la fourniture des services sociaux de base, dans le but de lutter contre la pauvreté, en réalisant une croissance économique plus soutenue et plus distributive. Bien évidemment, la mobilisation des financements appropriés ainsi que l’instauration d’un climat attractif pour l’investissement privé international et favorable à la compétitivité de nos entreprises privées, constituaient les défis majeurs à relever.

Nos efforts dans ce sens ont, grâce à Allah, été couronnés de succès puisque, en moins de sept mois, nous avons préparé un programme triennal d’investissement et en avons obtenu le financement pour un montant de l’ordre de 3 milliards de Dollars dont 2,5 de concours extérieurs. Déjà les conventions signés totalisent 600 Millions de Dollars.

De plus, nous avons enregistré des intentions sérieuses d’investissements pour un montant de l’ordre de 6 Milliards de Dollars de la part d’investisseurs privés étrangers.

Tout ceci a pu être obtenu grâce la pertinence de notre programme triennal de développement, à l’exemplarité de notre démocratie et à nos orientations claires en matière de réforme de la gouvernance.

Au chapitre des services de base, nous avons pu en quelques mois atténuer les problèmes les plus urgents à Nouakchott et Nouadhibou en assurant la régularité de la fourniture d’électricité et en renforçant la conduite d’Idini ce qui nous a permis d’éviter en 2008 les problèmes que nous avons connus en 2007 juste après la formation du premier Gouvernement. Pour le moyen et le long terme nous avons pu obtenir, dans un délai record, un financement additionnel de 217 Millions de Dollars nous permettant de nous assurer de la réalisation  du Projet Aftout Essahli, de même que nous avons obtenu le financement d’une capacité additionnelle de 60 Méga Watt et d’engagements pour l’installation d’une capacité totale de 160 MW avec une grande centrale électrique à Nouakchott avant que ne soit engagées récemment des discutions avec la Société PETRONAS pour la construction d’une centrale à gaz de 700 MW.  

A l’intérieur du pays, le programme hydraulique d’urgence a permis de prémunir plusieurs dizaines de villages et agglomérations contre la soif qui les menaçait au cours de la période de soudure 2007 et 2008. D’autres progrès étaient attendus avec le financement amorcé du Projet du Dhar dont allaient bénéficier les villes de Néma, Timbédra, Amourj et Adelbagrou et avec le déblocage de la construction de la ligne de transport électrique Rosso-Boghé.

Les infrastructures routières ont fait l’objet d’un intérêt particulier. C’est ainsi que les conventions de financement pour la réhabilitation des routes Kiffa-Tintane et Nouakchott-Rosso ainsi que le complément de financement de la route Atar-Tidjikja, ont été déjà signées pour un montant avoisinant 270 Millions de Dollars. Le Port de Nouakchott, engorgé depuis plusieurs années, doit connaitre une extension qui aura pour effet de doubler sa capacité d’accueil.

Dans le domaine de la sécurité alimentaire, nous avons fait face à la hausse mondiale sans précédent des prix des denrées alimentaires et des produits pétroliers, en mettant en œuvre un Programme Spécial d’Intervention qui, de l’avis unanime des spécialistes dans ce domaine, dont le FMI, la FAO et d’autres agences des Nations-Unies, est exemplaire à plus d’un titre. Outre la sécurisation des approvisionnements, la stabilisation des prix des principales denrées alimentaires et l’augmentation significative des salaires, ce programme a initié une politique nouvelle du secteur rural dont les résultats se traduiront cette année par un niveau de production sans précédent, comparativement aux résultats des campagnes agricoles antérieures, et à plus long terme par l’autosuffisance céréalière à l’horizon 2012 grâce à la réalisation d’aménagements agricoles nouveaux dont les discussions de financement avec nos partenaires extérieurs étaient déjà très avancées.

Dans le domaine de la lutte contre le chômage des jeunes, un programme d’insertion de près de 4000 jeunes chômeurs a été mis en œuvre, impliquant leur formation professionnelle et la mise en place des lignes de micro-crédit.


Quant à la promotion de la femme, elle a trouvé son illustration dans la nomination de plus de femmes au Gouvernement ainsi que la désignation, pour la première fois dans notre pays, de femmes dans des postes de chef de mission diplomatique et de commandement territorial. De plus, des financements importants d’Activités Génératrices de Revenus au profit des femmes ont été mis en place dans toutes les régions du Pays.

En matière d’habitat, la priorité a été accordée à la solution du problème des quartiers dits précaires (Gazra et Kebba) dans la périphérie des villes. Dans ce cadre, des populations des Mougataan d’El Mina, d’Arafat et de Nouadhibou ont déjà pu bénéficier de terrains viabilisés en 2007 et 2008. Cette politique était appelée à se poursuivre dans les autres quartiers de Nouakchott.

Dans le domaine de l’éducation, des réformes importantes ont été entamées et avaient comme objectif d’améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants et des élèves (amélioration des émoluments du corps enseignant, distribution d’équipements et fournitures etc.). La mise en place de la commission préparatoire des états généraux de l’éducation devait aboutir à une réforme profonde du système éducatif dans son contenu comme dans son organisation en totale cohésion avec les données économiques culturelles et sociales du pays.

Dans le domaine de la santé, le Gouvernement s’est attelé à l’amélioration de la couverture sanitaire par la construction ou la réhabilitation ainsi que l’équipement de centres de santé dans 6 régions, à la revalorisation et au renforcement des ressources humaines et à la lutte contre les grandes endémies.

Sur le plan extérieur et grâce à la reconversion réussie de notre pays aux valeurs de la démocratie, la Mauritanie jouissait désormais d’une aura spécifique dans le monde, en particulier dans notre environnement Islamique, Arabe et Africain. De ce fait, notre apport à la construction du Maghreb Arabe, notre rôle au sein de l’Union Africaine, de la Ligue des Etats Arabes et de la Conférence Islamique, s’est trouvé renforcé, comme s’est consolidée notre position en tant que partenaire au dialogue euro-méditerranéen.

Mes chers compatriotes,

Certes, notre pays recèle des richesses importantes mais leur exploitation ne peut se faire efficacement sans l’appui de nos partenaires au développement et l’intervention du secteur privé aussi bien national qu’étranger. Par cet appui, que nous avons effectivement obtenu, le pays a amorcé l’acheminement vers un développement économiquement et social vigoureux.

Le coup d’état perpétré le 6 Août 2008 a mis en péril ces perspectives prometteuses. De plus, il risque, s’il n’est pas mis en échec, de priver le peuple mauritanien de la quiétude politique qu’il vivait depuis plus d’un an et de replonger le pays dans les abysses d’une dictature militaire obscurantiste. Prenant notre peuple en otage, les putschistes tentent, à travers la politique du bâton et de la carotte, d’offrir au monde l’image d’un unanimisme de façade dont  les coups d’état successifs intervenus depuis 1978, ont amplement démontré le caractère fallacieux.

Notre peuple, qui avait commencé à prendre goût à la liberté et à recouvrer sa dignité, est engagé fermement dans le combat pour la défense de la démocratie. Les restrictions des libertés, la répression, les harcèlements, les persécutions ainsi que les inculpations, sous les prétextes les plus fantaisistes, des dirigeants du Front National pour la Défense de la Démocratie, notamment le Premier Ministre ainsi que de hautes personnalités dont un membre du Gouvernement et plusieurs anciens ministres, ne pourront l’en décourager.

Mes chers compatriotes,

Vous avez, à travers partis politiques, syndicats et organisations de la société civile, dans un sursaut national sans précédant, décidé d’affronter l’arbitraire et la force aveugle des putschistes pour préserver vos acquis en matière de démocratie et de liberté, dont vous savez qu’ils constituent la base de tout développement économique et social durable.

La Communauté Internationale qui exige le retour à l’ordre constitutionnel apporte, de ce fait, un appui important à votre combat.

Nous devons donc, ensemble, continuer fermement cette lutte, par tous les moyens pacifiques, en vue de mettre en échec cette prise de pouvoir par la force, de restaurer l’ordre constitutionnel, pour l’instaurer un système d’alternance pacifique au pouvoir, qui permet de s’adonner, en toute quiétude, à la lutte contre la pauvreté et à l’amélioration des conditions de vie de nos populations. Ceci nous permettra de relancer la dynamique de développement, bien entamée lors de la période précédente, tout en corrigeant nos erreurs éventuelles.

Comme je l’ai déjà annoncé et comme je compte le confirmer dans quelques jours aux représentants de la Communauté Internationale, la mise en échec du coup d’état du 6 Août 2008, est, pour moi, la condition sine qua non de toute solution de sortie définitive de la crise que vit actuellement notre pays.

Mettant au dessus de toute considération d’ordre personnel, l’intérêt supérieur de mon pays, je voudrais réitérer ici ma disponibilité, une fois cette mise en échec opérée, à m’investir dans la recherche d’une telle solution loin de tout règlement de compte et dans un esprit de grande tolérance.

Vive la Mauritanie libre, démocratique et prospère.

III

dernier discours radiotélévisé adressé à la nation, le 26 Juin 2009

Au nom d’Allah, le Clément, le Miséricordieux, dont j’implore le Salut pour Son noble Prophète.

Citoyens, Citoyennes,

Il y a de cela deux ans, vous vous en souvenez sans doute, j’ai accepté de me porter candidat à l’élection présidentielle de 2007, élection à l’issue de laquelle vous m’avez accordé votre inestimable confiance et conféré l’insigne honneur d’être, dans notre pays, le premier président civil porté au pouvoir au terme d’élections pluralistes honnêtes. Aucun d’entre vous n’ignore la nature des obstacles qui m’ont empêché, après une courte période, d’exercer mes fonctions et qui ont par ailleurs plongé le pays dans une crise institutionnelle dont mon souhait le plus ardent est que tous, nous conjuguions nos efforts pour y mettre fin dans la paix et la concorde.

Dès l’abord, je voudrais, puisqu’existe maintenant un nouvel espoir allant dans le sens de ce souhait, exprimer ma profonde reconnaissance à tous ceux qui nous ont aidé, avec sincérité et dévouement, en vue de sortir le pays de la crise qui l’affectait.

Cette reconnaissance, permettez-moi de l’exprimer de manière toute particulière à mon frère Maître Abdoulaye Wade, Président de la République du Sénégal, qui, par son engagement inlassable, a illustré de manière exemplaire sa conception des devoirs qu’implique le bon voisinage ; tout comme il a traduit en actes sa profonde conviction de l’interdépendance des intérêts de nos deux peuples frères, ainsi que sa conscience des dangers que fait courir la crise mauritanienne au Sénégal lui-même et à notre région toute entière.

Ma reconnaissance va aussi à l’Union Africaine qui, depuis le premier jour, a pris fait et cause en faveur de la légalité constitutionnelle et contribué efficacement à la recherche de solutions appropriées à la crise mauritanienne.

Il va sans dire que ma reconnaissance s’exprime aussi vis-à-vis des pays amis membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, ainsi qu’à ceux membres non permanents de ce même Conseil.

Cette reconnaissance je l’exprime enfin à l’ensemble des organisations membres du Groupe de Contact International :  la Ligue des Etats Arabes, l’Organisation de la Conférence Islamique, l’Union Européenne, l’Organisation Internationale de la Francophonie, l’Organisation des Nations Unies, ainsi qu’à tous ceux qui ont partagé avec les uns ou les autres leur combat pour la défense de la légalité constitutionnelle en Mauritanie et leurs efforts pour le retour de notre pays à un ordre institutionnel normal.

Citoyens, Citoyennes,

Je n’ai nulle intention, pour quelque raison que ce soit, et à fortiori dans le contexte qui est le nôtre aujourd’hui, de m’adonner à des polémiques stériles. Aussi, m’abstiendrai-je de tout commentaire relativement à la période d’exception qu’a connue le pays depuis le mois d’Août dernier. A vous et à l’Histoire d’en juger. Car les évènements que vous avez alors vécus comportent sans doute en eux-mêmes des réponses suffisantes pour votre édification.

Il reste que l’opportunité qui s’offre à moi, pour la première fois depuis des mois, de m’adresser à vous par le biais des medias officiels, me donne l’occasion de souscrire à un droit qui est le vôtre et de m’acquitter d’un devoir qui est le mien ; celui de répondre aux interrogations explicites ou sous-entendues induites par les évènements que vous avez vécu ces derniers temps, ainsi qu’aux accusations et calomnies dont vous avez été abreuvés jour et nuit dix mois durant, avec pour effet de semer dans vos esprits le doute et la perplexité sur le bien-fondé du choix que vous avez librement opéré en 2007.

Sans vouloir vous présenter un bilan, il me revient de vous affirmer en toute honnêteté et en toute modestie que les quinze mois pendant lesquels j’ai exercé le mandat que vous m’avez confié, ont été l’occasion d’une intense activité. Au cours de cette période, nous nous sommes attachés à mettre en pratique les valeurs islamiques, fondées sur le sens de la mesure et la pondération et à conforter l’enracinement de notre jeune démocratie.

Ainsi, ces quelques mois ont été un printemps de la liberté : aucun citoyen n’a été inquiété suite à l’expression de son opinion ou de son choix politique ; aucune publication n’a été saisie ou censurée ; par contre l’accès aux medias publics a été consenti à chacun et il a été mis définitivement fin à l’utilisation de ces medias comme instrument exclusivement affecté à l’encensement du pouvoir en place.

Au cours de cette période, j’ai personnellement veillé à ce qu’aucune immixtion de ma part ou de la part du pouvoir exécutif ne vienne entraver l’activité du pouvoir législatif ou du pouvoir judiciaire ; le parlement a connu une activité sans précédent dans son histoire, totalisant plus de huit mois de session sur la période.

Sur un autre plan, nous avons donné à l’opposition démocratique la pleine effectivité de son rôle, instituant la concertation sur les problèmes nationaux majeurs comme méthode constante dans nos rapports avec elle, comme d’ailleurs avec toutes les composantes de la scène politique et sociale.

Ont été promulguées par ailleurs les lois créant pour la première fois dans le pays une Haute Cour de Justice habilitée à juger le Président de la République en cas de haute trahison, ainsi que les membres du gouvernement lorsque ceux-ci contreviennent aux devoirs liés à leur charge.

Toutes ces mesures visaient à jeter les bases de l’état de droit et à promouvoir une culture de dialogue propre à mettre fin à l’autoritarisme et à l’abus de pouvoir.

Dans le souci de bâtir un socle solide de valeurs morales et de principes déontologiques sur lesquels se fondent notre système administratif et notre conception du service public, nous avons promulgué une loi qui, pour la première fois dans le pays, fait obligation aux hauts responsables de l’Etat de déclarer leur patrimoine au moment de leur entrée en fonction et de renouveler périodiquement cette déclaration tout au long de l’exercice de cette fonction.

S’agissant du renforcement de l’unité nationale et de la promotion de l’émancipation sociale, gages d’une mobilisation totale des potentialités de notre peuple en vue du développement, vous avez tous été témoins des grandes initiatives développées dans ce sens : criminalisation des pratiques esclavagistes, organisation du rapatriement volontaire de nos concitoyens déportés. Tout comme vous avez été témoins du rôle important et largement justifié qui a été, pour la première fois dans l’histoire, dévolu à la femme mauritanienne dans le domaine politique, diplomatique et administratif.

Quant à l’expérience démocratique conduite dans le pays, elle a joué un rôle d’une importance extrême dans l’émergence d’une classe politique nouvelle, soucieuse du bien public, attachée aux acquis démocratiques, disposée à tous les sacrifices au service de la patrie et, dans le même temps, imbue des valeurs du dialogue et de la compréhension.

Face aux dures conditions de vie qui affectaient nos populations, nous avons pris une décision symbolique par laquelle le Président de la République, les membres du gouvernement et assimilés ont volontairement renoncé à vingt cinq pour cent de leurs émoluments. Dans le même temps et face à la hausse mondiale des prix, nous avons mis en place un plan d’intervention d’urgence en faveur des populations ; plan dont la conception, l’exécution, le suivi et l’évaluation se sont fondés sur une approche participative dont l’exemplarité a été saluée par les institutions spécialisées et considérée par elles comme un modèle à suivre par les pays vivant des conditions similaires aux nôtres.

Plus important que tout cela, nous avons créé les bases que nous avons voulues solides, nécessaires à une nouvelle et forte croissance économique dont les résultats attendus, devaient se traduire par une accélération de l’activité économique, l’augmentation de la production, le renforcement des infrastructures de base, le développement du secteur des activités de service, l’encouragement à l’investissement privé et la promotion de l’emploi en vue d’assurer des conditions de vie décentes à nos populations.

Le plan d’action conçu en vue d’atteindre ces objectifs a bénéficié d’un accueil favorable auprès de nos partenaires au développement qui ont manifesté leur appréciation positive des programmes et projets qui en découlent.

C’est ainsi qu’ils nous ont consenti à l’occasion de la réunion à Paris en décembre 2007 du Groupe Consultatif sur la Mauritanie, une aide supérieure et de loin à toutes nos attentes (près de trois milliards de dollars, et plus aides supplémentaires dont, par exemple, plusieurs centaines de millions octroyés à titre de don par les Etats-Unis d’Amérique). Aide à laquelle devaient s’ajouter par la suite d’autres engagements financiers importants, notamment et à titre d’exemple, un don de plusieurs centaines de millions de dollars qui allait être octroyé par les Etats-Unis d’Amérique au titre du Millenium Challenge Account.

De leur côté, les organismes islamiques et arabes de financement ont favorablement répondu à notre appel pour le financement de notre plan visant à réaliser l’autosuffisance céréalière à l’horizon 2012.

Durant la courte période pendant laquelle j’ai pu exercer mon mandat, nombre de projets importants ont vu le jour, dont certains qui se trouvaient soit handicapés, soit simplement gelés. Au cours des quelques mois écoulés, nos populations ont pu cueillir les fruits de ces projets dont l’honnêteté m’oblige à reconnaître que certains ont vu le jour bien avant le changement démocratique intervenu en 2007.

Quant aux plans et projets que nous avons initiés, nos populations auraient commencé à en récolter les fruits dans deux à trois ans, ce qui devait progressivement, mais de manière rapide et effective, introduire des changements qualitatifs importants dans la vie quotidienne de tous les mauritaniens.

Au cours de cette période, nous nous sommes employés au renforcement de nos relations avec les pays frères et amis, tant au plan régional qu’au plan international ainsi qu’au renforcement de la présence et du rôle de notre pays sur la scène internationale, condition indispensable à la promotion de notre démocratie et à notre développement.

Force est de reconnaitre cependant que, malgré notre optimisme face à un avenir qui se profilait sous les meilleurs auspices, et malgré le sérieux des efforts déployés afin que se réalisent nos espoirs et se traduisent dans la réalité vécue nos ambitions, force est de reconnaître, dis-je, que nous nous sommes trouvés confrontés à nombre de difficultés. De celles-ci certaines sont imputables à la crise qui a frappé avec force la totalité des pays du monde consécutivement à la hausse vertigineuse du prix des hydrocarbures et des denrées alimentaires. D’autres, par contre, relevaient de l’ordre normal des choses tant il est rare que se trouve exemptée de ce genre de difficultés une expérience toute nouvelle et qui requiert le temps et l’effort nécessaires à l’adaptation ainsi qu’un seuil minimum de sollicitude et de compréhension.

Malgré cela, je ne revendique l’infaillibilité, ni pour moi-même ni pour ceux qui ont travaillé avec moi, car toute œuvre humaine est sujette à l’imperfection.

Je puis affirmer, cependant, que j’avais la volonté sincère et les dispositions d’esprit indiquées pour tenter d’éviter l’erreur et pour traiter et corriger celle-ci au cas où elle venait à se produire.

Citoyens, Citoyennes,

Durant la période où j’ai exercé le pouvoir, certains cadres et certains citoyens, soucieux de mon intérêt et bienveillants à mon égard, ont tenté de me convaincre que la politique et la morale sont deux rivales inconciliables. C’est là une croyance partagée par beaucoup mais à laquelle, pour ma part, je n’ai jamais adhéré et le fait d’avoir emporté votre adhésion ne pouvait me conduire à changer de position à cet égard et à devenir, par ce fait, une personne autre que la personne que vous avez élue.

C’est donc avec une ferme détermination que j’ai banni le mensonge de ma conduite en politique ; m’interdisant de recourir aux promesses mirifiques, je me suis par contre astreint à mener un travail sérieux avec pour objectif de réaliser le possible et non de promettre l’irréalisable.

C’est ainsi que j’ai cherché à ouvrir des chantiers prometteurs pour l’avenir plutôt qu’à me dérober derrière les engagements et les espoirs utopiques et à m’adonner à l’achat des consciences et à la conquête des soutiens à travers les pratiques notoirement connues.

Je savais bien qu’une telle conduite présentait des inconvénients, mais j’avais la ferme intention de m’y tenir, afin de prouver à ceux qui en doutaient que telle est la meilleure voie ; afin aussi que nos concitoyens puissent bénéficier des bienfaits d’un style de comportement qu’ils ignoraient peut-être ou auquel ils n’étaient pas suffisamment habitués par le passé.

Puis lorsque j’ai pris conscience des embûches que certains dressaient sur le chemin du changement pacifique et profond auquel je me suis engagé devant vous, j’ai privilégié la concertation à laquelle je suis attaché comme moyen pour contourner les difficultés. Ma surprise a été grande, alors même que ma méthode commençait à porter ses fruits, lorsque j’ai découvert que le péril s’est aggravé, attisé qu’il se trouvait du côté auquel je m’attendais le moins.

J’ai mesuré alors en conscience l’extrême gravité du danger qui risquait d’affecter le pays, si je n’assumais pas la plénitude de mes responsabilités constitutionnelles, au cas où, chez d’autres, le sens du devoir républicain ne prévalait pas sur toute autre considération.  Me refusant à emprunter les chemins du déshonneur pour réaliser les objectifs de l’honneur, et face à l’imminence du danger, je n’avais plus d’autre choix que l’utilisation des moyens que m’offre la Constitution pour prendre, forcé et contraint, la décision que les circonstances m’imposaient.

Ce faisant, je n’ignorais nullement les dangers divers que ce choix impliquait. De ces dangers, les moindres étaient sans doute la perte de la position que vous m’avez conférée et que j’ai perçu comme une opportunité qui m’est donnée pour vous servir ; puis le prix en terme de liberté et d’honneur que j’aurais sans doute à payer moi-même ainsi que d’autres parmi ceux qui, à mes côtés, servaient leur pays avec sérieux et dévouement. Mais je savais aussi que la Mauritanie allait pâtir d’une situation anticonstitutionnelle, avec tout ce que cela implique comme dommages pour notre peuple et pour notre pays.

Mais j’étais convaincu que mon choix, quelque pénible qu’il puisse avoir été, impliquait moins de dommages que tout autre et que ses conséquences s’avéreraient, en fin de compte, bénéfiques pour la Patrie.

Du reste, j’ai pris l’initiative au mois de Janvier dernier, de proposer une solution propre à sortir le pays de l’impasse dans laquelle il se trouve empêtré depuis le mois d’Août 2008 ; j’ai fait du consensus national et du retour à l’ordre constitutionnel la pierre angulaire d’une telle proposition. En m’adressant aujourd’hui à vous je ne puis que remercier Allah le Tout Puissant pour nous avoir inspiré à tous de travailler ensemble partant d’une telle vision.

Citoyens, Citoyennes,

Je voudrais profiter de cette occasion pour exprimer mes remerciements à chacun d’entre vous ainsi qu’à ceux qui ont assumé la charge de vos aspirations à la stabilité, au développement et à la démocratie depuis l’indépendance et plus particulièrement depuis l’année 2007 ;

A tous ceux qui ont œuvré sincèrement pour réaliser le changement démocratique pacifique ;

A tous ceux qui m’ont aidé avec dévouement et quinze mois durant, à réaliser les rêves des mauritaniens de bâtir l’état de droit, l’état moral où chaque mauritanien bénéficie des bienfaits de l’équité, de la prospérité, des valeurs démocratiques et de l’égalité des chances ;

Au Premier Ministre, Monsieur Yahya Ould Ahmed El Waqf et à ses compagnons, à tous ceux qui ont vécu les affres de la prison pour avoir défendu la vérité et être restés fidèles à leurs principes ;

Au Président de l’Assemblée Nationale, Monsieur Messaoud Ould Boulkheir, dont la position particulièrement honorable par rapport au rejet du coup d’état et au retour à l’ordre constitutionnel, a été à la hauteur de ses responsabilités constitutionnelles ;

Au Président du Conseil Economique et Social, Monsieur Ahmed Ould Sidi Baba, qui s’est tant sacrifié pour le retour à l’ordre constitutionnel ;

Aux membres du gouvernement légitime et aux parlementaires qui ont tant lutté pour la défense des intérêts supérieurs de la nation ;

Aux élus, aux partis politiques, aux centrales syndicales, aux organisations de la société civile, à nos cadres et à nos intellectuels à l’extérieur pour le rôle éminent qu’ils jouent pour la défense de la démocratie et de la légalité dans notre pays ;

A tous les militants sincères qui ont assumé sacrifice après sacrifice pour préserver notre expérience démocratique et pour que la Mauritanie recouvre sa stabilité politique, sa légalité constitutionnelle et poursuive sa marche vers le développement ;

A tous, j’adresse mes remerciements et leur dis que leurs efforts ne seront jamais déployés en pure perte et que, si Dieu le veut, aucune goutte de leur sueur versée au service de la Patrie n’aura coulé en vain.

A tous les pôles de la scène politique qui ont exercé leur droit légitime à la diversité des opinions, mais qui, prenant conscience de leur devoir, ont assumé leur responsabilité et se sont consensuellement retrouvés pour préserver le pays du danger imminent qui le guettait, j’adresse également des félicitations amplement méritées.

J’en appelle à tous afin qu’ils contribuent dans la sincérité à préserver l’accord auquel ils sont parvenus. Je les invite à aller de l’avant pour bâtir une Mauritanie véritablement nouvelle, une Mauritanie d’où sont bannies l’exclusion et la marginalisation ; une Mauritanie édifiée sur les bases du sacrifice, de l’abnégation, du travail productif, de la compréhension et du respect de l’autre, loin de toute inimité et de tout déchirement, loin de toute usurpation ou spoliation, loin des insultes et des injures.

A tous mes concitoyens, vous, hommes et femmes, qui êtes la richesse de ce pays, vous, personnes âgées, qui êtes le conservatoire de notre sagesse, vous, jeunes et enfants qui incarnez l’espoir et serez en charge de l’avenir de notre Nation, je voudrais dire ceci : Dieu m’en est témoin, j’ai assumé avec foi la responsabilité de votre destin et essayé, autant que j’ai pu, de me mettre à votre service. Mon espoir le plus cher aujourd’hui est que se réalisent pour vous, comme pour les générations futures de Mauritanie, les grandes ambitions qui nous avaient réunis hier et pour la réalisation desquelles vous m’aviez confié la charge de diriger le pays.

A ceux qui m’ont fait grief de ne pas leur avoir servi au bout d’une seule année, les fruits d’un travail de cinq ans, je dirai : pour ma part, je ne vous ferai pas grief de votre impatience, mais je vous demande d’accorder à ceux que vous choisirez à l’avenir pour diriger le pays, le temps de travail qui leur est imparti par la Constitution et par les électeurs. Ne faites pas perdre à votre pays davantage d’opportunités pour la construction et l’investissement.

A ceux que les circonstances exceptionnelles vécues par le pays ont amené à porter atteinte à ma personne ou, à cause de ma personne, à d’autres autour de moi et ont fait de moi, de ceux qui sont avec moi ou autour de moi la cible d’accusations dénuées de toute preuve et de tout fondement, nous imputant jusqu’à l’excès des faits dont nous sommes totalement innocents, à ceux-là je m’adresse en reprenant les paroles du prophète Youssouf (PSL) : « Aucun reproche ne vous sera fait aujourd’hui. Qu’Allah vous pardonne. Il est le plus Clément des cléments ». (s. 12, v. 92).

Croyez-le, je partirai comme je suis venu, le cœur pur de toute haine vis-à-vis de qui que ce soit et en souhaitant tout le bien possible pour chacun.

Quant aux amis de la Mauritanie et à nos partenaires au développement, je voudrais leur dire à tous : merci pour avoir un jour unanimement appuyé la jeune expérience démocratique mauritanienne dont vous avez été les témoins en 2007 ; merci pour vous être un jour unanimement mobilisés pour défendre la démocratie et la légalité constitutionnelle ; merci pour avoir un jour contribué avec tous les acteurs de la vie politique nationale à la mise au point d’une solution consensuelle et conforme à la Constitution propre à sortir pacifiquement le pays de la crise ; merci enfin pour l’appui que vous avez apporté par le passé à la Mauritanie, la Mauritanie qui a besoin aujourd’hui d’un surcroit d’aide pour conforter sa démocratie et assurer sa stabilité et son développement.

Citoyens, Citoyennes,

Merci encore une fois pour m’avoir manifesté votre confiance et pour m’avoir accordé l’insigne honneur d’être le premier Président mauritanien à accéder au pouvoir de l’extérieur de ce pouvoir à l’issue d’élections pluralistes transparentes.

Merci à vous pour m’avoir accordé à moi-même comme au pays votre soutien pendant cette période difficile.

Faciliter le retour de la Mauritanie sur le chemin de la démocratie, du développement et de la cohésion sociale en étant le premier président mauritanien qui accepte de quitter volontairement sa fonction en échange de garanties relevant de l’intérêt du pays, tel est le seul moyen dont je puis aujourd’hui disposer pour vous exprimer ma gratitude.

Fondé en effet à me retrancher derrière mon bon droit et à vouloir m’acquitter des devoirs de la charge dont vous m’avez investi, armé pour cela d’une légalité constitutionnelle indéniable, doté, grâce à Dieu, d’une grande capacité de résistance devant l’épreuve, soutenu par un grand nombre de citoyens attachés aux valeurs de la démocratie et disposés à tous les sacrifices pour la défendre, j’ai choisi malgré tout cela de prémunir mon pays et mes concitoyens contre les dangers cumulés de l’embargo économique, des déchirements politiques et des explosions sociales. Plus que tout cela, je formule le vœu ardent que, par ma disposition à quitter le pouvoir contre des garanties relatives à l’avenir du pays, j’aurais contribué, par l’acte et non par le verbe seulement, à instaurer la concertation comme usage incontournable pour résoudre les problèmes de la Mauritanie ; à convaincre chacun que la conquête du pouvoir ne doit jamais prévaloir sur l’intérêt supérieur du pays ; à persuader tout chef d’Etat futur d’accepter le moment venu de quitter sa fonction, dans le respect de la Constitution afin de barrer la route à toute velléité vindicative de prise de pouvoir par la force des armes ; à donner à tout chef d’Etat élu dans le futur l’occasion d’exercer sa fonction en conformité avec la Constitution de manière à assurer au pays la stabilité nécessaire au développement ; à faire prévaloir l’esprit de sacrifice et le dévouement au pays sur toute autre considération.

Puissent ceux qui ont glorifié l’expérience démocratique mauritanienne, l’ont érigée en modèle à suivre et qui, par la suite ont déchanté à cause du séisme qui a réduit à néant cette expérience, puissent ceux-là, en rémission de ce qui s’est produit, nous permettre de nous présenter à nouveau comme modèle par notre attachement au dialogue et à la concorde tout comme par notre acceptation de placer l’intérêt supérieur du pays au dessus de toute prise en compte étroite de l’intérêt d’une personne ou d’un groupe.

Notre confiance est grande dans les capacités de notre société à absorber les chocs et à surmonter les obstacles et les épreuves ; les premiers pionniers qui ont jeté les bases de l’édification du pays constituent pour nous à cet égard le meilleur des exemples à suivre et une source réelle d’inspiration.

Sur ce, citoyens citoyennes, et suite à la réalisation des conditions préalables que j’ai posées en considération de l’intérêt de la Mauritanie dans le futur, je déclare renoncer volontairement à ma fonction de Président de la République.

J’invite le peuple mauritanien, ses institutions constitutionnelles, son armée nationale et ses forces de sécurité, ses hommes politiques, ses intellectuels, ses communautés et sa société civile à s’unir en vue de redonner espoir à la Mauritanie à travers des élections transparentes, propres à faire de notre pays un havre de sécurité, de quiétude et d’aisance et un creuset de synergie des efforts de ses fils autour de l’intérêt supérieur de la Nation.

Pour ma part, je continuerai à être un citoyen dévoué à son pays, disposé à apporter ma modeste contribution à toute action visant à consolider le socle de nos acquis démocratiques, à renforcer l’unité nationale et la cohésion sociale entre l’ensemble de nos communautés et à offrir à la Mauritanie des perspectives nouvelles de développement et de stabilité.


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