lundi 9 juillet 2012

journal de maintenant - lundi 9 juillet 2012


Je reçois d’un de mes plus éminents amis mauritaniens, cette lettre :

citation –  J’éprouve une impression voisine de la déception et peut-être inspirée par une sorte de « dépit amoureux » par rapport à la France historique et je vais essayer de m’en expliquer brièvement :

            La référence à l’engagement de MOAA dans la guerre contre Aqmi reste inspirée uniquement par ce que je relevais déjà  dans un précédent envoi à vous destiné : l’égoïsme et le cynisme (ici j’évite d’employer un qualificatif plus infamant) qui ont amené le régime français précédent à installer au pouvoir en Mauritanie MOAA avec l’aide de Kaddafi et d’Abdoulaye Wade.

            J’aurais tant souhaité que le nouveau pouvoir, au lieu d’enfourcher par pur mimétisme les bottes du précédent, remette à plat la question mauritanienne et envisage la lutte contre le terrorisme au Sahel non à travers la « mercenarisation » des pouvoirs en place et donc l’exposition de leurs peuples à des dangers sans rapport avec leurs moyens et sans relation avec la volonté consensuelle de leurs peuples.

            J’aurais tant souhaité que cette mise à plat se fût opérée à la lumière des grands principes fondateurs de la démocratie pluraliste, de l’état de droit et des grandes idées qui ont été la marque du génie et de l’histoire du peuple français.

            J’aurais tant aimé que le « bénéfice » attendu de cette « mercenarisation » du pouvoir mauritanien de MOAA, ne continue pas à cacher aux yeux de la France amie, la « gestion » catastrophique et, à terme, mortelle de la chose publique mauritanienne par un quasi analphabète, de surcroît notoirement corrompu.

            J’aurais tant aimé, enfin, que le nouveau pouvoir de France, prête quelque attention aux caractéristiques culturelles et intellectuelles du peuple mauritanien – peuple, dit-on, au million de poètes – et aide à ce que, à un peuple civilisé, on applique «  une politique de civilisation », pour reprendre l’expression de l’un des grands sociologues français.

            Bien entendu, il faut combattre le terrorisme au Sahel, encore faut-il le combattre à raison des responsabilités et des intérêts de chacun, à raison des moyens et des possibilités des uns et des autres et, pour les pays du Sahel, à l’intérieur des frontières des Etats.

            Pour le reste, pourquoi ne pas envisager, au grand jour, la mise en place d’une force supranationale dotée de moyens adéquats, habilitée internationalement à agir dans l’ensemble des confins sahariens ?

Telles sont les raisons de ma déception et telles sont les causes de mon « dépit amoureux ».

Je le sais, les problèmes posés aujourd’hui au gouvernement français, sont de taille, mais ne relève-t-il pas du domaine de la facilité coupable, surtout pour le nouveau pouvoir socialiste, surtout après les déclarations novatrices et encourageantes du Président  Hollande à Tulle aussitôt après son élection,  de ne pas prêter plus d’attention que cela à l’Afrique en général et aux pays du Sahel en particulier ?

Ne sommes nous pas, en Afrique francophone, en droit d’attendre du nouveau pouvoir, plus que la suppression de la « Coopération » et de la « France-Afrique », la redéfinition, sur des bases nouvelles, de la philosophie même des relations avec nos pays et la mise en pratique de ces relations sous l’empire de cette philosophie et des principes qui en découlent ?

J’en viens maintenant aux deux questions qui vous ont été posées et sur lesquelles vous souhaitez, semble-t-il, entendre le point de vue de vos amis.

1/          Relativement à l’éventualité d’un putsch :

 Pour ma part, je partage complètement votre analyse sur la question.

            Ce dont je suis convaincu, c’est que, au vu de l’évolution de la situation, les choses ne pourront pas continuer ainsi.

            Le mieux dans ce cas et pour éviter une explosion dont les conséquences risquent de s’avérer néfastes,  (n’est-ce pas Roosevelt qui a dit : «  la chute de n’importe quelle dictature coûte au monde plus cher que la chute de n’importe quelle démocratie ») il importe que les pays amis et en premier lieu la France ( dont nous n’attendons pas qu’elle opère elle-même à notre place, de quelque manière que ce soit, le changement souhaité), cessent de faire confiance et d’apporter leur soutien à un régime inapte à diriger le pays et devenu, de surcroît illégitime par la volonté de la grande majorité des mauritaniens et suite à ses atteintes répétées à l’ordre institutionnel et aux lois du pays.

2/         Le péril islamique :

            Sur ce point, il est temps que l’Occident se débarrasse de la vieille billevesée faisant de l’Islam un repoussoir.

            En Mauritanie, comme vous le dites vous-même si bien, l’Islam n’a jamais et ne sera jamais extrémiste, salafiste ou jihadiste et ce ne sont pas les quelques jeunes mauritaniens, qui, par désoeuvrement ou désespérance au regard de la situation de leur pays, ont rejoint le salafisme qui y changeront quoi que ce soit.


Le Parti Tawassoul, membre aujourd’hui à part entière de la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD), n’a rien à envier aux autres partis membres de cette Organisation, en matière de modération, d’attachement à la démocratie pluraliste et de rejet de l’extrémisme et du terrorisme ; rien à envier non plus, à cet égard, aux partis islamistes du Maghreb et du Proche Orient.

Il convient d’ailleurs  ici de rappeler que la Mauritanie, dès l’indépendance, s’est donné le nom de «  République Islamique », que sa Constitution consacre l’Islam comme religion du peuple et de l’Etat et que la Charia est la source principale de la législation du pays.

Il n’y a donc pas lieu de craindre aujourd’hui plus qu’hier que les Partis politiques mauritaniens (dont les programmes se réfèrent tous sans exception à l’Islam) et en particulier le Parti Tawassoul de Mohamed Jamil Ould Mansour, puissent, une  fois arrivés au pouvoir ou y participant, se confondre avec la nébuleuse fondamentaliste. – fin  de citation

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